Cass. 3e civ., 9 juillet 2014, n° 13-15.643
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Terrier
Rapporteur :
Mme Proust
Avocat général :
M. Charpenel
Avocat :
SCP Piwnica et Molinié
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Caen, 18 octobre 2012), que par acte à effet au 1er janvier 1995, la société civile immobilière de la place Saint Jean (la SCI) a donné à bail à la société Havas tourisme, aux droits de laquelle vient la société Thomas Cook, des locaux à usage commercial ; que par acte du 28 juin 2006, la SCI a délivré congé avec offre de renouvellement pour le 10 janvier 2007, puis, par acte du 14 décembre 2007, elle a délivré un nouveau congé avec offre de renouvellement à compter de la même date, annulant le précédent et demandant un loyer annuel de 23 000 euros HT ; que la SCI a notifié le 7 octobre 2009 un mémoire préalable en fixation du prix du bail renouvelé ; que la société Thomas Cook l'a alors assignée aux fins de voir juger que le bail s'était renouvelé le 1er janvier 2007 aux mêmes conditions, notamment de prix, que le bail expiré ;
Sur le moyen unique, pris en ses première et deuxième branches, ci-après annexé :
Attendu qu'ayant à bon droit relevé, par motifs propres et adoptés, que, par l'effet du congé délivré le 28 juin 2006, le bail du 6 juin 1996 avait pris fin, que ce congé avait pris effet, s'agissant d'un bail tacitement reconduit, au 1er janvier 2007 et que la SCI ne pouvait ultérieurement rétracter unilatéralement ce congé, mais pouvait proposer un nouveau loyer, la cour d'appel a pu retenir que l'acte du 14 décembre 2007, qui précisait à la société locataire le montant du loyer désormais revendiqué, n'était pas nul et devait s'analyser comme une demande d'un nouveau prix ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :
Vu l'article L. 145-60 du code de commerce, ensemble les articles 2240 et suivants du code civil et R. 145-1 du code de commerce ;
Attendu que toutes les actions exercées en vertu du chapitre régissant le statut des baux commerciaux se prescrivent par deux ans ;
Attendu que pour ordonner le déplafonnement du prix du bail renouvelé, l'arrêt retient que le point de départ du délai de prescription de l'action en fixation du prix se situe au jour de la prise d'effet du nouveau bail, soit le 1er janvier 2007, que ce délai a été interrompu par la délivrance de l'acte du 14 décembre 2007 puis par le mémoire signifié le 7 octobre 2009, que la demande de fixation du loyer renouvelé à la somme de 23 000 euros présentée dans les conclusions du 25 mars 2010 n'est donc pas prescrite et que les locaux loués étant à usage exclusif de bureaux, le prix du bail renouvelé doit être fixé par référence aux prix pratiqués pour des locaux équivalents ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la demande du bailleur, qui n'a pas fait connaître le prix qu'il sollicite dans son congé ou dans la réponse à la demande de renouvellement du preneur, en modification du prix du bail par un acte ultérieur, n'a pas d'effet interruptif de la prescription biennale de l'action en fixation du prix du bail renouvelé qui court à compter de la date d'effet du nouveau bail, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a dit y avoir lieu à déplafonnement du prix du bail renouvelé le 1er janvier 2007 entre la SCI et la société Thomas Cook et avant dire droit ordonné une expertise, l'arrêt rendu le 18 octobre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Caen ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déclare prescrite la demande du bailleur en fixation du prix du bail à la somme de 23 000 euros ;
Dit que le bail s'est renouvelé aux clauses et conditions du bail expiré, notamment de prix ;
Condamne la SCI de la place Saint-Jean aux dépens d'appel et de cassation ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la SCI de la place Saint-Jean à payer la somme de 3 000 euros à la société Thomas Cook ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juillet deux mille quatorze.