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Décisions

Cass. com., 2 décembre 2014, n° 13-11.059

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Rapporteur :

Mme Texier

Avocat général :

Mme Pénichon

Avocats :

Me Blondel, SCP Spinosi et Sureau

Cass. com. n° 13-11.059

1 décembre 2014

Sur le moyen unique :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-Terre, 29 octobre 2012), que la société Iago (la société), locataire de locaux à usage d'établissement scolaire appartenant à la SCI Marie (la SCI), a donné un congé pour le 31 juillet 2009 qui a été contesté par celle-ci ; que, le 11 juin 2009, la société a été mise en redressement judiciaire, M. Y et Mme Xétant désignés, respectivement, administrateur et mandataire judiciaires ; que le 7 août 2009, la SCI, après avoir demandé à la société, le 24 juillet précédent, de libérer les lieux pour le 31 juillet, s'est désistée de sa demande en nullité du congé et a déclaré accepter celui-ci ; que les lieux ont été libérés le 1er novembre 2009 ; que la SCI a assigné la société et M. Y, ès qualités et à titre personnel, notamment en réparation du préjudice subi du fait de l'impossibilité de relouer les lieux avant le début de l'année scolaire suivante et en paiement du coût des travaux de leur remise en état ;

Attendu que la SCI fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables ses demandes contre la société et M. Y, ès qualités, et de rejeter ses demandes contre M. Y à titre personnel, alors, selon le moyen :

1°) que les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture, en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, sont payées à leur échéance ; que la créance de remise en état des locaux loués prend naissance au jour de la restitution des locaux ; que cette créance constitue la contrepartie de la mise à disposition du local, le preneur étant tenu d'utiliser le bien loué en bon père de famille ; qu'en décidant que la créance invoquée au titre de la remise en état constituait, non une créance au titre de prestations fournies après le jugement d'ouverture de la procédure collective, mais une créance liée à la résiliation du contrat, et comme telle soumise à déclaration, quand les locaux ont toutefois été restitués postérieurement au jugement d'ouverture de la société, la cour d'appel a violé l'article L. 622-17 du code commerce ;

2°) que les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture, en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant cette période, sont payées à leur échéance ; que la créance de dommages et intérêts résultant de la perte d'une chance de louer les locaux, en ce qu'elle est la conséquence du maintien illicite dans les lieux du preneur, postérieurement au jugement d'ouverture, pour la poursuite de son activité, a pour contrepartie une prestation fournie au débiteur ; qu'en énonçant cependant que la créance invoquée par la SCI pour avoir été privée de la possibilité de louer son local à un tiers pendant une année scolaire ne peut s'analyser en une créance née en contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant la période d'observation, la cour d'appel a violé l'article L. 622-17 du code de commerce ;

3°) qu'en décidant que l'administrateur judiciaire n'a pas commis de faute en ayant maintenu la société dans les lieux loués pendant trois mois après l'expiration du bail, quand l'administrateur judiciaire engage pourtant personnellement sa responsabilité pour ne pas avoir rendu les locaux loués dans un délai raisonnable après expiration du bail, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;

Mais attendu, d'une part, que la créance du bailleur relative aux travaux de remise en état n'est la contrepartie d'une prestation fournie au débiteur pendant la période d'observation, au sens des dispositions de l'article L. 622-17 du code de commerce, que si les dégradations qui lui sont reprochées ont été commises pendant cette période et non, comme le soutient le moyen, parce que les lieux auraient été restitués après le jugement d'ouverture de la procédure de redressement judiciaire ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant retenu que la SCI avait, du 11 juin au 1er novembre 2009, été réglée, en contrepartie de la prestation fournie au débiteur pendant cette période, du loyer dû puis d'une indemnité d'occupation après la résiliation du bail fixée au 31 juillet 2009, la cour d'appel en a exactement déduit que les dommages-intérêts demandés pour l'indemniser du préjudice résultant de la perte de la chance de pouvoir relouer immédiatement les lieux n'avaient pas pour contrepartie une prestation fournie au débiteur ;

Attendu, enfin, qu'ayant relevé, d'un côté, que l'administrateur avait su seulement quelques jours avant la résiliation du bail que la SCI avait accepté cette résiliation et, de l'autre, que le tribunal avait décidé la poursuite d'exploitation malgré son rapport concluant le 31 août 2009 à la liquidation judiciaire, la cour d'appel a pu en déduire l'absence de faute engageant la responsabilité personnelle de cet administrateur ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.