Livv
Décisions

Cass. com., 20 juin 2018, n° 16-16.723

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

PARTIES

Demandeur :

Aramon (EHPAD)

Défendeur :

SPE (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Avocats :

SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, SCP Nicolaý, de Lanouvelle et Hannotin

Nîmes, du 3 mars 2016

3 mars 2016

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 3 mars 2016), que l'établissement public d'hébergement pour personnes âgées dépendantes Aramon (l'EHPAD) a confié, dans le cadre de la construction d'une résidence, la réalisation du lot électricité à la Société provençale d'électricité (la SPE) par un marché du 14 novembre 2007 ; que la SPE a été mise en redressement puis liquidation judiciaires les 22 septembre et 16 novembre 2010, M. X... étant désigné liquidateur ; que n'ayant pas obtenu le paiement des factures émises par la SPE en octobre, novembre et décembre 2010, le liquidateur a assigné l'EHPAD en paiement devant un tribunal de commerce, lequel, par un jugement du 17 octobre 2014, a condamné l'EHPAD à payer à M. X..., ès qualités, la somme de 60 518,95 euros outre les intérêts au taux légal ;

Attendu que l'EHPAD fait grief à l'arrêt de confirmer ce jugement, sauf à déduire le montant de la retenue de garantie sur justification de sa libération, alors, selon le moyen :

1°) que le juge est tenu de répondre aux conclusions des parties de nature à influer sur la solution du litige si bien qu'en laissant sans réponse le moyen présenté par l'EHPAD Aramon, tiré de ce qu'à défaut d'avoir établi un décompte final établissant le montant total des sommes auxquelles la SPE pouvait prétendre du fait de l'exécution du marché, Me X..., ès qualités, ne pouvait solliciter en justice la condamnation de l'EHPAD Aramon au paiement d'éléments ayant vocation à être intégrés dans le décompte, et qui ne pouvaient en être isolés, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°) que l'ensemble des opérations auxquelles donne lieu l'exécution d'un marché de travaux publics est compris dans un compte dont aucun élément ne peut être isolé et dont seul le solde arrêté lors du décompte définitif détermine les droits et obligations définitifs des parties ; que l'établissement du décompte opère le règlement par contraction des dettes et des créances réciproques des parties de sorte que les créances du titulaire du marché se trouvent éteintes, à due concurrence, par l'effet d'une compensation avec les créances réciproques de la personne publique, même si celles-ci n'ont pas été déclarées au passif de la procédure collective ouverte contre le titulaire du marché si bien qu'en décidant néanmoins que l'EHPAD Aramon ne pouvait valablement opposer une compensation entre dettes connexes pour refuser de payer les factures la SPE, motif pris qu'il n'avait pas déclaré entre les mains de M. X..., sa créance de dommages-intérêts au titre de l'exécution incomplète et défectueuse de ses prestations par la SPE, la cour d'appel a violé les articles L. 622-7 et L. 641-3 du code de commerce ;

Mais attendu, d'une part, que la SPE n'ayant pas remis un projet de décompte final et l'EHPAD, maître de l'ouvrage, n'ayant adressé aucune mise en demeure de l'établir à l'entreprise ou au maître d'oeuvre, le décompte général définitif ne pouvait être arrêté, de sorte qu'en l'absence de solde d'un tel décompte déterminant les droits et obligations des parties, la SPE, représentée par son liquidateur, était fondée à saisir le juge de sa demande en paiement des prestations réalisées et que la cour d'appel n'avait pas à répondre aux conclusions inopérantes de l'EHPAD se prévalant des effets d'un décompte inexistant dont il avait négligé de provoquer l'établissement ;

Et attendu, d'autre part, que l'EHPAD, faute de décompte général définitif, ne peut davantage invoquer le règlement par contraction, au sein d'un tel décompte, des dettes et des créances réciproques des parties ; qu'en conséquence, l'arrêt, après avoir énoncé que des dispositions combinées des articles L. 622-24, L. 622-26 et L. 622-7 du code de commerce, rendus applicables à la liquidation judiciaire par l'article L. 641-3 du même code, il résulte l'obligation pour tout créancier dont la créance est née antérieurement au jugement d'ouverture de déclarer sa créance au passif du débiteur, sanctionnée, en cas de défaut, par l'inopposabilité de cette créance à la procédure collective, en déduit exactement que cette obligation subsiste même dans le cas où est invoquée la compensation pour créances connexes et que, faute d'avoir déclaré sa créance au titre de l'exécution incomplète et défectueuse du contrat, l'EHPAD ne peut, pour refuser de payer les factures de la SPE, se prévaloir d'une compensation avec une créance de dommages-intérêts inopposable à la liquidation judiciaire ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.