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Décisions

Cass. crim., 24 avril 2001, n° 00-83.798

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Cotte

Rapporteur :

M. Beyer

Avocat général :

Mme Commaret

Avocats :

SCP Boré, Xavier et Boré, SCP Vier et Barthélemy

Paris, du 12 mai 2000

12 mai 2000

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 311-1 du Code pénal, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de réponse à conclusions, défaut de motifs, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt attaqué a, infirmant le jugement entrepris, relaxé Bertrand X... des fins de la poursuite et a déclaré le SICOGIF, partie civile, irrecevable en toutes ses demandes formées en cause d'appel ;

" aux motifs qu'il est constant que Bertrand X... a remis une attestation au président du SICOGIF en vue de sa production en justice dans une instance prud'homale et qu'il a repris postérieurement possession de cette attestation qu'il détenait en qualité de directeur juridique du SICOGIF ; que, selon les dispositions de l'article 199 nouveau du Code de procédure civile, lorsque la preuve testimoniale est admissible, le juge peut recevoir des tiers les déclarations de nature à l'éclairer sur les faits litigieux dont ils ont personnellement connaissance ; que ces déclarations sont faites par attestation ou recueillies par voie d'enquête, selon qu'elles sont écrites ou orales ; que, selon l'article 202 du même Code, l'attestation est écrite, datée et signée de la main de son auteur qui annexe en photocopie un document officiel et mentionne qu'une fausse attestation de sa part l'expose à des sanctions pénales ; qu'une attestation est assimilable à un témoignage en justice qui peut toujours être modifié ou rétracté ; que, dès lors, l'auteur d'une attestation peut reprendre son témoignage dont il reste propriétaire et qu'en l'espèce l'infraction de vol n'est pas constituée puisqu'il manque l'un de ses éléments matériels, l'attestation bien que confiée au SICOGIF étant toujours la propriété de son rédacteur, seul auteur et seul responsable du témoignage écrit devant être produit en justice ;

" alors que toute appropriation de la chose appartenant à autrui, contre le gré de son propriétaire ou légitime détenteur, caractérise la soustraction frauduleuse constitutive de vol, quelque soit le mobile qui a inspiré son auteur et l'utilisation du bien appréhendé ; que le fait pour un agent qui détient matériellement un document qui ne lui appartient plus parce qu'il l'a remis à son destinataire de le reprendre sans l'autorisation de son propriétaire constitue la conversion d'une détention précaire en une véritable possession et caractérise ainsi la soustraction frauduleuse, la circonstance que ce document soit une attestation assimilable à un témoignage en justice modifiable et rétractable dont le rédacteur en reste l'auteur et seul responsable ne pouvant avoir une quelconque incidence sur l'appréciation de la matérialité de la soustraction frauduleuse ; qu'en estimant que l'infraction de vol n'était pas constituée puisqu'il manquait l'un de ses éléments matériels, l'attestation bien que confiée au SICOGIF étant toujours la propriété de son rédacteur, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen " ;

Vu l'article 311 du Code pénal ;

Attendu que toute appropriation de la chose appartenant à autrui, contre le gré de son propriétaire ou légitime détenteur, caractérise la soustraction frauduleuse constitutive de vol, quel que soit le mobile qui a inspiré son auteur ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que Bertrand X..., responsable du service juridique du syndicat national des industries de la communication graphique et de l'imprimerie française (SICOGIF), a, à l'insu de son employeur, repris dans un dossier dont il avait la détention matérielle l'original d'une attestation qu'il lui avait précédemment délivrée ;

Attendu que pour déclarer le délit de vol non constitué, l'arrêt retient que cette attestation, était assimilable à un témoignage qui pouvait toujours être modifié ou rétracté, et que Bertrand X... en était, dès lors, demeuré propriétaire ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que le document était devenu la propriété de celui à qui il avait été remis, les juges ont méconnu le texte susvisé ;

Que la cassation est, dès lors, encourue ;

Par ces motifs :

CASSE ET ANNULE, en ses seules dispositions civiles, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Paris, en date du 12 mai 2000, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi dans la limite de la cassation ainsi prononcée.