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Décisions

Cass. soc., 18 novembre 2009, n° 08-41.512

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Collomp

Rapporteur :

M. Béraud

Avocat général :

M. Aldigé

Avocats :

SCP Gatineau et Fattaccini, SCP Rocheteau et Uzan-Sarano

Douai, du 31 janv. 2008

31 janvier 2008

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a occupé en Belgique sur un chantier de la société VPK, un emploi de contremaître puis de chef d'équipe, d'abord, à partir de mars 1997 au service de la société française EBM dont le siège social est à Quievrain (Nord), puis, à compter de septembre 2000, à celui de la société Sotimon, également française et dont le siège social est Teteghem (Nord) ; qu'ayant saisi le conseil de prud'hommes de Dunkerque de diverses demandes à la suite de son licenciement survenu en décembre 2003, et la société Sotimon ayant été placée en liquidation judiciaire par un jugement du tribunal de commerce de Dunkerque du 1er juin 2004, il a demandé, à titre principal, la garantie de l'Association pour la gestion du régime de garantie des créances des Salariés (AGS) mise en oeuvre par le Centre de gestion et d'étude de l'AGS (CGEA) de Lille, et, à titre subsidiaire, celle du Fonds de fermeture des entreprises de l'Office national de l'emploi en Belgique ;

Sur le pourvoi incident de l'employeur :

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer sur les premier, troisième et quatrième moyens qui ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;

Mais sur le deuxième moyen :

Vu les articles L. 621-40 et L. 621-125, devenus les articles L. 622-21 et L. 625-1 du code de commerce ;

Attendu qu'après avoir dit que le licenciement du salarié ne reposait pas sur une cause réelle et sérieuse, l'arrêt ordonne le remboursement par l'employeur à l'ASSEDIC des indemnités de chômage payées au salarié licencié du jour de son licenciement dans la limite de six mois en application des dispositions de l'article L. 122-14-4 du code du travail ;

Attendu, cependant, que le jugement d'ouverture d'une procédure collective interdit toute action en justice de la part de tous les créanciers dont la créance a son origine antérieurement au jugement, et tendant à la condamnation du débiteur au paiement d'une somme d'argent ;

Qu'en statuant comme elle a fait, alors qu'il résultait de ses constatations que la créance de l'ASSEDIC était née antérieurement à la liquidation judiciaire et qu'elle devait se borner à fixer le montant de la somme à inscrire sur l'état des créances résultant du contrat de travail déposé au greffe du tribunal de commerce, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et attendu qu'en application de l'article 627, aliéna 2, du code de procédure civile, la Cour de cassation peut, en cassant sans renvoi, mettre fin au litige lorsque les faits, tels qu'ils ont été souverainement constatés et appréciés par le juge du fond, lui permettent d'appliquer la règle de droit appropriée ;

Et sur le pourvoi principal de M. X... :

Vu l'article 234 du Traité instituant la Communauté européenne ;

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de garantie formée contre le CGEA de Lille et de retenir la garantie du Fonds de fermeture des entreprises de l'Office national de l'emploi en Belgique par application de l'article 8 bis de la Directive n° 80 / 987 / CEE du Conseil, du 20 octobre 1980, concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives à la protection des travailleurs salariés en cas d'insolvabilité de l'employeur, telle que modifiée par la Directive n° 2002 / 74 / CE du Parlement européen et du Conseil du 23 septembre 2002 ;

Attendu, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 143-11-1, devenu l'article L. 3253-6 du code du travail, tout employeur de droit privé assure ses salariés, y compris ceux détachés à l'étranger ou expatriés mentionnés à l'article L. 5422-13, contre le risque de non-paiement des sommes qui leur sont dues en exécution du contrat de travail, en cas de procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire ; qu'il s'en déduit que la société de droit français Sotimon, domiciliée en France, cotisait obligatoirement à l'AGS ;

Attendu, d'autre part, qu'aux termes du premier alinéa de l'article 8 bis de la Directive n° 80 / 987 / CEE, modifiée, lorsqu'une entreprise ayant des activités sur le territoire d'au moins deux Etats membres se trouve en état d'insolvabilité, l'institution compétente pour le paiement des créances impayées des travailleurs est celle de l'Etat membre sur le territoire duquel ils exercent ou exerçaient habituellement leur travail ; qu'aux termes du deuxième alinéa, l'étendue des droits des salariés est déterminée par le droit régissant l'institution de garantie compétente, mais que cette directive, qui a pour finalité de consolider les droits des travailleurs faisant usage de leur liberté de circulation, prévoit dans son article 9 qu'elle ne porte pas atteinte à la faculté des Etats membres d'appliquer ou d'introduire des dispositions législatives, réglementaires ou administratives plus favorables aux travailleurs salariés ;

Attendu que se pose dès lors la question de savoir si la compétence d'une institution étrangère par application de l'article 8 bis de cette directive doit être entendue comme excluant celle de l'institution auprès de laquelle l'employeur s'assure et cotise en application du droit national, ou si, lorsque la garantie due par cette dernière est plus favorable, le salarié conserve le droit de s'en prévaloir ;

PAR CES MOTIFS :

Sur le pourvoi incident de l'employeur :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a ordonné le remboursement par l'employeur à l'ASSEDIC des indemnités de chômage payées au salarié licencié du jour de son licenciement dans la limite de six mois, l'arrêt rendu le 31 janvier 2008, entre les parties, par la cour d'appel de Douai.