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Décisions

Cass. crim., 5 janvier 2017, n° 15-86.484

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Guérin

Rapporteur :

Mme Zerbib

Avocats :

SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Waquet, Farge et Hazan

Paris, du 5 oct. 2015

5 octobre 2015

Vu le mémoire en demande, commun aux demandeurs et le mémoire en défense produits ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 § 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 388, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt a requalifié les faits poursuivis sous la qualification de recel de vol en bande organisée en celle de recel d'abus de confiance pour ce qui concerne les documents antérieurs au 10 août 2006, déclaré M. X..., M. Y... et la société Nest As coupables de recel d'abus de confiance, condamné M. X..., M. Y... et la société Nest As chacun au paiement d'une amende délictuelle de 10 000 euros, condamné solidairement M. X..., M. Y... et la société Nest As à payer à M. Z... la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts et débouté M. X..., M. Y... et la société Nest As de leur demande au titre de l'article 472 du code de procédure pénale ;

" aux motifs que c'est à tort que le tribunal a requalifié les faits soumis à son appréciation sans avoir mis aux débats la qualification nouvelle envisagée ; qu'il convient donc, en application des dispositions de l'article 520 du code de procédure pénale, d'annuler le jugement entrepris et d'évoquer la cause ; que, sur la culpabilité et la peine, il est reproché aux prévenus des faits de recel en bande organisée ; que les éléments de la procédure ne permettent pas d'établir que les documents visés par la partie civile aient été l'objet de soustraction frauduleuse, dans la mesure où M. Z... a admis les avoir confiés à M. X... dans le cadre d'un audit en vue d'entamer des négociations financières ; qu'il est démontré que les documents, pour ceux datés d'avant le 10 août 2006, après leur remise, ont été utilisés sans lien avec l'usage pour lequel ils avaient été confiés à savoir permettre un audit et d'entamer des négociations financières, ont été produits dans le cadre d'une dénonciation au procureur de la République d'agissements pouvant être imputés à M. Z... visant à discréditer ce dernier après l'échec d'accords précédemment intervenus ; que les faits étant requalifiés en recel d'abus de confiance, cette infraction est caractérisée à l'encontre de MM. Y... et X..., véritables instigateurs de la procédure dans laquelle les documents ont été produits et de la société Nest As, pour le compte et au nom de laquelle ledit délit a été commis ; que les prévenus en seront déclarés coupables ; que la cour, tenant compte de la gravité des faits et des éléments connus de la personnalité des prévenus MM. Y... et X..., prononcera à l'encontre de chacun une peine délictuelle de 10 000 euros ; qu'il convient en conséquence de rejeter les demandes des prévenus sur le fondement de l'article 472 du code de procédure pénale ; que, sur l'action civile, la cour déclarera recevable la constitution de partie civile de M. Z... qui sollicite la condamnation de l'ensemble des prévenus solidairement au paiement d'une somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts et 1 000 euros chacun au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale en première instance et leur condamnation conjointement et solidairement au paiement de la somme complémentaire de 1 000 euros chacun au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale au titre des frais irrépétibles exposés en appel ; que la cour dispose des éléments pour fixer à 5 000 euros le préjudice subi par la partie civile et condamnera solidairement les prévenus à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts ; qu'il y aura lieu également d'allouer à la partie civile, pour les frais irrépétibles qu'elle a dû exposer tant en première instance qu'en cause d'appel, la somme de 2 000 euros au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale ; que M. Y..., M. X... seront condamnés à lui payer chacun la somme de 500 euros et la société Nest As celle de 1 000 euros ;

" alors que, s'il appartient aux juges répressifs de restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification, c'est à la condition de rien y ajouter, sauf acceptation expresse par le prévenu d'être jugé sur des faits non compris dans la poursuite ; qu'en retenant, pour requalifier les infractions imputées aux prévenus de recel d'abus de confiance, que « si les éléments de la procédure ne permett [aient] pas d'établir que les documents visés par la partie civile aient été l'objet de soustraction frauduleuse […] M. Z... a [vait] admis les avoir confiés à M. X... dans le cadre d'un audit en vue d'entamer des négociations financières » et que ces documents auraient « été utilisés, sans lien avec l'usage pour lequel ils avaient été confiés à savoir permettre un audit et d'entamer des négociations financières » cependant que la citation délivrée aux prévenus visait la soustraction frauduleuse de ces documents et qu'il ne résulte ni des mentions de l'arrêt ni des pièces de la procédure que les prévenus aient accepté expressément d'être jugés sur ces faits, la cour d'appel a statué au-delà des limites de sa saisine, en violation des textes susvisés " ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, § 1 et 7, de la Convention européenne des droits de l'homme, 311-1 et 321-1 du code pénal, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt a déclaré M. X..., M. Y... et la société Nest As coupables de recel d'abus de confiance, condamné M. X..., M. Y... et la société Nest As chacun au paiement d'une amende délictuelle de 10 000 euros, condamné solidairement M. X..., M. Y... et la société Nest As à payer à M. Z... la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts et débouté M. X..., M. Y... et la société Nest As de leur demande au titre de l'article 472 du code de procédure pénale ;

" aux motifs que c'est à tort que le tribunal a requalifié les faits soumis à son appréciation sans avoir mis aux débats la qualification nouvelle envisagée ; qu'il convient donc, en application des dispositions de l'article 520 du code de procédure pénale, d'annuler le jugement entrepris et d'évoquer la cause ; que, sur la culpabilité et la peine, il est reproché aux prévenus des faits de recel en bande organisée ; que les éléments de la procédure ne permettent pas d'établir que les documents visés par la partie civile aient été l'objet de soustraction frauduleuse, dans la mesure où M. Z... a admis les avoir confiés à M. X... dans le cadre d'un audit en vue d'entamer des négociations financières ; qu'il est démontré que les documents, pour ceux datés d'avant le 10 août 2006, après leur remise, ont été utilisés sans lien avec l'usage pour lequel ils avaient été confiés à savoir permettre un audit et d'entamer des négociations financières, ont été produits dans le cadre d'une dénonciation au procureur de la République d'agissements pouvant être imputés à M. Z... visant à discréditer ce dernier après l'échec d'accords précédemment intervenus ; que les faits étant requalifiés en recel d'abus de confiance, cette infraction est caractérisée à l'encontre de MM. Y... et X..., véritables instigateurs de la procédure dans laquelle les documents ont été produits et de la société Nest As, pour le compte et au nom de laquelle ledit délit a été commis ; que les prévenus en seront déclarés coupables ; que la cour, tenant compte de la gravité des faits et des éléments connus de la personnalité des prévenus MM. Y... et X..., prononcera à l'encontre de chacun une peine délictuelle de 10 000 euros ; qu'il convient en conséquence de rejeter les demandes des prévenus sur le fondement de l'article 472 du code de procédure pénale ; que, sur l'action civile, la cour déclarera recevable la constitution de partie civile de M. Z... qui sollicite la condamnation de l'ensemble des prévenus solidairement au paiement d'une somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts et 1 000 euros chacun au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale en première instance et leur condamnation conjointement et solidairement au paiement de la somme complémentaire de 1 000 euros chacun au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale au titre des frais irrépétibles exposés en appel ; que la cour dispose des éléments pour fixer à 5 000 euros le préjudice subi par la partie civile et condamnera solidairement les prévenus à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts ; qu'il y aura lieu également d'allouer à la partie civile, pour les frais irrépétibles qu'elle a dû exposer tant en première instance qu'en cause d'appel, la somme de 2 000 euros au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale ; que M. Y..., M. X... seront condamnés à lui payer chacun la somme de 500 euros et la société Nest As celle de 1 000 euros ;

" 1°) alors que le recel suppose une infraction préalable punissable ; que n'est pas constitutif d'un abus de confiance l'usage d'un bien strictement nécessaire à l'exercice des droits de la défense ; qu'en condamnant les prévenus du chef d'abus de confiance sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si la production des documents litigieux au soutien de la plainte déposée par la société Nest As n'était pas strictement nécessaire à l'exercice des droits de la défense de sorte qu'en l'absence d'infraction préalable punissable le recel n'était pas constitué, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision ;

" 2°) alors qu'en toute hypothèse, le recel n'est pas constitué par la production en justice d'un bien strictement nécessaire à l'exercice des droits de la défense ; qu'en condamnant les prévenus du chef de recel sans rechercher si la production des documents au soutien de la plainte déposée par la société Nest As n'était pas strictement nécessaire à l'exercice des droits de la défense, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision " ;

Sur le troisième moyen de cassation pris de la violation des articles 7 de la Convention européenne des droits de l'homme, 321-1 du code pénal, préliminaire, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

" en ce que l'arrêt a déclaré M. Y... et la société Nest As coupables de recel d'abus de confiance, condamné M. Y... et la société Nest As chacun au paiement d'une amende délictuelle de 10 000 euros, condamné M. Y... et la société Nest As à payer à M. Z..., solidairement avec M. X..., la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts et débouté M. Y... et la société Nest As de leur demande au titre de l'article 472 du code de procédure pénale

" aux motifs que c'est à tort que le tribunal a requalifié les faits soumis à son appréciation sans avoir mis aux débats la qualification nouvelle envisagée ; qu'il convient donc, en application des dispositions de l'article 520 du code de procédure pénale, d'annuler le jugement entrepris et d'évoquer la cause ; que, sur la culpabilité et la peine, il est reproché aux prévenus des faits de recel en bande organisée ; que les éléments de la procédure ne permettent pas d'établir que les documents visés par la partie civile aient été l'objet de soustraction frauduleuse, dans la mesure où M. Z... a admis les avoir confiés à M. X... dans le cadre d'un audit en vue d'entamer des négociations financières ; qu'il est démontré que les documents, pour ceux datés d'avant le 10 août 2006, après leur remise, ont été utilisés sans lien avec l'usage pour lequel ils avaient été confiés à savoir permettre un audit et d'entamer des négociations financières, ont été produits dans le cadre d'une dénonciation au procureur de la République d'agissements pouvant être imputés à M. Z... visant à discréditer ce dernier après l'échec d'accords précédemment intervenus ; que les faits étant requalifiés en recel d'abus de confiance, cette infraction est caractérisée à l'encontre de MM. Y... et X..., véritables instigateurs de la procédure dans laquelle les documents ont été produits et de la société Nest As, pour le compte et au nom de laquelle ledit délit a été commis ; que les prévenus en seront déclarés coupables ; que la cour, tenant compte de la gravité des faits et des éléments connus de la personnalité des prévenus MM. Y... et X..., prononcera à l'encontre de chacun une peine délictuelle de 10 000 euros ; qu'il convient en conséquence de rejeter les demandes des prévenus sur le fondement de l'article 472 du code de procédure pénale ; que, sur l'action civile, la cour déclarera recevable la constitution de partie civile de M. Z... qui sollicite la condamnation de l'ensemble des prévenus solidairement au paiement d'une somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts et 1 000 euros chacun au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale en première instance et leur condamnation conjointement et solidairement au paiement de la somme complémentaire de 1 000 euros chacun au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale au titre des frais irrépétibles exposés en appel ; que la cour dispose des éléments pour fixer à 5 000 euros le préjudice subi par la partie civile et condamnera solidairement les prévenus à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts ; qu'il y aura lieu également d'allouer à la partie civile, pour les frais irrépétibles qu'elle a dû exposer tant en première instance qu'en cause d'appel, la somme de 2 000 euros au titre de l'article 475-1 du code de procédure pénale ; que M. Y..., M. X... seront condamnés à lui payer chacun la somme de 500 euros et la société Nest As celle de 1 000 euros ;

" alors que la connaissance par le prévenu de l'origine frauduleuse des objets recelés doit être constatée au titre d'une motivation suffisante ; qu'en condamnant la société Nest As et M. Y... du chef de recel d'abus de confiance sans constater que ces derniers auraient eu connaissance du détournement prétendument commis par M. X..., la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision " ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que MM. X... et Y... et la société Nest ont été poursuivis, du chef de recel, pour avoir utilisé, dans une plainte adressée au procureur de la République et dirigée contre M. Z..., des documents qui avaient été dérobés à ce dernier ;

Attendu que, pour déclarer les prévenus coupables de cette infraction, la cour d'appel énonce que les documents litigieux ayant été remis par M. Z... à M. X... aux fins d'audit et de négociations financières, leur utilisation à un autre usage est constitutif d'abus de confiance ;

Attendu qu'en l'état de ces motifs, et dès lors que, d'une part, Y... n'a pas contesté, devant la cour d'appel, qu'il savait que la documentation n'avait été remise par M. Z... à M. X... qu'aux fins d'audit, d'autre part, les pièces détenues frauduleusement n'ont pas été utilisées pour les besoins de la défense des prévenus mais dans le but de conforter une procédure qu'ils ont eux-mêmes initiée, la cour d'appel a, sans excéder sa saisine, justifié sa décision ;

D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois ;

FIXE à 2 000 euros la somme globale que MM. X..., Y... et la société Nest As devront payer solidairement à M. Z... au titre de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;

DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale au profit des autres parties ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le cinq janvier deux mille dix sept ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.