Cass. com., 27 novembre 1978, n° 77-11.102
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Vienne
Rapporteur :
M. Jonquères
Avocat général :
M. Laroque
Avocat :
Me Riché
SUR LE PREMIER MOYEN, PRIS EN SES DEUX BRANCHES :
ATTENDU QUE, SELON L'ARRET INFIRMATIF ATTAQUE (PARIS, 20 JANVIER 1977) LA SOCIETE TOYAMA. TITULAIRE DU BREVET FRANCAIS N° 1.521.751 DEPOSE LE 25 JANVIER 1963 CONCERNANT L'UTILISATION D'UN ANTIBIOTIQUE "LA NITROVINE" COMME STIMULANT DE CROISSANCE DANS L'ALIMENTATION DU BETAIL, A CONCEDE, LE 1ER JANVIER 1963 A LA SOCIETE AMERICAN CYANAMID LA LICENCE EXCLUSIVE DE CE BREVET ;
QUE CES SOCIETES, ESTIMANT QUE LA SOCIETE "EXPANDIA" AVAIT MIS EN VENTE DES PRODUITS UTILISANT LA "NITROVINE" POUR ACCELERER LA CROISSANCE DES ANIMAUX, ONT POURSUIVI CETTE DERNIERE EN CONTREFACON ;
ATTENDU QU'IL EST REPROCHE A LA COUR D'APPEL D'AVOIR DECLARE VALABLE CE BREVET, ALORS, SELON LE POURVOI, QU'IL NE POUVAIT PORTER SUR UN PRODUIT PHARMACEUTIQUE DONT L'ACTION N'EST PAS SEULEMENT CURATIVE MAIS EGALEMENT PREVENTIVE EN SORTE QUE LA COUR D'APPEL SE DEVAIT ENCORE DE RECHERCHER, AINSI QUE L'Y INVITAIENT LES CONCLUSIONS DE LA SOCIETE EXPANDIA, LAISSEES SUR CE POINT SANS REPONSE, SI L'ACTION DUDIT PRODUIT SUR LA CROISSANCE DES ANIMAUX N'ETAIT PAS INTIMEMENT LIEE A SON EFFET SUR LA FLORE INTESTINALE DE CEUX-CI, ET ALORS, D'AUTRE PART, QUE LA COUR D'APPEL SE DEVAIT EGALEMENT EN TOUTE HYPOTHESE, DE RECHERCHER SI, AU REGARD NOTAMMENT DES PROPORTIONS INDIQUEES DANS LE BREVET, LE MONOPOLE ATTRIBUE PAR CE TITRE NE VENAIT PAS PARALYSER SIMULTANEMENT ET NECESSAIREMENT, DANS DES CONDITIONS ILLEGALES, L'UTILISATION DU MEME PRODUIT A DES FINS MEDICAMENTEUSES ;
MAIS ATTENDU, D'UNE PART, QUE L'ARRET ENONCE, A BON DROIT, QUE SI UN PRODUIT DOIT ETRE TENU POUR UN MEDICAMENT DANS SON APPLICATION A LA LUTTE CONTRE LES MALADIES, L'ADDITION DE CE PRODUIT A DES ALIMENTS DESTINES AUX ANIMAUX EN VUE DE FAVORISER LEUR CROISSANCE DOIT ETRE REGARDEE COMME UNE APPLICATION INDUSTRIELLE, UNE TELLE APPLICATION AYANT POUR FIN, NON DE REMEDIER A UNE MALADIE, MAIS SEULEMENT DE STIMULER LE PROCESSUS DE CROISSANCE, CE QUI EST LE CAS EN L'ESPECE ;
QUE PARTANT DES DOCUMENTS VERSES AUX DEBATS, LA COUR D'APPEL, QUI A RETENU QUE LES ANTIBIOTIQUES EMPLOYES ONT UNE ACTION DIRECTE SUR L'ASSIMILATION INTESTINALE INDEPENDAMMENT DE L'EFFET SUR LA FLORE, A REPONDU AUX CONCLUSIONS ALLEGUEES ;
ATTENDU, D'AUTRE PART, QU'IL NE RESULTE NI DE L'ARRET, NI DES CONCLUSIONS DE LA SOCIETE EXPANDIA, QUE CETTE DERNIERE AIT SOUTENU DEVANT LA COUR D'APPEL QUE LE FAIT DE BREVETER L'UTILISATION INDUSTRIELLE DANS UNE CERTAINE PROPORTION DE LA NITROVINE AVAIT POUR CONSEQUENCE DE CONFERER AU PROPRIETAIRE DU BREVET UN MONOPOLE LUI PERMETTANT D'INTERDIRE SON EMPLOI PHARMACEUTIQUE ;
QUE CET ARGUMENT FORMULE POUR LA PREMIERE FOIS DEVANT LA COUR DE CASSATION, EST NOUVEAU, ET MELANGE DE FAIT ET DE DROIT ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN, DENUE DE FONDEMENT EN SA PREMIERE BRANCHE EST IRRECEVABLE EN SA SECONDE BRANCHE ;
SUR LE DEUXIEME MOYEN : ATTENDU QU'IL EST ENCORE FAIT GRIEF A L'ARRET DEFERE D'AVOIR ECARTE L'ANTERIORITE LUCKEY EN SE FONDANT SUR UN AFFIDAVIT KISER ET SUR UN AFFIDAVIT LUCKEY DONT ELLE N'INDIQUE PAS LES DATES ET QUI SONT DES DOCUMENTS POSTERIEURS AU BREVET AUQUEL ELLE ETAIT OPPOSEE, ALORS QUE, SELON LE POURVOI, L'EXAMEN D'UNE ANTERIORITE OPPOSEE A UN BREVET NE PEUT PRENDRE EN CONSIDERATION QUE DES ELEMENTS DU DOMAINE PUBLIC ANTERIEUR AUDIT BREVET ET NE PEUT SE FONDER SUR DES DOCUMENTS OU DES REVELATIONS POSTERIEURES A CELUI-CI OU DONT LA DATE N'EST PAS PRECISEE ;
MAIS ATTENDU QU'APRES AVOIR CONSTATE QUE LE RAPPORT LUCKEY DE 1958, NE POUVAIT SERVIR DE FONDEMENT A UNE REGLE GENERALE CONCERNANT L'EFFET STIMULATEUR DES ANTIBIOTIQUES, LA COUR D'APPEL N'A FAIT QU'USER DE SON POUVOIR SOUVERAIN D'APPRECIER LE CREDIT A ACCORDER A CE RAPPORT EN RETENANT DES AFFIDAVITS VERSES AUX DEBATS, DONT L'UN EMANAIT DE SON AUTEUR, LES ELEMENTS DE NATURE A LA COMPLETER ET A EN ECLAIRER LE SENS ET LA PORTEE QUELLES QUE SOIENT LES DATES AUXQUELLES ILS ONT ETE ETABLIS ;
QUE LE MOYEN N'EST PAS FONDE ;
SUR LE TROISIEME MOYEN, PRIS EN SES DEUX BRANCHES : ATTENDU QU'IL EST ENFIN REPROCHE A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR DECLARE LA SOCIETE EXPANDIA CONTREFACTRICE DU BREVET TOYAMA, AUX MOTIFS QUE, SI LE PRODUIT VENDU PAR LADITE SOCIETE EXPANDIA ECHAPPE AUX PREVISIONS DE CE BREVET S'AGISSANT DE LA PROPORTION DE NITROVINE QUI Y EST SPECIFIEE, L'APPLICATION DE LA REGLEMENTATION EN VIGUEUR IMPOSAIT AUX NEGOCIANTS TRAITANT AVEC LA MEME SOCIETE EXPANDIA UNE DILUTION CONDUISANT NECESSAIREMENT AUX PROPORTIONS DUDIT BREVET, QU'AINSI LES VENTES DE NITROVINE PAR LA SOCIETE EXPANDIA NE POUVAIENT SE VOIR ATTRIBUER UNE DESTINATION MEDICAMENTEUSE, MAIS CORRESPONDAIENT NECESSAIREMENT AUX STIMULANTS DE CROISSANCE BREVETES, ALORS, SELON LE POURVOI, D'UNE PART, QU'A LA DATE DES SAISIES ET MEME A LA DATE DE L'ASSIGNATION, LA REGLEMENTATION A LAQUELLE LA COUR D'APPEL SE REFERE ET QUI EST UN DECRET DU 28 NOVEMBRE 1973, N'ETAIT PAS APPLICABLE, ALORS, D'AUTRE PART, QUE LA DILUTION PREVUE PAR CETTE REGLEMENTATION S'APPLIQUE, CONTRAIREMENT A CE QU'ENONCE L'ARRET, A UNE UTILISATION MEDICAMENTEUSE DE LA NITROVINE QUI N'ETAIT PAS AINSI EN L'ESPECE NECESSAIREMENT EXCLUE, S'AGISSANT DES VENTES DE LA SOCIETE EXPANDIA ;
MAIS ATTENDU, D'UNE PART, QU'A LA DATE DES SAISIES ET DE L'ASSIGNATION, UNE CIRCULAIRE DU 24 SEPTEMBRE 1970 DU SYNDICAT NATIONAL DES PRODUCTEURS D'ADDITIFS ALIMENTAIRES A DIFFUSE UN COMMUNIQUE DU SERVICE DE LA REPRESSION DES FRAUDES PORTANT A LA CONNAISSANCE DES PROFESSIONNELS UN "AVIS" DE LA COMMISSION INTERMINISTERIELLE ET INTERPROFESSIONNELLE DE L'ALIMENTATION ANIMALE INSTITUEE PAR ARRETE DU MINISTERE DE L'AGRICULTURE DU 22 FEVRIER 1960 PRECISANT AUX DETAILLANTS QUE LA NITROVINE, EN TANT QUE FACTEUR DE CROISSANCE DES ANIMAUX, NE DEVAIT ETRE UTILISEE QUE DILUEE DANS LA PROPORTION DE DOUZE PARTIES PAR MILLION ;
QU'EN SE REFERANT "A LA REGLEMENTATION EN VIGUEUR", CE SONT CES DIRECTIVES DE L'AUTORITE ADMINISTRATIVE QUE LA COUR D'APPEL A NECESSAIREMENT ENTENDU VISER ET NON COMME LE PRETEND LE MOYEN, LES DISPOSITIONS DU DECRET DU 28 NOVEMBRE 1973 INAPPLICABLES A LA CAUSE ;
ATTENDU D'AUTRE PART, QUE LA COUR D'APPEL N'AYANT PU SE REFERER AU DECRET PRECITE, LE GRIEF QUI LUI EST FAIT TIRE DE LA MECONNAISSANCE DE SES DISPOSITIONS MANQUE EN FAIT ;
QUE LE MOYEN, NON FONDE EN SA PREMIERE BRANCHE MANQUE EN FAIT EN SA SECONDE BRANCHE ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 20 JANVIER 1977 PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS.