Cass. com., 13 février 1973, n° 71-13.756
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. MONGUILAN
Rapporteur :
M. LARERE
Avocat général :
M. ROBIN
Avocat :
M. RICHE
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches : Attendu que, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 13 juillet 1971), la société Manpower Europe a déposé une demande de brevet d'invention concernant une " publication destinée à apporter une prévision dans une activité de caractère précaire telle que le travail dit temporaire " ;
Attendu qu'il est fait grief à la cour d'appel d'avoir confirmé la décision du directeur de l'Institut national de la propriété industrielle rejetant cette demande par application des dispositions de l'article 16-5° de la loi du 2 janvier 1968, au motif que ladite demande de brevet n'avait manifestement pour objet qu'un système de caractère abstrait, alors, selon le pourvoi, que d'une part, le texte de la demande décrit de façon particulièrement précise les modalités d'utilisation des coupons mobiles, publiées avec les informations diffusées, et servant ensuite à composer un organigramme particulier permettant notamment au prestataire de service d'améliorer les résultats de sa gestion, que, d'autre part, aux termes de l'article 7 de la loi du 2 janvier 1968, est considérée comme industrielle toute invention concourant dans son objet, son application et son résultat, tant par la main de l'homme que par la machine, à la production de biens ou de résultats techniques ;
Que, contrairement à ce que décide l'arrêt attaque, le dispositif précité produit un résultat industriel au sens de la loi dès lors qu'il permet à son utilisateur d'obtenir immédiatement, par une lecture directe, des informations précises qui ne seraient autrement ni recueillies, ni réunies sous cet aspect pratique ;
Que dans le cas d'espèce la publication telle que décrite, accompagnée de la diffusion des coupons mobiles, puis la réunion de ces coupons selon des modalités elles-mêmes déterminées représente une application et une combinaison d'éléments matériels concourant à l'obtention d'un résultat technique dans la branche d'activité considérée ;
Que ce dispositif, dont la cour d'appel n'avait pas, par ailleurs, à apprécier le mérite ou la valeur, ne pouvait être en tout cas considéré comme " manifestement dépourvu de caractère industriel ", et que pour cette seule raison, la loi est faussement appliquée ;
Mais attendu que, sans dénaturer la demande de brevet litigieuse qui est produite, la cour d'appel relève que l'invention consiste en une publication qui offre simultanément au public des renseignements tant sur les emplois de travail temporaire offerts que sur les candidatures à de tels emplois, que les moyens de l'invention sont, d'une part, un ensemble d'informations données sous forme statistique et exprimant des prévisions pour une période, une région et un emploi déterminés, d'autre part, un coupon amovible comportant un questionnaire d'identification sociale et un moyen pour l'établissement par l'intéressé d'un plan de travail pour une durée correspondant à la période de temps couverte par les prévisions d'emplois, qu'il est constant que les études de conjoncture sont fondées sur les statistiques antérieures et que l'envoi de questionnaires est un procédé employé pour les enquêtes de toute nature, que les revendications du brevet énoncent seulement des données générales, des idées à caractère intellectuel qui permettront d'obtenir les renseignements devant figurer dans la publication ;
Attendu que la cour d'appel a pu en déduire que la demande de brevet était manifestement dépourvue de caractère industriel en application de l'article 7-3° de la loi du 2 janvier 1968 qui dispose que ne constituent pas des inventions industrielles les " systèmes de caractère abstrait " ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Par ces motifs : rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 13 juillet 1971 par la cour d'appel de Paris.