Cass. 3e civ., 30 avril 1969, n° 67-11.457
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. DE MONTERA
Rapporteur :
M. DECAUDIN
Avocat général :
M. LAGUERRE
Avocat :
Me DE GRANDMAISON ET NICOLAS
SUR LE PREMIER MOYEN :
ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE HUGUES ET GILBERT X... SONT PROPRIETAIRES, CHACUN POUR MOITIE, DES PARTS DE LA SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE DES 16-18, COUR SAINT-ELOI, DONT ILS SONT TOUS DEUX ADMINISTRATEURS ;
QUE LA SOCIETE POLYTECHNIQUE DU SIEGE, DONT HUGUES X... EST PRESIDENT-DIRECTEUR GENERAL, ETAIT LOCATAIRE DE L'IMMEUBLE SUSVISE DE LA COUR SAINT-ELOI, MAIS QU'ELLE A RESILIE SON BAIL, EN 1960, SANS INDEMNITE ET QUE, PAR CONTRAT DU 1ER DECEMBRE 1962, IL A ETE CONVENU QUE LADITE SOCIETE CONTINUERAIT SON OCCUPATION DES LIEUX EN QUALITE D'OCCUPANT PRECAIRE, S'INTERDISANT DE TRANSFERER SON DROIT D'OCCUPATION A UN TIERS QUELCONQUE ;
QUE, PAR CONVENTION DU 29 MAI 1963, HUGUES X..., REPRESENTANT LA SOCIETE POLYTECHNIQUE DU SIEGE, A CEDE LE DROIT D'OCCUPATION DES LOCAUX A LA SOCIETE LE CONSORTIUM DES PAPIERS PEINTS, MOYENNANT UNE INDEMNITE DE 240. 000 FRANCS QUE, PAR AUTRE CONVENTION DU MEME JOUR LE MEME HUGUES X..., REPRESENTANT CETTE FOIS LA SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE DES 16-18, COUR SAINT-ELOI, A CONSENTI A LA SOCIETE LE CONSORTIUM DES PAPIERS PEINTS UN DROIT D'OCCUPATION PRECAIRE ET PROVISOIRE, DONT LA DUREE DEVAIT EXPIRER AU PLUS TARD LE 15 MAI 1965, MOYENNANT UNE INDEMNITE GLOBALE, PAYABLE D'AVANCE, DE 60 000 FRANCS ;
ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF AUDIT ARRET D'AVOIR CONDAMNE LA SOCIETE POLYTECHNIQUE DU SIEGE A PAYER A LA SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE LA SOMME DE 240. 000 FRANCS, EN REJETANT L'EXCEPTION DE CHOSE JUGEE PAR UN JUGEMENT DU 1ER JUILLET 1965, ALORS, SELON LE MOYEN, "QUE LA DECISION RENDUE AVEC UNE PARTIE PROCEDANT EN UNE CERTAINE QUALITE FAIT OBSTACLE A CE QUE CETTE PARTIE REOUVRISSE UN NOUVEAU DEBAT AYANT LA MEME CAUSE ET LE MEME OBJET EN VERTU D'UNE QUALITE DISTINCTE " ;
MAIS ATTENDU QUE L'AUTORITE DE CHOSE JUGEE N'A D'EFFET QU'ENTRE LES MEMES PARTIES, PRISES EN LA MEME QUALITE ;
QUE LES JUGES DU FOND ENONCENT QUE LE JUGEMENT DU 1ER JUILLET 1965 A CONSTATE LE DEFAUT DE DROIT "PERSONNEL" DE GILBERT X... ET QUE CELUI-CI EST DONC EN DROIT DE REPRENDRE LA MEME ACTION AU NOM DE LA SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE DONT IL EST LE REPRESENTANT ;
QUE LE PREMIER MOYEN N'EST PAS FONDE ;
SUR LE DEUXIEME MOYEN :
ATTENDU QU'IL EST ENCORE FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR CONDAMNE LA SOCIETE POLYTECHNIQUE DU SIEGE A PAYER A LA SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE LA SOMME DE 240 000 FRANCS, AUX MOTIFS QUE LE PROPRIETAIRE POUVAIT ETRE EN DROIT D'ESCOMPTER UN PAS DE PORTE ET QUE LA SOMME DE 240 000 FRANCS AVAIT ETE INDUMENT RECUE PAR LA SOCIETE POLYTECHNIQUE DU SIEGE EN FRAUDE DES DROITS DE LA SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE, ALORS, SELON LE POURVOI QUE, D'UNE PART, GILBERT X..., ES QUALITE, N'AVAIT JAMAIS SOUTENU QUE CETTE SOMME REPRESENTAIT UN PAS DE PORTE, MAIS QU'ELLE AVAIT ETE VERSEE A TITRE D'INDEMNITE D'OCCUPATION ET DEVAIT, A CE TITRE, REVENIR A LA SOCIETE PROPRIETAIRE, QUE, D'AUTRE PART, LADITE SOCIETE POUVAIT D'AUTANT MOINS ESCOMPTER LE VERSEMENT D'UN PAS DE PORTE QUE LA SOCIETE POLYTECHNIQUE DU SIEGE, PRECEDENTE LOCATAIRE, N'EN AVAIT PAS PAYE ET QU'ENFIN LA COUR D'APPEL S'EST ABSTENUE DE REPONDRE AU MOYEN DE DEFENSE PRIS PAR LES DEMANDEURS AU POURVOI QUI SOUTENAIT QUE DEUX CONVENTIONS PARALLELES MAIS DISTINCTES AVAIENT ETE CONSENTIES LE 29 MAI 1963 ET QUE, PAR APPLICATION DE L'ARTICLE 1165 DU CODE CIVIL, LA PREMIERE CONVENTION CONCLUE ENTRE LA SOCIETE POLYTECHNIQUE DU SIEGE ET LA SOCIETE LE CONSORTIUM DES PAPIERS PEINTS N'AVAIT D'EFFET QU'ENTRE LES PARTIES CONTRACTANTES ET QUE LA SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE NE POUVAIT EN RECLAMER LE BENEFICE ;
MAIS ATTENDU QUE LES JUGES DU FOND, ONT LE POUVOIR DE QUALIFIER LES FAITS QUI LEUR SONT CONTRADICTOIREMENT SOUMIS SANS ETRE TENUS D'ADOPTER LA QUALIFICATION PROPOSEE PAR LES PARTIES ;
QUE, D'AUTRE PART, LA CIRCONSTANCE QUE LA SOCIETE POLYTECHNIQUE DU SIEGE N'AVAIT PAS VERSE DE PAS DE PORTE, LORS DE SON ENTREE DANS LES LIEUX, A ETE ENONCEE PAR L'ARRET ATTAQUE MAIS QUE CELUI-CI N'EN A TIRE AUCUNE DEDUCTION AU SOUTIEN DE SA DECISION ;
QU'ENFIN LA COUR D'APPEL, TANT PAR MOTIFS PROPRES QUE PAR CEUX QU'ELLE ADOPTE, RELEVE QUE LES DEUX CONVENTIONS DU 29 MAI 1963 ONT ETE CONCLUES PAR HUGUES X..., AGISSANT COMME REPRESENTANT LEGAL DE LA SOCIETE POLYTECHNIQUE DU SIEGE DANS L'UNE ET COMME REPRESENTANT LEGAL DE LA SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE DANS L'AUTRE, QUE LA SOCIETE POLYTECHNIQUE DU SIEGE "N'AVAIT DROIT A AUCUNE INDEMNITE DE REALISATION NI A L'EGARD DE LA SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE NI MEME A L'EGARD DE QUICONQUE DU FAIT DE LA CONVENTION PRECAIRE DU 1ER DECEMBRE 1962" , QU'ELLE EN A JUSTEMENT DEDUIT QUE LA SOMME DE 240. 000 FRANCS, DIFFERENCE ENTRE CELLE DE 300. 000 FRANCS PAYEE PAR LA SOCIETE LE CONSORTIUM DES PAPIERS PEINTS ET CELLE DE 60. 000 FRANCS, VERSEE A LA SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE AVAIT ETE PERCUE PAR LA SOCIETE POLYTECHNIQUE DU SIEGE EN FRAUDE DES DROITS DE LADITE SOCIETE CIVILE IMMOBILIERE ;
QU'AINSI, LE MOYEN, IRRECEVABLE DANS SA SECONDE BRANCHE, EST MAL FONDE DANS LES AUTRES ;
QUE LE DEUXIEME MOYEN NE PEUT ETRE ACCUEILLI ;
SUR LE TROISIEME MOYEN :
ATTENDU QU'IL EST ENFIN REPROCHE A L'ARRET D'AVOIR DECLARE QUE LA SOCIETE POLYTECHNIQUE DU SIEGE N'ETAIT PAS FONDEE A "RECEVOIR" UN DROIT AU BAIL COMME N'AYANT AUCUN DROIT SUR LES LIEUX ALORS D'APRES LES DEMANDEURS EN CASSATION QUE LA LEGISLATION SUR LES BAUX COMMERCIAUX EST D'ORDRE PUBLIC ET QU'UN LOCATAIRE AYANT REGULIEREMENT EU LA JOUISSANCE DES LIEUX PENDANT UN TEMPS LEGALEMENT FIXE BENEFICIE, NONOBSTANT TOUTE CLAUSE CONTRAIRE, DE CETTE LEGISLATION ET, PAR VOIE DE CONSEQUENCE, DU DROIT A UNE INDEMNITE LORS DE LA CESSION DE SON BAIL ;
MAIS ATTENDU QU'IL N'EST PAS INTERDIT A UN LOCATAIRE DE RENONCER AU BENEFICE DU DECRET DU 30 SEPTEMBRE 1953, LORSQUE CETTE RENONCIATION INTERVIENT POSTERIEUREMENT A LA NAISSANCE DE SON DROIT ;
QUE LES JUGES DU FOND CONSTATENT QUE LE BAIL DONT BENEFICIAIT LA SOCIETE POLYTECHNIQUE DU SIEGE A ETE RESILIE "D'UN COMMUN ACCORD" , LE 20 DECEMBRE 1960, AVEC EFFET AU 31 DECEMBRE SUIVANT, SANS INDEMNITE, ET QUE, PAR CONVENTION DU 1ER DECEMBRE 1962, LADITE SOCIETE A CONSERVE L'USAGE DES LIEUX "A TITRE PRECAIRE ET PROVISOIRE" , ETANT PRECISE QUE LA SOCIETE OCCUPANTE NE POURRA TRANSFERER SON DROIT D'OCCUPATION PRECAIRE A UN TIERS QUELCONQUE, ET EN DEDUISENT "QUE L'ON SE TROUVE EN PRESENCE D'UNE VERITABLE CONVENTION D'OCCUPATION PRECAIRE, NE CONSTITUANT NULLEMENT UN BAIL COMMERCIAL" ;
QU'AINSI LE TROISIEME MOYEN N'EST PAS DAVANTAGE FONDE QUE LES PRECEDENTS ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 16 JANVIER 1967 PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS.