Cass. 3e civ., 25 octobre 2018, n° 17-20.713
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Chauvin
Avocats :
Me Carbonnier, SCP Thouin-Palat et Boucard
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Saint-Denis, 31 mars 2017), que, le 2 juillet 1986, M. B... C..., aux droits duquel se trouve la commune de [...] (la commune), a donné à bail commercial à M. X... Y... Z... (M. Z...) un immeuble à usage d'hôtel ; que, les 27 janvier et 30 novembre 2012, la commune a signifié au locataire sa décision de ne pas renouveler le bail commercial au 30 juin 2013 ; que, le 13 mars 2014, la commune a assigné le locataire en validité du congé et en fixation des indemnités d'éviction et d'occupation ;
Attendu que M. Z... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande en nullité du congé ;
Mais attendu qu'ayant retenu, à bon droit, que le bailleur est toujours en droit de refuser le renouvellement d'un bail venu à expiration en payant une indemnité d'éviction et que le défaut de mention du délai légal dans lequel le congé peut être contesté constitue un vice de forme n'affectant la validité de l'acte que s'il fait grief à celui qui l'invoque, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation et qui ne s'est pas contredite, en a exactement déduit que le congé n'avait pas à être spécialement motivé et que la demande en nullité du congé devait être rejetée en l'absence de preuve d'un grief ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Z... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. Z... et le condamne à payer à la commune de [...] la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq octobre deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat aux Conseils, pour M. Z...
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR rejeté la demande de monsieur Z... tendant à l'annulation du congé portant refus de renouvellement, d'AVOIR constaté que le bail commercial liant les parties a pris fin le 30 juin 2013, d'AVOIR invité monsieur Z... à préciser s'il sous-loue tout ou partie des locaux qu'il a pris à bail et/ou s'il y exploite personnellement un fonds de commerce, d'AVOIR invité la commune de [...] à fournir tout élément utile à la fixation du montant de l'indemnité d'occupation qu'elle sollicite, et d'AVOIR renvoyé l'affaire à une audience ultérieure ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'« aux termes de l'article L. 145-9 du Code de commerce dans sa version applicable au présent litige, le congé doit être donné six mois à l'avance par acte extrajudiciaire, préciser, à peine de nullité, les motifs pour lesquels il est donné et indiquer que le locataire qui entend, soit contester le congé, soit demander le paiement d'une indemnité d'éviction, doit saisir le tribunal avant l'expiration d'un délai de deux ans à compter de la date pour laquelle le congé a été donné. Toutefois, le bailleur est toujours en droit de refuser le renouvellement d'un bail venu à expiration en payant une indemnité d'éviction et, en pareille hypothèse, le congé n'a pas à être motivé. En l'espèce, le bail commercial du 2 juillet 1986 liant les parties est soumis à ces dispositions. La Commune de [...] a notifié par voie d'huissier un courrier du 19 novembre 2012 portant non-renouvellement du bail à l'échéance du 30 juin 2013, sans indication de motif, ni offre d'indemnité d'éviction, ni encore mention du délai de deux ans pour saisir le juge en contestation du congé ou en revendication d'une indemnité d'éviction. Ce n'est que par courrier du 4 février 2013 que la Commune de [...] a fait à Monsieur X... Z... une offre d'indemnité d'éviction en maintenant le non-renouvellement du bail et en demandant au preneur "tous les éléments nécessaires au calcul de (son) indemnité d'éviction". En l'absence de suite donnée par Monsieur X... Z..., la Commune de [...] lui a proposé, par courrier du 24 mai 2013, une indemnité d'éviction de 40.000 €. Dès lors que la bailleresse n'entend pas nier à son locataire l'indemnité d'éviction à laquelle il peut prétendre, ce dernier ne peut invoquer la nullité formelle du congé, pour laquelle il ne propose d'ailleurs la démonstration d'aucun grief particulier. Il s'ensuit que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de Monsieur X... Z... en annulation du congé et constaté que le bail commercial a pris fin le 30 juin 2013 » ;
ET AUX MOTIFS REPUTES ADOPTES QU'« aux termes de l'article L. 145-9 du Code de commerce, le bailleur peut délivrer congé au preneur en respectant un préavis de six mois au moins avant l'échéance du contrat de location commerciale. Le congé est donné par acte extrajudiciaire, et il doit, à peine de nullité, préciser les motifs pour lesquels il est donné. À défaut de motivation, le locataire peut obtenir l'annulation du congé à condition d'établir que cette irrégularité lui cause un préjudice, en application de l'article 114 alinéa 2 du Code de procédure civile. Le congé nul pour absence de motifs produit effet puisqu'il met fin au bail, mais il conduit le bailleur à devoir régler une indemnité d'éviction. De même, si le congé est régulier et qu'il n'est délivré ni pour des motifs graves et légitimes, ni pour cause de reprise par le propriétaire dans les hypothèses particulières visées par la foi, le bailleur est tenu au paiement d'une indemnité d'éviction, En l'espèce, le bail signé par M. Z... a pris effet au 1er juillet 1986. Il s'est reconduit tacitement le 1er juillet 1995 et le 1er juillet 2004, il venait donc à échéance le 30 juin 2013. Par acte extrajudiciaire du 27 janvier 2012 réitéré le 30 novembre 2012, la COMMUNE DE [...] a notifié au preneur sa décision de ne pas renouveler la location au 30 juin 2013. Ces deux congés, délivrés plus de six mois avant l'échéance du bail n'ont été assortis d'aucun motif. M. Z... croit pouvoir déduire de cette irrégularité la nullité du congé, Cependant, il n'invoque aucun préjudice que lui aurait causé ce manquement. Par conséquent, sa demande en annulation du congé sera rejetée, et il sera constaté que le bail liant les parties a pris fin le 30 juin 2013 » ;
ALORS 1°) QUE le congé est délivré par acte extrajudiciaire, lequel n'est pas un acte de procédure et ne relève dès lors pas des nullités édictées par le code de procédure civile pour de tels actes ; qu'après avoir constaté que le congé n'était pas motivé, n'offrait pas d'indemnité d'éviction et n'indiquait pas le délai de deux ans pour saisir le juge, la cour d'appel, qui l'a néanmoins validé au prétexte que monsieur Z... ne justifiait pas d'un grief, et qui a ce faisant appliqué le régime des nullités pour vice de forme des actes de procédure, a violé les articles L. 145-9 du code de commerce et 114 du code de procédure civile ;
ALORS 2°) QUE les juges du fond ont constaté que le congé n'était ni motivé, ni assorti d'une offre d'indemnité d'éviction ; qu'en refusant cependant de l'annuler au prétexte que la commune de [...] avait offert une indemnité d'éviction puis proposé un montant par deux courriers postérieurs au congé et qu'elle n'entendait pas nier l'indemnité d'éviction, la cour d'appel a violé l'article L. 145-9 du code de commerce ;
ALORS 3°) QUE en retenant, pour valider le congé, que la commune de [...] ne déniait pas le droit de monsieur Z... à l'indemnité d'éviction, puis, statuant sur l'indemnité d'éviction, que la commune de [...] se prévalait de griefs justifiant une résiliation pour faute exonératoire de l'indemnité d'éviction, la cour d'appel s'est contredite en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
ALORS 4°) QUE monsieur Z... soulignait que l'action de la commune de [...] en fixation de l'indemnité d'éviction était mal fondée en raison de la mauvaise foi de la bailleresse parce qu'elle multipliait les procédures avec déloyauté pour tenter de l'évincer des lieux loués, et parce qu'à cet égard elle ne cessait d'essuyer des revers (conclusions de monsieur Z..., p. 9) ; qu'en ne s'expliquant pas sur ces points déterminants, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'ancien article 1134, alinéa 3, devenu 1104 du code civil., ensemble de l'article L. 145-14 du code de commerce