Cass. crim., 16 décembre 2015, n° 14-85.068
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Guérin
Rapporteur :
M. Sadot
Avocat général :
M. Wallon
Avocat :
SCP Thouin-Palat et Boucard
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Maurice B..., partie civile,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de LYON, en date du 27 juin 2014, qui, dans l'information suivie, sur sa plainte, contre personne non dénommée du chef de recel de violation du secret professionnel, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 321-1 et 226-13 du code pénal, 66-5 et 21 de la loi du 31 décembre 1971, 4 du décret du 12 juillet 2005, 2 du règlement intérieur national de la profession d'avocat, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt confirmatif attaqué a dit n'y avoir lieu à suivre en l'état ;
" aux motifs propres qu'il résulte de l'information que Me Christine X-Aa bien transmis spontanément au bâtonnier des pièces susceptibles d'être couvertes par le secret professionnel, ces transmissions ont été effectuées par celle-ci pour prévenir une éventuelle action en responsabilité professionnelle de la SELARL alors que son associé Me Maurice Bavait démissionné du jour au lendemain laissant le cabinet de Pertuis dont il avait plus spécialement la responsabilité en gros désordre ; qu'il s'ensuit que c'est dans le cadre d'un différend l'opposant à Me Bque Me X-Aa communiqué un certain nombre de documents au bâtonnier ; que l'article 21 de la loi du 31 décembre 1971 confie au bâtonnier la charge de concilier les différends d'ordre professionnel entre les membres du barreau et d'instruire toute réclamation formulée par des tiers ; que c'est donc dans ce cadre légal, à la suite du différend qui l'opposait à son ex-associé, que Me X-Aa pris la décision d'adresser à son Bâtonnier les documents en question ; qu'il s'ensuit que le délit de recel de violation du secret professionnel ne peut être caractérisé ;
" et aux motifs réputés adoptés qu'à l'issue de l'instruction, il est établi et non contesté par quiconque que Me A, épouse X, a informé le bâtonnier, M. Y, de la situation de la SELARL AAVIF et qu'elle a communiqué, au moins au secrétariat du conseil de l'ordre des avocats du barreau d'Avignon, des courriers et documents de clients du cabinet ; que Me Bestime que ces documents étaient couverts par le secret professionnel ; que les chancelassions apportées par la partie civile sur ces documents les rendent peu exploitables mais il n'est pas contestable que ces courriers émanaient, au jour de leur communication, de clients de la SELARL AAVIF ; que, comme l'a fait remarque M. René Z, Me Bne semblait donc pas disposer d'un intérêt à agir pour déposer plainte ; que, néanmoins, une information a été ouverte par le parquet d'Avignon (D. 73) puis par celui de Lyon (D. 82) ; que la démission de Me Bavec effet immédiat de ses fonctions de cogérant mais surtout d'avocat au sein de la structure, car il gérait, seul, le cabinet de Pertuis, tout à fait contraire aux intérêts de la société qu'il cogérait et quels qu'en soient les motifs, ne pouvait mettre la SELARL AAVIF, personne morale, que dans une situation à l'évidence très compliquée ; qu'en effet, Mme A, épouse X, devait, dès lors, sans avoir été en mesure d'anticiper cette décision, gérer deux cabinets ouverts à plein temps et assurer la permanence du troisième sauf à supposer que la partie civile avait déjà pour dessein de reprendre immédiatement et à son compte la clientèle du cabinet de Pertuis et que Mme A, épouse X, ne devait donc plus s'occuper que des cabinets de Cavaillon et d'APT ; que même si la codésignation de M. Z, pour effectuer l'enquête déontologique, peut sembler maladroite car il exerce dans la même ville que Mme A, épouse X, et qu'ils se rendaient mutuellement et naturellement des services, Mme A, épouse X, gérante de la SELARL AAVIF et membre d'une profession réglementée, avait l'obligation, ès qualités, d'une part, informer le bâtonnier du différend avec son associé et de la situation pour la SELARL AAVIF qui pouvait aboutir à une mise en cause rapide de sa responsabilité civile et, d'autre part, lui communiquer tous les éléments nécessaires afin de décider de la suite à donner à cette affaire ;
" 1°) alors que, sous réserve des strictes exigences de sa propre défense devant toute juridiction et des cas de déclaration ou de révélation prévues ou autorisées par la loi, l'avocat ne commet, en toute matière, aucune divulgation contrevenant au secret professionnel ; que l'arrêt attaqué a relevé que Mme A a spontanément transmis des documents susceptibles d'être couverts par le secret professionnel au bâtonnier, dans le cadre légal de la mission de celui-ci de conciliation des différends entre avocats, et au regard du différend qui l'opposait à M. B; qu'il en résulte que Mme A, de son propre mouvement, sans qu'aucune demande eût été émise contre elle par M. Bou par quiconque, avait communiqué des pièces au bâtonnier pris en tant que conciliateur, de sorte que cette communication n'était pas nécessitée, et moins encore strictement nécessitée par les exigences de sa défense devant une juridiction ; qu'en décidant, néanmoins, qu'elle avait pu valablement transmettre ces documents et que le recel de violation du secret professionnel ne pouvait être établi, la chambre de l'instruction a violé les textes susmentionnés ;
" 2°) alors que ni l'article 21 de la loi du 31 décembre 1971 ni aucune autre disposition n'obligeaient Mme A à transmettre au bâtonnier des documents, fussent-ils couverts par le secret professionnel, afin qu'il puisse apprécier, au vu de ces documents, la suite à donner à cette affaire ; qu'à supposer qu'elle ait décidé le contraire, par motifs adoptés du juge d'instruction, la chambre de l'instruction a de nouveau commis une erreur de droit et méconnu les textes susmentionnés ;
" 3°) alors que, à supposer, encore, que Mme A fût en droit de transmettre au bâtonnier des documents couverts par le secret professionnel dans le cadre son différend avec M. Blors-même que nulle demande n'était formulée contre elle par quiconque, encore fallait-il que ces documents fussent strictement nécessaires à la défense de Mme A contre M. B; qu'en ne s'expliquant pas sur ce rapport de stricte nécessité à l'égard de chacun des documents en cause, quand le demandeur prenait soin de les analyser un à un dans son mémoire et soulignait que leur divulgation par Mme A n'était pas justifiée, la chambre de l'instruction a placé la Cour de cassation dans l'impossibilité d'exercer son contrôle et privé sa décision de base légale ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'en octobre 2006, dans le cadre d'un conflit opposant M. B, avocat inscrit au barreau d'Avignon, et son associée, cette dernière a communiqué au bâtonnier de l'ordre certains documents couverts par le secret professionnel ; que M. Ba porté plainte en se constituant partie civile du chef de recel de violation du secret professionnel le 7 décembre 2009 ;
Attendu que, pour confirmer l'ordonnance du juge d'instruction disant n'y avoir lieu à suivre contre quiconque, l'arrêt retient que cette transmission au bâtonnier, qui a la mission de concilier les différends d'ordre professionnel entre les membres du barreau et d'instruire toute réclamation formulée par des tiers, a été effectuée par l'associée de M. B dans le cadre d'un tel différend, pour prévenir une éventuelle mise en cause de la responsabilité professionnelle de la société d'avocats ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi.