Cass. com., 8 octobre 2002, n° 00-16.361
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Dumas
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que l'Institut national de l'Audiovisuel (l'INA) a acquis en 1988 de la société Tree Studio les marques monégasque et française "Imagina", cette dernière déposée le 10 décembre 1985 et enregistrée sous le numéro 1.334.357 ; que M. X... a poursuivi en justice l'annulation de cette marque, au motif qu'il était lui-même titulaire d'une marque "Imagina" déposée le 27 novembre 1985 et enregistrée sous le numéro 769.446 ; qu'en cours d'instance, l'INA a acquis les droits de M. X... sur cette marque, puis a demandé la condamnation de la société Tree Studio, qu'elle avait entre-temps appelée en cause, à lui rembourser le prix de cette acquisition ;
Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 1626 du Code civil ;
Attendu que pour dénier la réalité de l'éviction subie par l'INA, l'arrêt retient que ce dernier a conservé la marque monégasque et que la principale exploitation de la marque "Imagina" se situe précisément à Monaco ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la société Tree Studio avait cédé à l'INA, non seulement la marque monégasque, mais également la marque française, de sorte que la réclamation de M. X... pouvait impliquer une éviction partielle, la cour d'appel a violé le texte susvisé par fausse application ;
Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu l'article 1626 du Code civil et l'article L 712-1 du Code de la propriété intellectuelle ;
Attendu que pour rejeter la réclamation formée par l'INA sur le fondement de la garantie d'éviction, l'arrêt attaqué retient encore que la garantie contractuelle qui portait sur la pleine propriété de la marque et de la dénomination cédées ne peut jouer en l'absence d'annulation de la marque, de preuve de cession, de licence ou de nantissement antérieurs à l'acquisition des droits par l'INA, qui aurait pu opposer à M. X... les droits qu'il tenait sur la dénomination Imagina du fait de son utilisation avant décembre 1985, que la procédure poursuivie par M. X... n'a pas été menée à son terme, et que les droits privatifs résultant de la création du terme, attestée par l'enveloppe Soleau déposée par le gérant de Tree Studio le 3 juin 1985, qui avaient été transmis à l'INA par le protocole de 1988, n'ont pas été invoqués ;
Attendu qu'en se déterminant pas ces motifs impropres à dénier le caractère incontestable des droits de M. X..., la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
Et sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1626 du Code civil ;
Attendu que pour rejeter la réclamation de l'INA, l'arrêt retient enfin qu'aucune faute contractuelle n'est établie à l'encontre de la société Tree Studio, qui justifie par les pièces produites aux débats avoir fait avant le dépôt de sa marque une recherche d'antériorités qui s'est révélée infructueuse, que l'INA ne produit aucun élément pour démontrer une faute quasi-délictuelle, alors qu'il aurait pu faire une recherche d'antériorités et opposer à M. X... les droits qu'il tenait sur la dénomination Imagina du fait de son utilisation avant décembre 1985, et que les droits privatifs résultant de la création du terme, attestée par l'enveloppe Soleau déposée par le gérant de tree studio le 3 juin 1985, qui avaient été transmis à l'INA par le protocole de 1988, n'ont pas été invoqués ;
Attendu qu'en écartant toute garantie du vendeur par ces motifs impropres à caractériser l'imputabilité du préjudice à la faute du seul cessionnaire, fût-il professionnel de l'audiovisuel, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 17 mars 2000, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles ;
Condamne la société Tree Studio aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit octobre deux mille deux.