Cass. crim., 24 mars 1969, n° 67-93.576
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. COMTE
Rapporteur :
M. GAGNE
Avocat général :
M. TOUREN
Avocat :
Me TALAMON ET ROUSSEAU
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION PRESENTE POUR X... ET PRIS DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 408 DU CODE PENAL, DE L'ARTICLE 1382 DU CODE CIVIL, ENSEMBLE VIOLATION DE L'ARTICLE 485 DU CODE DE PROCEDURE PENALE, POUR DEFAUT ET CONTRADICTION DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE, "EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A DECLARE LE DEMANDEUR COUPABLE D'ABUS DE CONFIANCE, AU MOTIF QU'IL AURAIT CONSERVE PAR DEVERS LUI DES APPAREILS TELEVISEURS, QUI NE LUI AURAIENT ETE REMIS QU'A TITRE DE DEPOT ;
" ALORS QU'IL RESULTE DES PROPRES CONSTATATIONS DE L'ARRET, QUE LE CONTRAT INTERVENU ENTRE LA PARTIE CIVILE ET LE DEMANDEUR NE SE RATTACHAIT A AUCUN DES CONTRATS PREVUS A L'ARTICLE 408 DU CODE PENAL ;
QU'IL S'AGISSAIT D'UN CONTRAT COMPLEXE, QUE LA COUR ELLE-MEME A QUALIFIE, DANS UN AUTRE DE SES MOTIFS, DE "VENTE PROTESTA VE", ET, QUE, D'AUTRE PART, IL NE RESULTE D'AUCUNE DES CONSTATATIONS DE L'ARRET QUE LE DEMANDEUR AIT ETE L'OBJET D'UNE MISE EN DEMEURE PREALABLE " ;
ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE LES ETABLISSEMENTS Y... ONT, LES 3 ET 7 NOVEMBRE 1961, LIVRE A X..., PRESIDENT DIRECTEUR GENERAL DE LA SOCIETE X... ET CIE, QUARANTE APPAREILS DE TELEVISION ;
QUE LES BONS DE CONSIGNATION QUI ACCOMPAGNAIENT CES APPAREILS INDIQUAIENT QUE CE MATERIEL ETAIT MIS A LA DISPOSITION DE X... TOUT EN DEMEURANT LA PROPRIETE DES ETABLISSEMENTS Y... PENDANT UN MOIS, SOIT JUSQU'AU 30 NOVEMBRE 1961 ;
QUE LES BONS PRECISAIENT, EN OUTRE, QU'A L'EXPIRATION DE CETTE PERIODE, X... S'ENGAGEAIT SOIT A RESTITUER LE MATERIEL EN PARFAIT ETAT, SOIT A LE PAYER, AU RECU D'UNE FACTURE ETABLIE AUX CONDITIONS GENERALES DE VENTE ;
ATTENDU QUE LES JUGES DU FOND ONT INTERPRETE CETTE CONVENTION COMME CONSTITUANT UN CONTRAT DE DEPOT JUSQU'AU 30 NOVEMBRE 1961, CONTRAT QUI POUVAIT, A PARTIR DE CETTE DATE, DEVENIR UN CONTRAT DE VENTE SI X... EN MANIFESTAIT LE DESIR ;
QU'AYANT CONSTATE QUE X... N'AVAIT PAS FAIT CONNAITRE A CETTE DATE AUX ETABLISSEMENTS Y... QU'IL DESIRAIT ACHETER CES APPAREILS ET QU'IL EN DEMANDAIT LA FACTURATION, LES JUGES D'APPEL EN ONT DEDUIT QUE LE CONTRAT DE DEPOT CONTINUAIT A ETRE LE SEUL TITRE EN VERTU DUQUEL X... DETENAIT CES APPAREILS POSTERIEUREMENT AU 30 NOVEMBRE ET QUE, DES LORS, IL S'ETAIT RENDU COUPABLE D'ABUS DE CONFIANCE EN VENDANT CES APPAREILS SANS AVISER LES ETABLISSEMENTS Y..., SANS EN DEMANDER LA FACTURATION, ET EN EN DETOURNANT LE PRIX ;
ATTENDU QUE LA DETERMINATION DU CONTRAT SUR LA VIOLATION DUQUEL REPOSE L'ABUS DE CONFIANCE ECHAPPE AU CONTROLE DE LA COUR DE CASSATION QUAND ELLE RESULTE, COMME EN L'ESPECE, D'UNE INTERPRETATION SANS DENATURATION DU CONTRAT, FONDEE SUR UNE APPRECIATION SOUVERAINE DE LA VOLONTE DES PARTIES ;
QUE, D'AUTRE PART, L'ARTICLE 408 DU CODE PENAL N'EXIGE PAS LA MISE EN DEMEURE DU DEPOSITAIRE POUR CONSTITUER LE DELIT D'ABUS DE CONFIANCE ;
QUE CE DELIT EXISTE PAR LE SEUL FAIT DU DETOURNEMENT DES OBJETS CONFIES ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN NE SAURAIT ETRE ADMIS ;
SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION PROPOSE POUR LA SOCIETE FRANCAISE DE RADIO ET DE TELEVISION, PARTIE CIVILE, ET PRIS DE LA VIOLATION ET FAUSSE APPLICATION DES ARTICLES 405 DU CODE PENAL, 1382 DU CODE CIVIL ET 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, DEFAUT DE MOTIFS ET MANQUE DE BASE LEGALE, "EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE, APRES AVOIR CONDAMNE LE PREVENU POUR ABUS DE CONFIANCE, L'A RELAXE DES FINS DE LA POURSUITE POUR ESCROQUERIE ET A DEBOUTE LA DEMANDERESSE DE SON ACTION CIVILE DE CE CHEF, AU MOTIF QUE SI, POUR OBTENIR DES AVANCES DE FONDS QUI POUR UNE PERIODE DONNEE N'ONT PAS DEPASSE 600000 FRANCS A 1200000 FRANCS, X... A COMMUNIQUE A LA DEMANDERESSE DES BILANS ENTACHES DE FAUSSETE, CETTE PRODUCTION N'AURAIT PAS ETE DETERMINANTE DE LA REMISE DES FONDS, ETANT DONNE QUE LA FAUSSETE DES BILANS PROVENAIT DE LA PRESENTATION COMME SINCERES DES VENTES FICTIVES QUI DISSIMULAIENT LES AVANCES DE LA DEMANDERESSE, QUI, PAR CONSEQUENT EN CONNAISSAIT LA FAUSSETE ;
" ALORS QUE LE JUGE DU FOND NE POUVAIT SANS SE CONTREDIRE CONSTATER LA MANOEUVRE QUE CONSTITUE LA PRESENTATION D'UN BILAN FAUX POUR OBTENIR UN CREDIT, ET EN NIER LE CARACTERE DETERMINANT, ET QU'IL IMPORTERAIT PEU QUE LA DEMANDERESSE EUT CONNU LE VICE DU BILAN QUI LUI ETAIT PRESENTE POUR OBTENIR D'ELLE UN CREDIT ;
ET QUE L'INFRACTION EST CONSTITUEE QUAND BIEN MEME LA VICTIME SAIT QU'ELLE N'EST PAS TENUE DE PAYER ;
" ALORS QU'IL RESULTE DES FAITS CONSTATES QUE SI DES AVANCES AVAIENT ETE CONSENTIES AVANT LA PRODUCTION DES BILANS, ELLES N'ATTEIGNAIENT PAS ALORS PLUS DE 226000 FRANCS ET QUE LA PRODUCTION DES BILANS FAUX A DETERMINE LA DEMANDERESSE A LES PORTER A "600000 FRANCS ET 1200000 FRANCS " ;
" ALORS QUE LA FAUSSETE CONSTATEE DES BILANS AUX TERMES DE L'ARRET QUI CONDAMNE POUR BANQUEROUTE S'ETEND A L'ENSEMBLE DE CES BILANS, QUI MASQUENT LES DETOURNEMENTS DE FONDS, DES ABUS DE BIENS, DES FALSIFICATIONS D'APPORTS, AINSI QUE LE RECOURS A D'AUTRES CREANCIERS QUE LA DEMANDERESSE (BANQUES, Z... ET A...) SI BIEN QUE LE PASSIF DU PREVENU EST DE 2600000 FRANCS TANDIS QUE SON ACTIF EST DE 800000 FRANCS, ET QU'EN DEFINITIVE LA PART, CONNUE DE LA DEMANDERESSE DANS SES OPERATIONS QUE LE JUGE DU FOND LIMITE A 1200000 FRANCS POUR UNE PERIODE DONNEE APPARAIT DERISOIRE, D'OU IL SUIT, QUE LA DEMANDERESSE A IGNORE POUR LA PLUS GRANDE PART LA FAUSSETE DES BILANS DONT LE CARACTERE DETERMINANT EST DES LORS CONSTANT ;
" ALORS ENFIN QUE LE JUGE DU FOND NE REPOND PAS AUX CONCLUSIONS QUI FONT ETAT DE CE QUE LA DEMANDERESSE A NECESSAIREMENT IGNORE CETTE FAUSSETE EN CE QU'ELLE RESULTE DES OPERATIONS FRAUDULEUSES FAITES PAR LES PREVENUS EUX-MEMES, OU AVEC D'AUTRES QUE LUI " ;
ATTENDU QUE L'ARRET CONSTATE QUE Y..., PRESIDENT DIRECTEUR GENERAL DE LA SOCIETE FRANCAISE DE RADIO ET DE TELEVISION, GRACE NOTAMMENT A UN TRAFIC DE TRAITES DE COMPLAISANCE, A PROCURE DES FONDS IMPORTANTS A X... PENDANT PLUSIEURS ANNEES ;
QUE SI, EN FEVRIER 1960, Y... A RECLAME A X... LA COMMUNICATION DE SES BILANS POUR 1958 ET 1959, LES AVANCES CONSENTIES ATTEIGNAIENT DEJA A CETTE EPOQUE 226534 FRANCS ;
QUE, BIEN QU'ECLAIRE SUR LA FAUSSETE DE CES BILANS AINSI QUE SUR L'INEXACTITUDE DE CELUI DE 1960 PAR UNE EXPERTISE COMPTABLE, BIEN QUE TRES AU FAIT, EGALEMENT, DE LA SITUATION FINANCIERE DESESPEREE DE X..., Y... N'EN A PAS MOINS CONTINUE, PAR LA SUITE, A AVANCER DES FONDS A X... DONT LA BELLE FAMILLE EST FORTUNEE ;
QUE DE CES FAITS, LES JUGES D'APPEL ONT CONCLU QUE LA PRESENTATION DES FAUX BILANS N'AVAIT PU DETERMINER Y..., QUI EN CONNAISSAIT LA FAUSSETE, A CONSENTIR DES PRETS A X..., ET QUE, DES LORS, EN L'ABSENCE DE TOUTE AUTRE MANOEUVRE FRAUDULEUSE, LE DELIT D'ESCROQUERIE N'ETAIT PAS ETABLI ;
ATTENDU QUE S'IL EST EXACT QUE LA PRESENTATION DE FAUX BILANS PUISSE CONSTITUER UNE MANOEUVRE FRAUDULEUSE CARACTERISANT LE DELIT D'ESCROQUERIE, C'EST A LA CONDITION QUE CETTE MANOEUVRE AIT ETE DETERMINANTE DE LA REMISE DES FONDS ;
QUE LA COUR D'APPEL AYANT, PAR DES ENONCIATIONS QUI NE SONT ENTACHEES NI D'INSUFFISANCE, NI DE CONTRADICTION CONSTATE QUE LA COMMUNICATION DES FAUX BILANS AVAIT ETE ETRANGERE AUX PRETS CONSENTIS, SA DECISION EST LEGALEMENT JUSTIFIEE ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN N'EST PAS FONDE ;
ET ATTENDU QUE L'ARRET EST REGULIER EN LA FORME ;
REJETTE LES POURVOIS.