Cass. crim., 8 octobre 2003, n° 02-88.412
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cotte
Rapporteur :
M. Soulard
Avocat général :
Me Di Guardia
Avocats :
SCP Delaporte, Briard et Trichet, SCP Tiffreau
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 385, 512, 591 et 593 du Code de procédure pénale, 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré irrecevable les exceptions de nullité de la procédure présentées par Jian Chi X... ;
" aux motifs que, " le tribunal a rejeté les exceptions de nullité de la procédure soulevées par Y..., Z... et Jian X... au motif qu'elles n'avaient pas été soulevées " in limine litis ", avant tout débat au fond, et il convient de rappeler que les mentions du jugement valent jusqu'à inscription de faux ; au demeurant, il résulte des notes d'audience que les conclusions de nullité n'ont été soulevées qu'après que les interrogatoires des prévenus sur le fond aient été largement entamés " ;
" 1 ) alors que, aux termes des notes de l'audience du tribunal correctionnel du 6 avril 2001 (production), l'avocat de Jian X..., " a déposé des conclusions de nullité in limine litis " ; qu'en énonçant que les "conclusions de nullité" n'auraient été " soulevées " qu'après l'ouverture des débats, la cour d'appel a dénaturé les notes d'audience susvisées ;
" 2 ) alors que, il résulte du dossier de la procédure que le prévenu avait remis des conclusions de nullité au greffe du tribunal le 30 novembre 2000, soit avant l'audience des débats du 6 avril 2001 ; que le juge se trouvait donc saisi en temps utile des exceptions de nullité ; qu'en refusant de les examiner, la cour d'appel a violé les textes susvisés " ;
Attendu que, pour déclarer irrecevables les exceptions de nullité soulevées par le prévenu, la cour d'appel énonce qu'il résulte des énonciations du jugement, qui valent jusqu'à inscription de faux, que ces exceptions n'ont pas été soulevées avant tout débat au fond ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision ;
Qu'il s'ensuit que le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles L 716-9 et L 716-10 du Code de la propriété intellectuelle, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a, sur l'action publique, déclaré Jian Chi X... coupable de détention de produits sous une marque contrefaite, en connaissance de cause ;
" aux motifs que, " le 25 mai 2000, les enquêteurs se rendaient 25, rue des Gravilliers à Paris (3ème) dans les locaux du magasin Alexandre où ils étaient reçus par le responsable, Jian Chi X..., ils y trouvaient des articles à l'effigie des personnages Pokemon, Pikachu et Teletubbies ; ils en découvraient également 81, rue du Temple, dans un local dont disposait Jian X... ; celui-ci reconnaissait les avoir achetés aux sociétés Ade et Les Chouchous et remettait des bons de livraison concernant 52 454 articles ; "sur l'action publique exercée à l'égard de Jian X..., A... et B... : que ces prévenus, commerçants en gros, sont poursuivis pour avoir détenu sans motif légitime des marchandises revêtues des marques contrefaisantes Pokemon, Pikachu, marques dont la société Nintendo Co Ltd est titulaire en France, étant précisé que les articles contrefaisants ne portaient pas toujours la marque, mais la plupart du temps les effigies des personnages créés par ces marques ; que ces marques nominatives et figuratives Pokemon, Pikachu et Teletubbies ont été déposées à l'INPI pour des produits faisant partie des classes énumérées lors du dépôt, et tous les articles saisis appartiennent à ces classes ; de même, certaines des marchandises saisies chez ces commerçants contrefaisaient la marque Teletubbies, dont la société Ragdoll Ltd est titulaire et propriétaire exclusive, marques nominatives et figuratives déposées à l'INPI pour des articles faisant partie notamment de la classe 25, qui englobe la totalité des articles saisis ;
que le caractère contrefaisant des articles saisis a été attesté par les représentants de ces marques et la Cour a pu constater, au vu des marchandises placées sous scellés et d'articles originaux présentés par les parties civiles, qu'il n'y avait aucun doute sur le caractère contrefaisant des premiers, présentés sans emballage et sans étiquettes, au contraire des seconds, de qualité médiocre et de prix très inférieurs ; que les prévenus sont des professionnels du commerce, grossistes au surplus, et ne pouvaient donc ignorer le caractère contrefaisant des produits qu'ils commercialisaient " ;
" 1 ) alors que, la cour d'appel ne pouvait retenir que la totalité des articles saisis était englobée dans la classe 25 de la classification internationale établie en application de l'Arrangement de Nice du 15 juin 1957, quand il résulte de la prévention que les produits litigieux étaient des "articles pour cheveux ", relevant de la classe 26 de ladite classification ;
" 2 ) alors que, le prévenu faisait valoir qu'il s'était enquis du caractère licite des produits litigieux auprès de son fournisseur ; que ce dernier l'avait délibérément trompé, en lui faisant croire que la commercialisation de ces produits avait été autorisée par les propriétaires des marques en cause ; qu'en omettant de se prononcer sur ces éléments, qui permettaient d'exclure l'élément intentionnel du délit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale " ;
Attendu que, pour déclarer Jian X... coupable de détention de produits sous une marque contrefaite, la cour d'appel prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors que la classe 25 de la Classification internationale des produits et des services aux fins de l'enregistrement des marques instituée par l'Arrangement de Nice, du 15 juin 1957, comprend, notamment, des articles de coiffure, la cour d'appel, qui a répondu comme elle le devait aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a justifié sa décision ;
Qu'il s'ensuit que le moyen doit être écarté ;
Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 3, 215, 343, 382, 399, 414, 419 et 435 du Code des douanes, 591 et 593 du Code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a, sur l'action douanière, condamné Jian Chi X... à une amende douanière de 204 677 francs (31 208,81 euros) pour importation en contrebande de marchandises prohibées ;
" aux motifs que, "la société Ade Louis Legrand, Nang Sangchanmahola et la SARL Mahola ont été poursuivies et condamnées par les premiers juges (le jugement étant sur ce point définitif) pour contrebande par importation illicite de marchandises prohibées dès lors qu'elles étaient revêtues de marques contrefaites ;
que les trois prévenus qui entretenaient des rapports étroits avec les importateurs et qui connaissaient le caractère contrefaisant des marchandises qu'ils commercialisaient en très grande quantité, ont participé comme intéressés à la fraude à ce délit de contrebande (article 399 du Code des douanes) et sont donc passibles des mêmes peines. Il convient cependant de confirmer le jugement en ce qu'il a limité leur solidarité et sur le montant des amendes douanières prononcées à l'égard des trois prévenus " ;
" 1 ) alors que, le prévenu faisait valoir qu'il s'était enquis du caractère licite des produits litigieux auprès de son fournisseur ; que ce dernier l'avait délibérément trompé, en lui faisant croire que la commercialisation de ces produits avait été autorisée par les propriétaires des marques en cause ; qu'en omettant de se prononcer sur ces éléments, qui permettaient d'exclure l'élément intentionnel du délit, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
" 2 ) alors que, le prévenu contestait, factures à l'appui, la valeur des marchandises retenue par l'administration des Douanes pour le calcul de l'amende prévue à l'article 414 du Code des douanes ; que la cour d'appel ne pouvait retenir la somme de 204 677 francs (31 202,81 euros), fixée par l'administration des Douanes, sans vérifier la justification de cette somme " ;
Attendu que, pour déclarer Jian X... coupable d'importations en contrebande de marchandises prohibées et le condamner à une amende douanière de 204 677 francs, la cour d'appel prononce par les motifs repris au moyen ;
Attendu qu'en cet état, et dès lors que la valeur des marchandises de fraude est appréciée souverainement par les juges du fond, lesquels peuvent s'approprier les évaluations de l'administration des Douanes, la cour d'appel, qui a répondu comme elle le devait aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de Cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus.