Cass. mixte, 11 mars 2005, n° 02-41.371
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la SA Codéviandes (la société), dont le siège social est situé en France à Folschviller (Moselle), a embauché M. X..., en juin 2000, pour aller travailler aux Pays-Bas ; que le salarié ayant fait convoquer la société à Arras devant le conseil de prud'hommes de son domicile, pour avoir paiement de diverses sommes à titre de rappel de salaire, la société, se fondant sur l'article R. 517-1 du Code du travail et sur la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 modifiée, a opposé la compétence de la juridiction de Maastricht, aux Pays-Bas, en tant que lieu d'exécution du contrat de travail ; que la cour d'appel a dit que le conseil de prud'hommes de Forbach (Moselle), dans le ressort duquel est situé le siège de la société, était compétent ;
Sur le premier moyen, après avertissement délivré aux parties conformément aux dispositions de l'article 1015 du nouveau Code de procédure civile :
Attendu que la société Codéviandes fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir renvoyé les parties devant le conseil de prud'hommes de son siège social, alors, selon le moyen, qu'il résulte de l'article 5, 1) de la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, tel que modifié par la convention de Saint-Sébastien du 26 mai 1989, que la juridiction territorialement compétente pour juger des actions engagées par un travailleur contre son employeur est celle du lieu où le travailleur accomplit habituellement son travail ; que ces dispositions impératives priment sur celles de droit interne, seraient-elles moins favorables que ces dernières aux salariés ; qu'en retenant que les conventions internationales ne pouvaient pas priver le salarié du bénéfice des dispositions relatives à la compétence plus favorables du pays avec lequel le contrat présente les liens les plus étroits, la cour d'appel a violé l'article 5, 1) de la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, par refus d'application, et les articles R. 517-1 alinéa 2 du Code du travail, 14 du Code civil et 42 du nouveau Code de procédure civile, par fausse application ;
Mais attendu que les règles de droit interne ne sont pas applicables pour la détermination de la compétence internationale du juge saisi d'un litige d'ordre international intra-communautaire, soumis aux dispositions de la convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 modifiée par la convention de Saint-Sébastien du 26 mai 1989 ; que le défendeur, assigné devant une juridiction de l'Etat de son domicile conformément à l'article 2 de la convention précitée, n'est pas en droit, pour écarter la compétence internationale de ce juge, de se prévaloir des compétences spéciales de la section 2 du titre II de cette convention, et, notamment, de son article 5, 1), qui permet au seul demandeur de l'attraire, dans un autre Etat contractant, devant le tribunal du lieu d'exécution de l'obligation ; qu'en l'espèce, la société Codéviandes, dont le siège est situé en France, ayant été attraite devant une juridiction de l'Etat de son domicile, n'était pas fondée à invoquer la compétence spéciale du lieu d'exécution du contrat de travail pour revendiquer la compétence du tribunal de Maastricht, situé dans un autre Etat contractant ; que par ces motifs de pur droit, substitués à ceux justement critiqués, la décision se trouve légalement justifiée de ce chef ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 559 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que pour condamner la société Codéviandes à une amende civile, l'arrêt retient que le recours de cette société pour écarter la compétence du conseil de prud'hommes de Forbach constitue une manoeuvre purement dilatoire ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui n'a pas caractérisé la faute commise par la société appelante dans l'exercice de cette voie de recours, a violé le texte susvisé ;
Et vu l'article 627 du nouveau Code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, par voie de retranchement, seulement en ce qu'il a condamné la société Codéviandes à une amende civile de 381,12 euros, l'arrêt rendu le 31 janvier 2002, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
Condamne la société Codéviandes aux dépens de l'instance en cassation et à ceux afférents aux instances devant les juges du fond ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Codéviandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, siégeant en Chambre mixte, et prononcé par le premier président en son audience publique du onze mars deux mille cinq.
LE CONSEILLER RAPPORTEUR, LE PREMIER PRESIDENT, LE GREFFIER EN CHEF.
Moyens produits par la SCP GATINEAU, Avocat aux Conseils pour la société Codéviandes