Cass. com., 17 juillet 2001, n° 98-21.045
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Dumas
Rapporteur :
M. Métivet
Avocat général :
M. Lafortune
Avocat :
Me Capron
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 18 juin 1998), que le fonds de commerce de boulangerie dépendant de la liquidation judiciaire de M. Claude X... dont la SCP Brouard-Daude avait été nommé liquidateur, a été mis en vente judiciaire et qu'une enchère a été portée au nom de la société à responsabilité limitée en formation "Le pain normand" (la société) dont les associés étaient MM. Franck et Laurent X..., M. B... et M. A... étant également associés, le dernier ayant été désigné en qualité de gérant dans les statuts qui comportaient une clause lui donnant pouvoir "dans l'intérêt de la société et vu l'urgence", "à l'effet d'acquérir un fonds de boulangerie à Créteil mis en vente judiciaire par MM. Y... et Z..., notaires à Paris" ; que la société n'a pas été immatriculée au registre du commerce et des sociétés et n'a pas réglé le prix de l'adjudication ; que le fonds ayant été remis en vente sur folle enchère et le nouvel enchérisseur, la société Mendy, n'ayant à son tour pas acquitté le prix, a été vendu à un prix moindre lors d'une troisième adjudication ; que le liquidateur a assigné les associés de la société en paiement de la différence entre le prix de la première adjudication et celui de l'adjudication définitive ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que M. B... reproche à l'arrêt de l'avoir condamné à payer une certaine somme au liquidateur alors, selon le moyen :
1°) que si les personnes qui ont donné mandat à un tiers pour agir au nom d'une société en formation sont tenus solidairement et indéfiniment des actes ainsi accomplis, encore faut-il que mandat ait été donné à un tiers d'agir, non pas au nom de la société une fois immatriculée, mais au nom de la société en formation ; qu'en l'espèce, la clause ci-dessus reproduite et dont l'existence d'un mandat a été déduite, se bornait à énoncer que mandat a été donné au gérant "dans l'intérêt de la société" ; qu'elle ne mentionnait nullement que le gérant avait le pouvoir d'agir au nom de la société en formation ; que dès lors l'arrêt attaqué a été rendu en violation de l'article 5 de la loi du 24 juillet 1966 ;
2°) que faute d'avoir recherché, eu égard à la formule utilisée "dans l'intérêt de la société", si les associés avaient eu l'intention de donner mandat au gérant d'agir au nom de la société en formation pour s'assurer des conditions d'un engagement des associés, les juges du second degré ont, en tout état de cause, privé leur décision de base légale au regard du même texte ;
Mais attendu que l'arrêt retient que lors de la signature des statuts, les associés ont donné pouvoir au gérant "vu l'urgence" d'acquérir un fonds de boulangerie faisant l'objet d'une vente sur adjudication, faisant ainsi ressortir que celui-ci avait reçu pouvoir d'agir au nom de la société alors en formation ; que la cour d'appel, qui a légalement justifié sa décision, a pu statuer comme elle a fait ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le second moyen, pris en ses trois branches :
Attendu que M. B... reproche à l'arrêt d'avoir rejeté la demande en dommages-intérêts qu'il avait formé à l'encontre du liquidateur alors, selon le moyen :
1°) que le juge ne peut relever d'office la nouveauté d'une demande pour en prononcer l'irrecevabilité ; qu'en l'espèce le liquidateur n'a pas invoqué la nouveauté de la demande de dommages-intérêts formée par lui ; que l'arrêt a été rendu en violation des articles 125 et 564 du nouveau Code de procédure civile ;
2°) que lorsque le juge relève d'office une fin de non-recevoir, il doit rouvrir les débats pour permettre aux parties de s'expliquer ; que faute pour les juges du second degré d'avoir satisfait à cette exigence, l'arrêt a été rendu en violation de l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ;
3°) que lorsqu'elle émane du défendeur, la demande nouvelle formée en cause d'appel s'analyse en une demande reconventionnelle ; qu'elle est recevable dès lors qu'elle présente un lien suffisant avec la demande originaire ; que faute d'avoir recherché si tel était le cas, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard des articles 70 et 567 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'il ne résulte pas de ses conclusions que M. B... ait formé à l'encontre du liquidateur une demande de dommages-intérêts fondée sur la responsabilité que celui-ci aurait encourue pour avoir laissé la société Mendy exploiter le fonds pendant un an ; qu'il ne peut se faire un grief de ce que la cour d'appel a déclaré une telle demande irrecevable ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.