Cass. 3e civ., 8 janvier 1975, n° 73-13.635
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Costa
Rapporteur :
M. Dutheillet-Lamonthezie
Avocat général :
M. Laguerre
Avocat :
Me Rouvière
SUR LE PREMIER MOYEN : ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE QUE, PAR DEUX ACTES DATES DU 27 JANVIER 1949, LOUIS Y... A CONSTITUE, AVEC MOUSSY ET SENEGAL, LA SOCIETE CIVILE DES TERRAINS ET IMMEUBLES DU 14 RUE ARISTIDE-BRIAND A LEVALLOIS-PERRET, A LAQUELLE IL A FAIT APPORT DE L'IMMEUBLE CONSTITUANT LE SIEGE SOCIAL, ET LA SARL DES LABORATOIRES LECOQ ;
QU'IL A ENSUITE CONCLU, LE 2 MAI 1950, AVEC LA SOCIETE LAROCHE-NAVARRON UN ACCORD SUR LA LOCATION FUTURE DE CET IMMEUBLE, SOUS CONDITION D'ACHAT PAR LADITE SOCIETE DES 5000 PARTS SOCIALES DE MOUSSY, CONDITIONS REALISEE LE 30 MAI 1950 ;
QUE, LE 24 JUIN 1950, Y..., EN QUALITE DE GERANT DE LA SOCIETE CIVILE, A DONNE A BAIL A LA SOCIETE LAROCHE-NAVARRON DEUX ETAGES DE L'IMMEUBLE ;
QUE LA SOCIETE CIVILE AYANT ETE DECLAREE NULLE POUR DEFAUT D'AFFECTIO SOCIETATIS PAR ARRET DU 15 JUIN 1966, DEVENU IRREVOCABLE, FRANCOIS Y... A, APRES DECES DE SON PERE, DEMANDE LA NULLITE DU BAIL DU 24 JUIN 1950 ;
ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE, QUI A DECLARE CETTE DEMANDE BIEN FONDEE, D'AVOIR ADMIS QUE LA SOCIETE LAROCHE-NAVARRON ETAIT UNE LOCATAIRE DE MAUVAISE FOI ET NE POUVAIT SE PREVALOIR DU BAIL DE 1950, ALORS, SELON LE MOYEN, QUE CE BAIL AYANT ETE CONSENTI PAR LE SEUL GERANT STATUTAIRE DE LA SOCIETE CIVILE, LE FAIT QUE LA SOCIETE LAROCHE-NAVARRON EUT ETE PORTEUR DE PARTS DE CETTE SOCIETE N'IMPLIQUANT PAS NECESSAIREMENT SA MAUVAISE FOI DANS LA CONCLUSION D'UN BAIL A ELLE CONSENTI EN UNE AUTRE QUALITE, AINSI QUE LE SOUTENAIENT DES CONCLUSIONS LAISSEES SANS REPONSE, QUE LE FAIT DE NE PAS IGNORER LE DEFAUT D'AFFECTIO SOCIETATIS D'UNE SOCIETE CONSTITUEE AVANT QUE LA SOCIETE LAROCHE-NAVARRON DEVINT CESSIONNAIRE DE PARTS N'ETAIT PAS CONSTITUTIF DE MAUVAISE FOI RELATIVEMENT A UN BAIL REMPLISSANT LES CONDITIONS PREVUES A L'ARTICLE 1709 DU CODE CIVIL, LES CONTRATS DE SOCIETE ET DE BAIL AYANT DES CAUSES ET DES OBJETS DIFFERENTS ;
MAIS ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL, SE FONDANT SUR DES MOTIFS, SOUTIEN NECESSAIRE DU DISPOSITIF, DE L'ARRET IRREVOCABLE DU 15 JUIN 1966, RETIENT QUE LA SOCIETE LAROCHE-NAVARRON ETAIT, DES L'ORIGINE, DEPOURVUE DE TOUTE INTENTION VERITABLE DE COOPERER A UNE ENTREPRISE COMMUNE ET QU'ELLE S'ETAIT FAIT CONSENTIR LE BAIL LITIGIEUX A UN LOYER INFERIEUR A SA VALEUR ET SANS VERSEMENT DE PAS DE PORTE, DANS DES CONDITIONS GRAVEMENT PREJUDICIABLES A LA SOCIETE CIVILE DONT ELLE ETAIT COGERANTE ;
QU'EN DEDUISANT DE CES ENONCIATIONS QUE LA SOCIETE LAROCHE-NAVARRON N'ETAIT PAS UNE LOCATAIRE DE BONNE FOI, LA COUR D'APPEL, NON TENUE DE SUIVRE LES PARTIES DANS LE DETAIL DE LEUR ARGUMENTATION, N'A FAIT QU'USER DE SON POUVOIR SOUVERAIN D'APPRECIATION ET A JUSTIFIE SA DECISION SUR CE POINT ;
SUR LE DEUXIEME MOYEN : ATTENDU QU'IL EST REPROCHE A L'ARRET D'AVOIR ADMIS QUE LA VALIDITE DU BAIL NE POUVAIT ETRE ADMISE, NI SUR LE FONDEMENT DE L'INDIVISION, NI SUR CELUI DE LA GESTION D'AFFAIRES, ALORS, SELON LE MOYEN, QUE, D'UNE PART, ON NE PEUT EXCLURE UN ETAT D'INDIVISION, AU MOTIF QU'A LA CESSATION DE CET ETAT, LES BIENS SONT CENSES N'AVOIR JAMAIS APPARTENU A L'INDIVISION, QUE, D'AUTRE PART, LA COUR D'APPEL SE CONTREDIT EN AFFIRMANT QUE L'IMMEUBLE EST TOUJOURS RESTE DANS LE PATRIMOINE DE Y..., TOUT EN ADMETTANT L'EXISTENCE D'UN GROUPEMENT D'INTERETS ENTRE Y... ET LA SOCIETE LAROCHE-NAVARRON ET QU'ENFIN, ELLE DENATURE AU SURPLUS L'ASSIGNATION SPECIFIANT QU'IL Y AVAIT COMPTE A FAIRE POUR METTRE UN TERME AU GROUPEMENT D'INTERETS ET DONNE, DE SURCROIT, A LA NOTION DE GROUPEMENT D'INTERETS UNE PORTEE RESTRICTIVE QU'ELLE NE COMPORTE PAS, CE QUI PRIVE DE TOUTE BASE LEGALE LE REJET DE LA DEMANDE DE VALIDITE DU BAIL FONDEE SUR LA GESTION D'AFFAIRES ;
MAIS ATTENDU, D'ABORD, QUE LA COUR D'APPEL RETIENT A BON DROIT QUE LA NULLITE D'UNE SOCIETE POUR DEFAUT D'AFFECTIO SOCIETATIS ENTRAINE L'INEXISTENCE DE TOUT LIEN VERITABLE D'ASSOCIATION ENTRE LES PSEUDO-ASSOCIES ET EXCLUT NOTAMMENT QUE LES APPORTS DE CEUX-CI SOIENT ENTRES DANS UN PATRIMOINE COMMUN ;
QU'ELLE A AINSI JUSTEMENT EXCLU L'EXISTENCE D'UNE INDIVISION TEMPORAIRE DE L'IMMEUBLE LOUE DONT Y... AVAIT FAIT APPORT ;
ATTENDU, ENSUITE, QUE LA GESTION D'AFFAIRES N'EST GENERATRICE D'OBLIGATIONS QUE SI L'AFFAIRE A ETE UTILEMENT ADMINISTREE ;
QUE LA COUR D'APPEL RETIENT QUE LE BAIL, DANS LES CONDITIONS OU IL A ETE CONCLU, CONSTITUAIT UN ACTE DE MAUVAISE GESTION ;
QU'ELLE A, PAR CES SEULS MOTIFS, ETRANGERS A LA CONTRADICTION ALLEGUEE, LEGALEMENT JUSTIFIE SA DECISION DE CE CHEF, SANS DENATURER AUCUN DOCUMENT ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN NE PEUT ETRE ACCUEILLI ;
SUR LE TROISIEME MOYEN : ATTENDU QU'IL EST ENFIN FAIT GRIEF A L'ARRET D'AVOIR EXCLU LA VALIDITE DE LA PROMESSE DE BAIL CONSENTIE LE 2 MAI 1950 ET OPPOSABLE A LOUIS Y... ET A SES HERITIERS, AUX MOTIFS QU'ELLE NE MENTIONNAIT PAS LES CONDITIONS ESSENTIELLES DU BAIL, QUE Y... N'ENVISAGEAIT LA LOCATION QUE COMME GERANT DE LA SOCIETE CIVILE, EN LIAISON AVEC UN PACTE SOCIAL NUL, ET QUE LA REGLE NEMO X... NE POUVAIT RECEVOIR APPLICATION EN L'ESPECE, ALORS, SELON LE POURVOI, QUE, D'UNE PART, L'ARRET DENATURE LES TERMES DES LETTRES ECHANGEES LE 2 MAI 1950 TRADUISANT CLAIREMENT L'EXISTENCE D'UNE PROMESSE DE BAIL FORMELLE, L'ABSENCE DE MENTION DES CONDITIONS DE LOCATION ETANT SANS IMPORTANCE A L'EGARD D'UN BAIL SIGNE ET EXECUTE PENDANT VINGT ANS ;
QUE, D'AUTRE PART, LA COUR D'APPEL, QUI RETIENT QUE L'IMMEUBLE A TOUJOURS ETE DANS LE PATRIMOINE DE Y..., NE POUVAIT, SANS SE CONTREDIRE, PRETENDRE QUE CE DERNIER AVAIT SIGNE LA PROMESSE DE BAIL EN QUALITE DE GERANT DE LA SOCIETE CIVILE ;
QU'IL EST ENCORE SOUTENU QUE L'ARRET CONFOND LE BAIL ET LA PROMESSE DE BAIL ANTERIEURE, VALABLE PUISQUE L'ACQUISITION DE PARTS DE LA SOCIETE CIVILE PAR LA SOCIETE LAROCHE-NAVARRON N'A ETE REALISEE QUE PLUS TARD ET AVALISEE PAR L'ARRET ;
QU'ENFIN, LA COUR D'APPEL NE POUVAIT REFUSER L'APPLICATION DE LA REGLE NEMO AUDITUR AU MOTIFS, ERRONE, QUE CETTE DERNIERE NE JOUE QU'EN MATIERE D'ORDRE PUBLIC ET DE BONNES MOEURS, CETTE REGLE EXCLUANT QU'IL PUISSE ETRE TENU COMPTE DE LA NULLITE DE LA SOCIETE POUR PRONONCER UNE NULLITE RETROACTIVE DU BAIL AU PROFIT D'UN HERITIER TENU A GARANTIE ;
MAIS ATTENDU D'ABORD QUE, SANS DENATURER AUCUN DOCUMENT, LA COUR D'APPEL CONSTATE QUE LA PRETENDUE PROMESSE DE BAIL NE MENTIONNE NI LA DUREE DE LA LOCATION, NI LE LOYER, ET EN DEDUIT EXACTEMENT QUE, FAUTE D'ACCORD DES PARTIES SUR CES ELEMENTS ESSENTIELS, IL NE PEUT Y AVOIR PROMESSE DE BAIL VALABLE ;
QU'ELLE RETIENT ENSUITE, A BON DROIT, QUE LA REGLE NEMO X... NE PEUT PERMETTRE A UN LOCATAIRE DE MAUVAISE FOI DE SE PREVALOIR D'UN BAIL NUL ET DE PRETENDRE EN VOIR SE PERPETUER L'EXISTENCE ;
QUE PAR CES SEULS MOTIFS, ETRANGERS A LA CONTRADICTION ALLEGUEE, L'ARRET EST LEGALEMENT JUSTIFIE ;
QU'AINSI, LE TROISIEME MOYEN N'EST PAS MIEUX FONDE QUE LES PRECEDENTS ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 14 MAI 1973 PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS.