Cass. com., 1 avril 2014, n° 12-23.501
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Espel
Avocats :
SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Piwnica et Molinié
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Basse-terre, 21 mars 2011), que la Société de développement régional Antilles Guyane (la SADERAG), aux droits de laquelle se trouve la Société financière Antilles-Guyane (la SOFIAG), a, par acte notarié du 20 juillet 1987, consenti à la société La Maison de l'Afrique (la société), alors en formation, un prêt en garantie duquel Mme X..., veuve Y... (Mme X...) a consenti une sûreté réelle ; que la société n'ayant pas repris cet engagement, Mme X... a assigné la SOFIAG, demandant à être déchargée de son obligation ;
Attendu que la SOFIAG fait grief à l'arrêt d'avoir dit que Mme X... était déchargée de l'engagement de caution hypothécaire pris par acte notarié du 20 juillet 1987, ordonné la mainlevée de l'hypothèque prise le 2 septembre 1987 et renouvelée le 7 mai 1997, et de l'avoir condamnée à verser à Mme X... la somme de 8 384,70 euros, alors, selon le moyen :
1°/ que la sûreté réelle consentie en garantie de la dette d'un tiers n'est pas un cautionnement ; qu'en faisant application des dispositions propres au cautionnement, pour décharger Mme X... de l'engagement qu'elle avait souscrit par acte notarié du 20 juillet 1987, bien qu'elle y ait consenti, non un cautionnement, mais une hypothèque sur un immeuble lui appartenant, en garantie de la dette d'un tiers, la cour d'appel a violé les articles 2292 et 2393 du code civil ;
2°/ que selon prêt notarié consenti par acte du 20 juillet 1987, Mme X... a déclaré se constituer caution hypothécaire du preneur envers la SODERAG, le terme « preneur » désignant « la société à responsabilité limitée « la Maison de l'Afrique (¿) représentée par : - M. Z... (¿) et Mme Y... Yveline (¿) Tous deux co-gérants de ladite société. Ci après dénommés « l'emprunteur » ; qu'en jugeant néanmoins, pour décharger Mme X... de son obligation de garantie, que la sûreté ainsi consentie bénéficiait à la seule société en formation, à l'exclusion de ses gérants cependant que ces derniers étaient expressément et nommément visés par le terme « preneur », la cour d'appel a dénaturé l'acte de prêt, en violation de l'article 1134 du code civil ;
3°/ que tout jugement doit être motivé ; que selon le prêt notarié, sont « dénommés « l'emprunteur » les « deux co-gérants de la société La Maison de l'Afrique » et la société elle-même, et Mme X... se constitue caution hypothécaire du « preneur » ; qu'en affirmant que l'acte notarié indiquait « sans ambiguïté ni aucune incertitude » que « l'emprunteur garanti » était la seule société en formation, sans préciser quelle clause de l'acte permettait de justifier une telle affirmation, la cour d'appel a privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ qu' en présence d'un acte ambigu, le juge doit rechercher la commune intention des parties contractantes ; qu'en s'abstenant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si l'intention de Mme X... de constituer une sûreté en garantie de la dette de M. Z... et Mme Y... ne s'évinçait pas notamment d'une lettre du 25 mars 2004, dans laquelle elle écrivait s'être « portée caution pour le prêt que la SOFIAG avait consenti à M. Z... », bien que les clauses de l'acte précisant qu'elle se constituait caution hypothécaire du preneur et que la société La Maison de l'Afrique, M. Z... et Mme Y... étaient « dénommés » preneurs, s'opposaient à ce que la convention soit considérée comme réservant clairement la qualité d'emprunteur garanti à la société La Maison de l'Afrique, de sorte qu'il fallait à tout le moins rechercher dans tout élément la volonté des parties, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, que c'est par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, rendue nécessaire par l'ambiguïté résultant des termes employés, que la cour d'appel a considéré que la sûreté réelle avait été consentie pour garantir la dette de la société en formation envers la SOFIRAG ;
Attendu, en second lieu, qu'après avoir énoncé par motifs adoptés que le prêt contracté au nom d'une société en cours de constitution n'engage, en l'absence de reprise de cet engagement que celui qui se dit son représentant, que l'obligation de restituer les fonds est, dès lors, à la charge d'une partie distincte de la personne morale prévue tant par le contrat de prêt que par la sûreté garantissant l'exécution de celui-ci , puis constaté que l'état des actes accomplis pour le compte de la société La Maison de l'Afrique en formation faisait apparaître que le prêt litigieux n'avait pas été repris par celle-ci, l'arrêt en déduit que la sûreté réelle consentie par Mme X... ne pouvait garantir la dette personnelle des cogérants ; que par ces énonciations, constatations et appréciations, abstraction faite du visa erroné de l'article 2292 du code civil, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à la recherche évoquée à la quatrième branche que ses constatations rendaient inopérantes, a, par une décision motivée, légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.