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Décisions

CA Chambéry, ch. civ. sect. 1, 13 mai 2014, n° 13/02726

CHAMBÉRY

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

LE TOIT DE L'EUROPE (Sarl)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Billy

Conseillers :

M. Leclercq, M. Morel

Avocats :

SCP FORQUIN REMONDIN, Me CIEVET

TGI de Bonneville, du 4 déc. 2013, n° 13…

4 décembre 2013

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS

Par acte notarié du 19 avril 2005 M. A... B... a vendu à la société de promotion immobilière LE TOIT DE L'EUROPE la pleine propriété d'un terrain situé commune des HOUCHES (74) cadastré section B n° 506 d'une surface de 761 m2 moyennant le prix principal de 320.000 euros, les parties ayant convenu qu'à titre de dation en paiement la société LE TOIT DE L'EUROPE remettrait au cédant, dans la future copropriété qui serait construite, un appartement de 106,11 m2 situé au premier étage avec les prestations figurant sur la notice descriptive annexée à l'acte, ainsi qu'un box de garage au sous-sol, cette dation en paiement devant être constatée par acte notarié, la livraison du bien devant intervenir au plus tard le 30 juin 2006.

En mai 2008 il a été constaté par huissier que l'appartement n'était pas achevé.

Par ordonnance du 27 octobre 2008 le juge des référés du tribunal de grande instance de BONNEVILLE a ordonné à la société LE TOIT DE L'EUROPE de terminer l'ensemble des travaux et de signer l'acte de vente et dation en paiement en l'étude de M° MILAN dans les 15 jours de la signification de l'ordonnance sous astreinte de 500 euros par jour de retard et l'a condamnée à payer à M. B... la somme de 36.000 euros à titre de provision à valoir sur son préjudice.

Deux projets successifs d'acte notarié ont été rédigés en 2009 mais la société LE TOIT DE L'EUROPE ne les a pas régularisés.

En 2013, le TRESOR PUBLIC a diligenté une procédure de saisie immobilière sur le bien dont s'agit.

Par acte du 30 juillet 2013 M. B... a assigné la société LE TOIT DU MONDE devant le tribunal de grande instance de BONNEVILLE auquel il demandait de dire que le jugement vaudrait acte de vente sur l'appartement et les garages litigieux et de condamner la société LE TOIT DU MONDE à lui payer la somme de 500.000 euros à titre de dommages et intérêts.

La société LE TOIT DU MONDE n'a pas constitué avocat.

Par jugement du 4 décembre 2013 le tribunal a débouté M. B... de toutes ses demandes.

M. B... a relevé appel de ce jugement.

La société LE TOIT DU MONDE, non assignée à personne, n'a pas constitué avocat, le présent arrêt sera donc rendu par défaut.

M. A... B... demande à la cour:

- de réformer le jugement

- de dire que l'arrêt à intervenir vaudra acte de vente à son profit sur les biens litigieux,

- de dire que l'arrêt à intervenir sera publié au service de la publicité foncière, aux frais avancés de M. B... à charge par la société LE TOIT DE L'EUROPE de lui rembourser la coût de ladite publication,

- de lui allouer la somme de 500.000 euros à titre de dommages et intérêts,

- de condamner la société LE TOIT DE L'EUROPE à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il fait valoir:

- que les conditions de la dation en paiement étaient réalisées en raison de son acceptation de l'appartement, même non complètement achevé, manifestée par la prise de possession qu'il en a faite sans opposition de la société LE TOIT DU MONDE,

- que la société LE TOIT DU MONDE en ne respectant pas son obligation de livrer l'appartement aux conditions fixées, soit dès la fin de l'année 2006, lui a causé un préjudice résultant du coût des travaux d'achèvement et de la perte de chance de percevoir des loyers, soit une somme globale de 500.000 euros.

MOTIFS

Attendu qu'en matière de dation en paiement d'une chose à construire, donc future, le transfert de propriété ne peut s'opérer que lorsque la chose est effectivement en mesure d'être livrée par celui qui doit la construire;

Qu'il ressort des énonciations du procès-verbal de constat d'huissier établi le 13 mai 2008 à la demande de M. B... que l'appartement à construire objet de la dation en paiement que lui a consentie la société LE TOIT DU MONDE dans l'acte du 19 avril 2005 n'était ni terminé, ni habitable, ce qui est confirmé par l'ordonnance de référé du 27 novembre 2008 qui a ordonné à la société LE TOIT DU MONDE de terminer l'ensemble des travaux;

Que M. B... ne rapporte pas la preuve de ce qu'il aurait pris possession de l'immeuble avec l'accord tacite de la société LE TOIT DU MONDE;

Que le bien n'a jamais été livré ni effectivement été en mesure de l'être;

Que le transfert de propriété au profit de M. B... ne s'est donc pas opéré, de sorte que ne peut être rendue une décision judiciaire valant vente du bien concerné;

Attendu que M. B... ne rapporte pas la preuve de la réalité et du montant des travaux qu'il prétend avoir réalisés;

Attendu, en revanche, qu'en ne livrant pas le bien alors qu'elle avait l'obligation contractuelle de le faire au plus tard le 30 juin 2006, la société LE TOIT DU MONDE n'a pas permis au transfert de propriété de s'opérer et a ainsi nécessairement fait perdre à M. B... une chance de percevoir des loyers en louant le bien, perte de chance qu'il y a lieu de chiffrer à 50.000 euros, somme au paiement de laquelle l'intimée doit être condamnée;

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement et par défaut,

Infirmant,

Condamne la société LE TOIT DU MONDE à payer à M. A... B... la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts,

Condamne la société LE TOIT DU MONDE à payer à M. A... B... la somme de 2.500 euros en dédommagement de ses frais irrépétibles de première instance,

Condamne la société LE TOIT DU MONDE aux dépens de première instance, distraits au profit de l'avocat de M. B... devant le premier juge,

Confirme, pour le surplus, le jugement entrepris en ses autres dispositions,

Condamne la société LE TOIT DU MONDE à payer à M. A... B... la somme de 2.500 euros en dédommagement de ses frais irrépétibles d'appel,

Rejette toute autre demande,

Condamne la société LE TOIT DU MONDE aux dépens d'appel, dont distraction au profit de la SCP FORQUIN REMONDIN.

Ainsi prononcé publiquement le 13 mai 2014 par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile, et signé par Claude BILLY, Président et Sylvie LAVAL, Greffier.