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Décisions

Cass. crim., 4 mai 2016, n° 15-81.244

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Guérin

Rapporteur :

Mme Planchon

Avocat général :

M. Gauthier

Avocats :

Me Occhipinti, SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, SCP Thouin-Palat et Boucard

Versailles, du 21 janv. 2015

21 janvier 2015

I-Sur le pourvoi de M. X... :

Attendu qu'aucun mémoire n'est produit ;

II-Sur les autres pourvois :

Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;

Sur le moyen unique de cassation, proposé pour la société Crédit foncier de France, pris de la violation des articles L. 313-1 du code pénal, de l'article 1382 du code civil, des articles 2, 3, 591 et 593 du code de procédure pénale, manque de base légale, insuffisance de motivation et contradiction de motifs ;

" en ce que l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, a relaxé Mme C..., épouse Y..., du chef d'escroquerie commise en récidive à Mantes-la-Jolie entre, le 29 juillet 2008 et le 22 novembre 2008, au détriment des sociétés Crédit foncier de France et Crédit immobilier de France et de M. Z..., et a déclaré irrecevable la constitution de partie civile de la société Crédit foncier de France, y compris les demandes présentées au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;

" aux motifs que l'administrateur judiciaire de l'entreprise LPS conseils a saisi, le 15 décembre 2010, le tribunal de commerce de Versailles d'une demande de liquidation judiciaire en raison des défauts du paiement des charges sociales et des acomptes sur la TVA devant être acquittés par l'entreprise située 2, rue Pierre de Ronsard à Mantes-la-Jolie (78) qui poursuivait une activité d'ingénierie en informatique exécutée par son unique salarié, M. A..., et qui avait pour dirigeant la mère de ce dernier, Mme C... ; que cette entreprise a fait l'objet d'un jugement de liquidation judiciaire du 4 février 2010 avec un passif arrêté à 111 064 euros dont 84 649 euros au titre des créanciers privilégiés ; qu'il a été établi par le mandataire liquidateur que l'entreprise avait pour seul client la société Ingéniance jusqu'au 1er mai 2010, date à compter de laquelle des factures ont été émises au profit de la FDS consulting domiciliée 34, boulevard des Italiens à Paris (75) ; que la société FDS consulting avait pour objet le conseil en informatique avec pour unique salarié M. A... et avait, par ailleurs, succédé à la société Vansovy, elle aussi animée par M. A... comme seul salarié, avec pour seul client la société EDF, tandis que les parts sociales étaient attribuées à Mme C..., à ses fils MM. A... et Mathieu Y..., ainsi qu'à la concubine de ce dernier, Mme B..., nommée aussi gérante de la société ; que, par ailleurs, le 17 octobre 2011, M. X... a déposé plainte au commissariat de police de Mantes-la-Jolie à l'encontre de Mme C... pour escroquerie en expliquant qu'elle lui avait demandé par l'intermédiaire de ses parents de servir de prête-nom pour l'achat de deux maisons individuelles situées au 125 et 127, boulevard du maréchal Juin à Mantes-la-Jolie (78) au prétexte que la procédure de divorce en cours l'empêchait d'acquérir personnellement ses immeubles ; qu'il a indiqué lui avoir remis ses bulletins de salaire et la copie de sa feuille d'imposition qu'elle avait ensuite présenté pour signature des contrats de prêt souscrits au Crédit foncier et au Crédit immobilier de France en octobre et novembre 2008 puis avoir conservé les actes de propriété et tous les documents bancaires ; qu'il avait ainsi la charge des remboursements de deux prêts de 240 000 euros et 225 000 euros payables sur trente ans et dont les mensualités excédaient ses revenus limités à 1 752 euros brut par mois et les réitérations des actes de ventes ont été passées devant notaire le 30 octobre 2008 et le 14 novembre 2011 ; que M. X... a soutenu que Mme C... l'avait trompé dans son intention de reprendre à son compte la propriété des immeubles alors qu'elle a refusé de régulariser et qu'elle ne s'acquittait plus régulièrement des mensualités des emprunts ; qu'il a indiqué avoir aussi pris la présidence de l'association Mékong en Seine dont l'objet était la promotion de la culture asiatique, avant que M. Mathieu Y... ne le remplace ; qu'il a exposé que cette association avait concouru à compter de septembre 2011 au versement des mensualités des crédits immobiliers ; que M. X... a indiqué que Mme C... avait créé, le 13 janvier 2011, la SCI L'Eveil, située à la même adresse que l'association Mékong en Seine, et avec pour objet social l'acquisition de biens immobiliers en vue d'exploiter une maison de retraite ; qu'il a déclaré qu'il était prévu qu'il soit associé à cette SCI par l'apport des deux immeubles, mais que cette opération a échoué en raison de l'opposition des établissements de crédit, en sorte qu'il a refusé la cession des immeubles ; qu'il a, par ailleurs, affirmé avoir été dupé par Mme C... qui lui avait promis une place de directeur dans la future maison de retraite qu'elle avait conçue de développer au 127, boulevard du maréchal Juin, projet pour lequel elle lui avait promis de lui payer une formation de management et qu'enfin, il a vainement obtenu de Mme C... qu'elle rachète les immeubles ; qu'enfin, M. X... a exposé que sous l'influence de Mme C..., il avait accepté de prendre le 22 mars 2010 la gérance de la société FDS consulting et l'entreprise LPS conseil qui avaient pour seul client la société Ingéniance et a déclaré avoir remis l'ensemble des moyens de paiement de ces deux entités à Mme C... avant de démissionner lorsqu'il a été informé par la banque que le compte de la société FDS consulting présentait un découvert anormal ; que l'enquête a établi que la SCI L'Eveil avait ouvert un compte au Crédit mutuel crédité de chèques de particuliers et débité essentiellement sous forme de virements au profit de Mme B..., gérante de la SCI, de M. Mathieu Y... et de Mme C... ; qu'il a encore été acquis que, le 18 février 2011, la SCI Merveilles a été créée avec pour siège social le 2 rue de la Haie Grosset à Mantes-la-Jolie avec M. Mathieu Y... comme gérant ; que l'exploitation des comptes bancaires de l'entreprise LPS et de la société FDS a attesté de virements importants et réguliers au profit des membres de la famille de Mme C... ainsi que des associations et de la SCI ; que l'association Mékong en Seine créée, le 1er décembre 2010, a été présidée le 10 août 2011, par M. Y..., sa compagne étant alors la trésorière ; qu'il a été établi que les biens immobiliers acquis par M. X... étaient mitoyens de ceux du pavillon du maréchal Juin ou résidait la famille de Mme C..., et avait été transformés en appartements loués à des personnes âgées issues de la communauté asiatique ; qu'aucune déclaration au titre de la taxe d'habitation ou des loyers n'avaient été faites auprès des services fiscaux ; qu'entendue, le 17 avril 2012, Mme C... a mis en avant son attention à l'endroit de M. X... ainsi que de sa famille et son dévouement à la communauté asiatique et enfin, a indiqué que les faits s'inscrivaient dans un projet de prise en charge des personnes âgées dans le cadre d'une résidence ; qu'elle a reconnu être à l'origine du projet d'acquisition des deux biens immobiliers ainsi que de la création des SCI et des associations ; qu'elle a indiqué ne pas comprendre comment les fiches de payes falsifiées de M. X... ont pu être communiquées aux établissements de crédits pour l'obtention des deux prêts, alors que, pour sa part, elle s'était limitée à communiquer à des courtiers celles que M. X... lui avait données ; qu'elle a indiqué que son fils A... était l'unique salarié des sociétés qui se sont succédé et elle a reconnu avoir retiré personnellement une partie de ses revenus et avoir affecté une autre partie au remboursement de prêt et à la réalisation de travaux dans l'immeuble du 127, rue maréchal Juin ; qu'entendu, le 17 avril 2012, M. A... a déclaré avoir versé à sa mère, à son demi-frère et à sa belle-soeur, une partie des revenus substantiels que lui rapportaient ses missions d'ingénierie qu'il a exécutées dans le cadre l'entreprise LPS, puis dans celui des sociétés FDS et Vansovy pour le compte de la société de banque Société générale, de la BNP ou d'EDF au travers de la société Ingéniance dédiée au portage salarial ; qu'il a déclaré que figurait sur son bulletin de salaire le véritable nombre d'heures qu'il a exécuté chaque mois et a soutenu que les charges sociales étaient payées dans leur intégralité ; que M. Y... a été entendu, le 17 avril 2012, et a déclaré percevoir 800 euros pour un emploi dans la société Véolia ; qu'il a indiqué avoir accepté de sa mère de recevoir des fonds venant de l'entreprise LPS conseil et FDS consulting ; que Mme B... a de même reconnu lors de son audition avoir acceptée d'être nommée gérante de la société FDS consulting sur demande de Mme C... et lui avoir aussi donné tous les moyens de paiement sans avoir participé à l'activité de la société ; que l'enquête s'est attachée à l'exploitation des mouvements en débit de la SCI L'Eveil et de l'association Mékong en Seine, et d'après les retraits en espèces ou les virements par chèques opérés directement par Mme C..., ou par l'intermédiaire de M. X..., de son fils M. Mathieu Y... ou de Mme B..., il a été fixé à 353 975 euros, le montant des fonds débités de l'objet de la société et de l'association dont 69 511 euros captés par Mme C... ; que, par ailleurs, Mme C... a été condamnée, le 27 août 2002, par le tribunal de commerce de Toulouse à la peine d'interdiction de diriger, de gérer ou d'administrer une personne morale pendant une durée de douze ans puis, le 30 janvier 2008, par le tribunal correctionnel de Toulouse à la peine de six mois d'emprisonnement avec sursis et mise à l'épreuve pour des faits d'abus de confiance et de falsification de chèque ; (…) que, sur les culpabilités de Mme C..., épouse Y..., du chef d'escroquerie au préjudice du Crédit foncier de France, du Crédit immobilier et de M. X... ; qu'aux termes de l'article 313-1 du code pénal, l'escroquerie est le fait, soit de l'usage d'un faux nom ou d'une fausse qualité, soit par l'abus d'une qualité vraie, soit par l'emploi de manoeuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d'un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge ; que d'après les faits rapportés ci-dessus, et à supposer établie la preuve que Mme C... est à l'origine des faux bulletins de salaires remis aux établissements de crédit en vue de la souscription des prêts consentis pour l'acquisition des deux pavillons, il est constant qu'elle ne s'est vue remettre aucun fonds des deux banques ou de M. X..., tandis qu'en suite des conditions et du terme stipulés aux actes de cession des immeubles, la propriété des immeubles obtenue au moyen des prêts a été définitivement transférée à M. X... le jour de la vente ; que la cession d'immeuble convenue sans autre condition suspensive que la souscription de prêts acquise le jour de la vente n'entre pas dans les prévisions limitatives de l'article 313-1 précité ; qu'il s'en suit surabondamment que, à supposer établi le bénéfice que Mme C... aurait pu retirer des projets ultérieurs – quoique non mentionnés à la prévention – de transférer la propriété de ces immeubles à une SCI, puis de les affecter à une activité de prise en charge de seniors ressortissants vietnamiens, ces intentions postérieures au transfert de propriété des immeubles ne pouvaient tendre directement et immédiatement à la commission de l'infraction dans les conditions de la tentative définie à l'article 121-5 du code pénal, étant surabondamment encore relevé que les banques ont refusé de souscrire au projet de SCI et que M. X... y avait adhéré avant d'y renoncer ; que, par ces motifs, il convient d'infirmer le jugement et de relaxer Mme C... de ce chef ;

" et aux motifs qu'à la suite de la relaxe de Mme C... du chef d'escroquerie au détriment des sociétés Crédit foncier et Crédit immobilier de France et de M. X..., il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a déclaré irrecevable M. X... en sa constitution de partie civile par application des articles 2 et 3 du code de procédure pénale, mais d'infirmer sur le même fondement le jugement en ce qu'il a accueilli les constitutions des parties civiles des établissements de crédit, lesquelles doivent aussi être déclarées irrecevables ; que, par suite, les parties sont aussi irrecevables en leurs demandes présentées sur le fondement de l'article 475-1 du code de procédure pénale ;

" 1°) alors que l'infraction d'escroquerie est constituée dès lors qu'une personne a été déterminée par des manoeuvres frauduleuses à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque à un tiers, peu important que cette remise n'ait pas été faite entre les mains de l'auteur du délit ; qu'en l'espèce, Mme C..., épouse Y..., était poursuivie pour avoir fourni à M. Z... de faux documents sur la base desquels le Crédit foncier de France a octroyé à ce dernier un prêt destiné à l'acquisition d'un bien immobilier, dont l'enquête a révélé qu'il était occupé par Mme C... et les membres de sa famille ; que, pour relaxer Mme C..., épouse Y..., du chef d'escroquerie au préjudice du Crédit foncier de France, et déclarer irrecevable la constitution de partie civile de cette banque, la cour d'appel a retenu que la prévenue ne s'était vue remettre aucun fonds de la banque ou de M. Z..., tandis que la propriété de l'immeuble litigieux avait été transférée à ce dernier le jour de la vente ; qu'elle a considéré que la cession d'un immeuble sans autre condition suspensive que la souscription de prêts acquise le jour de la vente n'entrait pas dans la définition de l'escroquerie, peu important que Mme C..., épouse Y..., ait ultérieurement essayé de transférer la propriété de l'immeuble à une SCI qu'elle dirigeait ; qu'en statuant de la sorte, quand la loi n'exige pas que les fonds aient été remis directement par la victime entre les mains de l'escroc, la cour d'appel a méconnu l'article 313-1 du code civil, ensemble les textes et principes visés au moyen ;

" 2°) alors que constitue une escroquerie l'utilisation de manoeuvres déterminant un tiers à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, en particulier le prix de vente d'un immeuble ; qu'en jugeant, pour déclarer irrecevable la constitution de partie civile du Crédit foncier de France, que la cession d'immeuble convenue sans autre condition suspensive que la souscription de prêts acquise le jour de la vente n'entrait pas dans les prévisions limitatives de l'article 313-1 du code pénal, la cour d'appel a derechef méconnu cette disposition, ensemble les textes et principes visés au moyen ;

" 3°) alors que les juges du fond doivent statuer par des motifs répondant aux questions qui leur sont soumises et permettant de justifier leurs décisions en fait et en droit ; que, pour retenir la culpabilité de Mme C..., épouse Y..., du chef d'escroquerie, le jugement du tribunal correctionnel de Versailles du 3 juin 2013 avait retenu qu'au cours de son audition, M. Z... avait expliqué que Mme Y... « a vait utilisé le ressort affectif pour le forcer à accepter de contracter un important prêt à son nom en vue de l'acquisition d'un bien immobilier, que plus tard elle lui demandera de signer un second prêt pour acquérir une seconde maison, cette fois à son insu et enfin, qu'elle avait insisté pour garder tous les documents bancaires et les actes de propriété par devers elle », que « l'enquête montrera que Mme Le Dung C... dit Y... a falsifié des fiches de paie et d'imposition appartenant à M. X... pour qu'il obtienne ses deux prêts bancaires, ce qui était impensable dans des conditions normales eu égard à la modicité de ses ressources par rapport aux montants empruntés », que dans son audition, en date du 17 avril 2012, Mme C... Dung dit Y... avait reconnu qu'elle avait préféré solliciter M. X... pour ce service, ne pouvant plus s'adresser pour ce faire aux membres de sa famille, et enfin que Mme Y... avait seule intérêt à la falsification des bulletins de salaire utilisés par M. Z... pour obtenir le prêt litigieux, et qu'avait été retrouvées chez elle lors de la perquisition de fausses fiches de paye au nom de son fils M. A... ; qu'en se bornant à énoncer qu'« à supposer établie la preuve que Mme C... est à l'origine des faux bulletins de salaires remis aux établissements de crédit en vue de la souscription des prêts consentis pour l'acquisition des deux pavillons », les faits reprochés à Mme C..., épouse Y..., ne caractérisaient pas une escroquerie, et que la constitution de partie civile du Crédit foncier de France était en conséquence irrecevable, sans rechercher si les éléments de fait retenus par le tribunal correctionnel ne permettaient pas d'établir que Mme C..., épouse Y..., était effectivement l'auteur des faux documents remis à M. Z..., la cour d'appel a insuffisamment motivé sa décision, violant ainsi l'article 593 du code de procédure pénale ;

" 4°) alors que le délit d'escroquerie est constitué par l'emploi de toutes manoeuvres frauduleuses destinées à déterminer une personne à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que lors de son audition, en date du 17 avril 2012, Mme Y... « a vait reconnu être à l'origine du projet d'acquisition des deux biens immobiliers », ainsi qu'« avoir affecté une autre partie de ses revenus au remboursement de prêt » ; qu'il résulte encore des éléments de l'enquête que lors de son audition, en date du 17 avril 2012, Mme C... le Dung dit Y... avait reconnu qu'elle avait sollicité M. X... pour obtenir un prêt du Crédit foncier de France ; qu'en s'abstenant de rechercher si ces éléments ne suffisaient pas à rapporter la preuve de manoeuvres frauduleuses de la part de Mme C..., épouse Y..., tendant à la remise de fonds par le Crédit foncier de France à M. Z..., ce qui suffisait à caractériser une escroquerie indépendamment même du point de savoir si Mme C..., épouse Y..., était elle-même à l'origine de la falsification des documents remis à la banque, la cour d'appel a insuffisamment motivé sa décision et méconnu l'article 593 du code de procédure pénale ;

" 5°) alors subsidiairement que, nonobstant la relaxe du prévenu, la partie civile peut obtenir l'indemnisation des préjudices résultant de la faute civile démontrée à partir et dans la limite des faits objet de la poursuite ; qu'en déduisant de la relaxe de Mme C..., épouse Y..., du chef d'escroquerie l'irrecevabilité de la plainte avec constitution de partie civile du Crédit foncier de France, sans rechercher si les éléments de fait de la prévention ne caractérisaient pas à tout le moins la commission par Mme C..., épouse Y..., d'une faute civile engageant sa responsabilité à l'égard de la banque, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil, ensemble l'article 313-1 du code pénal " ;

Sur le même moyen de cassation dont le Crédit immobilier de France s'approprie la teneur ;

Sur le moyen unique de cassation, proposé pour la société Crédit immobilier de France, pris de la violation des articles 313-1 du code pénal, des articles préliminaire 591 et 593 du code de procédure pénale, 6, § 1, de la Convention européennes des droits de l'homme, défaut de motifs et manque de base légale ;

" en ce que l'arrêt attaqué a relaxé Mme Y... du chef d'escroquerie commise en récidive et a en conséquence déclaré irrecevable la constitution de partie civile du Crédit immobilier de France ;
" aux motifs qu'aux termes de l'article 313-1 du code pénal, l'escroquerie est le fait, soit par l'usage d'un faux nom ou d'une fausse qualité, soit par l'abus d'une qualité vraie, soit par l'emploi de manoeuvres frauduleuses, de tromper une personne physique ou morale et de la déterminer ainsi, à son préjudice ou au préjudice d'un tiers, à remettre des fonds, des valeurs ou un bien quelconque, à fournir un service ou à consentir un acte opérant obligation ou décharge ; que, d'après les faits rapportés ci-dessus, et à supposer établie la preuve que Mme C... est à l'origine des faux bulletins de salaires remis aux établissements de crédit en vue de la souscription des prêts consentis pour l'acquisition des deux pavillons, il est constant qu'elle ne s'est vue remettre aucun fonds des deux banques ou de M. X..., tandis qu'ensuite des conditions et du terme stipulés aux actes de cession des immeubles, la propriété des immeubles obtenue au moyen des prêts a été définitivement transférées à M. X... le jour de la vente ; que la cession d'immeuble convenue sans autre condition suspensive que la souscription de prêts acquise le jour de la vente n'entre pas dans les prévisions limitatives de l'article 313-1 précité ; qu'il s'en suit surabondamment que, à supposer établi le bénéfice que Mme C... aurait pu retirer des projets ultérieurs – quoi que non mentionnés à la prévention – de transférer la propriété de ces immeubles à une SCI, puis de les affecter à une activité de prise en charge de seniors ressortissant vietnamiens, ces intentions postérieures au transfert de propriété des immeubles ne pouvaient tendre directement et immédiatement à la commission de l'infraction dans les conditions de la tentative définie à l'article 121-5 du code pénal, étant surabondamment encore relevé que les banques ont refusé de souscrire au projet de SCI et que M. X... y avait adhéré avant d'y renoncer ; que, par ces motifs, il convient d'infirmer le jugement et de relaxer Mme C... de ce chef ;

" 1°) alors que la procédure pénale doit être équitable, contradictoire et préserver l'équilibre des droits des parties, en sorte que les juges répressifs ne peuvent relever un moyen d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, aucune des parties, et pas même la prévenue, n'avaient fait valoir que les faits d'escroquerie visés à la prévention portaient sur la remise d'un immeuble ; qu'il avait seulement soutenu que les manoeuvres frauduleuses commises par Mme Y... avaient été déterminantes de l'octroi des prêts devant servir à financer leur acquisition ; qu'en retenant cependant, pour relaxer Mme Y... des fins de la poursuite, que la cession d'immeuble n'entrait pas dans les prévisions limitatives de l'article 313-1 précité, sans que les parties, qui n'avaient pas conclu sur ce point, aient été mises à même de débattre de ce moyen de droit relevé d'office, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;

" 2°) alors que l'escroquerie est constituée à la charge de l'auteur des manoeuvres frauduleuses, quel que soit le bénéficiaire de la remise ; que l'article 313-1 du code pénal n'exige donc pas, comme condition de son application, que la remise des choses qu'il énumère ait été faite entre les mains de l'auteur des manoeuvres frauduleuses ; qu'en se bornant, pour relaxer Mme Y... des fins de la poursuite, a énoncer que si elle avait commis des manoeuvres frauduleuses pour obtenir les prêts bancaires incriminés, « il est constant qu'elle ne s'est vue remettre aucun fonds des deux banques ou de M. X... », la cour d'appel, qui a ajouté à la loi une condition qu'elle ne comporte pas, a violé les textes susvisés ;

" 3°) alors qu'en tout état de cause, l'escroquerie peut porter indirectement sur un immeuble dès lors que la remise incriminée concerne son prix, qui a été obtenu par l'emploi de manoeuvres frauduleuses ; qu'en estimant en l'espèce, pour infirmer le jugement entrepris et relaxer Mme Y... des fins de la poursuite, que la cession d'immeuble n'entrait pas dans les prévisions de l'article 313-1 du code pénal, tout en constatant elle-même que les manoeuvres frauduleuses commises par la prévenue avaient été déterminantes de la remise des fonds par le Crédit immobilier de France à M. X..., ayant servi à financer l'acquisition du bien immobilier litigieux que la prévenue occupait, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les textes susvisés " ;

Les moyens étant réunis ;

Sur le moyen proposé pour le Crédit foncier de France, dont le Crédit immobilier de France, s'approprie la teneur, pris en ses première, deuxième et quatrième branches, et sur le moyen proposé pour le Crédit immobilier de France, pris en ses deuxième et troisième branches :

Vu les articles 313-1 du code pénal, 1382 du code civil et 2 du code de procédure pénale ;

Attendu que le premier de ces articles, qui fait notamment de la remise de fonds l'un des éléments constitutifs de délit d'escroquerie, n'exige pas que cette remise soit opérée dans les mains de l'auteur du délit ;

Attendu qu'il résulte des termes combinés des deux articles suivants que le dommage dont la partie civile peut obtenir réparation de la personne relaxée résulte de la faute civile démontrée à partir et dans les limites des faits objets de la poursuite ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que, suite à la liquidation judiciaire de la société LPS conseil, une enquête a été diligentée sur les activités de sa dirigeante, Mme C... ; qu'il résulte des investigations qu'en 2008 et en 2011, sur la demande de celle-ci, qui reconnaît être à l'origine de l'opération, M. X... a accepté d'être son prête-nom pour l'acquisition de deux immeubles financée à l'aide de deux prêts bancaires d'un montant total de 465 000 euros, excédant largement les capacités financières de l'emprunteur, sollicités auprès des parties civiles sur la base d'un dossier contenant des bulletins de salaires et l'avis d'imposition remis par M. X... à Mme C..., qui se sont révélés avoir été falsifiés ; que les mensualités des prêts ont été réglées par les sociétés LPS conseil et FDS consulting et l'association Mékong en Seine créées par Mme C... qui en était la dirigeante de fait et qui occupait l'un des immeubles avec sa famille tandis qu'elle louait les appartements du second ;

Attendu que Mme C... a été poursuivie devant le tribunal correctionnel pour avoir, notamment, par l'emploi de manoeuvres frauduleuses, en l'espèce en présentant de faux bulletins de salaires et des fausses fiches d'imposition, trompé le Crédit foncier de France et le Crédit immobilier de France en les déterminant respectivement à octroyer deux prêts de 240 000 et 225 000 euros ; que les juges du premier degré l'ont condamnée, notamment, de ce chef, ont déclaré recevables les constitutions de partie civile des établissements bancaires et ont fait droit partiellement à leurs demandes d'indemnisation ; que la prévenue, les parties civiles et le ministère public ont relevé appel de cette décision ;

Attendu que, pour dire non constitué le délit d'escroquerie et déclarer irrecevables les constitutions de partie civile des établissements bancaires, l'arrêt relève notamment que, d'une part, " à supposer établie la preuve que Mme C... soit l'auteur des faux documents remis aux établissements bancaires ", les fonds provenant des prêts ne lui ont pas été remis, d'autre part, " la cession d'un immeuble convenue sans autre condition suspensive que la souscription de prêts acquise le jour de la vente n'entre pas dans les prévisions limitatives de l'article 313-1 " du code pénal ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi alors que le fait de recourir à un prête-nom pour obtenir un prêt sur la base d'un dossier contenant des documents falsifiés est constitutif de manoeuvres frauduleuses susceptibles d'établir une faute civile ouvrant droit à la réparation des préjudices des parties civiles, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;

Par ces motifs :

I-Sur le pourvoi de M. X... :

Le REJETTE ;

II-Sur les autres pourvois :

CASSE et ANNULE l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Versailles, en date du 21 janvier 2015, mais en ses seules dispositions relatives aux intérêts civils, toutes autres dispositions étant expressément maintenues ;

Et pour qu'il soit à nouveau statué, conformément à la loi, dans les limites de la cassation ainsi prononcée,

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;

DIT n'y avoir lieu à l'application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Versailles et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement annulé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatre mai deux mille seize.