Cass. com., 29 septembre 2015, n° 14-14.572
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Mouillard
Avocats :
Me Bertrand, Me Haas
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que M. X est titulaire des marques communautaires semi-figurative « PhytoQuant l'énergie par les plantes » n° 4 948 873 et verbale « Quanta » n° 4 948 733, déposées le 9 mars 2006 et enregistrées, respectivement, les 20 avril 2007 et 21 janvier 2009, pour désigner, notamment, les compléments alimentaires à usage médical, produits diététiques à usage médical, produits de complémentation et supplémentation alimentaire à base de substances vitaminiques et minérales ; que ces marques sont exploitées par la société N. Frassanito & Cie (la société X), exerçant sous le nom commercial Phytoquant, qui a engagé une action en concurrence déloyale contre un de ses anciens distributeurs, la société Biofficine, pour avoir référencé les produits Phytoquant sur des sites internet en dirigeant la clientèle sur son propre site ; que cette société a été condamnée de ce chef, par arrêt définitif du 23 février 2011 de la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; qu'estimant qu'en mentionnant la marque « PhytoQuant » et diverses déclinaisons de la marque « Quanta » sur les sites internet « acheter-moins-cher.com », « biofficine.com », « wipiwin.com » et « lvdlinc.com », les sociétés Acheter moins cher.com, Biofficine, Lvdlinc-parisglam.fr et M. Y portaient atteinte aux marques dont il est titulaire, M. X a fait dresser des procès-verbaux de constat d'huissier de justice les 29 mai 2009, 29 septembre 2009 et 23 mars 2010, avant de les assigner en contrefaçon de marque ; que la société Lvdlinc-parisglam.fr a appelé en garantie la société C2B, devenue la société Kwanko ;
Sur le premier moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 455 du code de procédure civile ;
Attendu que pour rejeter l'action en contrefaçon de la marque communautaire semi-figurative « PhytoQuant l'énergie par les plantes » n° 4 948 873, formée par M. X contre les sociétés Biofficine, Acheter moins cher.com, Lvdlinc-parisglam.fr et M. Y, l'arrêt, après avoir relevé que les recherches par mots-clés effectuées par l'huissier de justice sur le site Google, à l'occasion des constats des 29 mai 2009, 29 septembre 2009 et 23 mars 2010, n'avaient porté que sur les termes « quantavie », « quantarelax », « quantakel », « quantaroyale », « quantaphylle », « quantadraine », « quantavital », « quantaflore », « quantadyn », « quantasmodium » et « quantamag », à l'exclusion de toute recherche portant sur le signe « PhytoQuant l'énergie par les plantes » ou sur le seul signe « phytoquant », retient qu'il ressort du texte complet figurant sur le site de la société Biofficine, auquel renvoie le lien hypertexte accompagnant le texte incriminé par M. X s'affichant sur la page de résultats du procès-verbal du 29 mai 2009, que cette société, par la référence au terme « Phytoquant », loin de chercher à créer une confusion dans l'esprit du consommateur concerné, informe ce dernier qu'elle ne commercialise plus les produits de la marque « Phytoquant » et le renvoie à s'adresser à la société éponyme qui les commercialise, de sorte que le consommateur moyennement attentif ne sera pas amené à croire que la société Biofficine est toujours économiquement liée à M. X ;
Qu'en statuant ainsi, sans répondre aux conclusions de M. X qui soutenait que l'exploitation illicite de la marque était établie, notamment, par le procès-verbal de constat du 23 mars 2010 faisant apparaître la présence du mot « phytoquant » dans les termes de référencement des pages de résultat « produits seniors » et « produits vitalité tonus », la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 9, 1, b) du règlement (CE) n° 40/94 du 20 décembre 1993, codifié par le règlement (CE) n° 207/2009 du 26 février 2009 sur la marque communautaire, et l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle ;
Attendu que pour statuer comme il fait, l'arrêt, après avoir relevé qu'il ressortait des impressions d'écran figurant au procès-verbal du 29 mai 2009 que le texte, incriminé par M. X, apparaissant sur la page de résultats des recherches par les mots-clés « quantakel », « quantaflore », « quantadyn », « quantasmodium », « quantaphylle » et « quantamag », n'était que l'abstract établi automatiquement par le moteur de recherche Google, retient que, dans le texte complet affiché sur le site de la société Biofficine accessible par le lien hypertexte, la référence, par cette société, au terme « Phytoquant » n'est pas susceptible, malgré la similitude des produits et des signes, d'engendrer un risque de confusion dans l'esprit du consommateur moyennement attentif, lequel, renvoyé à s'adresser à la société Phytoquant commercialisant les produits sous cette marque, ne sera pas amené à croire que la société Biofficine est toujours économiquement liée à M. X ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté l'affichage, en première position, sur les pages de résultats de recherches effectuées par des mots-clés désignant des compléments alimentaires, d'un texte, fût-il incomplet, qui mentionnait un signe similaire à la marque invoquée et dirigeait, par le lien hypertexte, le consommateur vers le site sur lequel cette société présentait ses propres compléments alimentaires, et retenu la similitude des signes en présence et des produits, ce dont il résultait l'existence d'un risque de confusion dans l'esprit du public, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés ;
Et sur le second moyen, relevé d'office après avertissement délivré aux parties :
Vu l'article 9, 1, b) du règlement (CE) n° 40/94 du 20 décembre 1993, codifié par le règlement (CE) n° 207/2009 du 26 février 2009 sur la marque communautaire, l'article L. 713-3 du code de la propriété intellectuelle et l'article 620 du code de procédure civile ;
Attendu que pour rejeter l'action en contrefaçon de la marque communautaire « Quanta » n° 4 948 733 formée par M. X contre les sociétés Biofficine, Acheter moins cher.com, Lvdlinc-parisglam.fr et M. Y, l'arrêt retient que, sur les plans visuel et phonétique, les signes incriminés produisent une impression d'ensemble différente de la marque revendiquée et que, s'ils ont en commun, avec celle-ci, la séquence d'attaque « Quanta », ils forment cependant des termes dans lesquels cette dernière ne se distingue pas de la séquence finale et n'apparaît pas plus distinctive que celle-ci, de sorte qu'ils ne seront pas perçus par le consommateur comme des déclinaisons de la marque « Quanta », et en déduit qu'en l'absence d'imitation de celle-ci, il n'existe pas de risque de confusion sur l'origine de ces signes, nonobstant « la similarité et/ou l'identité » des produits en présence ;
Qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si l'usage de mots-clés, comportant en séquence d'attaque la marque « Quanta », dans le cadre d'un service de référencement renvoyant l'internaute, grâce à l'affichage des pages de résultats, vers des sites internet sur lesquels était assurée la promotion de produits similaires et identiques à ceux désignés à l'enregistrement de la marque, n'était pas susceptible d'engendrer, dans l'esprit du consommateur d'attention moyenne, un risque de confusion sur l'origine des produits visés par l'annonce, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes formées par M. X contre les sociétés Biofficine, Acheter moins cher.com, Lvdlinc-parisglam.fr et M. Y, l'arrêt rendu le 27 novembre 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée.