Cass. com., 15 septembre 2015, n° 14-14.587
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocats :
Me Copper-Royer, SCP Hémery et Thomas-Raquin
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 20 septembre 2011, pourvoi n° 10-20. 997) et les productions, que M. X, qui exerçait une activité de chercheur puis de conseiller scientifique du président au sein de la société Pierre Y médicaments, devenue Biomérieux Pierre Y puis Pierre Y, estimant que la société Pierre Y dermo-cosmétique, société du même groupe, exploitait plusieurs de ses inventions, a assigné ces deux sociétés aux fins, notamment, de se voir payer un complément de rémunération s'il était jugé que les inventions avaient le caractère d'inventions de mission ;
Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Attendu que M. X fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes en paiement de rémunération supplémentaire relative aux brevets n° 88 15575, 89 04815 et 90 12811 alors, selon le moyen, qu'en affirmant, par motifs éventuellement adoptés, que s'agissant de ces brevets, il n'établirait pas « que les inventions en cause sont remarquables soit par le caractère novateur des produits soit par l'importance du chiffre d'affaires généré alors même que la fréquence des brevets laisse à penser que les inventions s'inscrivent au contraire dans la continuité de l'état de la recherche antérieure » et qu'il ne serait « pas démontré le caractère extraordinaire que ces inventions représentent pour la société s'agissant d'une entreprise dont l'objet même est la recherche en matière pharmaceutique et dermo cosmétique », sans donner les raisons pour lesquelles elle estimait que les éléments de preuve produits par M. X, relatifs notamment aux chiffres d'affaires réalisés par chacun des produits en cause, ne seraient pas de nature à établir l'intérêt exceptionnel de ces inventions pour l'entreprise, cependant qu'elle constatait elle-même que les applications industrielles générées par les brevets présentaient « indéniablement un intérêt économique non négligeable pour l'entreprise » et que « sur le terrain scientifique, les inventions sont à l'origine de produits qui durent et ne sont pas de simples innovations marketing », la cour d'appel a entaché sa décision d'une insuffisance de motivation, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt relève, par motifs adoptés, que, s'il est indéniable que les applications industrielles générées par les brevets n° 88 15575, 89 04815 et 90 12811 présentent un intérêt économique non négligeable pour l'entreprise et que, sur le terrain scientifique, les produits issus de ces inventions ne sont pas de simples innovations marketing mais sont présents sur le marché durablement, M. X, cependant, n'établit pas, notamment par comparaison avec d'autres produits du groupe ou avec des produits comparables concurrents, que les inventions en cause sont remarquables, soit par le caractère novateur des produits, soit par l'importance du chiffre d'affaires généré, quand la fréquence des brevets laisse à penser que les inventions s'inscrivent au contraire dans la continuité de l'état de la recherche antérieure ; qu'il relève, en outre, que n'est pas démontré le caractère extraordinaire que ces inventions représentent pour la société Pierre Y, dont l'objet même de l'activité est la recherche en matière pharmaceutique et dermo-cosmétique ; qu'en cet état, la cour d'appel, qui a souverainement estimé que les éléments de preuve fournis par M. X ne suffisaient pas à caractériser l'intérêt exceptionnel, pour l'entreprise, des brevets n° 88 15575, 89 04815 et 90 12811, au sens de la convention collective nationale de l'industrie pharmaceutique dans sa rédaction applicable au litige, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen, pris en sa quatrième branche :
Vu l'article 7 du code de procédure civile ;
Attendu que pour rejeter la demande de rémunération supplémentaire formée par M. X au titre du brevet n° 91 12044, l'arrêt retient que ce dernier est relatif au produit Diroseal, lequel a été abandonné en 1997 après la délivrance du brevet européen EP 0606386 qui s'est substitué au titre français ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les sociétés Pierre Y et Pierre Y dermo-cosmétique s'étaient bornées à indiquer que le brevet français avait été abandonné en 1997, à la suite de la délivrance du brevet européen désignant la France qui s'était substitué à lui, la cour d'appel, qui s'est fondée sur un élément de fait qui n'était pas dans le débat, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de rémunération supplémentaire formée par M. X au titre du brevet n° 91 12044, l'arrêt rendu le 6 décembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.