Cass. com., 14 janvier 2003, n° 00-12.557
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Dumas
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 9 décembre 1999) rendu sur renvoi après cassation (Chambre commerciale, économique et financière, 19 mai 1998, n° D 9520.071) que la société Socosud a réalisé pour le compte de la société Cidem en formation des travaux de rénovation dans un local situé à Marseille sur devis estimatif établi le 6 octobre 1987 à l'intention de la société Cidem et accepté par deux associés, MM. X... et Y... ; que le mandat du 8 décembre 1987, donné par l'ensemble des associés de la société Cidem à MM. X... et Y... de signer un bail commercial et de faire exécuter des travaux d'aménagement stipulait que l'immatriculation de la société au registre du commerce emporterait reprise par elle de ces engagements ; que le 5 février 1988, la société Socosud a adressé à la société Cidem une facture que celle-ci a partiellement payé en juin 1988 et a tiré deux lettres de change en mars et avril 1988 sur cette société ; que cette dernière ayant fait l'objet d'une procédure collective, la société Socosud a assigné MM. X... et Y... en paiement du solde de la facture ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que la société Socosud reproche à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande dirigée contre MM. X... et Y... alors, selon le moyen :
1 / que, si le mandat donné par les associés à l'un ou plusieurs d'entre eux, de prendre des engagements pour le compte de la société en formation, emporte leur reprise par la société immatriculée, c'est à la condition que ce mandat ait été consenti antérieurement ou concomitamment aux engagements pris par les fondateurs ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui, après avoir relevé que le devis établi par la société Socosud et signé par MM. X... et Y..., datait du 6 octobre 1987 et que le mandat d'engager la société Cidem ne leur avait été concédé que le 8 décembre suivant, n'en a pas déduit que les travaux litigieux avaient été commandés par MM. X... et Y... avant que le moindre pouvoir leur ait été donné à cet effet, a omis de tirer les conséquences légales de ses constatations au regard des articles 5 de la loi du 24 juillet 1966, 26 du décret du 23 mars 1967 et 6 du décret du 3 juillet 1978 ;
2 / que si le mandat donné par les associés à l'un ou plusieurs d'entre eux, de prendre des engagements pour le compte de la société en formation, emporte leur reprise par la société immatriculée, c'est à la condition que ce mandat ait été consenti antérieurement ou concomitamment aux engagements pris par les fondateurs ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a décidé que le mandat concédé, le 8 décembre 1987, à MM. X... et Y..., emportait reprise, par la société Cidem de leur commande de travaux auprès de la société Socosud concrétisée par le devis signé par eux le 6 octobre 1987, sans rechercher, alors qu'elle y avait été invitée, si le mandat en cause n'avait pas été consenti postérieurement à la commande des travaux, ce dont il résultait qu'il ne pouvait emporter la reprise des engagements ainsi contractés, a privé sa décision de base légale au regard des articles 5 de la loi du 24 juillet 1966, 26 du décret du 23 mars 1967 et 6 du décret du 3 juillet 1978 ;
Mais attendu que l'arrêt retient que le mandat donné à MM. Y... et X... par les associés de la société Cidem portait sur deux engagements nécessaires à l'activité de la société en formation, à savoir la signature du bail commercial et la réalisation de travaux d'aménagement du local loué et précisait que l'immatriculation de la société au registre du commerce et des sociétés emporterait reprise de ces engagements par ladite société ; qu'il résulte de ces constatations que la société Cidem a, dans ce mandat, donné son accord pour reprendre les deux engagements déterminés dans leur montant, par le seul effet de l'immatriculation au registre du commerce et des sociétés, peu important dans les rapports entre MM. X... et Y... et des tiers que les associés de la société Cidem aient ratifié ces engagements, par un mandat donné postérieurement à ceux-ci ; que le moyen, pris en ses deux branches, n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen, pris en son unique branche :
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir condamné la société Socosud à verser des dommages-intérêts pour procédure abusive à M. X..., alors, selon le moyen, que le droit d'ester en justice ne dégénère en abus réparable qu'à la condition qu'un préjudice ait été causé par son auteur ; qu'en l'espèce, la cour d'appel, qui a accordé à M. X... une indemnité pour procédure abusive sans caractériser le préjudice que lui aurait causé l'action intentée par la société Socosud a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel qui relève qu'un créancier ne peut considérer dans le même trait de temps, de bonne foi, que la société à créer est sa débitrice et que les personnes physiques qui la représentent le sont également, a suffisamment caractérisé le préjudice subi par M. X..., lequel a été recherché en paiement après l'ouverture de la procédure collective de la société débitrice ;que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.