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Décisions

Cass. crim., 12 mai 1998, n° 96-83.366

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gomez

Rapporteur :

Mme Chanet

Avocat général :

M. Géronimi

Avocats :

SCP Delaporte et Briard, SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, SCP Ancel et Couturier-Heller, Me Roger

Colmar, ch. corr., du 8 mars 1996

8 mars 1996

LA COUR : - Joignant les pourvois en raison de la connexité ;

Vu les mémoires produits ;

I - Sur le pourvoi formé par Marcel H... :

Attendu qu'aucun moyen n'est produit à l'appui du pourvoi ;

II - Sur les autres pourvois :

Sur le premier moyen de cassation, proposé par Me Y... pour Marcel X..., et pris de la violation des articles 433-1 et 433-22 du Code pénal, et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré le prévenu coupable de corruption active et, en répression, l'a condamné à huit mois d'emprisonnement avec sursis, à l'interdiction des droits civiques, civils et de famille pendant trois ans, et aux réparations civiles ;

"aux motifs que, "en dépit des dénégations de la plupart des prévenus, François F... et Patrick M..., qui n'avaient personnellement aucun intérêt à mettre en cause les patrons et les chauffeurs de ces entreprises, ont maintenu leurs déclarations en des termes identiques lors de la confrontation entre eux et lors des confrontations avec les autres prévenus qui ont eu lieu au cours de l'enquête et au cours des débats devant le tribunal correctionnel et devant la Cour ;

""que les entreprises concernées dont l'activité principale est la collecte et le transport des déchets à incinérer avaient, contrairement aux affirmations de leurs représentants, un intérêt financier évident à bénéficier d'un tonnage minoré qui leur permettrait de facturer à leurs clients la prestation à un tarif plus avantageux et plus concurrentiel" ;

"alors que le délit de corruption active n'est caractérisé que si la réception de dons est antérieure à l'abstention d'un acte de la fonction et qu'elle est accomplie dans le but de cette abstention;

qu'en l'espèce, la Cour, qui relève que les entreprises concernées avaient, contrairement aux affirmations de leurs représentants, un intérêt financier évident à bénéficier d'un tonnage minoré qui leur permettait de facturer à leurs clients la prestation à un tarif plus avantageux et plus concurrentiel, ne caractérise ainsi ni l'antériorité de la sollicitation de l'agent, ni le but de la corruption et viole les textes visés au moyen" ;

Sur le premier moyen de cassation, proposé par Me Y... pour Lucien K..., et pris de la violation des articles 433-1 et 433-22 du Code pénal, et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré le prévenu coupable de corruption active et, en répression, l'a condamné à huit mois d'emprisonnement avec sursis, à l'interdiction des droits civiques, civils et de famille pendant trois ans, et aux réparations civiles ;

"aux motifs que, "en dépit des dénégations de la plupart des prévenus, François F... et Patrick M..., qui n'avaient personnellement aucun intérêt à mettre en cause les patrons et les chauffeurs de ces entreprises, ont maintenu leurs déclarations en des termes identiques lors de la confrontation entre eux et lors des confrontations avec les autres prévenus qui ont eu lieu au cours de l'enquête et au cours des débats devant le tribunal correctionnel et devant la Cour ;

""que les entreprises concernées dont l'activité principale est la collecte et le transport des déchets à incinérer avaient, contrairement aux affirmations de leurs représentants, un intérêt financier évident à bénéficier d'un tonnage minoré qui leur permettrait de facturer à leurs clients la prestation à un tarif plus avantageux et plus concurrentiel" ;

"alors que le délit de corruption active n'est caractérisé que si la réception de dons est antérieure à l'abstention d'un acte de la fonction et qu'elle est accomplie dans le but de cette abstention;

qu'en l'espèce, la Cour, qui relève que les entreprises concernées avaient, contrairement aux affirmations de leurs représentants, un intérêt financier évident à bénéficier d'un tonnage minoré qui leur permettait de facturer à leurs clients la prestation à un tarif plus avantageux et plus concurrentiel, ne caractérise ainsi ni l'antériorité de la sollicitation de l'agent, ni le but de la corruption et viole les textes visés au moyen" ;

Sur le premier moyen de cassation, proposé par Me Y... pour Jean-Pierre E..., et pris de la violation des articles 433-1 et 433-22 du Code pénal, et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable de corruption active et, en répression, l'a condamné à trois mois d'emprisonnement avec sursis, à l'interdiction des droits civiques, civils et de famille pendant trois ans, et aux réparations civiles ;

"aux motifs que Jean-Pierre E..., confronté à François F... et Patrick M... lors de l'enquête de police, a reconnu qu'il leur avait donné de temps en temps un billet de 100 francs pour faire procéder à la minoration du tonnage du camion et que c'était Jacques K..., qui, seul, était intéressé par ce procédé, qui lui remettait l'argent ;

"alors que le délit de corruption active suppose, notamment, l'usage, par le prévenu, d'offres ou de dons dans un but recherché qui peut être l'abstention d'un acte de la fonction du corrompu et ce, avec l'intention coupable;

qu'en l'espèce, la Cour, qui se borne à relever que Jacques K..., qui, seul, était intéressé par le procédé, remettait de l'argent au demandeur, lequel le reversait de temps en temps à François F... et Patrick M..., ne caractérise pas les éléments constitutifs du délit de corruption active à la charge du demandeur et viole ainsi les textes visés au moyen" ;

Sur le premier moyen de cassation, proposé par la société civile professionnelle Delaporte et Briard pour Bernard C... et Roland L..., et pris de la violation des articles 432-11, 1°, 432-17, 433-1, 433-22, 433-23 nouveaux, 179 ancien du Code pénal, 485 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Bernard C... et Roland L... coupables de corruption active de fonctionnaires chargés d'une mission de service public ;

"alors que le délit de corruption active de fonctionnaire est constitué si la proposition ou la remise sans droit de dons, de présents ou d'avantages quelconques est faite pour obtenir de la personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public qu'elle accomplisse ou s'abstienne d'accomplir un acte de sa fonction, de sa mission;

qu'ainsi, la proposition ou la remise doit être antérieure ou concomitante au service illicite réclamé ou, si elle est postérieure, résulter d'un accord antérieur;

qu'il ne résulte d'aucune constatation de l'arrêt infirmatif que les remises de fonds aient été préalables aux pesées irrégulières demandées, ou résultaient d'un accord antérieur;

que, dès lors, la Cour a violé les textes visés au moyen" ;

Sur le premier moyen de cassation, proposé par la société civile professionnelle Guiguet, Bachellier, et Potier de la Varde pour Mathilde Z... et Michel A..., et pris de la violation des articles 179 ancien, 433-1, 121-3 du Code pénal , 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Mathilde Z... et Michel A... coupables du délit de corruption active, commis de janvier 1990 à 1993 ;

"aux motifs que François F... et Patrick M..., entendus séparément, ont affirmé : 4°) que Michel A..., chauffeur routier auprès de la SA Sostra dirigée par Mathilde Z..., leur remettait 250 francs par camion pour minoration du poids en présence d'un tonnage important soit environ une ou deux fois par semaine depuis 1988;

qu'en dépit des dénégations de la plupart des prévenus, François F... et Patrick M..., qui n'avaient personnellement aucun intérêt à mettre en cause les patrons et les chauffeurs de ces entreprises, ont maintenu leurs déclarations en des termes identiques lors de la confrontation entre eux et lors des confrontations avec les autres prévenus qui ont eu lieu au cours de l'enquête et au cours des débats devant le tribunal correctionnel et devant la Cour;

que le caractère nécessairement occulte de ces remises de dons implique qu'elles s'effectuaient dans la discrétion et en l'absence de témoins ;

que les entreprises concernées dont l'activité principale est la collecte et le transport de déchets à incinérer avaient, contrairement aux affirmations de leurs représentants, un intérêt financier évident à bénéficier d'un tonnage minoré qui leur permettait de facturer à leurs clients la prestation à un tarif plus avantageux et plus concurrentiel ;

que la réalité des avantages perçus par les agents de la CUS résulte de leurs déclarations et de factures pour achat de matériel payées grâce à ces dons ;

"alors que tout jugement ou arrêt en matière correctionnelle doit énoncer les faits dont le prévenu est jugé coupable et constater l'existence des éléments constitutifs de l'infraction;

qu'en statuant par ces motifs qui ne constatent pas que les remises auraient été effectuées par Michel A... en vertu d'un pacte corruptif antérieur, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

"alors, au surplus, que la cour d'appel n'a pas constaté de remises effectuées par Michel A... entre janvier 1990 et 1993 ;

"et alors, enfin, qu'il ne résulte d'aucune constatation de l'arrêt que Mathilde Z... ait eu connaissance de remises effectuées par Michel A..., chauffeur" ;

Sur le premier moyen de cassation, proposé par la société civile professionnelle Ancel et Couturier-Heller pour Hubert D..., et pris de la violation des articles 433-1, 433-22, 433-23 nouveaux, 179 ancien du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale et défaut de réponse à conclusions ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Hubert D... coupable de corruption active et l'a condamné à la peine de 8 mois d'emprisonnement avec sursis ;

"aux motifs que "François F... et Patrick M... entendus séparément ont affirmé :

""1°) qu'Anthony B..., chauffeur de l'EURL D... et pendant les congés de celui-ci, Hubert D..., gérant de cette entreprise, exploitant le ramassage de vieux papiers et de ferrailles, leur ont remis régulièrement entre 300 et 400 francs par mois depuis 1990 pour minorer le tonnage du camion de déchargement ;

""que les prévenus Hubert D..., Anthony B..., Lucien K..., Marcel H..., Gérard G..., Mathilde Z..., Michel A..., Bernard C... et Marcel X... ont catégoriquement nié les faits ;

""que, cependant, Jean-Pierre E..., confronté à François F... et Patrick M... lors de l'enquête de police, a reconnu qu'il leur avait donné de temps en temps un billet de 100 francs pour faire procéder à la minoration du tonnage du camion et que c'était Jacques K..., qui, seul, était intéressé par ce procédé, qui lui remettait l'argent ;

""que Roland L... a également admis qu'il lui était arrivé, fin 1990 ou début 1991, de remettre personnellement deux fois de l'argent liquide à François F..., à savoir 600 ou 1 500 francs, qui provenait du service comptabilité de l'agence Novaservice ;

""que Bernard C... a confirmé avoir donné des "gratifications" aux employés de la pesée, sur les conseils des chauffeurs de Novaservice, sous la forme de pourboires de 500 francs par l'intermédiaire de Roland L... ;

""que Bernard C... et Roland L... prétendent que ces dons n'avaient pas pour but de faire minorer le tonnage des camions, mais de réduire les délais d'attente au poste de pesée ;

""que, toutefois, cette explication apparaît peu vraisemblable dès lors qu'il ressort de la procédure que les difficultés de passage à la pesée ont été résolues par une modification des horaires de déchargement, et qu'en outre, les pourboires de 500 francs sont sans commune mesure avec les services qui auraient été rendus ;

""qu'au surplus, en dépit des dénégations de la plupart des prévenus, François F... et Patrick M..., qui n'avaient personnellement aucun intérêt à mettre en cause les patrons et les chauffeurs de ces entreprises, ont maintenu leurs déclarations en des termes identiques lors de la confrontation entre eux et lors des confrontations avec les autres prévenus qui ont eu lieu au cours de l'enquête et au cours des débats devant le tribunal correctionnel et devant la Cour ;

""que le caractère nécessairement occulte de ces remises de dons implique qu'elles s'effectuaient dans la discrétion et en l'absence de témoins ;

""que les entreprises concernées dont l'activité principale est la collecte et le transport de déchets à incinérer avaient, contrairement aux affirmations de leurs représentants, un intérêt financier évident à bénéficier d'un tonnage minoré qui leur permettait de facturer à leurs clients la prestation à un tarif plus avantageux et plus concurrentiel ;

que, de surcroît, la réalité des avantages perçus par les agents de la CUS résulte de leurs déclarations et des factures pour achat de matériel payées grâce à ces dons;

qu'en conséquence, il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris et de déclarer les prévenus coupables des faits qui leur sont reprochés" ;

"alors, d'une part, que le délit de corruption n'est caractérisé que s'il est constaté que le prévenu a fait aux personnes dépositaires de l'autorité publique ou chargées d'une mission de service public des promesses, dons ou présents, ou encore cédé à des sollicitations, antérieurement au but recherché ;

"qu'en s'abstenant de caractériser en quoi Hubert D... avait fait des offres, dons ou présents antérieurs au but recherché ou résultant d'une convention antérieure, la Cour a privé sa décision de base légale au regard des textes visés au moyen ;

"alors, d'autre part, que le doute doit toujours profiter au prévenu;

qu'en l'état du procès-verbal d'audition de François F... et Patrick M... du 16 mai 1994, qui se bornaient à reconnaître avoir reçu de l'argent de la part d'Anthony B..., chauffeur de l'entreprise D..., et du procès-verbal de confrontation du 31 mai suivant, aux termes duquel François F... déclarait : "Je confirme que je voyais rarement le patron de ce Monsieur prénommé Anthony et que c'est toujours ce dernier qui nous remettait de l'argent, de la façon que je vous avais décrite lors de ma précédente déposition", déclarations confirmées en tous points par Patrick M... qui ajoutait "que c'est toujours lui qui nous a remis l'argent et jamais son patron", Anthony B... ajoutant pour sa part : "mon patron, Hubert D..., ne m'a jamais demandé de remettre des espèces au personnel de la pesée pour minorer le tonnage du camion", la Cour, qui constatait qu'Hubert D... avait toujours contesté les faits, ne pouvait retenir sa culpabilité sur le fondement des déclarations faites par François F... et Patrick M..., sans autre précision sur ces déclarations et sans relever aucun autre élément de preuve de nature à caractériser les éléments constitutifs du délit;

qu'elle a ainsi privé sa décision de base légale au regard des textes visés ;

"alors, enfin, que l'intérêt éventuel que les entreprises de transport de déchets auraient pu avoir à corrompre François F... et Patrick M... ne saurait suffire à établir la corruption ;

"qu'en se bornant en définitive à invoquer, pour justifier sa décision, à se référer "l'intérêt financier évident" qu'auraient eu les entreprises à bénéficier d'un tonnage minoré, la cour d'appel s'est prononcé par un motif inopérant, privant à nouveau sa décision de toute base légale au regard des textes visés au moyen"; Les moyens étant réunis ;

Attendu que, pour déclarer les prévenus coupables de corruption active, la cour d'appel retient notamment qu'un pacte de corruption avait été conclu entre les prévenus et deux fonctionnaires de l'usine de traitement des ordures ménagères de la communauté urbaine de Strasbourg, qui, pendant plusieurs années, ont reçu des dons occultes pour minorer les pesées de déchets;

qu'ainsi, la cour d'appel a caractérisé en tous ses éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, le délit reproché aux intéressés, et justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;

Qu'en effet, le caractère d'antériorité de la convention conclue entre le corrupteur et le corrompu résulte suffisamment du fait que les avantages reçus ont été réitérés, de telle sorte qu'ils ont nécessairement précédé les agissements du corrupteur et déterminé le corrompu ;

Qu'en effet, par ailleurs, le délit de corruption, consommé dès la conclusion du pacte entre le corrupteur et le corrompu, se renouvelle à chaque acte d'exécution dudit pacte, et que l'aide ou l'assistance en connaissance de cause à ces actes d'exécution constitue la complicité du délit ;

D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;

Sur le second moyen de cassation, proposé par Me Y... pour Marcel X..., et pris de la violation des articles 55 du Code pénal, 203 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré les prévenus coupables de corruption active et, en répression, les a solidairement condamnés au paiement des réparations civiles :

"aux motifs que "les agissements des prévenus, agents préposés à la pesée, transporteurs et chauffeurs constituent des infractions connexes entre elles procédant d'une conception unique, et tendant au même but;

que chacun d'eux a directement participé aux actes de corruption active ou passive qui ont causé à la CUS une perte financière constituée par la non-rémunération partielle d'une prestation exécutée;

que, dans ces conditions, il y a lieu de condamner solidairement tous les prévenus à réparer les dommages subis par la CUS et directement causés par les infractions" ;

"alors que, selon l'article 203 du Code de procédure pénale, les infractions ne sont connexes que si, lorsqu'elles ont été commises en différents temps par des personnes différentes, elles l'ont été par suite d'un concert formé à l'avance entre elles;

qu'en l'espèce, la Cour qui constate l'existence d'actions frauduleuses parallèles des prévenus sans relever l'existence d'un concert frauduleux entre elles préalable, et qui condamne tous les prévenus au paiement solidaire des réparations civiles, viole les textes visés au moyen" ;

Sur le second moyen de cassation, proposé par Me Y... pour Lucien K..., en termes identiques ;

Sur le second moyen de cassation, proposé par Me Y... pour Jean-Pierre E..., en termes identiques ;

Sur le deuxième moyen de cassation, proposé par la société civile professionnelle Delaporte et Briard pour Bernard C... et Roland L..., et pris de la violation des articles 433-1 nouveau, 179 ancien du Code pénal, 1382 et 1383 du Code civil, 2 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a, sur l'action civile, déclaré Bernard C... et Roland L... tenus solidairement avec François F..., Patrick M..., Hubert D..., Anthony B..., Lucien K..., Jean-Pierre E..., Marcel H..., Gérard G..., Mathilde Z..., Michel A... et Marcel X... de réparer l'entier dommage subi par la Communauté urbaine de Strasbourg, soit la somme de 6 963 840 francs, en conséquence des délits de corruption passive et active de fonctionnaires commis par ces derniers ;

"alors que, dans ses écritures d'appel, la partie civile se limitait à demander la condamnation solidaire de Bernard C... et Roland L... pour le seul paiement d'une provision de 870 480 francs avec intérêts légaux;

qu'en condamnant ces derniers à des réparations qui n'avaient pas été demandées par la partie civile, les juges du fond ont statué ultra petita et ont excédé leurs pouvoirs" ;

Sur le troisième moyen de cassation, proposé par la société civile professionnelle Delaporte et Briard pour Bernard C... et Roland L..., et pris de la violation des articles 433-1 nouveau, 179 ancien du Code pénal, 1382 et 1383 du Code civil, 2 et 593 du Code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a, sur l'action civile, déclaré Bernard C... et Roland L... tenus solidairement avec François F..., Patrick M..., Hubert D..., Anthony B..., Lucien K..., Jean-Pierre E..., Marcel H..., Gérard G..., Mathilde Z..., Michel A... et Marcel X... de réparer l'entier dommage subi par la Communauté urbaine de Strasbourg, soit la somme de 6 963 840 francs, en conséquence des délits de corruption passive et active de fonctionnaires commis par ces derniers ;

"aux motifs que les agissements des prévenus, agents préposés à la pesée, transporteurs et chauffeurs, constituent des infractions connexes entre elles procédant d'une conception unique, et tendant au même but;

que chacun d'entre eux a directement participé aux actes de corruption active ou passive qui ont causé à la CUS une perte financière constituée par la non-rémunération partielle d'une prestation exécutée ;

"alors que la solidarité n'existe qu'entre personnes condamnées pour un même crime ou un même délit, ou pour des crimes et délits connexes, ou pour des faits non connexes mais commis dans un même intérêt et un même but ;

"et alors, d'une part, qu'il ne résulte pas de l'arrêt que Bernard C... et Roland L... aient participé d'une façon quelconque aux délits dont François F..., Patrick M..., Hubert D..., Anthony B..., Lucien K..., Jean-Pierre E..., Marcel H..., Gérard G..., Mathilde Z..., Michel A... ont été déclarés coupables, ou qu'ils aient agi de concert avec eux ou pour la même fin ;

"et alors, d'autre part, qu'il ne résulte pas davantage de l'arrêt que Bernard C... et Roland L... ont eu connaissance des autres délits commis et qu'il y avait connivence générale favorisant l'action délictueuse de tous" ;

Sur le second moyen de cassation, proposé par la société civile professionnelle Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde pour Mathilde Z... et Michel A..., et pris de la violation des articles 55 ancien, 2, 3, 203 et 480-1 du Code de procédure pénale, excès de pouvoir ;

"en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Mathilde Z... et Michel A... tenus solidairement avec les autres prévenus de réparer le dommage subi par la Communauté urbaine de Strasbourg ;

"aux motifs que les agissements des prévenus, agents préposés à la pesée, transporteurs et chauffeurs, constituent des infractions connexes entre elles procédant d'une conception unique, et tendant au même but;

que chacun d'eux a directement participé aux actes de corruption active ou passive qui ont causé à la CUS une perte financière constituée par la non-rémunération partielle d'une prestation exécutée;

que, dans ces conditions, il y a lieu de condamner solidairement tous les prévenus à réparer le dommage subi par la CUS et directement causé par les infractions ;

"alors que la Communauté urbaine de Strasbourg ne demandait que la condamnation de Mathilde Z... et de Michel A..., solidairement entre eux deux, au paiement d'une somme de 1 450 800 francs représentant le préjudice supposé causé par les agissements qui leur étaient personnellement reprochés;

qu'en les déclarant responsables de l'entier préjudice subi par la partie civile du fait des agissements de l'ensemble des prévenus, et solidairement avec ceux-ci, la cour d'appel a statué ultra petita, commettant ainsi un excès de pouvoir ;

"et alors qu'il ne peut y avoir de condamnation solidaire aux réparations civiles que pour un même délit ou des délits connexes;

qu'en condamnant l'ensemble des prévenus, déclarés coupables de faits de corruption active ou passive distincts, à réparer solidairement l'entier préjudice, sans faire apparaître en quoi aurait consisté la conception commune ayant inspiré ces faits, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision" ;

Sur le second moyen de cassation, proposé par la société civile professionnelle Ancel et Couturier-Heller pour Hubert D..., et pris de la violation des articles 55 du Code pénal ancien, des articles 203, 480-1 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale et modification des termes du litige ;

"en ce que, statuant sur l'action civile, l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré Hubert D... tenu solidairement avec François F..., Patrick M..., Anthony B..., Lucien K..., Jean-Pierre E..., Marcel H..., Gérard G..., Mathilde Z..., Michel A..., Bernard C..., Roland L... et Marcel X... de réparer le dommage subi par la CU de Strasbourg ;

"aux motifs que "les agissements des prévenus, agents préposés à la pesée, transporteurs et chauffeurs, constituent des infractions connexes entre elles procédant d'une conception unique, et tendant au même but;

que chacun d'eux a directement participé aux actes de corruption active ou passive qui ont causé à la CUS une perte financière constituée par la non-rémunération partielle d'une prestation exécutée;

que, dans ces conditions, il y a lieu de condamner solidairement tous les prévenus à réparer le dommage subi par la CUS et directement causé par les infractions" ;

"alors qu'il ne peut y avoir condamnation solidaire aux réparations civiles que pour un même délit ou des délits connexes ;

"que la connexité suppose des faits procédant d'une conception unique, déterminés par la même cause et tendant au même but ;

"que tel n'est pas le cas d'une personne déclarée coupable de l'infraction de corruption active, laquelle ne saurait être déclarée solidaire d'autres prévenus déclarés coupables d'autres faits de corruption, dès lors que la cour d'appel ne constate aucun concert frauduleux entre les prévenus, ni ne caractérise une conception unique tendant au même but ;

"qu'en condamnant Hubert D... avec l'ensemble des autres prévenus à réparer le préjudice subi par la Communauté urbaine de Strasbourg, la cour d'appel a violé les textes visés au moyen ;

"qu'en toute hypothèse, en prononçant une condamnation solidaire à l'encontre des prévenus de corruption active, condamnation qui n'était pas demandée par la partie civile, la Cour de Colmar, qui était tenue de statuer dans les limites des conclusions des parties, a modifié la cause et l'objet des demandes qui lui était soumises et a violé les textes visés au moyen" ;

Les moyens étant réunis ;

Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et des conclusions déposées le 17 novembre 1995 au nom de la Communauté urbaine de Strasbourg que celle-ci a demandé à la cour d'appel de "déclarer François F... et Patrick M...", poursuivis pour corruption passive, "solidairement tenus avec l'ensemble des prévenus de la présente affaire du préjudice occasionné à la partie civile", lequel a été évalué par provision à la somme de 6 963 840 francs ;

Qu'en déclarant, dès lors, par les motifs reproduits aux moyens, tous les prévenus tenus solidairement de réparer le dommage subi par la partie civile et causé par les infractions connexes, tout en renvoyant l'évaluation de ce préjudice à une audience ultérieure, la cour d'appel, qui a statué dans les limites des conclusions dont elle était saisie, a fait l'exacte application des articles 203 et 480-1 du Code de procédure pénale, sans encourir les griefs allégués ;

D'où il suit que les moyens ne sont pas fondés ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois.