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Décisions

Cass. com., 1 juillet 2003, n° 01-10.807

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Tricot

Rapporteur :

M. Sémériva

Avocat général :

M. Feuillard

Avocats :

SCP Thomas-Raquin et Bénabent, SCP Monod et Colin, Me Bertrand, SCP Boré, Xavier et Boré

Paris, du 20 déc. 2000

20 décembre 2000

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 20 décembre 2000), que M. X... est titulaire d'un brevet n° 85.11.964 couvrant un système propulsif bi-liquide d'un satellite artificiel et l'utilisation de ce système pour assurer l'éjection du satellite ; qu'estimant que trois satellites acquis par la société France télécom, par l'intermédiaire du Centre national d'études spatiales (le CNES), auprès de la société Matra Marconi space, depuis devenue société Astrium SAS, reproduisaient les caractéristiques de ce brevet, M. X... a fait pratiquer deux saisies contrefaçons, en 1991 et 1992 ; que l'huissier a restitué les documents originaux recueillis dans les locaux du CNES et de la société Matra Marconi space, aprés en avoir tiré des photocopies qu'il a annexées à son procès-verbal ; que par jugement du 10 mars 1994, passé en force de chose jugée, ces saisies ont été déclarées nulles, faute d'avoir été suivies d'une assignation au fond dans le délai de quinzaine fixé par l'article L. 615-5 du Code de la propriété intellectuelle ; qu'ayant exposé que la société France télécom avait acquis un quatrième satellite du même modèle, M. X... a été autorisé à faire pratiquer une saisie réelle des photocopies effectuées par l'huissier lors des opérations ayant donné lieu au jugement du 10 mars 1994 ; que la cour d'appel a annulé cette seconde saisie, pratiquée le 21 avril 1994, décidé que le brevet était valable, en ce que sa description impliquait la constitution d'un différentiel d'ergols préalablement au tir du satellite, et dit sans objet l'appel incident de M. X... portant notamment sur ce point ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir annulé les opérations de saisie-contrefaçon du 21 avril 1994, alors, selon le moyen :

1) que les copies et photocopies de documents effectuées par l'huissier pour en opérer la saisie réelle dans le cadre d'opérations de saisies-contrefaçon, copies qui ont été déposées au greffe du tribunal et dont la restitution a été ordonnée - la suite de l'annulation des saisies-contrefaçon, ne se trouvent pas invalidées par suite de cette annulation, qui ne porte que sur les constats et descriptions opérés par l'huissier ; qu'en retenant le contraire, la cour d'appel a violé l'article L. 615-5 du Code de la propriété intellectuelle ;

2) que le jugement du 10 mars 1994, qui a prononcé la nullité des saisies-contrefaçon effectuées les 6 décembre 1991 et 5 mars 1992, ayant, d'une part, jugé qu'il s'agissait de saisies réelles, et, d'autre part, ordonné la restitution et non la destruction des documents saisis, la cour d'appel, qui a retenu que ces documents feraient partie intégrante du procès-verbal de l'huissier et se trouveraient invalidés par l'annulation des opérations de saisie, a méconnu l'autorité de chose jugée attachée au jugement précité en violation de l'article 1351 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, que la nullité d'une saisie privant les constats et descriptions effectués par l'huissier de leur valeur probante, la cour d'appel a décidé à bon droit que de telles constatations, alors même qu'elles résultent de photocopies effectuées par cet huissier, sont en pareil cas dépourvues d'une telle valeur ;

Et attendu, d'autre part, que l'autorité de chose jugée attachée aux chefs du jugement du 10 mars 1994, qualifiant une saisie de réelle, prononçant sa nullité et ordonnant la restitution des documents saisis à cette occasion, ne confère pas une valeur probante propre aux photocopies de documents recueillis lors de la saisie annulée ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses deux branches ;

Et sur le second moyen :

Attendu que M. X... fait encore grief à l'arrêt d'avoir dit que la revendication 1 du brevet n° 85.11.964 couvrait un dispositif comportant un excédent d'ergols nécessairement constitué préalablement au tir du satellite, alors, selon le moyen, que l'étendue de la protection conférée par un brevet est déterminée par la teneur de la revendication et si celle-ci peut être interprétée par la description ou les dessins, il ne peut y être ajouté ; qu'en l'espèce, en retenant qu'il résultait de la description que l'excédent d'ergols devait être constitué préalablement au tir du satellite et que les moyens objets de la revendication 1 du brevet étaient donc limités à un tel mode de réalisation, bien que celui-ci n'ait pas été expressément revendiqué et qu'il ait été précisé dans la description que l'invention ne se limitait pas au mode de réalisation et d'utilisation ainsi décrit, la cour d'appel, qui a ainsi restreint la teneur de la revendication 1 à la seule hypothèse où le différentiel d'ergols est constitué avant le tir du satellite, à l'exclusion de celles où un différentiel serait constitué au cours de la vie du satellite, en ajoutant à cette revendication une caractéristique qu'elle ne comporte pas quant au moment où le différentiel d'ergols doit tre constitué, a, par là-même, violé les articles L.612-6 et L.613-2 du Code de la propriété intellectuelle ;

Mais attendu qu'en se fondant sur la description de l'invention pour procéder à l'interprétation nécessaire des revendications du brevet, la cour d'appel a fait l'exacte application des textes cités au moyen ; que celui-ci n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.