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Décisions

Cass. crim., 6 janvier 1966, n° 64-92.298

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Zambeaux

Rapporteur :

M. Gagne

Avocat général :

M. Reliquet

Avocats :

Me Goutet, Me Henry

Cass. crim. n° 64-92.298

5 janvier 1966

VU LES MEMOIRES PRODUITS EN DEMANDE ET EN DEFENSE ;

SUR LE MOYEN UNIQUE DE CASSATION DES EPOUX X PRIS DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 400, ALINEA 5 DU CODE PENAL, DE LA LOI DU 17 MARS 1909 RELATIVE A LA VENTE ET AU NANTISSEMENT DES FONDS DE COMMERCE, DE L'ARTICLE 7 DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, POUR DEFAUT DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE ;

JOINT AU PREMIER ET AU SECOND MOYENS DE CASSATION REUNIS DE LA DAME Z EPOUSE A PRIS DE LA VIOLATION DE L'ARTICLE 400 DU CODE PENAL, DE L'ARTICLE / DE LA LOI DU 20 AVRIL 1810, POUR DEFAUT ET CONTRADICTION DE MOTIFS, MANQUE DE BASE LEGALE, EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A DECIDE QUE LES EPOUX X ETAIENT COUPABLES, AYANT DONNE EN NANTISSEMENT LEUR FONDS DE COMMERCE A B AVEC SES ELEMENTS CORPORELS, D'AVOIR VENDU ET DELIVRE DES ELEMENTS CORPORELS A UN TIERS, QU'IL IMPORTAIT PEU QUE L'EXPLOITATION AIT CONSTITUE OU NON UN FONDS DE COMMERCE SUSCEPTIBLE D'UN NANTISSEMENT REGULIER, QU'IL SUFFISAIT QUE DES OBJETS MOBILIERS AIENT ETE AFFECTES PAR CONTRAT A LA GARANTIE D'UNE CREANCE ;

ALORS QUE L'ARRET CONSTATE QUE, PAR ACTE DU 10 JUILLET 1961, LES EPOUX X AVAIENT DONNE AUX EPOUX B UN NANTISSEMENT SUR LEUR FONDS DE COMMERCE AVEC TOUS SES ELEMENTS, QUE CE NANTISSEMENT AVAIT ETE INSCRIT AU REGISTRE DU TRIBUNAL DE COMMERCE, QUE LA VENTE INCRIMINEE AVAIT PORTE, NON SUR DES ELEMENTS MOBILIERS ISOLES, MAIS SUR L'ENSEMBLE DU FONDS DE COMMERCE ;

QU'IL N'Y A DONC AUCUNE DISTRACTION DES OBJETS MOBILIERS DEPENDANT DU FONDS, QUE LE NANTISSEMENT ASSURE AUX EPOUX B UN DROIT DE SUITE ET QUE LEUR GAGE ETAIT INTACT ;

QU'EN ADMETTANT MEME QUE LE NANTISSEMENT SOIT NUL - CE QUE L'ARRET NE DIT PAS -, L'EXISTENCE D'UN DETOURNEMENT DE L'INTENTION COUPABLE NE POUVAIT ETRE DETERMINEE QUE PAR RAPPORT A LA CATEGORIE DE GAGE QUE LES PARTIES AVAIENT VOULU REALISER ;

QUE, S'AGISSANT D'UN NANTISSEMENT DE FONDS DE COMMERCE, LA VENTE EN BLOC DE TOUS LES ELEMENTS DU FONDS NE POUVAIT ETRE INCRIMINEE ;

ET AUSSI EN CE QUE L'ARRET ATTAQUE A DECIDE SUBSIDIAIREMENT QU'IL ETAIT SANS INTERET POUR L'EXISTENCE DU DELIT QUE B PUISSE ENCORE, OU NON, FAIRE JOUER LE NANTISSEMENT SUR DES OBJETS PASSES EN LA POSSESSION DE DAME C, QUE TOUT ACTE DE NATURE A APPORTER UN TROUBLE AU CREANCIER DANS LA MISE EN OEUVRE DU GAGE SUFFIT A CONSTITUER UN FAIT DE DETOURNEMENT, QUE TEL ETAIT LE CAS POUR LES ACTIONS JUDICIAIRES OU EXTRAJUDICIAIRES QUE B AURAIT A ENTREPRENDRE VIS-A-VIS DE DAME C ;

ALORS QU'IL NE POUVAIT Y AVOIR DETOURNEMENT AU SENS DE LA LOI SI LE DEBITEUR AVAIT ACCOMPLI UN ACTE DE NATURE A COMPROMETTRE L'EXISTENCE DU GAGE OU A EN EMPECHER LA MISE EN OEUVRE ;

QUE LE SIMPLE TROUBLE EPROUVE PAR LE CREANCIER, DANS LA MISE EN OEUVRE DU GAGE, NE PEUT ETRE ASSIMILE A UN DETOURNEMENT, QUE D'AILLEURS LES ACTIONS JUDICIAIRES OU EXTRA-JUDICIAIRES QUE B A A ENTREPRENDRE NE SONT PAS UN TROUBLE DANS LA MISE EN OEUVRE DE SON GAGE, MAIS CONSTITUENT LE PROCESSUS NORMAL POUR SA REALISATION, ET QU'IL AURAIT EU A SUIVRE LE MEME PROCESSUS SI LES EPOUX X N'AVAIENT PAS VENDU LE FONDS ;

VU LESDITS ARTICLES ;

ATTENDU QUE TOUT JUGEMENT OU ARRET DOIT CONTENIR LES MOTIFS PROPRES A JUSTIFIER LA DECISION ;

QUE L'INSUFFISANCE OU LA CONTRADICTION DES MOTIFS EQUIVAUT A LEUR ABSENCE ;

ATTENDU QU'IL RESULTE DES CONSTATATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE PAR ACTE DU MINISTERE DE D, NOTAIRE A BOULOGNE-BILLANCOURT, EN DATE DU 10 JUILLET 1961, LES EPOUX X ONT DONNE EN NANTISSEMENT AUX EPOUX B, EN GARANTIE D'UN PRET DE VINGT- CINQ MILLE FRANCS QUI LEUR ETAIT ALORS CONSENTI PAR CEUX-CI, UN FONDS DE COMMERCE DE MARCHAND FORAIN EN CONFISERIE ET GATEAUX, EXPLOITE A VERBERIE (OISE) PAR X ET COMPRENANT L'ENSEIGNE, LE NOM COMMERCIAL, LA CLIENTELE, LE MATERIEL ET LES OBJETS MOBILIERS SERVANT A L'EXPLOITATION, SOIT UNE CAMIONNETTE CITROEN IMMATRICULEE 215 FV 60, UN ENSEMBLE TUBULAIRE BARNUM ET DEUX BALANCES LUTRANA ;

QUE LE PRIVILEGE DE NANTISSEMENT A ETE REGULIEREMENT INSCRIT AU GREFFE DU TRIBUNAL DE COMMERCE DE SENLIS LE 24 JUILLET 1961 ;

QUE LE MONTANT DU PRET N'A JAMAIS ETE REMBOURSE ;

ATTENDU QUE L'ARRET CONSTATE, D'AUTRE PART, QUE LE 2 JUILLET 1962 LES EPOUX X ONT CEDE PAR ACTE SOUS SEING PRIVE A UNE DAME C, POUR LE PRIX DE TRENTE-CINQ MILLE FRANCS, LEURS CONCESSIONS SUR LES MARCHES DE SENLIS, VERBERIE, SENLIS-RANTIGNY, COMPIEGNE ET CHEVRIERES, Y COMPRIS LE MATERIEL SUIVANT : DEUX BALANCES, UN BARNUM, UN CAMION N° 215 PV 60, ETC ;

QUE L'ARRET PRECISE QUE CETTE VENTE N'A PAS FAIT L'OBJET DE LA PUBLICITE LEGALE OBLIGATOIRE EN CAS DE VENTE DE FONDS DE COMMERCE ;

ATTENDU QU'AU MOTIF QUE L'INFRACTION RETENUE SERAIT CARACTERISEE DANS UN CAS COMME DANS L'AUTRE, LA COUR D'APPEL A DECLARE QU'IL ETAIT SANS INTERET DE RECHERCHER SI LA VENTE DU 2 JUILLET 1962 ETAIT UNE VENTE DE FONDS DE COMMERCE OU UNE VENTE D'OBJETS MOBILIERS ET DE DROITS INCORPORELS NE CONSTITUANT PAS ENTRE EUX UNE UNIVERSALITE ;

ATTENDU, CEPENDANT, QUE L'ARTICLE 400, ALINEA 5 DU CODE PENAL NE PUNIT QUE LA DESTRUCTION OU LE DETOURNEMENT D'OBJETS DONNES A TITRE DE GAGE ;

QU'AUCUNE DISPOSITION DE LA LOI DU 17 MARS 1909 SUR LA VENTE ET LE NANTISSEMENT DES FONDS DE COMMERCE N'INTERDIT LA VENTE D'UN FONDS DE COMMERCE NANTI ;

QUE, SEULE, LA VENTE D'OBJETS DISTRAITS DU FONDS DE COMMERCE NANTI PEUT CONSTITUER LE DELIT DE L'ARTICLE 400, ALINEA 5 SUSVISE ;

QU'EN LAISSANT INCERTAIN LE POINT DE SAVOIR SI L'ACTE DU 2 JUILLET 1962 CONCERNAIT LA VENTE DE L'UNIVERSALITE JURIDIQUE QUE CONSTITUE UN FONDS DE COMMERCE OU NE CONSTATAIT QUE LA VENTE D'OBJETS MOBILIERS ET DE DROITS INCORPORELS DONT LA REUNION NE POUVAIT, EN L'ESPECE, CONSTITUER UN FONDS DE COMMERCE, LA COUR D'APPEL N'A PAS PERMIS A LA COUR DE CASSATION D'EXERCER SON CONTROLE ;

D'OU IL SUIT QUE LA CASSATION EST ENCOURUE ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE L'ARRET DE LA COUR D'APPEL D'AMIENS DU 12 JUIN 1964 ET, POUR QU'IL SOIT STATUE A NOUVEAU, CONFORMEMENT A LA LOI ;

RENVOIE LA CAUSE ET LES PARTIES DEVANT LA COUR D'APPEL DE DOUAI.