Cass. com., 31 janvier 2012, n° 10-19.065
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Favre
Avocat :
SCP Piwnica et Molinié
Sur le moyen unique, après avertissement délivré au demandeur :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Dijon, 2 mars 2010, RG n° 09/1376), que le 19 septembre 1996, la société Avions Pierre Robin, aux droits de laquelle se trouve la société Ceapr (le loueur), a donné en location-gérance un fonds de commerce à la société Apex industries (le locataire) ; que le locataire, mis en redressement judiciaire, a bénéficié, le 25 août 2003, d'un plan de continuation ; que la résolution de ce plan et la liquidation judiciaire ont été prononcés par jugement du 16 septembre 2008, M. X... étant nommé liquidateur (le liquidateur) ; que celui-ci a résilié le contrat de location-gérance le 24 septembre 2008, avec effet au 1er octobre suivant, tandis que les stocks de pièces détachées sont demeurés dans les locaux repris par le loueur ; que le 13 mars 2009, le liquidateur a présenté une requête aux fins d'ordonner la vente aux enchères publiques des biens et actifs du locataire incluant ces stocks ; que le loueur a été placé sous sauvegarde le 19 mai 2009, M. X... étant nommé mandataire judiciaire et, ultérieurement, M. Z..., administrateur ; que par ordonnance du 25 mai 2009, le juge-commissaire a constaté que le loueur n'avait pas exercé la faculté prévue par le contrat de location-gérance de payer le prix des stocks à sa valeur nette comptable lors de la cessation du contrat et a ordonné la vente aux enchères publiques des actifs du locataire incluant les stocks de pièces détachées ; qu'un jugement du 28 juillet 2009, a rejeté la tierce opposition du loueur, " débouté " celui-ci-ci de l'intégralité de ses demandes et confirmé l'ordonnance ;
Attendu que le loueur et M. Z..., ès qualités, font grief à l'arrêt d'avoir rejeté la tierce opposition formée contre l'ordonnance du 25 mai 2009 ayant ordonné la vente aux enchères publiques des biens dépendant des actifs de la liquidation judiciaire du locataire, sauf à préciser qu'il n'y a pas lieu de constater que le loueur n'a pas exercé la faculté prévue à l'article 4. 0. 17 du contrat de location-gérance en payant le prix des stocks à sa valeur nette comptable lors de la cessation de la location-gérance alors, selon le moyen :
1°/ que la dispense de revendication bénéficie à tous les propriétaires de biens mobiliers qui se trouvent confiés au débiteur en procédure collective, par suite d'un contrat publié ayant fait l'objet d'une publicité ; qu'en considérant que le droit de propriété du locataire sur les stocks litigieux ne saurait être contesté, tout en retenant que ceux-ci étaient restés dans les locaux du loueur, qui avait été placé sous sauvegarde de justice par jugement rendu par le tribunal de commerce de Dijon le 24 mars 2009, sans que le locataire n'exerçât l'action en revendication, la cour d'appel a violé les articles L. 624-9 et L. 624-10 du code de commerce dans sa version issue de la loi du 26 juillet 2005, applicable en l'espèce ;
2°/ que le loueur faisait valoir dans ses conclusions signifiées le 8 décembre 2008 que la société Apex international avait cédé par acte de cession de créance professionnelle versé aux débats, notifié à M. X... le 13 mai 2009, tout ou partie des créances qu'elle détenait sur ses filiales et notamment ses créances de compte courant gagées sur les stocks litigieux au loueur ; qu'en considérant que le droit de propriété du locataire sur les stocks litigieux ne pouvait être contesté sans répondre à ce moyen péremptoire, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ qu'aux termes de l'article 4. 0. 17, alinéa 1er, du contrat de location-gérance du 19 septembre 1996 consenti par l'auteur du loueur au profit de la société aux droits de laquelle est venu le loueur, il est stipulé que « la locataire gérante s'oblige en cas de cessation de la location gérance, pour quelque cause que ce soit, à :- restituer l'ensemble des biens compris dans la branche d'activité louée, dans un état de fonctionnement et/ ou d'utilisation et/ ou d'entretien comparable à celui constaté lors de son entrée en jouissance ; cette obligation de restitution porte également sur les biens acquis par la locataire gérante en remplacement des matériels et biens initialement compris dans la branche louée, au titre de ses obligations d'entretien et de renouvellement de ceux-ci. Les autres actifs acquis par la locataire gérante après accord du loueur, et nécessaires à l'exploitation de la branche louée seront repris par le loueur, et ce exclusivement si ce dernier le demande, pour leur valeur nette comptable lors de la cessation de la location gérance » ; qu'en considérant que la rubrique « autres actifs acquis par la locataire-gérante après accord du loueur et nécessaires à l'exploitation de la branche louée » ne peut viser les stocks de pièces détachées dont il n'est pas concevable que l'acquisition puisse dépendre de l'accord du loueur, la cour d'appel a dénaturé ladite clause en violation de l'article 1134 du code civil ;
4°/ qu'aux termes de l'article 4. 0. 17, alinéa 1er, du contrat de location-gérance du 19 septembre 1996 consenti par l'auteur du loueur au profit de la société aux droits de laquelle est venu le locataire, il est stipulé que « la locataire gérante s'oblige en cas de cessation de la location gérance, pour quelque cause que ce soit, à :- restituer l'ensemble des biens compris dans la branche d'activité louée, dans un état de fonctionnement et/ ou d'utilisation et/ ou d'entretien comparable à celui constaté lors de son entrée en jouissance ; cette obligation de restitution porte également sur les biens acquis par la locataire gérante en remplacement des matériels et biens initialement compris dans la branche louée, au titre de ses obligations d'entretien et de renouvellement de ceux-ci. Les autres actifs acquis par la locataire gérante après accord du loueur, et nécessaires à l'exploitation de la branche louée seront repris par le loueur, et ce exclusivement si ce dernier le demande, pour leur valeur nette comptable lors de la cessation de la location gérance » ; qu'en considérant que le droit de propriété du locataire sur les stocks litigieux ne saurait être contesté tout en relevant que le contrat de location-gérance liant le locataire au loueur avait été résilié par M. X..., es qualités, le 24 septembre 2008 et que les stocks litigieux étaient restés dans les locaux repris par le loueur et qu'il résultait de la lecture de la clause précitée que la rubrique « autres actifs acquis par la locataire-gérante après accord du loueur et nécessaires à l'exploitation de la branche louée » ne peut viser les stocks de pièces détachées dont il n'est pas concevable que l'acquisition puisse dépendre de l'accord du loueur, sans rechercher s'il n'en résultait pas que les stocks litigieux avaient été restitués au loueur en application de l'alinéa précédent, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'une demande en restitution de meubles présentée avant la mise sous sauvegarde de leur détenteur n'est pas soumise aux dispositions des articles L. 624-9 et L. 624-10 du code de commerce dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance du 18 décembre 2008 et se poursuit selon les dispositions de l'article L. 622-23 du même code ; que par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués, la décision de la cour d'appel se trouve justifiée ;
Attendu, en second lieu, qu'ayant relevé que les stocks litigieux se trouvaient ans les locaux du loueur à la suite de la résiliation du contrat de location-gérance et du départ du locataire, que ces stocks faisaient l'objet d'un gage avec dessaisissement et que si M. X..., ès qualités, a fait procéder à une saisie conservatoire des biens détenus par le loueur, cette mesure ne valait pas reconnaissance d'un droit de propriété, la cour d'appel a implicitement mais nécessairement répondu aux conclusions prétendument omises ;
Attendu, en troisième lieu, qu'ayant relevé, par une interprétation que rendait nécessaire l'ambiguïté de ses termes, qu'il résultait de la lecture de l'article 4. 0. 17 du contrat de location-gérance que la rubrique " autres actifs acquis par la locataire-gérante après l'accord du loueur et nécessaires à l'exploitation de la branche louée " ne pouvait viser les stocks de pièces détachées, dont il n'était pas concevable que l'acquisition pût dépendre de l'accord du loueur, accord qui n'était au demeurant pas démontré, mais seulement les machines et autres actifs immobilisés, la cour d'appel, hors dénaturation, a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.