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Décisions

Cass. com., 5 juillet 2017, n° 15-20.554

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Mouillard

Avocats :

Me Bertrand, SCP Hémery et Thomas-Raquin

Paris, du 20 mars 2015

20 mars 2015

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 20 mars 2015), que la société Airbus Helicopters, anciennement dénommée Eurocopter, ayant pour activité la conception, la fabrication et la commercialisation d'hélicoptères civils et militaires, est titulaire du brevet français n° 96 07156, déposé le 10 juin 1996, intitulé "train d'atterrissage à patins pour hélicoptère" ; que cette invention, dite "train à moustache", a été mise en oeuvre par cette société pour équiper ses appareils EC 120 et EC 130 et a fait l'objet de dépôts aux Etats-Unis et au Canada sous la priorité du brevet français ; qu'ayant constaté qu'une première version de l'hélicoptère Bell 429, équipée d'un "train à moustache", avait été présentée au public au mois de février 2007 au Canada par la société de droit américain Bell Helicopter Textron et la société de droit canadien Bell Helicopter Textron Canada (les sociétés Bell Helicopter), qui avaient préalablement loué un appareil EC 120, la société Airbus Helicopters a engagé une procédure contre la société Bell Helicopter Textron Canada devant les juridictions canadiennes ; que les sociétés Bell Helicopter ont présenté une seconde version de l'hélicoptère Bell 429 avec un train d'atterrissage modifié ; qu'estimant que les deux versions du train d'atterrissage de cet appareil contrefaisaient son brevet, la société Airbus Helicopters, après avoir fait dresser un constat d'huissier de justice sur les sites internet www.salon-du-bourget.fr, www.bellhelicopter.textron.com et www.rotor-aircraft.com et procéder à une saisie-contrefaçon, le 16 juin 2009, sur le stand des sociétés Bell Helicopter au salon international de l'aéronautique et de l'espace du Bourget, a assigné ces sociétés en contrefaçon des revendications 1, 2, 4, 5, 7, 8, 9, 10, 13 et 15 du brevet susvisé ; que les sociétés Bell Helicopter ont reconventionnellement demandé l'annulation de ces revendications et de la revendication 14 pour insuffisance de description, absence de nouveauté et défaut d'activité inventive, ainsi que l'annulation du procès-verbal de saisie-contrefaçon ;

Sur le premier moyen :

Attendu que les sociétés Bell Helicopter font grief à l'arrêt de rejeter la demande d'annulation du brevet français n° 96 07 156 de la société Airbus Helicopters, retenir que la deuxième version du train d'atterrissage équipant les hélicoptères Bell 429 contrefait par équivalence les revendications 1, 2, 4, 5, 7, 8, 9, 10, 13 et 15 de ce brevet et juger qu'elles se sont rendues coupables de contrefaçon de ces mêmes revendications alors, selon le moyen :

1°) que l'étendue de la protection conférée par le brevet est déterminée par les revendications interprétées au besoin à la lumière de la description et des dessins ; qu'il résulte de la description du brevet que l'amélioration du comportement de l'hélicoptère en résonance au sol dans le mode de roulis doit être rapportée à la variante selon laquelle les points d'appui au sol de la traverse avant sont déportés longitudinalement vers l'avant de l'appareil par rapport aux points de fixation sur la structure de celui-ci, décalage vers l'arrière de la traverse avant, cette variante, représentée à la figure 11 e), faisant l'objet de la revendication dépendante n° 16 selon laquelle la traverse avant est décalée vers l'arrière par rapport à la délimitation avant du plan de contact des plages longitudinales d'appui des patins au sol ; que la revendication 15, combinée à la revendication principale 1, couvre une traverse avant décalée vers l'avant par rapport à la délimitation avant du plan de contact des plages longitudinales d'appui des patins au sol, de sorte que l'amélioration du comportement de l'hélicoptère en résonance sol dans le mode de roulis est étrangère à la protection conférée par la combinaison de ces deux revendications ; que la cour d'appel, qui a constaté que seules les revendications 1, 2, 4, 5, 7, 8, 9, 10, 13, 14 et 15 étaient opposées, devait en déduire que l'amélioration du comportement de l'appareil en résonance au sol en raison du décalage vers l'arrière de la traverse avant était étrangère au jugement de l'action en contrefaçon exercée par la société Airbus Helicopters ; qu'en énonçant au contraire que le brevet couvrait les fonctions ayant pour but de répondre aux problèmes de la résonance au sol, notamment le fait que la traverse avant du train travaille en flexion sur plusieurs plans et en torsion, fonctions que la description du brevet rapportait uniquement au décalage vers l'arrière de la traverse avant, en écartant l'antériorité constituée par l'appareil XV-3 invoquée comme destructrice de la nouveauté au motif que cet appareil n'était pas soumis au phénomène de résonance au sol, en écartant les antériorités invoquées par les sociétés Bell Helicopter comme étant destructrices de l'activité inventive des revendications opposées pour la raison qu'elles recherchaient des solutions à des problèmes étrangers à celui de la résonance au sol et en décidant que la seconde version de l'appareil Bell 429 contrefaisait par équivalence le brevet au motif que celui-ci couvrait des fonctions techniques nouvelles tendant à résoudre le problème de la résonance au sol, la cour d'appel a méconnu l'étendue de la protection conférée par les revendications 1 et 15, seules opposées, en violation de l'article L. 613-2 du code de la propriété intellectuelle ;

2°) qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a dénaturé les termes du brevet, clairs et précis en ceci que l'amélioration du comportement de l'hélicoptère en résonance sol dans le mode de roulis était rapportée par la description, p. 3 lignes 1 à 11, à la variante couvrant le décalage vers l'arrière de la traverse avant, objet de la revendication 16 non opposée, violant ainsi l'article 1134 du code civil ;

Mais attendu qu'après avoir examiné la teneur de la description, l'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, que le but de l'invention est de remédier à l'inconvénient majeur du système antérieur, qui présentait une grande rigidité se traduisant par des facteurs d'accélération élevés lors des atterrissages, une adaptation en fréquence difficile, relativement au phénomène dit de "résonance-sol" et un poids de l'atterrisseur assez élevé, en proposant un train d'atterrissage différent comportant, notamment, l'intégration de la traverse avant à la partie "patin", inclinée dans un plan vertical, placée en porte à faux vers l'avant ou l'arrière, qui assurera ainsi un rôle prépondérant pour l'absorption des forces engendrées lors des atterrissages durs et glissés ; qu'il ajoute que le brevet précise que par cette invention, les systèmes mécaniques anti-résonances au sol sont supprimés ; qu'en cet état, c'est sans méconnaître l'étendue de la protection conférée par les revendications 1 et 15 ni dénaturer les termes du brevet que la cour d'appel en a, souverainement, apprécié la portée au regard de la description de l'invention ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que les sociétés Bell Helicopter font grief à l'arrêt de rejeter la demande de nullité du brevet français n° 96 07 156 de la société Airbus Helicopters pour insuffisance de description alors, selon le moyen, que le brevet est déclaré nul s'il n'expose pas l'invention de façon suffisamment claire et complète pour qu'un homme du métier puisse l'exécuter ; qu'en se bornant à énoncer, pour refuser de prononcer la nullité du brevet pour insuffisance de description, que la description expliquait "en détail" comment réaliser une traverse avant décalée, présentait le matériau pouvant être utilisé, ses limites d'élasticité et des "détails de réalisation précis" et que les figures du brevet présentaient un train conforme à chacun des modes de réalisation des revendications de sorte que l'homme du métier était en mesure de reproduire l'invention à l'aide de ses connaissances et par des opérations matérielles ne revêtant pas de difficulté excessive sans s'expliquer, comme elle y était invitée, sur le fait que les revendications, la description et les figures du brevet ne comportaient aucune indication ni sur le degré d'inclinaison ni sur le rayon de courbure des deux zones de transition inclinées à double courbure des patins constituant ensemble une traverse avant intégrée de façon à parvenir à la réalisation d'un train amortissant mieux les chocs à l'atterrissage et permettant de réduire les inconvénients des trains de l'art antérieur dans les proportions mentionnées, fût-ce à titre indicatif, dans la description, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 613-25, b, du code de la propriété intellectuelle ;

Mais attendu que l'arrêt retient, d'abord, que la description du brevet explique en détail comment réaliser une traverse avant décalée vers l'avant et vers l'arrière, en présentant également le matériau qui peut être utilisé, ses limites d'élasticité et des détails de réalisation précis, et que les figures 1 et 11-e du brevet présentent un train d'atterrissage conforme à chacun des modes de réalisation des revendications et en déduit que l'homme du métier, avec l'aide de ses connaissances et par des opérations matérielles ne revêtant pas de difficultés excessives, est en mesure de reproduire l'invention ; qu'il retient, ensuite, que les objectifs chiffrés ayant, par l'emploi du terme "environ", été donnés de façon indicative, la preuve de leur exactitude n'a pas d'incidence sur la validité du brevet et qu'au surplus, la société Airbus Helicopters démontre les avoir atteints sur les appareils AS 350 et EC 130 ; qu'en l'état de ces appréciations, faisant ressortir que la description faite dans le texte du brevet, éclairée par les dessins, était suffisante, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen :

Attendu que les sociétés Bell Helicopter font grief à l'arrêt de rejeter leur demande de nullité du procès-verbal de saisie-contrefaçon du 16 juin 2009 alors, selon le moyen :

1°) que l'excès de pouvoir de l'huissier de justice qui méconnaît les limites de sa mission entache le procès-verbal de saisie-contrefaçon de nullité ; que pour écarter le moyen de nullité tiré de ce que l'huissier de justice n'avait pas, lors de la saisie-contrefaçon, procédé personnellement à certaines mesures, contrairement aux termes de l'ordonnance qui autorisait l'huissier à mesurer les trains d'atterrissage argués de contrefaçon et déterminer le matériau et les dimensions des tubes les composant à l'aide d'outils présents sur place ou apportés, la cour d'appel a énoncé que l'huissier avait précisé à la fin de son procès-verbal avoir lui-même effectué les constatations assisté par deux techniciens sans que les sociétés Bell Helicopter apportent aucun élément probant contraire et que rien n'indiquait dans le procès-verbal que les mesures n'avaient pas été effectuées par l'huissier mais par l'expert; qu'en statuant de la sorte sans s'expliquer, comme elle y était invitée, sur le fait, relevé par les premiers juges, que les photographies prises sur les lieux montraient que les mesures avaient été effectuées par une deuxième personne aidant l'huissier de justice, lequel s'était borné à constater le résultat de ces mesures qu'il n'avait pas personnellement effectuées, de sorte que les photographies du procès-verbal lui-même démontraient que certaines mesures avaient été effectuées par une autre personne que l'huissier, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L 615-5 du code de la propriété intellectuelle ;

2°) qu'il résulte de l'article L 615-5 du code de la propriété intellectuelle, selon lequel l'huissier de justice peut le cas échéant être assisté d'experts, que, s'il n'est pas interdit à l'huissier de transcrire, en tout ou partie, lors de la saisie, la description technique faite par l'expert qui l'assiste régulièrement dans ses opérations, il appartient à l'huissier de distinguer clairement dans son procès-verbal ce qui relève de ses constatations personnelles et ce qui relève des constatations de l'expert ; qu'après avoir constaté que l'huissier de justice était assisté d'experts lors de la saisie, que l'auteur de la réalisation des constatations était identifié, dans le procès-verbal de saisie, par le pronom personnel à la première personne du pluriel, "nous", l'emploi du pronom personnel à la première personne du singulier étant réservé aux opérations ayant précédé la description proprement dite, et que la description comportait l'emploi de termes techniques, d'ailleurs empruntés au brevet, la cour d'appel devait en déduire que le procès-verbal de saisie ne permettait pas de faire le départ entre les constatations personnelles de l'huissier et celles des experts, ce qui entachait le procès-verbal de saisie de nullité ; qu'en rejetant au contraire la demande de nullité du procès-verbal de saisie, la cour d'appel a violé l'article L 615-5 du code de la propriété intellectuelle ;

3°) qu'en énonçant que, dans la description des éléments structurels du train d'atterrissage, l'huissier de justice avait employé "des termes d'appréhension simple" puis en faisant état de l'emploi par l'huissier de "termes techniques issus du brevet", la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction qui la prive de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel a retenu que l'assistance purement matérielle des experts sous son contrôle, lors de l'exécution par l'huissier des mesures, n'est pas de nature à vicier ses propres opérations ; qu'elle est en outre réputée avoir adopté les motifs non contraires des premiers juges qui, après avoir relevé que les photographies prises sur les lieux montraient que les opérations de mesures avaient été effectuées par une deuxième personne aidant l'huissier de justice et énoncé la relation des opérations de mesurage faite par celui-ci dans son procès-verbal, ont retenu qu'il apparaissait ainsi que l'huissier de justice avait constaté la mesure autorisée, et ce, conformément aux dispositions de la requête, et que le fait qu'il avait été aidé par un expert l'assistant pour tenir le fil à plomb n'était pas de nature à établir que celui-ci avait outrepassé sa mission d'assistance ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant, par motifs propres et adoptés, relevé que le terme "nous" avait été utilisé par l'huissier de justice pour la relation des opérations de constatation, lesquelles avaient été effectuées en présence des techniciens de la société Bell Textron, de ses représentants et des experts, dont il avait été autorisé à se faire assister, tandis que le terme "je" l'avait été dans les actes de signification de la requête et de l'ordonnance et de clôture du procès-verbal de saisie-contrefaçon, la cour d'appel a pu en déduire que, s'agissant d'une formulation usuelle, l'emploi du terme "nous" n'était pas de nature à établir que l'huissier de justice n'avait pas procédé lui-même aux opérations de saisie-contrefaçon avec l'assistance des experts ;

Et attendu, enfin, qu'ayant relevé que l'huissier instrumentaire avait, concernant la description des éléments structurels du train d'atterrissage, employé des termes simples et retenu que ses opérations avaient nécessairement été précédées d'une prise de connaissance du brevet lui permettant d'effectuer ses opérations, la cour d'appel a pu, sans se contredire, considérer que, dans ces circonstances, l'emploi par l'huissier de termes techniques issus du brevet n'était pas de nature à établir qu'il n'avait pas lui-même effectué ses opérations ;

D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que les sociétés Bell Helicopter font grief à l'arrêt de dire que la première version du train d'atterrissage équipant les hélicoptères Bell 429 reproduit de façon littérale les caractéristiques des revendications 1, 2, 4, 5, 7, 8, 9, 10, 13 et 15 du brevet français n° 96 07 156 dont la société Airbus Helicopters est titulaire et qu'elles se sont rendues coupables de contrefaçon de ces revendications en "offrant, important, offrant à la vente et détenant en France" des appareils Bell 429 première version alors, selon le moyen :

1°) que l'article L. 613-3 du code de la propriété intellectuelle interdit notamment, à défaut de consentement du propriétaire du brevet, l'offre du produit objet de ce brevet ; que n'avait pas le caractère d'une offre, au sens de ce texte, le fait d'avoir présenté, dans un cadre privé et dans le cercle étroit de spécialistes, un simple prototype qui n'avait pas encore volé, ayant fait l'objet par la suite de plusieurs modifications et qui, en l'absence de toute certification préalable, ne pouvait faire l'objet d'aucune mise sur le marché, ce fait ne correspondant ni à une mise dans le commerce ni même à un acte préparatoire à une telle mise dans le commerce ; qu'en décidant le contraire au motif que l'offre en vente s'entendait de toute opération matérielle tendant à mettre un produit en contact avec la clientèle potentielle et à préparer la mise dans le commerce même si ce produit, non encore homologué, ne pouvait être commercialisé, la cour d'appel, qui a statué en considération d'une définition erronée de l'offre au sens de l'article L. 613-3 du code de la propriété intellectuelle, a violé ce texte par fausse qualification ;

2°) qu'en admettant qu'un acte préparatoire à la mise dans le commerce puisse constituer une offre au sens de l'article L. 613-3 du code de la propriété intellectuelle, cette mise dans le commerce doit porter sur l'objet argué de contrefaçon ; qu'après avoir constaté que la présentation de la première version du train, en France et à l'étranger, avait été suivie à bref délai de la commercialisation de la deuxième version de l'appareil dont l'homologation avait été obtenue sur la base des tests réalisés avec la première version, la cour d'appel devait en déduire que les actes de présentation de la première version avaient le caractère d'actes préparatoires à la commercialisation de la deuxième version et ne pouvaient donc constituer une offre portant sur la première version, qui constituait un objet différent, sans méconnaître la portée de ses propres constatations, violant ainsi l'article L. 613-3 du code de la propriété intellectuelle par fausse application ;

3°) que seule une atteinte au droit protégé par le brevet commise sur le territoire que le propriétaire du brevet s'est réservé peut constituer un acte de contrefaçon engageant la responsabilité de son auteur ; que la cour d'appel, qui a décidé que la proposition à la vente "à l'étranger", dans le catalogue des sociétés Bell Helicopter dès 2005 et 2006, de l'appareil Bell 429 équipé de la première version du train d'atterrissage, et la présentation de ce même appareil au salon Heli-Expo à Houston, USA, et au forum annuel de l'American Helicopter Society à Montréal Canada avaient le caractère d'offres du produit objet du brevet constituant des actes de contrefaçon en l'absence de consentement du propriétaire du brevet, a violé le principe de territorialité du droit de brevet, ensemble les articles L 613-3 et L 615-1 du code de la propriété intellectuelle ;

4°) que les droits conférés par le brevet ne s'étendent pas aux actes accomplis dans un cadre privé et à des fins non commerciales ; que, pour considérer qu'une présentation effectuée par les sociétés Bell Helicopter le 15 septembre 2005 à Toussus-le-Noble portant sur le prototype d'un appareil équipé de la première version du train d'atterrissage n'avait pas un caractère confidentiel mais celui d'une présentation publique et par conséquent celui d'une offre au sens de l'article L. 613-3 du code de la propriété intellectuelle, la cour d'appel s'est fondée sur les mentions d'un site internet "www.[...]" dont elle a constaté qu'il était celui "d'un particulier" ; qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel, qui devait considérer au contraire que cette divulgation, étrangère aux sociétés Bell Helicopter, ne correspondait à aucun acte accompli par ces sociétés sur l'objet de l'invention brevetée en dehors d'un cadre privé et à des fins non commerciales et qu'elle ne pouvait avoir le caractère d'une offre émanant de celles-ci portant sur le produit objet du brevet, a violé les articles L 613-3, L 613-5 a, et L 615-1 du code de la propriété intellectuelle ;

5°) que pour retenir l'existence d'une présentation au public constitutive d'une offre au sens de l'article L. 613-3 du code de la propriété intellectuelle, la cour d'appel s'est fondée en outre sur le site internet "consultable en France" de la société Rotor & Aircraft dont elle a énoncé qu'elle serait le distributeur et le représentant des sociétés Bell Helicopter en France ; qu'en statuant de la sorte sans s'expliquer, comme elle y était invitée, sur le fait, expressément relevé par les premiers juges, qu'aucune des photographies reproduites sur ce site ne permettait de savoir de quel train étaient équipés les hélicoptères Bell 429 présentés par la société Rotor & Aircraft, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles L. 613-3 et L. 615-1 du code de la propriété intellectuelle ;

6°) qu'après avoir elle-même constaté que le procès-verbal de saisie-contrefaçon établi lors du salon du Bourget n'avait pas permis de décrire avec précision le train d'atterrissage d'un prototype présenté lors de ce salon, la cour d'appel devait en déduire que la preuve d'une présentation et par conséquent celle d'une offre à la vente du train d'atterrissage dans sa première version lors de ce salon n'avait pas été rapportée ; qu'en décidant le contraire, elle a violé par fausse application les articles L 613-3 et L 615-1 du code de la propriété intellectuelle ;

7°) que les droits conférés par le brevet ne s'étendent pas aux actes accomplis à titre expérimental qui portent sur l'objet de l'invention ; que le caractère expérimental des actes peut correspondre à la seule utilisation de l'objet de l'invention afin d'en observer le comportement en dehors de tout test scientifique ou technique ou de tout acte de recherche ; que la cour d'appel qui, pour écarter l'exception de caractère expérimental invoquée en tout état de cause par les sociétés Bell Helicopter, a énoncé qu'aucun test scientifique ni aucun acte de recherche n'avait été réalisé lors de la présentation de la première version du train d'atterrissage, dont la seule utilisation pouvait pourtant correspondre à un usage expérimental exclusif de toute contrefaçon par offre de vente, a violé l'article L. 613-5, b, du code de la propriété intellectuelle ;

Mais attendu, en premier lieu, que les dispositions de l'article L. 613-3 du code de la propriété intellectuelle distinguant l'offre de la mise dans le commerce, fait l'exacte application de ce texte l'arrêt qui énonce que constitue une offre, au sens de cet article, toute opération matérielle tendant à préparer la clientèle potentielle à la commercialisation prochaine du produit, même s'il est encore au stade de prototype non homologué, dans la mesure où la présentation du produit sous forme de prototype est susceptible de détourner une partie de la clientèle du produit breveté ;

Attendu, en deuxième lieu, que, sous le couvert du grief infondé de violation par fausse application de la loi, le moyen, pris en sa deuxième branche, ne tend qu'à remettre en cause l'appréciation souveraine par les juges du fond de l'intention des sociétés Bell Helicopter, à la date de la présentation du prototype le 15 septembre 2005, de commercialiser, en France, l'hélicoptère équipé de la première version du train d'atterrissage, caractérisant ainsi l'offre d'un produit contrefaisant au sens de l'article L. 613-3 du code de la propriété intellectuelle ;

Attendu, en troisième lieu, qu'en soulignant, pour caractériser l'offre en France de cet appareil, que, lorsque sa maquette fut présentée le 15 septembre 2005 à Toussus-le-Noble, l'hélicoptère Bell 429 équipé de la première version du train d'atterrissage, qui figurait au catalogue des sociétés Bell Helicopter dès 2005, était déjà proposé à la vente à l'étranger, et que cette présentation en France avait été précédée de présentations aux Etats-Unis et au Canada en vue de sa commercialisation, la cour d'appel, qui n'a pas dit que ces faits étaient constitutifs d'actes de contrefaçon commis en France, n'a pas méconnu le principe de territorialité du droit de brevet ; que le grief de la troisième branche, qui postule le contraire, n'est pas fondé ;

Attendu, en quatrième lieu, que, sous le couvert des griefs infondés de violations de la loi et de manque de base légale, le moyen, pris en ses quatrième à sixième branches, ne tend qu'à remettre en cause les motifs par lesquels les juges du fond, appréciant souverainement la réalité de la présentation au public, en France, de l'hélicoptère Bell 429 équipé de la première version du train d'atterrissage, caractérisant son offre, d'une part, à Toussus-le-Noble le 15 septembre 2005, d'autre part, sur le site internet consultable en France d'une société représentant dans ce pays les sociétés Bell Helicopter et, enfin, au salon professionnel du Bourget le 16 septembre 2009, ont écarté l'exception des actes accomplis dans un cadre privé et à des fins non commerciales, prévue par l'article L. 613-5, a, du code de la propriété intellectuelle ;

Et attendu, en dernier lieu, qu'ayant constaté, d'abord, qu'aucun travail de recherches n'avait été accompli et qu'il n'avait été communiqué aucun document établissant que des essais expérimentaux avaient été effectués à l'occasion de la présentation de l'appareil dans sa première version le 15 septembre 2005 et, ensuite, qu'aucun test scientifique n'avait été réalisé lors de sa présentation au salon du Bourget, la cour d'appel a pu écarter l'exception des actes accomplis à titre expérimental, prévue par l'article L. 613-5, b, du code de la propriété intellectuelle ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le cinquième moyen, pris en ses deuxième, sixième et huitième à dix-septième branches :

Attendu que les sociétés Bell Helicopter font grief à l'arrêt de décider que la deuxième version du train d'atterrissage équipant les hélicoptères Bell 429 reproduisait les caractéristiques des revendications 1 et 15 du brevet d'invention n° 96 07 156 dont est titulaire la société Airbus Helicopters par équivalence et qu'elles se sont rendues coupables de contrefaçon de ces revendications alors, selon le moyen :

1°) qu'il ne peut y avoir contrefaçon par équivalence que lorsque l'objet breveté n'est pas reproduit dans la même forme, la contrefaçon étant alors réalisée par l'identité de la fonction exercée par les moyens des objets en présence ; que la cour d'appel, dont les motifs reposent tout à la fois sur une contrefaçon par reproduction littérale des revendications 1 et 15 du brevet et sur une contrefaçon par équivalence de ces mêmes revendications et qui laissent ainsi incertain le fondement juridique de la décision, plaçant la Cour de cassation dans l'impossibilité d'exercer son contrôle, a entaché sa décision d'une contradiction qui la prive de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

2°) que dans des conclusions demeurées sans réponse, signifiées le 8 janvier 2015, les sociétés Bell Helicopter faisaient valoir que, parmi les trois « fonctions » dont la société Airbus Helicopters revendiquait le faisceau, la "fonction" relative à la liaison de la traverse avant à la structure de l'appareil était étrangère aux caractéristiques couvertes par la revendication 1 et que la "fonction" relative au fait que la traverse avant ne travaillait plus en flexion dans un seul plan sensiblement vertical mais travaillait en flexion dans plusieurs plans et en torsion, inhérente au mode de réalisation dans laquelle la traverse avant est décalée vers l'arrière, mode de réalisation faisant l'objet de la revendication 16 non-opposée, était étrangère aux caractéristiques couvertes par les revendications 1 et 15, opposées, protégeant un décalage vers l'avant de la traverse ; que la cour d'appel, qui a défini ainsi les fonctions techniques dont la reproduction aurait traduit une contrefaçon par équivalence : "traverse avant du train dont la présence des zones inclinées de transition à double courbure, en porte-à-faux, qui travaille en flexion sur plusieurs plans et en torsion, liée à la structure de l'appareil qui transmet une partie des efforts vers les patins", sans répondre aux conclusions qui précèdent a privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

3°) que la cour d'appel ne pouvait, sans entacher sa décision d'une contradiction, énoncer que les trains de l'art antérieur ne comportaient pas de zone de transition inclinée, pour en déduire qu'ils ne pouvaient exercer les fonctions revendiquées par le brevet, après avoir constaté que, dans les trains classiques, la traverse était rapportée aux patins par un manchon et que cette même configuration, reproduite dans le train critiqué, dans lequel la traverse est rapportée aux patins par un manchon, correspondait à une zone de transition inclinée dans laquelle le manchon lui-même constituait l'inclinaison ; que cette contradiction prive l'arrêt de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

4°) que dans des conclusions demeurées sans réponse, signifiées le 8 janvier 2015, les sociétés Bell Helicopter démontraient que la transmission vers les patins des efforts s'exerçant sur la traverse était connue de l'art antérieur comme le démontrait le passage de la description du brevet, p. 11 lignes 1 à 11, décrivant le comportement mécanique à l'atterrissage des trains de l'art antérieur par comparaison avec celui du train couvert par le brevet et comme le démontrait le brevet d'invention du 29 août 1968, correspondant à la pièce adverse n° 49, montrant la distribution des efforts par rapport aux différents éléments du train d'atterrissage et plus particulièrement la transmission des efforts des traverses sur les patins ; qu'en se bornant à énoncer, sans répondre à ces conclusions ni les analyser, que les fonctions couvertes par le brevet étaient « nouvelles », la cour d'appel a privé sa décision de motifs en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;

5°) que les brevets antérieurs n° 91 05 524 et 91 05 525 communiqués par les sociétés Bell Helicopter pour démontrer que les fonctions revendiquées étaient connues de l'art antérieur faisaient état d'un travail en torsion de la traverse, brevet n° 91 05 525 p. 8, brevet n° 91 05 525 p. 4, et d'un travail de la traverse en flexion dans le plan horizontal et dans le plan vertical, brevet n° 91 05 524 p.11 et brevet n° 91 05 525 pp. 4, 6 et 18 ; que la cour d'appel qui a énoncé que, dans les documents communiqués par les sociétés Bell Helicopter, les trains conventionnels travaillaient, à la différence de celui de l'invention, en flexion sur un seul plan, a dénaturé les brevets n° 91 05 524 et 91 05 525, en violation de l'article 1134 du code civil ;

6°) qu'il y a contrefaçon par équivalence lorsque deux moyens de forme différente remplissent la même fonction ; que la contrefaçon par équivalence suppose que la fonction du moyen couvert par le brevet ne soit pas connue de l'art antérieur ; qu'une invention peut être nouvelle sous le rapport de la brevetabilité et comporter des moyens qui, différant par leur forme des moyens de l'art antérieur, couvrent une fonction identique ; que pour écarter comme n'étant pas pertinents les documents communiqués par les sociétés Bell Helicopter pour démontrer que les fonctions exercées par les zones de transition inclinées du brevet étaient connues des trains d'atterrissage de l'art antérieur, la cour d'appel a énoncé que les trains conventionnels ne comportaient pas de zone de transition inclinée et qu'il avait été établi précédemment que l'invention brevetée était nouvelle ; qu'en statuant de la sorte au prix d'une confusion entre la condition de nouveauté du brevet sous le rapport de la brevetabilité et la condition, requise sous le rapport de la contrefaçon par équivalence, que la fonction exercée par le moyen ne soit pas connue de l'art antérieur, la cour d'appel a violé l'article L. 615-1 du code de la propriété intellectuelle ;

7°) que la contrefaçon par équivalence est réalisée lorsque deux moyens de forme différente remplissent la même fonction ; que la cour d'appel qui, pour décider que le train équipant l'appareil Bell 429 des sociétés Bell Helicopter constituait la contrefaçon par équivalence du brevet, a retenu que le train critiqué présentait une zone de transition inclinée à double changement de direction plaçant la traverse avant en porte-à-faux, le manchon reliant, dans le train critiqué, la traverse aux patins constituant, selon la cour d'appel, la première inclinaison de la zone de transition ; qu'en statuant par de tels motifs de nature à caractériser, le cas échéant, une reproduction des moyens du brevet dans leur forme et non une reproduction des fonctions exercées par des moyens de forme différente, la cour d'appel a statué par des motifs inopérants et impropres à caractériser l'existence d'une contrefaçon par équivalence, privant ainsi sa décision de toute base légale au regard de l'article L 615-1 du code de la propriété intellectuelle ;

8°) que c'est au propriétaire du brevet, qui entend démontrer que l'objet critiqué constitue la contrefaçon par équivalence de son titre, qu'il appartient de démontrer que les fonctions dont il soutient qu'elles seraient reproduites procurent les mêmes résultats ; que la cour d'appel qui, pour retenir une équivalence des résultats entre la seconde version du train équipant l'appareil Bell 429 des sociétés Bell Helicopter et la première version, dont elle a retenu qu'elle constituait une reproduction littérale du train objet des revendications 1 et 15 du brevet, a énoncé, au demeurant à tort, qu'aucune analyse pertinente n'était communiquée par les sociétés Bell Helicopter démontrant l'absence d'équivalence de résultat entre les deux trains, qu'aucun document ne démontrait l'existence d'une rigidité globale plus importante que la première version du train d'atterrissage et que seul était établi par les documents communiqués par les sociétés Bell Helicopter un déplacement des zones de rigidité, a inversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil ;

9°) que les sociétés Bell Helicopter, bien que la charge de la preuve ne leur incombât pas, démontraient dans leurs conclusions signifiées le 8 janvier 2015 que le train protégé par le brevet français et la deuxième version du train du Bell 429 ne fonctionnaient pas de manière équivalente, la présence d'un manchon au lieu de la courbure revendiquée par le brevet correspondant à une augmentation de la rigidité globale du train d'atterrissage, en se fondant sur une étude réalisée par le docteur B... à partir de l'appareil lui-même, et non comme les simulations produites par la société Airbus Helicopters à partir d'un simple modèle ; que la cour d'appel, dont la décision ne comporte aucune mention de l'étude du docteur B..., ne pouvait énoncer qu'aucune analyse contraire pertinente n'était communiquée par les sociétés intimées démontrant l'absence d'équivalence de résultat entre les deux versions sans méconnaître les termes du litige tels qu'ils étaient fixés par ces conclusions et la pièce régulièrement communiquée et produite, violant ainsi l'article 4 du code de procédure civile ;

10°) que la cour d'appel, qui a elle-même constaté que, dans les trains d'atterrissage classiques, la traverse est rapportée aux patins au moyen d'un manchon ne pouvait énoncer qu'aucune document ne démontrait l'existence, dans la deuxième version du train dans lequel elle a constaté que la traverse était rapportée aux patins au moyen d'un manchon, d'une rigidité globale plus importante sans s'expliquer sur les mentions de la description du brevet dans laquelle il était indiqué que l'invention se proposait de remédier à « la grande rigidité du système » constituant l'inconvénient majeur des trains d'atterrissage classiques et que, dans le train selon l'invention, il était possible de « mieux amortir les chocs à l'atterrissage » grâce à une plus grande déformation de la traverse avant en flexion et grâce à sa rotation, autorisée par la flexion élastique des zones de transition, la plus grande déformation de la traverse permettant de réduire la rigidité d'un train à traverse intégrée par rapport à un train à traverse rapportée ; que faute de l'avoir fait, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 615-1 du code de la propriété intellectuelle ;

11°) que la cour d'appel ne pouvait se borner à énoncer que M. Robert C..., responsable au sein des sociétés Bell Helicopter, avait reconnu, lors de son audition devant la juridiction canadienne, que l'objectif poursuivi était d'obtenir un train d'atterrissage ayant le même comportement que la première version, ce train, même altéré par rapport à l'invention, résolvant le problème de la résonance au sol avec un train d'atterrissage restant plus léger que les trains traditionnels, cette considération ne pouvant suppléer à la constatation positive, seule de nature à conférer un fondement à l'arrêt attaqué, de l'équivalence technique du comportement des deux versions du train, et se rapportant en outre au comportement de l'hélicoptère en résonance au sol, objet de la revendication 16 du brevet et étranger aux revendications opposées au soutien de l'action en contrefaçon ; que la cour d'appel qui a statué par des motifs inopérants a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article L. 615-1 du code de la propriété intellectuelle ;

12°) que l'aveu exige de la part de son auteur une manifestation non équivoque de sa volonté de reconnaître pour vrai un fait de nature à produire contre lui des conséquences juridiques ; que la poursuite des tests d'accréditation avec des modèles Bell 429 équipés d'un train de forme luge à seule fin de valider leur outil logiciel, comme elles en justifiaient en produisant l'attestation du directeur de recherche et développement de la société Bell Helicopter Textron, n'avait nullement le caractère d'une manifestation non équivoque de la volonté des sociétés Bell Helicopter de reconnaître pour vrai le fait de l'équivalence de comportement des deux versions du train et n'avait donc pas le caractère d'un aveu ; qu'en jugeant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1354 du code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que c'est sans contradiction qu'après avoir constaté la reproduction de certains éléments des revendications 1 et 15 du brevet dans la deuxième version du train d'atterrissage de l'hélicoptère Bell 429, et relevé des différences de forme des moyens mis en oeuvre, l'arrêt en déduit que cette version ne constitue pas une reproduction littérale des caractéristiques desdites revendications, mais que, remplissant les mêmes fonctions en vue du même résultat que l'invention, elle en constitue la contrefaçon par équivalence ;

Attendu, en deuxième lieu, qu'en retenant, au terme d'une interprétation souveraine de leur portée, que les fonctions techniques mises en oeuvre par les revendications 1 et 15 consistent en une « traverse avant du train dont la présence des zones inclinées de transition à double courbure, en porte-à-faux, qui travaille en flexion sur plusieurs plans et en torsion, liée à la structure de l'appareil qui transmet une partie des efforts vers les patins », la cour d'appel a ainsi répondu, en les écartant, aux conclusions des sociétés Bell Helicopter qui soutenaient au contraire que de telles fonctions étaient étrangères à ces revendications ;

Attendu, en troisième lieu, qu'ayant constaté que, la traverse avant de la deuxième version du train d'atterrissage de l'hélicoptère Bell 429 étant intégrée à la zone de patin pour former un tout fonctionnel, ce train se démarquait des trains d'atterrissage classiques dont les traverses sont rapportées par des manchons et ne forment pas un tout fonctionnel, c'est sans contradiction que l'arrêt relève que la deuxième version du train d'atterrissage de l'hélicoptère Bell 429 comporte une zone de transition inclinée tandis que les trains d'atterrissage antérieurs au brevet n'en comportaient pas ;

Attendu, en quatrième lieu, qu'en retenant, après avoir considéré que les documents communiqués par les sociétés Bell Helicopter pour soutenir que les fonctions assurées par les zones de transition inclinées du brevet Airbus Helicopters étaient connues des trains d'atterrissage antérieurs ne sont pas pertinents puisque, dans ces documents, les trains conventionnels, qui ne contiennent pas de zone de transition inclinée, travaillent, à la différence de l'invention, en flexion sur un seul plan, que les fonctions techniques mises en oeuvre par les revendications 1 et 15 sont nouvelles, la cour d'appel, qui s'est livrée à une interprétation, exclusive de dénaturation, des brevets antérieurs n° 91 05 524 et 91 05 525 communiqués par les sociétés Bell Helicopter, que leur ambiguïté rendait nécessaire, et abstraction faite du motif surabondant critiqué par la sixième branche, par lequel elle s'est référée à la nouveauté de l'invention précédemment retenue, a ainsi répondu, en les écartant, aux conclusions de ces sociétés qui soutenaient que de telles fonctions n'étaient pas nouvelles ;

Attendu, en cinquième lieu, qu'après avoir relevé que la deuxième version du train d'atterrissage de l'hélicoptère Bell 429 comportait, par rapport aux revendications 1 et 15 du brevet, des différences de forme des moyens mis en oeuvre, tenant à l'adjonction de patins et à l'existence de modifications de positionnement sur la première courbure et de dimensions des manchons, l'arrêt retient que cette deuxième version, malgré la présence d'un manchon situé sur la première zone de transition et l'ajout d'une spatule à l'extrémité avant du patin, remplit les mêmes fonctions en vue du même résultat que l'invention ; qu'il retient en outre que ce nouveau manchon, situé sur la première zone de transition, constitue lui-même la première inclinaison, dans la mesure où se trouve toujours, à l'avant des patins, une zone de transition inclinée à double changement de direction plaçant la traverse avant en porte-à-faux, ladite traverse avant étant intégrée, au sens du brevet ; qu'ayant déduit de ces constatations et appréciations que la fonction exercée par cette forme différente des moyens procurait les mêmes avantages en vue du même résultat et qu'ainsi, la contrefaçon par équivalence était constituée, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

Attendu, en sixième lieu, qu'après avoir constaté que la société Airbus Helicopters, pour confirmer l'équivalence des résultats, avait communiqué des simulations réalisées par l'un des inventeurs du brevet, M. N...             , desquelles il ressortait que les deux trains d'atterrissage réagissaient de façon identique du point de vue statique et dynamique, tant en mode tangage qu'en mode roulis, les deux configurations ayant les mêmes qualités d'absorption d'énergie et ces deux trains s'adaptant aux mêmes appareils, l'arrêt relève, d'abord, que le bien-fondé de la méthodologie a été reconnu et les conclusions de ces simulations approuvées par M. D..., professeur à l'Ecole nationale supérieure d'arts et métiers et auteur d'ouvrages sur les phénomènes de résonance au sol des hélicoptères, et, ensuite, que ces simulations sont contestées par les sociétés Bell Helicopter, qui communiquent des avis critiques de M. E... auxquels ont répondu MM. N...              et D..., leur déniant toute pertinence, ainsi que trois avis supplémentaires de MM. B..., E... et F... en réplique ; qu'il relève, encore, que les rapports communiqués par les sociétés Bell Helicopter établissent seulement un déplacement des zones de rigidité, les déformations globales étant identiques ; qu'en cet état, c'est sans méconnaître les termes du litige ni omettre de prendre en compte l'étude réalisée par M. B..., et par un motif dont une simple impropriété des termes a été relevée par la huitième branche, que la cour d'appel a considéré qu'aucune analyse contraire pertinente démontrant l'absence d'équivalence de résultat n'avait été communiquée par les sociétés Bell Helicopter et qu'aucun document ne démontrait l'existence d'une rigidité globale plus importante que la première version du train d'atterrissage ;

Attendu, en septième lieu, qu'ayant relevé que, la traverse avant de la deuxième version du train d'atterrissage étant intégrée à la zone de patin pour former un tout fonctionnel, ce train se démarquait des trains d'atterrissage classiques dont les traverses sont rapportées par des manchons, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation des éléments de preuve versés aux débats et sans méconnaître les enseignements de la description du brevet, que la cour d'appel a retenu qu'aucun document ne démontrait l'existence, dans cette deuxième version, d'une rigidité globale plus importante que la première version du train d'atterrissage, seul étant établi un déplacement des zones de rigidité, et que, malgré la présence d'un manchon situé sur la première zone de transition et l'ajout d'une spatule à l'extrémité avant du patin, cette deuxième version remplissait les mêmes fonctions en vue du même résultat que l'invention, dans la mesure où il y avait toujours à l'avant des patins une zone de transition inclinée à double changement de direction plaçant la traverse avant, intégrée, en porte-à-faux, ce dont elle a déduit que cette version du train d'atterrissage constituait la contrefaçon par équivalence des revendications 1 et 15 du brevet ;

Et attendu, en dernier lieu, que les onzième et douzième branches critiquent des motifs surabondants ;

D'où il suit que le moyen, inopérant en ses sixième, huitième, onzième et douzième branches, n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le sixième moyen, pris en ses première et troisième branches :

Attendu que les sociétés Bell Helicopter font grief à l'arrêt de juger que la deuxième version du train d'atterrissage équipant les hélicoptères Bell 429 reproduit les caractéristiques des revendications n° 2, 4, 5, 7, 8, 9, 10 et 13 du brevet n° 96 07 156 dont est titulaire la société Airbus Helicopters et qu'elles se sont rendues coupables de contrefaçon de ces mêmes revendications alors, selon le moyen :

1°) que la cassation des dispositions déclarant contrefaite la revendication 1 principale du brevet entraînera par voie de conséquence la cassation des dispositions déclarant contrefaites les revendications dépendantes 2, 4, 5, 7, 8, 9, 10 et 13, en application de l'article 625 du code de procédure civile ;

2°) que la cour d'appel, qui a constaté que, dans la forme de réalisation couverte par la revendication 7, la traverse avant est constituée d'une seule branche dont les extrémités sont chacune reliées par un moyen de jonction démontable à la partie avant du patin correspondant, ce moyen de jonction étant disposé entre les deux courbures de la zone de transition concernée, ne pouvait décider que cette revendication était contrefaite, fût-ce par équivalence, par la deuxième version du train dans lequel les moyens de jonction ne relient pas la traverse au patin mais relient le manchon, dont la cour d'appel considère qu'il constituerait la première courbure, à la traverse, de tels moyens, qui n'étaient pas la reproduction littérale des moyens couverts par la revendication, ne pouvant procurer le même effet technique ni le même résultat, sans méconnaître la portée de ses constatations sur le contenu de la revendication violant ainsi l'article L. 615-1 du code de la propriété intellectuelle ;

Mais attendu, d'une part, que le rejet du cinquième moyen rend le moyen, pris en sa première branche, sans portée ;

Et attendu, d'autre part, que c'est sans méconnaître la portée de ses constatations sur le contenu de la revendication 7 du brevet qu'après avoir relevé que, dans la deuxième version du train d'atterrissage des hélicoptères Bell 429, la traverse avant du train comprend une branche dont les extrémités sont emmanchées dans des manchons fixés à la partie avant du train, formant une seule pièce, ces manchons constituant la première courbure, et que, si les manchons ne sont pas situés entre les deux courbures, la traverse avant est toutefois reliée à ceux-ci par un moyen de jonction démontable qui est situé entre les deux inclinaisons à proximité de la première courbure, la cour d'appel a retenu que ce moyen de jonction remplissait ainsi le même effet en vue du même résultat que celui visé par ladite revendication et en a déduit qu'il en constituait la contrefaçon par équivalence ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le cinquième moyen, pris en ses première, troisième, quatrième, cinquième et septième branches, et sur le sixième moyen, pris en ses deuxième et quatrième branches :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les sociétés Bell Helicopter Textron et Bell Helicopter Textron Canada aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à la société Airbus Helicopters la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juillet deux mille dix-sept.