Cass. com., 31 mai 2005, n° 03-20.952
COUR DE CASSATION
Avis
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Rapporteur :
Mme Collomp
Avocat général :
M. Main
Avocats :
Me Blondel, SCP Vier, Barthélemy et Matuchansky
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles 1147, 1382 et 1383 du Code civil ;
Attendu qu'en l'absence de faute du déposant, ou d'un préposé de celui-ci, et même s'il n'a lui-même commis aucune faute, le banquier n'est pas libéré envers le client qui lui a confié des fonds quand il se défait de ces derniers sur présentation d'un faux ordre de paiement revêtu dès l'origine d'une fausse signature et n'ayant eu à aucun moment la qualité légale de chèque ; qu'en revanche, si l'établissement de ce faux ordre de paiement a été rendu possible à la suite d'une faute du titulaire du compte, ou de l'un de ses préposés, le banquier n'est tenu envers lui que s'il a lui-même commis une négligence, et ce seulement pour la part de responsabilité en découlant ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'entre 1992 et 1997, le clerc de M. X, alors avoué près la cour d'appel de Lyon, a émis, à son profit, en imitant la signature de ce dernier, 245 chèques que le Crédit industriel et commercial (le CCF) où se trouvait le compte, lui a payés ; qu'après le décès de leur auteur, Mme Y veuve X, Mme X, épouse Z, Mme X, épouse A, Mme X épouse B, Mme X épouse C (les consorts X), ses ayants droit, ont fait assigner l'établissement de crédit en responsabilité ;
Attendu que pour rejeter les demandes des consorts X, l'arrêt retient que M. X, qui n'avait surveillé ni ses carnets de chèques ni les mouvements de son compte bancaire ni la comptabilité de son étude, avait été gravement négligent tandis que le CCF ne pouvait se voir reprocher aucune faute, dès lors que les signatures simplifiées figurant sur les titres litigieux étaient très semblables à celle utilisée depuis plusieurs années par M. X ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que, fussent-elles semblables aux signatures récentes de M. X, celles qui figuraient sur les titres litigieux n'étaient pas conformes au spécimen déposé par celui-ci et qu'il appartenait dès lors à l'établissement de crédit, en l'absence de nouveau dépôt, de refuser le paiement sollicité sauf instruction contraire de son client, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit que le Crédit commercial de France n'avait commis aucune faute, l'arrêt rendu le 2 octobre 2003, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble.