Cass. crim., 3 décembre 1984, n° 83-94.622
COUR DE CASSATION
Arrêt
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Escande Faisant Fonctions
Rapporteur :
M. Bayet
Avocat général :
M. de Sablet
Avocat :
Me Choucroy
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION PRIS EN SES DEUX BRANCHES, DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 460 DU CODE PENAL, DE L'ARTICLE 2279 ALINEA 1 DU CODE CIVIL ET DE L'ARTICLE 593 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;
" EN CE QUE L'ARRET INFIRMATIF ATTAQUE A DECLARE LE PREVENU COUPABLE DE RECEL DE CHOSES ;
" AUX MOTIFS, D'UNE PART, QUE LE PREVENU NE SAURAIT ETRE RETENU POUR UN ACQUEREUR DE BONNE FOI POUVANT SE PREVALOIR DES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 2279 ALINEA 1 DU CODE CIVIL, DES L'INSTANT OU, AGISSANT EN QUALITE DE PROFESSIONNEL, IL N'A PAS RESPECTE LES OBLIGATIONS MISES A SA CHARGE PAR LE DECRET N° 68-786 DU 29 AOUT 1968 ARTICLE 2, 2° ;
QUE FAUTE D'AVOIR REMPLI CES FORMALITES ELEMENTAIRES, IL DOIT ETRE, D'EMBLEE, CONSIDERE COMME DE MAUVAISE FOI ET NE PEUT SE PREVALOIR DES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 2279 ;
" ALORS QUE L'ACQUEREUR D'UN BIEN MOBILIER NE SAURAIT ETRE DECLARE COUPABLE DE RECEL LORSQUE LA REGULARITE DE SA POSSESSION ET SA BONNE FOI IMPLIQUENT LA REUNION DES CONDITIONS D'APPLICATION DE L'ARTICLE 2279 ALINEA 1 DU CODE CIVIL, QUE L'INOBSERVATION DES FORMALITES PRESCRITES EN MATIERE DE POLICE DU COMMERCE DE REVENDEUR D'OBJETS MOBILIERS PAR LE DECRET DU 29 AOUT 1968, NE SAURAIT FAIRE PRESUMER, DU POINT DE VUE DU DROIT CIVIL, CELLE DE LA VENTE CONCLUE ENTRE LES PARTIES ;
QUE, DES LORS, EN SE BORNANT A DEDUIRE LA MAUVAISE FOI DU PREVENU DE L'ABSENCE DE RESPECT DES FORMALITES DE POLICE, SANS RELEVER EN QUOI CETTE IRREGULARITE DEMONTRAIT QUE LE REVENDEUR D'OBJETS MOBILIERS AVAIT EU CONNAISSANCE, ANTERIEUREMENT A SON ACQUISITION, DE CE QUE SON VENDEUR N'ETAIT PAS LE PROPRIETAIRE DU BIEN, LA COUR D'APPEL N'A PAS LEGALEMENT JUSTIFIE SA DECISION ;
" AUX MOTIFS, D'AUTRE PART, QUE LE PRIX DERISOIRE AUQUEL A ETE CONCLUE LA TRANSACTION LITIGIEUSE ET LE COMPORTEMENT ULTERIEUR DE L'INCULPE A L'EGARD DU PROPRIETAIRE DE LA STATUETTE SONT REVELATEURS DE LA CONSCIENCE QU'AVAIT, DES L'ACHAT, L'ANTIQUAIRE ;
QU'IL S'AGISSAIT D'UN OBJET VOLE AYANT UNE ORIGINE FRAUDULEUSE ;
QUE NE SAURAIENT ETRE ADMISES LES EXPLICATIONS DE X... QUI NIE AVOIR UNE QUELCONQUE COMPETENCE POUR L'EPOQUE ET LE LIEU D'ORIGINE DE LA STATUETTE EN QUESTION ;
QU'EN OUTRE, IL AVAIT ETE ECLAIRE, DES L'ORIGINE, PAR DAME Y... SUR LA VALEUR ELEVEE DE SON ACQUISITION ;
" ALORS QUE L'ACQUEREUR D'UN BIEN MOBILIER NE SAURAIT ETRE DECLARE COUPABLE DE RECEL LORSQUE LA REGULARITE DE SA POSSESSION ET SA BONNE FOI IMPLIQUENT LA REUNION DES CONDITIONS D'APPLICATION DE L'ARTICLE 2279 ALINEA 1 DU CODE CIVIL ;
QU'IL EST CONSTANT, EN L'ESPECE, QUE L'OBJET LITIGIEUX ETAIT D'UNE EXTREME RARETE ;
QUE SEUL LE MUSEE DU LOUVRE EN POSSEDAIT UN AUTRE EXEMPLAIRE ET QU'IL N'EXISTAIT SUR LUI AUCUNE LITTERATURE SPECIALISEE EN FRANCE ;
QU'EN OUTRE DAME Y... N'AVAIT INDIQUE AU PREVENU QUE LE PRIX DE SON ACQUISITION ETAIT DERISOIRE QUE POSTERIEUREMENT A CELLE-CI ;
QUE, DES LORS, EN SE BORNANT A DEDUIRE LA MAUVAISE FOI DU PREVENU DE SA PRETENDUE COMPETENCE EN SA QUALITE D'ANTIQUAIRE, POUR APPRECIER LA VALEUR DE L'OBJET, COMME DE L'AVIS FORMULE PAR DAME Y..., SANS RECHERCHER SI, DANS LES CONDITIONS PARTICULIERES DE L'ESPECE, LE PREVENU, MEME PROFESSIONNEL, N'AVAIT PAS PU PENSER AVOIR ACQUIS UN OBJET BANAL A LA FAIBLE VALEUR MARCHANDE, ET SANS RELEVER QUE L'AVIS DE DAME Y... ETAIT POSTERIEUR A LA TRANSACTION, LA COUR D'APPEL N'A PAS LEGALEMENT JUSTIFIE SA DECISION ;
ATTENDU QU'IL APPERT DE L'ARRET INFIRMATIF ATTAQUE QUE X..., ANTIQUAIRE, A ACHETE A Z... COURANT JUIN 1981 NOTAMMENT UN OBJET EN BRONZE ET UNE STATUETTE POUR UNE SOMME DE 3 500 F ;
QU'IL S'EST REVELE QUE LA STATUETTE, D'EPOQUE PHENICIENNE REPRESENTANT LE DIEU BAAL, AVAIT ETE VOLEE A A..., LEQUEL ESTIMAIT LA VALEUR DE CETTE PIECE A 350 000 F ;
QUE X... A ETE POURSUIVI DU CHEF DE RECEL ;
ATTENDU QUE, POUR DECLARER LE PREVENU COUPABLE DU DELIT REPROCHE, LA COUR D'APPEL ENONCE QUE X... NE SAURAIT EN AUCUNE FACON ETRE TENU POUR UN ACQUEREUR DE BONNE FOI POUVANT SE PREVALOIR DES DISPOSITIONS DE L'ARTICLE 2279 ALINEA 1ER DU CODE CIVIL DES L'INSTANT OU, AGISSANT EN QUALITE DE PROFESSIONNEL, ET NON DE SIMPLE PARTICULIER, IL N'A PAS RESPECTE LES OBLIGATIONS MISES A SA CHARGE PAR LE DECRET N° 68-786 DU 29 AOUT 1968, ARTICLE 2, 2°, QUI IMPOSE L'INSCRIPTION DE L'ACHAT SUR UN REGISTRE ET EXIGE LA PRODUCTION D'UNE CARTE D'IDENTITE ;
QUE FAUTE PAR LUI D'AVOIR REMPLI CES FORMALITES ELEMENTAIRES, IL DOIT ETRE CONSIDERE COMME DE MAUVAISE FOI ;
QUE LES JUGES AJOUTENT QUE LE PRIX DERISOIRE AUQUEL A ETE CONCLUE LA TRANSACTION LITIGIEUSE ET LE COMPORTEMENT ULTERIEUR DU PREVENU A L'EGARD DU PROPRIETAIRE DE LA STATUETTE SONT, DE SURCROIT, REVELATEURS DE LA CONSCIENCE QUE CET ANTIQUAIRE AVAIT DES L'ACHAT DE L'ORIGINE FRAUDULEUSE DE L'OBJET ;
ATTENDU QU'EN L'ETAT DE CES MOTIFS, LA COUR A JUSTIFIE SA DECISION ;
QU'EN EFFET, LES TRIBUNAUX APPRECIENT SOUVERAINEMENT, AU VU DES ELEMENTS DE PREUVE REGULIEREMENT SOUMIS AUX DEBATS CONTRADICTOIRES, LA REGULARITE DE LA POSSESSION ET LA BONNE FOI DONT PEUT SE PREVALOIR, EN APPLICATION DE L'ARTICLE 2279 ALINEA 1ER DU CODE CIVIL, L'ACQUEREUR D'UN BIEN MOBILIER ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ACCUEILLI ;
ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;
REJETTE LE POURVOI.