Cass. com., 15 mai 1973, n° 71-12.870
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Monguillan
Rapporteur :
M. Edin
Avocat général :
M. Lambert
Avocats :
Me Lesourd, Me Georges
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu que, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Rouen, 23 avril 1971), une société en participation pour l'exploitation d'un fonds de commerce fut formée entre veuve X..., qui, propriétaire du fonds, en faisait apport dans des conditions sur lesquelles les parties sont en désaccord, tandis que sa fille Claudine, apportait une créance de salaires et son industrie ; que Claudine X... ayant épousé Chadi, puis étant décédée en laissant son mari pour héritier, il est fait grief à l'arrêt d'avoir débouté celui-ci de sa demande tendant à se voir reconnaître la qualité de copropriétaire du fonds, alors, selon le pourvoi, d'une part, que les parties sont libres de régler comme elles l'entendent les effets d'une association en participation, qu'il n'existe aucune règle de droit commun limitant leur faculté de convenir d'une copropriété indivise des apports, que l'article 12 de la loi du 29 juin 1935 ne s'applique qu'aux actes portant transfert du fonds de commerce par cession ou apport en société, mais non aux actes conférant sur le fonds un simple droit de copropriété, que d'ailleurs l'acquéreur est seul en droit de se prévaloir de l'absence des mentions exigées par ce texte dans son intérêt, alors, d'autre part, qu'il résulte des dispositions claires et précises de la convention, dénaturée par la Cour d'appel, que l'un des associés avait apporté sa créance sur sa coassociée comme contrepartie du droit de copropriété acquis par elle sur le fonds de commerce apporté par l'autre et que ce droit de copropriété se concrétisait d'une part, par l'interdiction d'aliéner le fonds de commerce sans l'accord des deux associés, d'autre part, par un droit de partage de la valeur du fonds lors de la dissolution de la société, et alors, enfin, que la Cour d'appel a dénaturé cette clause de partage stipulée sans aucune réserve pour le cas de dissolution de la société ou de vente de fonds, en refusant de l'appliquer en faveur de l'héritier de l'associée dont le décès a entraîné dissolution de la société, d'autant plus qu'en conférant à l'associée elle-même un droit patrimonial sur le fonds de commerce le contrat n'aurait pas pu légalement contenir un pacte sur succession future excluant les héritiers de ce droit patrimonial ;
Mais attendu que la convention litigieuse, régulièrement produite, contenait une clause aux termes de laquelle : "la dissolution ou la vente ne pourront être réalisées qu'avec le consentement des deux parties intéressées. Il sera alors attribué à chacune la moitié du prix de vente ou de la valeur du fonds lors de sa dissolution" ; que la Cour d'appel déclare que dans une société en participation, dépourvue de personnalité morale, chaque participant reste, en règle générale et sauf stipulation d'indivision qui n'existe pas en la cause, propriétaire de ses biens ; qu'elle retient que la convention ne contenait aucune des mentions que l'article 12 de la loi du 29 juin 1935 impose de figurer, dans les actes de cession ou d'apport en société d'un fonds de commerce, que cette omission démontre la volonté des parties d'apporter le fonds en jouissance et non d'établir sur lui un droit de copropriété, que la clause susvisée ne pouvait s'appliquer qu'au seul cas où la dissolution se serait produite du vivant des parties et de leur volonté commune, puisqu'elle exigeait leur consentement et prévoyait l'attribution à chacune d'elles de la moitié de la valeur du fonds ; que par ces motifs, la Cour d'appel n'a fait qu'user de son pouvoir souverain d'interpréter les termes ambigus et imprécis de la convention quant au droit de propriété sur le fonds ;
Attendu, d'autre part, qu'il ne résulte ni des conclusions régulièrement produites, ni de l'arrêt, que Chadi ait soutenu devant les juges du fond un moyen pris de la prohibition des pactes sur succession future ; que ce grief, mélangé de fait et de droit, ne peut être présenté pour la première fois devant la Cour de cassation ;
D'où il suit que le moyen, mal fondé en ses deux premières branches et quant au premier grief de la troisième branche, est irrecevable quant au dernier grief de la troisième branche ;
PAR CES MOTIFS :
Rejette le pourvoi formé contre l'arrêt rendu le 23 avril 1971, par la Cour d'appel de Rouen.