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Décisions

Cass. 3e civ., 5 décembre 1984, n° 83-12.895

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Monégier du Sorbier

Rapporteur :

M. Cachelot

Avocat général :

M. Sainte Blancard

Avocat :

Me Choucroy

Paris, 2e ch. A, du 9 mars 1983

9 mars 1983

SUR LES DEUX PREMIERS MOYENS REUNIS :

ATTENDU, SELON L'ARRET ATTAQUE (PARIS, 9 MARS 1983) QUE M. Y A PROMIS DE VENDRE UN IMMEUBLE AUX EPOUX X TAM, LESQUELS DISPOSAIENT D'UN DELAI POUR LEVER L'OPTION ET S'ENGAGEAIENT A VERSER UNE SOMME EGALE A 10 % DU PRIX DE VENTE, CETTE SOMME DEVANT S'IMPUTER SUR LE PRIX EN CAS DE REALISATION DE LA VENTE ET, A DEFAUT, RESTER ACQUISE AU PROMETTANT ;

QUE LES EPOUX X TAM AYANT RENONCE A LA VENTE AVANT L'EXPIRATION DU DELAI FIXE ONT ASSIGNE M. Y EN RESTITUTION DE LA SOMME VERSEE ;

QUE LES PREMIERS JUGES, TOUT EN REFUSANT DE FAIRE DROIT A CETTE DEMANDE, ONT CONSIDERE QUE CETTE SOMME AYANT ETE PAYEE A TITRE DE CLAUSE PENALE ETAIT REDUCTIBLE AU PREJUDICE REELLEMENT SUBI PAR M. Y ET ONT CONDAMNE CELUI-CI A RESTITUER LA PARTIE EXCEDANT CE PREJUDICE AUX EPOUX X TAM ;

ATTENDU QUE CES DERNIERS REPROCHENT A L'ARRET QUI A INFIRME LE JUGEMENT SUR CE POINT D'AVOIR DECIDE QUE L'INDEMNITE PREVUE PAR LA PROMESSE DE VENTE NE CONSTITUANT PAS UNE CLAUSE PENALE N'ETAIT PAS SUSCEPTIBLE DE MODERATION JUDICIAIRE ALORS, SELON LE MOYEN, QUE, D'UNE PART, LA PARTIE ADVERSE N'AVAIT PAS SOUTENU QUE L'INDEMNITE LITIGIEUSE AIT PU NE PAS AVOIR LE CARACTERE D'UNE CLAUSE PENALE MAIS, BIEN AU CONTRAIRE QUE CETTE INDEMNITE, QUI CONSTITUAIT UNE CLAUSE PENALE, N'AVAIT AUCUN CARACTERE EXCESSIF ;

QU'EN SOULEVANT AINSI D'OFFICE L'INAPPLICABILITE EN LA CAUSE DE L'ARTICLE 1152, ALINEA 2, DU CODE CIVIL, LA COUR D'APPEL A DENATURE LES TERMES DU LITIGE, ET MECONNU AINSI L'ARTICLE 4 DU NOUVEAU CODE DE PROCEDURE CIVILE, ALORS, D'AUTRE PART, QUE EN SOULEVANT D'OFFICE LE MOYEN TIRE DE L'INAPPLICABILITE DE L'ARTICLE 1152, ALINEA 2, DU CODE CIVIL, SANS PERMETTRE AUX PARTIES DE PRESENTER PREALABLEMENT LEUR DEFENSE SUR CE POINT, LA COUR D'APPEL A MECONNU LE PRINCIPE DE LA CONTRADICTION, ET L'ARTICLE 16 DU NOUVEAU CODE DE PROCEDURE CIVILE, ALORS ENSUITE QU'EN ENONCANT QUE LE POUVOIR MODERATEUR DU JUGE N'AURAIT PU S'EXERCER EN MATIERE D'INDEMNITE D'IMMOBILISATION, AU SEUL MOTIF QUE, DANS CE CAS, LE BENEFICIAIRE N'AURAIT PAS COMMIS UNE FAUTE CONTRACTUELLE, ALORS QUE LA PROTECTION LEGALE APPLICABLE AU CONTRACTANT COUPABLE DEVAIT, A FORTIORI, ETRE APPLIQUEE AU CONTRACTANT INNOCENT, LA COUR D'APPEL A MECONNU L'ESPRIT ET LE DOMAINE DE L'ARTICLE 1152, ALINEA 2, DU CODE CIVIL, ALORS, EN OUTRE, QUE EN JUGEANT QUE L'INDEMNITE D'IMMOBILISATION N'AURAIT PAS CONSTITUE, EN DROIT, UNE CLAUSE PENALE, BIEN QU'ELLE AIT EU POUR BUT D'ASSURER, SOUS UN MODE CONTRACTUEL FORFAITAIRE, L'EXECUTION DE L'OBLIGATION DE PAYER POUR LE CAS DE NON REALISATION DE LA VENTE PAR LE BENEFICIAIRE ET DE REPARER L'INEXECUTION PAR LE BENEFICIAIRE DE SON OBLIGATION DE NE PAS CAUSER AU PROMETTANT UN PREJUDICE PAR IMMOBILISATION DE L'IMMEUBLE, LA COUR D'APPEL N'A PAS DONNE DE BASE LEGALE A SA DECISION, AU REGARD DE L'ARTICLE 1226 DU CODE CIVIL, ET ALORS ENFIN QU'IL ETAIT ACQUIS QUE LES EPOUX Z TAM AVAIENT, PEU APRES LA SIGNATURE DE LA PROMESSE DE VENTE, RENONCE EXPRESSEMENT A LEVER L'OPTION, METTANT AINSI FIN A L'IMMOBILISATION PAR DECLARATION DE VOLONTE, COMME LE CARACTERE UNILATERAL DE LA PROMESSE LE LEUR PERMETTAIT ;

QU'EN INFIRMANT LA DECISION DES PREMIERS JUGES, AUX MOTIFS QUE L'INDEMNITE AURAIT CONSTITUE UNE CONTREPARTIE CONTRACTUELLE DE L'IMMOBILISATION ET NON UNE CLAUSE PENALE, SANS RECHERCHER SI, DANS CETTE HYPOTHESE, LES PREMIERS JUGES N'ETAIENT PAS VALABLEMENT INTERVENUS POUR RETABLIR L'EQUILIBRE DES PRESTATIONS, PROFONDEMENT MODIFIEES PAR LA CESSATION AVANT TERME DE L'IMMOBILISATION, LA COUR D'APPEL N'A PAS DONNE DE BASE LEGALE A SA DECISION, AU REGARD DE L'ARTICLE 1134 DU CODE CIVIL ;

MAIS ATTENDU, D'UNE PART, QU'APRES AVOIR RETENU QU'EN L'ETAT DES DERNIERES CONCLUSIONS DES PARTIES, LE LITIGE SE LIMITAIT A L'INTERVENTION DE LA CLAUSE "INDEMNITE" INSEREE A LA PROMESSE DE VENTE AFIN, LA VENTE NE S'ETANT PAS REALISEE, D'APPRECIER SI LES BENEFICIAIRES ETAIENT FONDES A RECLAMER LE REMBOURSEMENT DE TOUT OU PARTIE DE LA SOMME VERSEE PAR EUX EN VERTU DE CETTE CLAUSE, L'ARRET N'A NI EXCEDE LES LIMITES DU LITIGE NI VIOLE LE PRINCIPE DE LA CONTRADICTION EN RESTITUANT A LA CLAUSE LITIGIEUSE SON EXACTE QUALIFICATION PAR APPLICATION DE L'ARTICLE 12 DU NOUVEAU CODE DE PROCEDURE CIVILE ;

ATTENDU, D'AUTRE PART, QU'APRES AVOIR EXACTEMENT ENONCE QUE LE BENEFICIAIRE D'UNE PROMESSE UNILATERALE DE VENTE, N'ETANT PAS TENU D'ACQUERIR, NE MANQUE PAS A UNE OBLIGATION CONTRACTUELLE EN S'ABSTENANT DE REQUERIR DU PROMETTANT L'EXECUTION DE SA PROMESSE, L'ARRET EN A DEDUIT A BON DROIT QUE LA STIPULATION D'UNE INDEMNITE D'IMMOBILISATION AU PROFIT DU PROMETTANT NE CONSTITUE PAS UNE CLAUSE PENALE ;

MAIS SUR LE TROISIEME MOYEN :

VU L'ARTICLE 1134 DU CODE CIVIL ;

ATTENDU QUE POUR DECIDER QUE L'INDEMNITE D'IMMOBILISATION STIPULE QUE LA PROMESSE DE VENTE N'ETAIT PAS SUSCEPTIBLE D'ETRE JUDICIAIREMENT REDUITE, L'ARRET ENONCE QUE CETTE SOMME EST INTEGRALEMENT ACQUISE A M. Y QUEL QU'AIT PU ETRE SON PREJUDICE REEL ;

QU'EN STATUANT AINSI, SANS RECHERCHER SI CETTE INDEMNITE N'AVAIT PAS ETE FIXEE PAR LES PARTIES EN FONCTION DE LA DUREE D'IMMOBILISATION DE L'IMMEUBLE ET SI SON MONTANT NE DEVAIT PAS ETRE REDUIT DU FAIT DE LA RENONCIATION ANTICIPEE DES EPOUX X TAM AU BENEFICE DE LA PROMESSE DE VENTE, LA COUR D'APPEL N'A PAS DONNE DE BASE LEGALE A SA DECISION ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE L'ARRET RENDU LE 9 MARS 1983, ENTRE LES PARTIES, PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS ;

REMET, EN CONSEQUENCE, LA CAUSE ET LES PARTIES AU MEME ET SEMBLABLE ETAT OU ELLES ETAIENT AVANT LEDIT ARRET ET, POUR ETRE FAIT DROIT, LES RENVOIE DEVANT LA COUR D'APPEL D'ORLEANS, A CE DESIGNEE PAR DELIBERATION SPECIALE PRISE EN LA CHAMBRE DU CONSEIL.