Cass. com., 5 juillet 2005, n° 04-12.337
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Attendu, selon l'arrêt déféré, qu'en 1994, une convention de tâcheron a été conclue entre M. X, aux droits duquel est venue la société Réparation mécanique et construction métallique (RMCM), et la société Nickel mining corporation (MNC) pour une durée d'une année renouvelable par tacite reconduction ; que les deux sociétés ont également conclu le 27 janvier 1998 un contrat pour la réparation de six chalands ; que la société NMC a été mise en redressement judiciaire le 19 août 1998 et son plan de continuation arrêté le 16 décembre 1998 ;
que par lettre du 19 octobre 1999, la société NMC a adressé à la société RMCM une lettre lui indiquant que la résiliation de la convention concernant la réparation des chalands était acquise et lui notifiant la résiliation du contrat de tâcheron ; que, par requête du 25 février 2000, la société RMCM et M. X ont demandé au tribunal que soit constatée la rupture abusive des deux contrats et sollicité le paiement de diverses sommes à titre de dommages-intérêts ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société RMCM et M. X font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leurs demandes tendant à voir condamner la société NMC à leur payer respectivement les sommes de 6 000 000 XPF et 15 000 000 XPF avec intérêts à titre de dommages-intérêts, en réparation du préjudice subi à la suite de la résiliation du contrat de tâcheron, alors, selon le moyen, que commet une faute de nature à engager sa responsabilité, celle des parties à un contrat à durée indéterminée qui commet un abus dans l'exercice de son droit de rompre la convention ;
qu'en se bornant à affirmer que la société NMC n'avait pas abusé de son droit de résilier la convention de tâcheron, conclue pour une durée indéterminée, dès lors qu'elle avait affirmé auprès de la société RMCM que ce contrat n'était plus économiquement acceptable, sans rechercher si ce motif était fondé ou s'il constituait un simple prétexte destiné à motiver la décision de résiliation, de sorte qu'en l'absence de tout motif, celle-ci était abusive, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ;
Mais attendu qu'après avoir énoncé que dans les contrats à durée indéterminée, la résiliation unilatérale est offerte, sauf abus, à chacune des parties, sous réserve de respecter les formes et le délai de préavis qu'ils stipulent, l'arrêt relève que la régularité formelle de la rupture n'est pas discutée et qu'après négociation sur les conditions financières de la convention, la société NMC a estimé que la tarification ancienne n'était plus adaptée et était économiquement dangereuse pour une société en difficulté pour en déduire que la rupture ne peut être qualifiée d'abusive ; que la cour d'appel, qui n'avait pas à effectuer la recherche évoquée au moyen, la preuve d'une faute dans l'exercice de la faculté de résiliation faisant dégénérer son exercice en abus incombant à la société RMCM qui l'invoquait, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article L. 621-28 du Code de commerce ;
Attendu que la résiliation d'un contrat en cours ne peut résulter du seul fait de l'ouverture du redressement judiciaire et que, si l'administrateur a seul la faculté d'exiger l'exécution des contrats en cours, le contrat n'est pas résilié en l'absence de mise en demeure adressée par le cocontractant à l'administrateur ;
Attendu que pour rejeter les demandes de dommages-intérêts de la société RMCM et de M. X en réparation du préjudice subi à la suite de la résiliation de la convention ayant pour objet la réfection de huit chalands, l'arrêt retient que ce contrat a été résilié de plein droit, l'administrateur, qui n'a pas été mis en demeure, n'ayant pas non plus pris position spontanément sur la poursuite de la convention et qu'aucun contrat ne saurait persister à son insu ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le premier moyen, pris en sa seconde branche :
Vu les articles L. 621-28 et L. 621-43 du Code de commerce ;
Attendu que pour rejeter les demandes de dommages-intérêts de la société RMCM et de M. X en réparation du préjudice subi à la suite de la résiliation de la convention ayant pour objet la réfection de huit chalands, l'arrêt retient encore que la créance de dommages-intérêts dont se prévaut la société RMCM est éteinte pour ne pas avoir été déclarée au passif ;
Attendu qu'en statuant ainsi alors qu'en l'absence de résiliation du contrat pendant la période d'observation, celui-ci n'avait pu se trouver résilié qu'après la lettre de la société NMC du 19 octobre 1999, soit après l'adoption du plan de continuation et que la créance de dommages-intérêts pouvant en résulter n'était dès lors pas soumise à l'obligation de déclaration, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement il a rejeté les demandes de dommages-intérêts, en réparation du préjudice subi du fait de la résiliation de la convention ayant pour objet la réfection des huit chalands, l'arrêt rendu le 16 octobre 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Nouméa ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nouméa, autrement composée.