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Décisions

Cass. com., 17 mars 1998, n° 95-11.209

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Bézard

Rapporteur :

M. Tricot

Avocat général :

M. Raynaud

Avocats :

SCP Waquet, Farge et Hazan, Me Baraduc-Bénabent

Montpellier, du 3 nov. 1994

3 novembre 1994

Attendu, selon l'arrêt déféré (Montpellier, 3 novembre 1994), que M. X... ayant commandé à la société Seeri Froid divers matériels dont la livraison a été effectuée avant le 29 août 1991, date de la mise en redressement judiciaire de M. X..., la société Seeri Froid, invoquant une clause de réserve de propriété, a revendiqué le prix de ces matériels et en a demandé le paiement à la société Meijac sur le fondement de l'article 122 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Meijac reproche à l'arrêt d'avoir accueilli le demande alors, selon le pourvoi, que la clause de réserve de propriété n'est opposable à l'acquéreur que si elle a été acceptée par ce dernier ; qu'en se bornant à constater la remise des bons de livraison à M. X... sans rechercher si celui-ci, qui n'avait pas apposé sa signature sur ces bons, ni exécuté le contrat, avait accepté la clause de réserve de propriété qui était stipulée dans ces seuls bons, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 121 et 122 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu qu'après avoir retenu qu'il n'était pas contesté que les matériels avaient été livrés par la société Seeri Froid et réceptionnés par M. X..., la cour d'appel, qui a relevé que chaque livraison donnait lieu à l'établissement d'un bon de livraison dont un exemplaire était destiné au client, et que chaque bon de livraison comportait au verso la mention intégrale de la clause de réserve de propriété, a légalement justifié sa décision en déduisant de ces constatations que M. X..., dont la signature n'était pas nécessaire, avait accepté cette clause ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que la société Meijac reproche encore à l'arrêt d'avoir statué comme il a fait alors, selon le pourvoi, que l'action en revendication de la créance du prix ne peut être exercée qu'à l'encontre du sous-acquéreur lié au débiteur par un contrat de vente ; qu'en décidant que cette action pouvait être exercée à l'encontre du maître de l'ouvrage qui aurait reçu la marchandise objet d'une clause de réserve de propriété dans le cadre de l'exécution d'un contrat d'entreprise, la cour d'appel a violé l'article 122 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu que le vendeur dont la propriété est réservée peut revendiquer le prix impayé par le sous-acquéreur dès lors que ce dernier a reçu le matériel dans son état initial ; qu'ainsi la cour d'appel, qui a constaté que la société Meijac était sous-acquéreur du matériel vendu par la société Seeri Froid à M. X... en exécution d'un contrat d'entreprise, a légalement justifié sa décision ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen, pris en ses deux branches : (sans intérêt) ;

Et sur le quatrième moyen :

Attendu que la société Meijac reproche enfin à l'arrêt d'avoir statué comme il a fait alors, selon le pourvoi, que c'est à la société Seeri Froid, revendiquante, qu'il incombait de démontrer que les marchandises litigieuses n'auraient pas été payées par la société Meijac ; qu'en se contentant de relever une " improbabilité " quant au paiement des marchandises sans constater la certitude du non-paiement allégué, la cour d'appel a fait peser le risque de cette preuve sur la société Meijac en violation des articles 122 de la loi du 25 janvier 1985 et 1315 du Code civil ;

Mais attendu qu'en vertu de l'article 1315, alinéa 2, du Code civil, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; que dès lors, pour être déchargé de tout ou partie de son obligation vis-à-vis du vendeur dont la propriété est réservée, le sous-acquéreur recherché en revendication sur le fondement de l'article 122 de la loi du 25 janvier 1985 doit prouver qu'il a payé, ou réglé en valeur, ou opéré une compensation en compte courant ; qu'ayant constaté que les factures produites par la société Meijac, émanant de M. X..., ne portaient aucune mention d'acquit, et étaient sans rapport avec les marchandises litigieuses, la cour d'appel a fait l'exacte application des textes visés au moyen en retenant que la société Meijac ne rapportait pas la preuve, qui lui incombait, de ce qu'elle avait payé le matériel ; d'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.