Cass. com., 20 décembre 2017, n° 16-19.283
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Riffault-Silk
Avocats :
SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, SCP Potier de La Varde, Buk-Lament et Robillot, SCP Rousseau et Tapie
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 3 juin 2016), que, dans le cadre d'une opération de défiscalisation, les sociétés du Soleil, Phip, Dragon soleil, Père Labat, Fusil Guadeloupe, Brija, Saint Hilaire, Socimac, Saint Just, Flopas, Decroocq Alize, Hôtelière Dupain, Créole, Boclava, Kruypers Grand Bleu, MGB, Carmen, Garnier, Soman, Eck, Roda, Saab, Coquillage, Commercial expansion, Vacances loisirs hôtels, JR Abeille, Amarante, Lamaran, Rey-Invest, Centrale de participation commerciale et Darivest ont acquis des lots d'un hôtel situé en Guadeloupe et ont apporté leurs droits de jouissance sur ces lots à la société en participation La Maison créole (la SEP), créée à cet effet, qui a pour objet la mise en commun des résultats d'exploitation de l'hôtel, la représentation commune des participants à l'égard des tiers et la conduite des actions en vue de réaliser des profits et des économies au bénéfice des participants ; que cette société a pour gérant la société Services prestige investissement (la société SPI), la gestion de l'hôtel étant assurée par la société Sagedom ; que la durée statutaire de la SEP, qui expirait le 30 juin 2004, a été prorogée successivement au 31 décembre 2004, puis au 31 décembre 2009, par assemblées générales des 24 juin 2000 et 27 septembre 2004, son activité s'étant poursuivie au-delà de la dernière prorogation ; que, considérant que le gérant de la SEP avait poursuivi l'activité de la société sans prorogation décidée à l'unanimité des participants et n'avait pas procédé aux opérations de liquidation, la société Hôtelière Dupain, la société Créole et la société Vacances loisirs hôtels, associés de la SEP, ont assigné la société SPI, la société Sagedom et les différents copropriétaires en annulation des assemblées générales des 24 juin 2000 et 27 septembre 2004 et en constatation de la dissolution de la SEP ;
Attendu que les sociétés du Soleil, Phip, Dragon soleil, Père Labat, Fusil Guadeloupe, Brija, Saint Hilaire, Socimac, Sagedom, SPI, Saint Just, Flopas et Decroocq Alize font grief à l'arrêt d'annuler les résolutions n° 1, 3 et 4 du 27 septembre 2004, de constater la dissolution de la SEP par l'arrivée de son terme et de désigner M. X...en qualité de liquidateur de la SEP pour une durée de douze mois avec pour mission de régler le passif de la SEP et de répartir l'éventuel produit net alors, selon le moyen :
1°/ que la prorogation de la société est votée à l'unanimité des associés à moins que les statuts n'en disposent autrement ; que la prorogation de la société ne constitue pas en soi une modification statutaire augmentant les engagements des associés nécessitant l'unanimité ; que l'article 3. 2 des statuts prévoyait que la prorogation de la durée de la société était décidée à la majorité simple sur deuxième convocation ; que l'assemblée générale du 27 septembre 2004 a adopté, à la majorité simple sur deuxième convocation, la résolution n° 3 ayant prorogé la durée de la société ; qu'en annulant la décision de prorogation pour n'avoir pas été prise à l'unanimité, motif pris que cette prorogation aurait augmenté les engagements des associés, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations au regard des articles 1844-6 et 1871 du code civil et a violé par fausse application l'article 1836 du code civil ;
2°/ que pour retenir une augmentation des engagements de la société, la cour d'appel s'est bornée à décrire les effets du renouvellement des engagements initiaux (interdiction de sortie des lots, mise à disposition en jouissance de lots, participation aux chargées générées par l'exploitation) ; qu'en ne précisant pas en quoi la prorogation de la société avait entraîné l'augmentation des engagements des associés, indépendamment de la seule prolongation de la durée de la société et du renouvellement de leurs engagements initiaux, quand il était au contraire précisé que le contrat de société avait été reconduit aux même charges et conditions que précédemment, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1836 du code civil ;
3°/ que la tacite reconduction résulte de la poursuite des relations contractuelles postérieurement au terme du contrat ; qu'en écartant la tacite reconduction résultant de la poursuite de l'activité après la résolution votée le 27 septembre 2004 tout en constatant que l'assignation en nullité de cette assemblée générale n'avait été introduite qu'en septembre 2007, sans rechercher ainsi en quoi la poursuite de l'activité et la participation de tous les associés à la vie sociale de la société, au moins jusqu'en septembre 2007, ne caractérisaient pas une prorogation tacite de la société de la part des associés n'ayant pas voté la prorogation, ce dont il résultait un accord unanime, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article 1836 du code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'après avoir énoncé qu'en vertu de l'article 1871 du code civil, les associés d'une société en participation conviennent librement de l'objet, du fonctionnement et des conditions de la société, sous réserve de ne pas déroger aux dispositions impératives de l'article 1836, alinéa 2, du même code, aux termes duquel en aucun cas les engagements d'un associé ne peuvent être augmentés sans le consentement de celui-ci, l'arrêt relève que la résolution n° 3 adoptée par l'assemblée générale du 27 septembre 2004 non seulement prolonge pour cinq ans la durée de la société, mais en outre interdit toute sortie des lots aux dates initialement prévues et impose le maintien de leur mise à disposition en jouissance au profit de la SEP durant cette nouvelle période ; qu'il retient que cette résolution porte atteinte à la libre disposition de la jouissance des lots d'hébergement et contraint en outre les associés à participer aux charges générées par l'exploitation des lots, hors des prévisions temporelles du pacte social ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, dont elle a déduit à bon droit que cette résolution augmentait les engagements des participants, de sorte qu'elle ne pouvait être adoptée qu'à l'unanimité, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
Et attendu, en second lieu, qu'ayant relevé que l'exploitation de la résidence hôtelière au-delà du 31 décembre 2004 reposait non pas sur un accord implicite de tous les associés mais sur une décision sociale de reconduction qui a été annulée, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à la recherche invoquée par la troisième branche que cette appréciation rendait inopérante, a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.