Livv
Décisions

CA Metz, 3e ch., 17 mai 2018, n° 16/00090

METZ

Arrêt

Infirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Févre

Conseillers :

M. Humbert, Mme Buchmann

TI Saint Avold, du 9 déc. 2015, n° 14/00…

9 décembre 2015

Par jugement contradictoire du 9 décembre 2015, le Tribunal d'instance de SAINT-AVOLD a :

- débouté Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. de l'ensemble de leurs demandes

- condamné Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. à payer à Monsieur Garip B. la somme de 6414,55 euros au titre des loyers et charges impayés arrêtés au mois de décembre 2014, somme assortie des intérêts au taux légal à compter du présent jugement

- ordonné à Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. de restituer immédiatement et sans délai les clés du logement situé [...] à Monsieur Garip B.

- dit que passé le délai de 8 jours à compter de la notification du présent jugement, Monsieur GaripB. pourra à défaut de restitution des clés, reprendre possession de son logement et en changer les serrures

- dit n'y avoir lieu à prononcer une astreinte

- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du CPC

- condamné Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. aux dépens.

Pour statuer en ce sens, le premier juge a considéré que Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. ont donné congé par lettre recommandée avec accusé de réception reçu par Monsieur Garip B. le 28 décembre 2013 ; que les clés sont portables et non quérables ; qu'à défaut de restitution des clés au propriétaire et d'état des lieux de sorti e signé par le bailleur, il ne peut y avoir prise dépossession du logement par le bailleur, de sorte que les loyers sont dus ; que Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. restent redevables de la somme de 6414,55 euros au titre des loyers et charges ;que Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. n'indiquent pas à quoi est dû le dégât des eaux ; qu'à défaut de preuve de cette imputabilité, la responsabilité de Monsieur Garip B. ne peut être engagée ; que Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. sont tenus à la restitution des clés.

Par déclaration d'appel faite par voie électronique au Greffe de la Cour le 13 janvier 2016, Monsieur

Patrick A. et Madame Gisèle A. ont relevé appel de cette décision.

En l'état de leurs conclusions du 20 août 2016, Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. demandent à la Cour de :

- dire et juger recevable et fondé leur appel

- débouter Monsieur Garip B. de son appel incident

- infirmer le jugement

- dire et juger le Tribunal d'instance incompétent pour statuer sur la demande en paiement de loyers commerciaux formés par Monsieur Garip B.

- déclarer irrecevable la demande de Monsieur Garip B. au titre des loyers commerciaux

- débouter Monsieur Garip B. de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions

24/06/2022 16:41 Cour d'appel, Metz, 3e chambre, 17 Mai 2018 – n° 16/00090 - Lexis 360 beta

- condamner Monsieur Garip B. à leur payer la somme de : 2087,57 euros au titre du trop-perçu des loyers 357,22 euros au titre des frais engagés par Monsieur A. pour le compte de Monsieur Garip B.

majorée des intérêts à compter de l'assignation, soit le 27 octobre 2014

- condamner Monsieur Garip B. à leur payer une indemnité de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

À l'appui de leur appel, Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. soutiennent que le 14 novembre 2011, Monsieur Garip B. et Madame Tulay D. épouse B. leur ont donné à bail commercial un commerce de débit de boissons-pizzéria et un appartement situés à [...], moyennant un loyer annuel de 14400 euros, soit 1200 euros par mois, outre 50 euros de charges ; qu'un dépôt de garanti e de 7200 euros a été versé ; que le bail a prévu par ailleurs une clause par laquelle « le preneur aura la faculté de ne donner congé que pour la partie commerciale. Le bailleur et le preneur s'obligeront alors à signer un nouveau bail moyennant un loyer de 450 euros lequel sera révisé en fonction de la variation de l'indice de référence des loyers à compter d'aujourd'hui » ; qu'ils ont cessé l'exploitation du commerce le 1er janvier 2013 ; qu'une radiation est intervenue ; qu'un état des lieux de sorti e a été effectué le 30 avril 2013 ; que le loyer de 1250 euros a été payé jusqu'en avril 2013 ; que conformément aux dispositions du bail et en accord avec le bailleur, ils sont restés dans l'appartement ; qu'en revanche, et en contradiction avec le bail commercial, Monsieur Garip B. n'a pas établi de nouveau bail ; que le bailleur a sollicité devant le Tribunal d'instance leur condamnation à de prétendus loyers commerciaux ; que le Tribunal d'instance n'est pas compétent pour connaître de cette demande ; qu'il appartient au bailleur de saisir le Tribunal de Grande Instance, chambre commerciale, qui a compétence exclusive ; que Monsieur B. fait écrire que le local à usage d'habitation a été compris comme accessoire dans bail commercial et qu'il suit le principal et reste soumis au droit des baux commerciaux ; que dès lors, le tribunal d'instance est incompétent pour connaître des demandes portant sur le bail « verbal » à usage d'habitation ; que Monsieur B. a accepté que le bail commercial se termine en avril 2013 ; que les parti es au bail commercial peuvent toujours convenir, sans respecter les formes du congé, d'une résiliation anticipée du bail ; que c'est ce qui a été convenu entre les parti es, Monsieur B. ne pouvant aujourd'hui prétendre le contraire ; que le loyer convenu dans le bail commercial a été fixé à 450 euros par mois ; qu'ils ont versé plus que 450 euros ; qu'il résulte du décompte et des justificatifs de paiement produits que Monsieur B. leur doit la somme de 2087,57 euros pour la période dumois de janvier 2013 à décembre 2013 ; que le 23 décembre 2013, ils ont avisé le bailleur de leur intention de quitter le logement donné en location dans le délai d'un mois faisant application du délai de préavis abrégé visé par l'article 15-1 de la loi du 6 juillet 1989 ; qu'ils interpellaient également le bailleur sur le sort du dépôt de garantie non restitué et sur une réclamation restée sans effet concernant des travaux financés par leurs soins suite à un dégât des eaux dans l'immeuble ; qu'ils ont fait parvenir à Monsieur B. une lettre recommandée sollicitant des explications quant aux charges notamment d'eau réclamées par le bailleur et payées par les preneurs ; que les clés ont été envoyées par lettre suivie ; que le bail a pris fi n le 22 janvier 2014 ;que c'est avec une particulière mauvaise foi que Monsieur B. a prétendu que le paquet envoyé était vide ; que la disposition leur enjoignant de restituer les clés n'a, en tout état de cause, plus d'objet ;qu'ils ont dû engager pour le compte de Monsieur B. des frais qui ne leur sont pas imputables et qui doivent donc être remboursés comme la mise en conformité électrique de l'appartement ; que suite au dégât des eaux, ils ont procédé eux-mêmes et avancé les frais de remise en état ; que pa run geste commercial, leur propre compagnie d'assurance a participé au coût des travaux à hauteur de 201,84 euros ; que l'agent d'assurance a établi une attestation en ce sens.

En l'état de ses conclusions récapitulatives du 10 novembre 2016, Monsieur Garip B. demande à la Cour de :

- débouter les époux A. de leurs appels et de leurs moyens, fi ns et demandes

- dire et juger que la Cour est compétente comme cour d'appel quant à la matière commerciale et peut évoquer l'affaire

- dire et juger recevable et bien fondé son appel incident

- infirmer le jugement entrepris

- statuant à nouveau, dire et juger que le bail commercial prendra fin au 1er novembre 2014

- condamner solidairement les époux A. à payer la somme de 22385,20 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement entrepris

- lui réserver de demander restitution du matériel mis à disposition dans le cadre de ce bail commercial le cas échéant sous astreinte commercial, le cas échéant sous astreinte

- dire et juger qu'à l'expiration de l'utilisation du local à usage d'habitation accessoire au bail commercial le 1er novembre 2014 s'est établi un bail d'habitation verbal dont le loyer était fixé à 450 euros par mois

- condamner solidairement les époux A. à payer la somme de 6913,82 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement entrepris

- lui réserver de demander remboursement des éléments de cuisine démontés et non remontés dans le local à usage d'habitation

- subsidiairement, dire et juger que le bail commercial prendra fin au 30 avril 2013

- condamner solidairement les époux A. à payer la somme de 3134,36 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement entrepris

- lui réserver de demander restitution du matériel mis à disposition dans le cadre de ce bail commercial, le cas échéant sous astreinte

- dire et juger qu'à l'expiration de l'utilisation du local à usage d'habitation accessoire au bail commercial le 30 avril 2013, s'est établi un bail d'habitation verbal dont le loyer était fixé à 450 euros par mois

- condamner solidairement les époux A. à payer la somme de 15917 euros avec intérêts au taux légal à compter du jugement entrepris

- lui réserver de demander remboursement des éléments de cuisine démontés et non remontésdans le local à usage d'habitation

- dans tous les cas, confirmer sur le surplus des dispositions du jugement non contraires

- y ajoutant, dire et juger que les dépens de première instance comprendront les frais du constat d'huissier SCP A. - C. - L. - M. - T. en date du 21 janvier 2016 ; à défaut, ils seront compris dans les dépens d'appel

- condamner les époux A. à payer une somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- condamner les époux A. aux entiers frais et dépens d'appel.

Monsieur Garip B. expose qu'un local à usage d'habitation a été compris comme accessoire du bail commercial conclu le 14 novembre 2011 entre les parties ; que l'accessoire suit le principal et reste soumis au droit des baux commerciaux ; que le bail commercial a été conclu pour une durée de neuf années commençant à courir le 1er novembre 2011 pour se terminer le 31 octobre 2020 ; que le preneur ne pouvait se désengager que dans les formes prévues par l'article L. 145-5 du code de commerce et à l'expiration d'une période triennale ; que pourtant, à ce jour, il n'a pas réceptionné le moindre congé au bail commercial, régulier en la forme, ce d'autant que le preneur ne pouvait y mettre un terme qu'à l'issue notamment de la première période triennale fixée au 1er novembre 2014 ; que le contrat n'a pu dès lors se terminer à cette date du 30 avril 2013 ; qu'il accepte que le bail commercial, par souhait des époux A. et des relations de confiance entretenues, prenne fin le 1er novembre 2014 ; que sur cette période, les loyers et charges étaient donc dus ;que les époux A. ont un arriéré locatif certain ; que le litige étant appelé devant la Cour, cette dernière juridiction d'appel du Tribunal de Grande Instance peut évoquer sur le fond indépendamment du fait qu'il y aurait eu une incompétence éventuelle en première instance ; qu'ilpeut dès lors être validé la condamnation des époux A. sur des montants au titre du contrat de bail commercial ; que les époux A. n'ont pas restitué le matériel mis à leur disposition suivant le contrat de bail commercial ; que le courrier du 23 décembre 2013, réceptionné le 27 décembre 2013,envoyé par les époux A. pour informer le bailleur de leur intention de quitter le logement (= local à usage d'habitation) n'est pas valable, ce d'autant que le local à usage d'habitation était accessoire et aucun congé régulier n'a été donné par le preneur pour le bail commercial ; que la possibilité d'utiliser le local à usage d'habitation, accessoire au bail commercial, a donc pris fin le 1er novembre 2014 ; que les époux A. sont restés dans lieux jusqu'à une date inconnue de départ ; que s'est établi un bail verbal d'habitation, le loyer étant fixé à 450 euros par mois ainsi qu'ils en conviennent ; que les époux A. n'ont jamais donné congé régulier à ce bail verbal ; qu'ils ont affirmé avoir adressé les neuf clés du logement par lettre ; qu'il a bien réceptionné une telle lettre mais vide ; que les clés auraient dû être remises au bailleur en mains propres ; que le fait même de les envoyer par la poste même en recommandé, sauf accord préalable ne vaut pas restitution ; que les époux A. n'ont pas déféré à l'exécution provisoire du jugement entrepris, ne restituant pas les clés ; que dès lors le bail verbal s'est poursuivi ; qu'il a repris le 21 janvier 2016 son logement et a changé les serrures, comme autorisé par le jugement entrepris ; qu'il est donc dû des loyers et charges depuis le 1er novembre 2014 jusqu'au 20 janvier 2016 ; que les époux A. ont également démonté les éléments de cuisine dans le local à usage d'habitation, éléments présents à l'entrée dans les lieux ; à la reprise, il a pu être constaté que ces éléments n'avaient pas été réinstallés ; que cette cuisine coûte la somme de 3147,94 euros ; qu'il sera dit qu'il se réserve le droit d'en solliciter le remboursement ; que les époux A. soutiennent que le bail aurait fait l'objet d'un accord de résiliation anticipée des parties ; qu'il n'en est rien ; que dans le cadre de relation de confiance, il pouvait s'engager à accorder une telle résiliation anticipée, hors délai des baux commerciaux, mais sous la condition donnée aux locataires de donner congé en bonne forme ; que l'état des lieux a été anticipé en attendant que les preneurs envoient le congé qui n'est jamais venu ; que cet état des lieux n'est pas univoque pour admettre l'accord quant à une résiliation anticipée ; qu'à défaut, subsidiairement, il y aurait donc lieu de fixer la résiliation au 30 avril 2013 ; que la possibilité d'utiliser le local à usage d'habitation, accessoire au bail commercial, aurait donc pris fin le 30 avril2013 ; qu'un nouveau bail verbal se serait établi ; que le bail verbal s'étant poursuivi, il est donc dû l'ensemble des loyers et charges depuis le 1er mai 2013 jusqu'au 20 janvier 2016 ; qu'il n'existe aucun trop perçu de la part du bailleur ; que ce dernier n'a pas à rembourser une intervention d'un électricien chez les époux A. qui confirment bien d'ailleurs la conformité du réseau ; que s'agissant de la demande relative à la fuite d'eau, il n'en est pas responsable sur le plan civil ; que la fuite s'est produite au niveau du siphon d'écoulement de l'évier alors que les époux A. ont installé leurs propres éléments de cuisine après avoir déposé l'ancienne ; que les époux A. ont pourtant déposé une déclaration de sinistre dégât des eaux auprès de leur assureur en invoquant que leurs propriétaires devaient garanti e au titre de leur assurance immeuble ; que leur assureur est venu vers lui pour lui demander de rembourser les frais exposés par l'assuré pour la somme de 403,68euros ; qu'il n'a pas été donné suite ; que son assureur MMA a été averti de la situation et il n'y a pas eu de prise en charge des frais des époux A. ; que la somme de 403,68 euros est exagérée : la pièce de la cuisine fait 21m² mais la facture parle d'une intervention pour une surface de 58 m² ; que les époux A. ont reçu une indemnisation de leur compagnie SWISS LIFE pour 201,84 euros soit déjà largement plus que le coût rapporté à la bonne surface.

Le 14 septembre 2017, le conseiller de la mise en état a ordonné la clôture de l'instruction.

MOTIFS

Sur la recevabilité des appels

Attendu que l'appel principal doit être déclaré recevable pour avoir été introduit selon les formes et délais prévus par la loi ;

Que l'appel incident, en lien avec l'appel recevable, est également recevable ;

Sur l'exception d'incompétence

Attendu que Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. entendent soulever l'incompétence du Tribunal d'instance pour statuer sur la demande en paiement de loyers commerciaux formée par Monsieur Garip B. ;

Attendu que l'article 74 du code de procédure civile dispose : « Les exceptions doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir » ;

Attendu que Monsieur Garip B. a, par demande reconventionnelle présentée devant le juge d'instance, sollicité la condamnation de Monsieur et Madame A. au paiement d'une somme de7414,55 euros au titre des loyers dus en exécution du bail commercial du 14 novembre 2011,comme le reconnaissent les appelants dans le cadre de leurs écritures à hauteur d'appel (page 4) ;

Attendu que Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. ont conclu au fond, en première instance, sur ces prétentions ;

Attendu en conséquence que l'exception d'incompétence soulevée pour la première fois à hauteur de Cour par Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. doit être déclarée irrecevable ;

Sur la date de résiliation du bail commercial

Attendu que Monsieur Garip B. et Madame Tulay D. épouse B. ont signé un bail commercial avec Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle M. épouse A. en date du 14 novembre 2011 portant sur un local situé à [...] ;

Attendu que ce bail prévoit que « Le présent bail est conclu pour une durée de neuf années entières et consécutives qui commencent à courir rétroactivement le 1er novembre 2011 pour se terminer le 31 octobre 2020.

Toutefois, conformément aux dispositions de l'article L. 145-4 du code de commerce :

Le preneur aura dans les formes et délai de l'article L. 145-9 dudit Code, la faculté de donner congé à l'expiration de chaque période triennale » ;

Attendu que l'article L. 145-9 prévoit un congé donné 6 mois à l'avance ;

Qu'il est constant, en l'espèce, que Monsieur et Madame A. n'ont pas délivré un tel congé au bailleur ;

Attendu que Monsieur et Madame A. indiquent qu'ils ont cessé l'exploitation du commerce le 1erjanvier 2013 et se prévalent d'un accord de Monsieur B. pour que le bail commercial se termine en avril 2013 et produisent aux débats un état des lieux de sortie signé par les parties ;

Attendu que Monsieur B. indique qu'il n'en est rien ; que dans le cadre de relations de confiance, il pouvait s'engager à accorder une telle résiliation anticipée, hors délai des baux commerciaux, mais sous la condition donnée aux locataires de donner congé en bonne forme ; que l'état des lieux a été anticipé en attendant que les preneurs envoient le congé qui n'est jamais venu ; que cet état des lieux n'est pas univoque pour admettre l'accord quant à une résiliation anticipée ;

Attendu qu'une résiliation amiable d'un contrat de bail qui implique la renonciation à un droit, en l'occurrence, pour le bailleur, à la poursuite du bail jusqu'à son terme et au paiement des loyers, ne se présume pas et suppose que les parti es s'accordent à mettre fin au contrat selon les modalités et dans des conditions dépourvues d'équivoque ;

Attendu que s'il est établi par les pièces produites aux débats, s'agissant notamment d'une notification de radiation auprès des services de l'URSSAF de LORRAINE (pièce n° 3 des appelants), que les époux A. ont cessé leur activité en janvier 2013, cet élément est insuffisant pour caractériser un accord du bailleur pour une résiliation anticipée du bail ;

Que, de même, s'il est constant que Monsieur B., averti par ses locataires de leur intention de quitter les locaux commerciaux, a consenti à établir contradictoirement l'état des lieux de sorti e le30 avril 2013, il ne peut être déduit de ce seul fait que soit établi le principe d'une rupture conventionnelle ;

Qu'en conséquence, Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. n'apportent pas la preuve qu'un accord amiable soit intervenu entre les parties pour une résiliation anticipée du bail commercial à la date du 30 avril 2013 ;

Qu'il y a dès lors lieu de considérer que le bail commercial conclu entre les parti es a pris fin à l'expiration de la première période triennale soit le 1er  novembre2014 comme y consent par l’expiration de la première période triennale, soit le 1er novembre 2014, comme y consent par ailleurs le bailleur ;

Sur la demande au titre de l'arriéré locatif

Attendu que Monsieur Garip B. sollicite la condamnation solidaire de Monsieur Patrick A. et de Madame Gisèle A. à lui payer la somme de 22385,20 euros au titre du bail commercial se décomposant comme suit ;

- 30,62 euros au titre de l'année 2011

- 1193,82 euros au titre de l'année 2012

- 6702,10 euros au titre de l'année 2013

- 12722,50 euros au titre de l'année 2014

- 1736,16 euros au titre de la consommation d'eau ;

Attendu que Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. restent redevables des loyer et charges au titre du bail commercial jusqu'au 1er novembre 2014 ;

Attendu que le bail commercial du 14 novembre 2011 prévoit un loyer mensuel de 1200 euros, outre 50 euros à titre de charges ;

Attendu qu'il sera rappelé que la charge de la preuve du paiement des loyers et charges incombe aux locataires en application des dispositions de l'article 1315, devenu 1353, du code civil ;

Attendu que Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. produisent aux débats des récépissés de demandes de virements et des attestations de droits aux prestations familiales établies par la Caisse d'Allocations Familiales de la Moselle pour justifier du paiement des loyers et charges ;

Que force est de constater que les sommes ainsi justifiées apparaissent toutes dans les décomptes produits par Monsieur Garip B. et ont été régulièrement déduites des sommes dues au bailleur de sorte que les époux A. doivent être déboutés de leur demande au titre du trop perçu de loyers pour la période du mois de janvier 2013 à décembre 2013 ;

Qu'en revanche, les sommes versées par les locataires ne couvrent pas l'intégralité de leur dette locative ;

Qu'au surplus, Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. ne contestent pas le montant des charges réclamées par le bailleur ;

Que la somme de 22385,20 euros réclamée par Monsieur Garip B. apparaît dès lors justifiée en son principe et en son montant ;

Qu'en conséquence de ce qui précède, Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. seront solidairement condamnés à payer à Monsieur Garip B. la somme de 22385,20 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Attendu que Monsieur Garip B. ne justifie pas des raisons pour lesquelles il faudrait lui réserver le droit de demander restitution du matériel mis à disposition des époux A., il sera débouté de cette demande ;

Attendu que Monsieur Garip B. sollicite également la condamnation solidaire de Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. à lui payer la somme de 6913,82 euros au titre des loyers et charges pour la période du 1er novembre 2014 au 20 janvier 2016 ;

Attendu que les appelants contestent devoir cette somme et indiquent avoir avisé le bailleur le 23 décembre 2013 de leur intention de quitter le logement donné en location dans le délai d'un mois, faisant application du délai de préavis abrégé visé par l'article 15-1 de la loi du 6 juillet 1989 ;

Que ce faisant, ils reconnaissent qu'à l'issue du bail commercial, un bail d'habitation s'est poursuivi entre les parti es moyennant un loyer de 450 euros par mois selon les termes du bail commercial ;

Attendu que Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. considèrent que ce bail a pris fin le 22janvier 2014 avec l'envoi des clés par la poste ;

Attendu que Monsieur Garip B. indique que la lettre reçue était vide ;

Attendu qu'il sera rappelé que la cessation du contrat de bail oblige les locataires à restituer les lieux loués ;

Que la restitution des lieux se réalise à la fois par la libération des lieux et par la remise de toutes les clés au propriétaire ;

Que les locataires, qui se prétendent libérés de l'obligation de restitution, doivent en rapporter la preuve ;

Attendu que Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A., qui soutiennent avoir renvoyé 9 clés à Monsieur Garip B. par courrier recommandé, produisent aux débats les justificatifs de l'envoi d'un format d'enveloppe de 50 grammes maximum ;

Qu'il ne peut valablement être retenu que cet envoi puisse correspondre à celui de 9 clés ;

Qu'en conséquence, Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. ne rapportent pas la preuve de s'être libérés de leur obligation de restitution ;

Attendu que Monsieur Garip B. indique avoir repris le logement en date du 21 janvier 2016 et produit le procès-verbal de constat établi à cette date par Maître Guillaume L., huissier de justice ;

Que le bail d'habitation existant entre Monsieur Garip B. et Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. a donc pris fin à cette date ;

Qu'en conséquence, Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. sont redevables des loyers et charges dus au titre de ce bail d'habitation pour la période du 1er novembre 2014, date de fin du bail commercial, au 21 janvier 2016, date de reprise du logement par le bailleur, soit la somme de6913,82 euros, non contestée en son montant par les appelants, et solidairement condamnés à payer cette somme majorée des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt à Monsieur Garip B. ;

Attendu que Monsieur Garip B. ne justifie pas des raisons pour lesquelles il faudrait lui réserver le droit de demander remboursement des éléments de cuisine démontés et non remontés dans le local à usage d'habitation, il sera débouté de cette demande ;

Sur la demande au titre des frais engagés par Monsieur et Madame A. pour le compte de Monsieur Garip B.

Attendu que Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. sollicitent la condamnation de Monsieur Garip B. à leur payer la somme de 357,22 euros au titre de frais engagés pour son compte se décomposant comme suit :

- 155,48 euros pour des frais d'électricien

- 201,84 euros pour des frais de remise en état suite à un dégât des eaux ;

Attendu que Monsieur Garip B. conteste devoir ces sommes ;

Attendu que s'agissant des frais d'électricien, Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. produisent aux débats une facture n° 12175 du 26 février 2013 établie par la société GS ELECTRICITE d'un montant de 155,48 euros et une attestation de conformité de l'installation électrique ;

Qu'en l'absence de plus amples explications, il ne peut valablement être retenu que ces frais ont été engagés aux lieu et place de Monsieur B. ;

Attendu que s'agissant des frais de remise en état suite à un dégât des eaux, Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. produisent aux débats :

- un constat amiable de dégât des eaux en date du 26 juin 2013

- un courrier de SWISS LIFE, assureur des appelants, à Monsieur Garip B. en date du 1er août 2013 lui précisant que les époux A. avaient été victimes « d'un dégât des eaux en date du 21 juin 2013ayant atteint des parties en plancher relevant de la garantie de l'immeuble dont vous êtes propriétaire »

- une attestation d'assurance établie par le SWISS LIFE en date du 20 janvier 2015 selon laquelle une somme de 201,84 euros a été versée aux appelants, « Cette intervention exceptionnelle acceptée par SWISS LIFE le 27 février 2014, a été motivée par le fait que Monsieur B. Garip, propriétaire des locaux occupés par Monsieur A. Patrick n'a pas donné suite à notre courrier en date du 1er août 2014 lui signifiant la non intervention de notre Compagnie mandante au motif que les dégâts relevaient de la garanti e de l'immeuble »

- une facture de matériaux de la société SOPALOR établie le 27 juin 2013 d'un montant de 403,68euros ;

Attendu que Monsieur Garip B. soutient que son assureur MMA a été averti de la situation et qu'il n'y a pas eu de prise en charge des frais des époux A. ; que la somme de 403,68 euros est exagérée;

Qu'il ne produit cependant aux débats aucune pièce de nature à soutenir ces affirmations ou à contredire utilement la somme de 403,68 euros évoquée ;

Qu'en revanche, les pièces produites par les époux A. sont de nature à établir la réalité de leur demande qui sera accueillie à hauteur de 201,84 euros ;

Que Monsieur Garip B. sera donc condamné à payer à Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. la somme de 201,84 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Que le jugement entrepris sera infirmé en toutes ses dispositions ;

Sur les demandes accessoires

Attendu qu'il paraît inéquitable de laisser à la charge de Monsieur Garip B. ses frais irrépétibles ;

Qu'en conséquence, Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. seront déboutés de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et condamnés à payer à Monsieur Garip B. une somme de 1200 euros de ce chef ;

Attendu que Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A., qui succombent, supporteront les dépens de première instance et d'appel en ce y compris les frais du constat d'huissier du 21 janvier 2016 ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par décision contradictoire, par mise à disposition au greffe conformément aux dispositions de l'article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

DÉCLARE les appels recevables ;

DÉCLARE l'exception d'incompétence irrecevable ;

INFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Et statuant à nouveau,

DIT et JUGE que le bail commercial conclu entre les parties le 14 novembre 2011 a pris fin le 1er novembre 2014 ;

CONDAMNE solidairement Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. à payer à Monsieur Garip B.la somme de 22385,20 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt au titre des loyers commerciaux ;

DIT et JUGE qu'à l'issue du bail commercial, un bail d'habitation s'est poursuivi entre les parties ;

CONDAMNE solidairement Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. à payer à Monsieur Garip B.la somme de 6913,82 euros au taux légal à compter du présent arrêt au titre des loyers d'habitation ;

CONDAMNE Monsieur Garip B. à payer à Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. la somme de201,84 euros avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt au titre des frais engagés par eux pour son compte ;

CONDAMNE Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. à payer à Monsieur Garip B. la somme de1200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE toute autre demande ;

CONDAMNE Monsieur Patrick A. et Madame Gisèle A. aux dépens de première instance et d'appelen ce y compris les frais du constat d'huissier du 21 janvier 2016.

Le présent arrêt a été prononcé par mise à disposition publique au greffe le 17 Mai 2018, par Madame Caroline FEVRE, Président de Chambre, assistée de Mme Julie CHRISTOPHE, Greffier, et signé par elles.