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Décisions

Cass. 3e civ., 8 octobre 1997, n° 96-10.410

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. BEAUVOIS

Rapporteur :

Mme Stéphan

Avocat général :

M. Weber

Avocat :

Me Choucroy

cour d'appel de Paris (16e chambre, sect…

10 novembre 1995

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 novembre 1995), que la société Charter, locataire, à compter du 1er avril 1991, de locaux à usage commercial appartenant à la société civile immobilière (la SCI) des ..., lui a délivré congé le 4 août 1993 pour le 31 mars 1994; que, postérieurement à la délivrance de ce congé, des négociations ont eu lieu entre les parties sur la prolongation éventuelle de la location pour une période limitée; que la bailleresse a subordonné cette prolongation à la signature d'un accord, qui n'a en définitive pas été établi; que la locataire s'est néanmoins maintenue dans les lieux au-delà de la date d'effet du congé; que la bailleresse l'a assignée en nullité et subsidiairement en rétractation de la dénonciation du bail par la locataire, pour faire dire que le bail devait recevoir sa pleine application et pour faire condamner la société Charter à lui payer des loyers et des dommages et intérêts ;

Attendu que la société Charter fait grief à l'arrêt d'accueillir ces demandes, alors, selon le moyen "1 ) que la renonciation à un droit ne se déduit pas de la seule inaction de son titulaire et ne peut résulter que d'actes manifestant sans équivoque la volonté de renoncer; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de ses constatations d'où il résultait que postérieurement à la prise d'effet du congé litigieux, le bailleur et le preneur ont négocié une prolongation limitée du bail sans aboutir à un accord et, par suite, que ce dernier ne s'était maintenu dans les lieux qu'en prévision d'un tel accord, ce qui excluait toute volonté du preneur de poursuivre le bail pour une nouvelle période triennale, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil; 2 ) qu'en toute hypothèse, le congé régulièrement délivré par le locataire met fin au bail et ne peut être rétracté sans le consentement du bailleur; que la cour d'appel a constaté que postérieurement à la prise d'effet du congé le preneur aurait renoncé au bénéfice de celui-ci en se maintenant dans les lieux et que les parties n'auraient pas été d'accord sur les conditions de la location; qu'en ne tirant pas les conséquences légales de telles constatations d'où il résultait que le bailleur n'avait pas accepté la prétendue rétractation du preneur, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil; 3 ) qu'au surplus, les conventions doivent être exécutées de bonne foi; qu'en ne recherchant pas, ainsi qu'elle y était invitée, si le bailleur n'avait pas fait preuve de mauvaise foi dans l'exécution du bail en négociant postérieurement à la délivrance du congé litigieux une prolongation limitée du bail et en exprimant avec retard son désaccord à une prolongation du bail jusqu'au 31 octobre 1994 exclusivement, dans le but de conduire le preneur à se maintenir dans les lieux après la date d'effet du congé, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1134, alinéa 3, du Code civil" ;

Mais attendu qu'ayant constaté que la société Charter s'était maintenue dans les lieux après la date d'effet du congé et alors que l'accord envisagé entre elle et la bailleresse sur l'éventuelle prolongation de la location pour une période limitée n'avait pas été concrétisé par un écrit comme l'exigeait cette dernière, la cour d'appel a pu en déduire, sans être tenue de procéder à des recherches que ses constatations rendaient inopérantes, que le maintien dans les lieux de la société Charter au-delà de la date d'effet du congé, qu'elle avait elle-même délivré, valait renonciation au bénéfice de ce congé ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Charter aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Charter à payer à la SCI des ... la somme de 9000 francs ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-sept, signé par M. Beauvois président, et par Mlle Jacomy, greffier de chambre, qui a assisté au prononcé de l'arrêt.