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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 3, 25 février 2015, n° 13/05156

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Pizza Delco France (SAS), SEPSA (SNC), KFC Holding (Sté)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Bartholin

Conseillers :

Mme Chokron, Mme Parant

TGI Paris, du 14 févr. 2013, n° 05/05287

14 février 2013

Par deux actes sous seing privé du 19 avril 1995, Georgette B. a donné à bail à la société Sepsa (Snc) des locaux commerciaux reliés entre eux, dépendant respectivement de deux immeubles contigus implantés [...].

La société Sepsa exploitait dans les lieux loués, sous l'enseigne « Pizza Hut », un commerce de traiteur et fabrication de plats cuisinés avec livraison à domicile et vente à emporter.

Le 29 décembre 2005, Huguette B. venant aux droits de Georgette B. a fait donation des locaux à Marie-Pierre R. épouse C. et Jean-Philippe R..

La présente instance a été introduite le 29 décembre 2004, sur l'assignation délivrée par la Société Sepsa à l'encontre de sa bailleresse en opposition aux sommations d'avoir à procéder à la dépose des enseignes et du système de climatisation.

Les 27 et 31 janvier 2005, Huguette B. donnait congé à la société Sepsa avec refus d'indemnité d'éviction pour motifs graves et légitimes.

C'est dans ce contexte que le tribunal de grande instance de Paris, par jugement du 18 octobre2007, a dit que les motifs énoncés à l'appui des congés délivrés les 27 et 31 janvier 2005 ne pouvaient être utilement invoqués pour justifier le refus de paiement d'une indemnité d'éviction, a validé les congés en ce qu'ils mettent fin au bail, avant-dire-droit sur la demande de résiliation judiciaire, a désigné en premier lieu, l'expert Albert G. afin d'examiner les désordres constitués par des dégâts des eaux, fuites, infiltrations et engorgements, d'en rechercher l'origine et fournir tous éléments permettant de déterminer les responsabilités encourues, en second lieu, l'expert Eric V. afin d'examiner les désordres résultant des nuisances sonores et vibrations pouvant provenir des lieux loués, rechercher la cause de ces nuisances et fournir les éléments permettant de déterminer les responsabilités encourues.

Le 31 juillet 2009, la société Sepsa a cédé son fonds de commerce et, partant, son droit au bail, à la société Pizza Delco France (SAS), mais le 31 août 2009, à la suite d'une visite des services vétérinaires, les locaux faisaient l'objet d'un arrêté de fermeture administrative pour infraction aux règles d'hygiène et la société Pizza Delco France quitt ait les lieux le 23 novembre 2009, à la suite de quoi, au vu du procès-verbal d'état des lieux de sorti e établi contradictoirement par l'huissier de justice Me R. le 8 décembre 2009, le juge de la mise en état, par ordonnance du 18 juin 2010, désignait l'expert Paul C. afin de déterminer les éventuelles réparations locatives.

Les experts G. et V. ont déposé leur rapport le 29 décembre 2010 et l'expert C. le 20 septembre2011.

Par jugement contradictoire du 14 février 2013, le tribunal de grande instance de Paris a, sous le bénéfice de l'exécution provisoire,

- prononcé la résiliation du bail consenti à la société Sepsa et la société Pizza Delco France sur les locaux situés [...] à la date du 18 octobre 2007,

- condamné la société Sepsa et la société Pizza Delco France à payer à Marie-Pierre R. épouse C. et Jean-Philippe R. :

*la somme de 43.542 euros au titre des réparations locatives

*la somme de 47.000 euros au titre de la perte des loyers,

- condamné Marie-Pierre R. épouse C. et Jean-Philippe R. à restituer à la société Sepsa et la société Pizza Delco France la somme de 11.726,87 euros au titre du dépôt de garanti e et du prorata du loyer pour la période postérieure au 23 novembre 2009,

- condamné la société Sepsa et la société Pizza Delco France à payer à Marie-Pierre R. épouse C. etJean-Philippe R. la somme de 10.000 euros en application de l'article 700 du Code de procédure civile et aux dépens lesquels comprendront les frais d'expertise.

Les sociétés Sepsa et Pizza Delco France ont relevé appel le 13 mars 2013.

Par dernières conclusions signifiées le 3 octobre 3013, la société Kfc Holding venant aux droits de la société Sepsa et la société Pizza Delco France demandent la confirmation du jugement déféré en ce qu'il condamne les consorts R. au paiement de la somme de 11.726,87 euros en remboursement du dépôt de garanti e et du loyer payé pour la période postérieure au 23 novembre 2009 et son information pour le surplus ; elles prient la cour, statuant à nouveau, de juger que la résiliation des baux du 19 avril 1995 n'est pas justifiée, que les bailleurs sont redevables d'une indemnité d'éviction suite aux congés sans off re de renouvellement délivrés les 27 et 31 janvier 2005, de fixer le montant de l'indemnité d'éviction revenant à la société Pizza Delco France à la somme de849.175,66 euros et condamner les consorts R. au paiement de cette somme, de dire les consorts R. mal fondés en leur demande au titre de l'indemnisation de la perte de loyers ainsi qu'en leur demande au titre des réparations locatives, à titre subsidiaire, désigner un expert aux fins de déterminer le montant de l'indemnité d'éviction, en tout état de cause, condamner solidairement les consorts R. au paiement d'une indemnité de 20.000 euros au titre des frais irrépétibles.

Marie-Pierre R. épouse C. et Jean-Philippe R., intimés, par dernières écritures signifiées le 1er juillet 2014, concluent à la confirmation du jugement entrepris sauf sur le quantum des sommes allouées au titre des réparations locatives et de la perte de loyer et en ce qu'il les déboute de leur demande de dommages-intérêts ; ils prient la cour, statuant à nouveau de ces chefs, de condamner solidairement les sociétés Pizza Delco France et Kfc Holding venant aux droits de la société Sepsa à leur payer les sommes de 31.722,68 euros HT au titre des réparations locatives, 25.911,25 euros HT au titre des frais de remise en état des chambres froides, 84.280 euros au titre de la perte de loyer, d'ordonner la compensation entre les sommes dont sont redevables les sociétés appelantes au titre des réparations locatives et de la perte de loyer et les sommes dont sont redevables les intimés au titre du dépôt de garanti e et le loyer payé par la société Pizza Delco France pour la période postérieure au 23 novembre 2009, de condamner solidairement les sociétés Pizza Delco France et Kfc Hoding venant aux droits de la société Sepsa à leur payer la somme de 15.000 euros à titre de dommages-intérêts, si la cour devait réformer le jugement en ce qu'il prononce la résiliation du bail, de dire et juger que le départ de la société Pizza Delco France n'était pas motivé par le refus de renouvellement notifié le 31 janvier 2005 à la société Sepsa aux droits de laquelle elle se trouve, qu'elle a quitté les lieux de mauvaise foi et se trouve en conséquence déchue de son droit à indemnité d'éviction et la débouter de sa demande de ce chef, dans tous les cas, condamner solidairement la société Pizza Delco France et la société Kfc Holding venant aux droits de la société Sepsa au paiement de la somme de 10.000 euros au titre des frais irrépétibles.

SUR CE

Sur la demande de résiliation du bail

Les appelantes critiquent à titre liminaire le jugement déféré pour avoir, en méconnaissance de l'autorité de la chose jugée, retenu pour résilier les baux conclus entre les parties, des griefs qui avaient été écartés par le jugement précédemment rendu par le tribunal le 18 octobre 2007 ;

Il doit être à cet égard rappelé que le jugement en date du 18 octobre 2007 a statué en premier lieu sur la demande en validation des congés avec refus de renouvellement et dénégation du droit à indemnité d'éviction délivrés les 27 et 31 janvier 2005 à la locataire et, en second lieu, sur la demande subsidiaire en résiliation du bail aux torts de la locataire pour laquelle il a ordonné une expertise avant-dire-droit ;

Pour que l'autorité de chose jugée puisse être utilement invoquée il faut, selon les dispositions de l'article 1351 du Code civil, que la chose demandée soit la même et que la demande soit fondée sur la même cause ;

Or la demande en validation de congé avec refus de renouvellement et refus du droit à indemnité d'éviction n'a pas le même objet et n'est pas fondée sur la même cause que la demande en résiliation du bail aux torts de la locataire ;

Force est de constater au surplus, que le jugement du 18 septembre 2007 ne s'est pas prononcé sur le bien-fondé des griefs invoqués au souti en de la demande de résiliation judiciaire, puisqu'il a sur ce point ordonné une expertise avant-dire-droit, et s'il a retenu, s'agissant de ces mêmes griefs, qu'ils ne pouvaient être utilement invoqués pour justifier le refus de paiement d'une indemnité d'éviction, c'est au motif qu'ils n'avaient pas été visés dans la sommation préalable à la délivrance des congés conformément aux dispositions de l'article L. 145-17 du Code de commerce ;

La fin de non-recevoir opposée par les appelantes est en conséquence dénuée de toute pertinence ;

Les appelantes reprochent encore aux premiers juges d'avoir fondé la résiliation sur des constatations effectuées par les experts en dehors des limites de leur mission qui concernait les nuisances sonores et vibrations pouvant provenir des lieux loués et plus particulièrement des systèmes de climatisation, de ventilation et d'extraction et qu'ils ne pouvaient étendre à l'ensemble des désordres allégués par les consorts R. , y compris ceux ne provenant pas des lieux loués, telles la circulation des mobylettes dans la rue et sur le trottoir ou les conversations de clients et d'employés devant l'immeuble ou dans les parti es communes ;

Or, il ressort des motifs du jugement du 18 octobre 2007 que la mesure d'expertise procède de la nécessité 'd'établir l'importance des désordres et troubles que peut causer l'exploitation par la société Sepsa dans les lieux loués, outre qu'il est expressément demandé à l'expert V., dans l'énoncé de sa mission, « d'examiner les désordres résultant des nuisances sonores et vibrations pouvant provenir des lieux loués » , « de dire si les systèmes de climatisation, de ventilation et d'extraction utilisés par la société Sepsa et plus généralement si les installations et conditions d'exploitation de la société Sepsa sont la cause de ces nuisances et s'ils sont conformes à la réglementation en vigueur et aux règles de l'art au regard de l'activité exercée »;

Il s'ensuit que contrairement à ce que prétendent non sans mauvaise foi les appelantes, il appartenait à l'expert de rechercher l'ensemble des nuisances sonores susceptibles d'être imputables à la locataire non seulement du fait des installations et équipements garnissant les lieux loués mais aussi à raison de ses conditions d'exploitation ;

Enfin, les appelantes soutiennent que les griefs retenus par le tribunal, ne reposent pour certains sur aucune constatation objective et sont en tout état de cause insuffisants à justifier une résiliation judiciaire ;

Les bailleurs invoquent à l'appui de la demande en résiliation des baux du 19 avril 1995, de très nombreuses nuisances sonores ainsi que des dégâts des eaux que la locataire a laisser perdurer au mépris des multiples plaintes et doléances des occupants de l'immeuble et du voisinage ;

S'agissant des nuisances sonores, sont en cause, en premier lieu, les allées et venues des cyclomoteurs de livraison circulant sur le trottoir jusqu'à des heures tardives de la nuit ainsi que les rassemblements des livreurs à l'entrée de l'immeuble ou dans la cour, ponctués d'invectives verbales et accompagnés de diffusion de musique ;

Il ressort à cet égard des pièces de la procédure que le gestionnaire immobilier, la société Silmarimmo, répercutait , le 5 avril 2002, les plaintes des occupants de l'immeuble concernant les réunions de salariés de Pizza Hut sur le banc dans la cour de l'immeuble, et, le 4 août 2004,demandait à la locataire de cesser de laver les cyclomoteurs sur le trottoir, le 22 avril 2002, Mme O.se plaignait auprès des bailleurs des conversations bruyantes dans la cour et devant l'immeuble, des courses de cyclomoteurs sur le trottoir et des hurlements dans les cuisines, le 20 janvier 2002,les époux B. se plaignaient à leur tour du bruit des mobylettes, des provocations diverses des livreurs, des échanges verbaux et de la diffusion de musique à des heures tardives sur le trottoir à l'entrée de l'immeuble, le 29 novembre 2004, Mme J., au [...] faisait état de musique « tonitruante » tard dans la nuit, le 11 février 2005 Mme D., au [...] indiquait que des bruits violents étaient survenus dans la nuit, à une heure du matin, causés par la chute de plaques de cuisson sur le sol, que dans le même temps, des salariés de la pizzeria faisaient la conversation dans la cour de l'immeuble tandis que des mobylettes de livreurs démarraient en trombe ;

En outre, si à l'occasion de ses deux visites sur les lieux l'expert V. n'a pas personnellement constaté de bruits intempestifs, il a dans le cadre de ses opérations entendu onze occupants de l'immeuble et recueilli leurs doléances concernant le comportement des employés de Pizza Hut s'interpellant et s'invectivant dans la cour et circulant bruyamment sur le trottoir à bord de leur mobylette, il a par ailleurs reçu un courrier électronique de Mme D. sur le tapage nocturne provoqué par les livreurs en scooters devant l'immeuble ;

Est visée en deuxième lieu, une sonnette de service destinée à signaler aux employés aux cuisines l'ouverture et la fermeture de la porte du magasin, dont l'expert V. a pu relever qu'elle était nettement audible dans la cour de l'immeuble et qu'elle avait une puissance acoustique excessive ;

Le 29 novembre 2004, Mme J., se plaignait du 'vacarme' causé par cette sonnette de service, de même que l'ensemble des occupants entendus au cours des opérations d'expertise outre, Mme C. qui remettait à l'expert un courrier qu'elle avait adressé le 17 juin 2009 à la société Silmarimmo au sujet du bruit de la sonnette, pour lequel elle s'était déjà déplacée à quatre reprises au magasin Pizza Hut pour en demander l'arrêt, en vain, et le refus de Pizza Hut de la couper et Mme D. qui, dans sa lettre du 12 mai 2009, évoquait la sonnette retentissante empêchant son fils de dormir le soir ;

Sont concernés enfin, les installations techniques de climatisation et d'extraction d'air pour causer des nuisances sonores outre des vibrations importantes ;

L'expert V. relève à cet égard, dans l'appartement du premier étage occupé par Mme J., que le système de mini-climatisation génère un bruit important, audible dans toutes les pièces de l'appartement, qu'il provoque en outre des vibrations au sol , il estime que cette nuisance est de nature à gêner fortement la concentration intellectuelle en période diurne et à nuire au sommeil en période nocturne, en résumé, à priver d'une jouissance normale de l'appartement, que les fenêtres soient ouvertes ou fermées;

Il explique que ces nuisances, perceptibles aussi bien à grande vitesse qu'à petite vitesse sont liées à un fonctionnement défectueux de l'équipement qui, en outre, a été installé au mépris des règles de l'art, le caisson d'extraction d'air ayant été suspendu sous plafond sans être muni de plots anti -vibratiles ;

Les constatations de l'expert corroborent celles effectuées le 1er septembre 2006 à 11 heures 30, dans l'appartement de Mme J., par Me G., huissier de justice, requis par les bailleurs, qui remarquait un bruit de moteur électrique incessant en provenance de l'établissement Pizza Hut, audible dans tout l'appartement et accompagné de vibrations ;

C'est vainement que les appelantes font grief à l'expert de n'avoir pas mesuré objectivement le bruit et les vibrations provenant du système de ventilation alors que ses constatations claires et précises et par ailleurs concordantes avec l'ensemble des pièces versées à la procédure, suffi sent à établir qu'elles sont manifestement anormales et qu'elles sont la cause d'une gêne importante pour le voisinage ;

L'expert indique enfin que ces installations techniques étaient d'ores et déjà en place lors de laprise à bail, confirmant ainsi que cette gêne a été continuelle et permanente pendant toute la durée de l'occupation des locaux par les sociétés Sepsa et Pizza Delco France ;

Il découle de l'ensemble des éléments précédemment rapportés que sont caractérisées en l'espèce des nuisances sonores excédant les inconvénients normaux du voisinage, imputables à la locataire, et que celle-ci a laissé perdurer sur plusieurs années en dépit des multiples plaintes qui lui ont été adressées ;

La cour fait sienne à cet égard la conclusion de l'expert estimant que « Pizza Hut a fait preuve de négligence en n'ayant jamais essayé d'apporter une solution aux nuisances sonores dont se plaignaient régulièrement des locataires de l'immeuble ; on a là une accumulation de désagréments, pouvant conduire à l'exaspération, dont beaucoup auraient pu être évités si l'encadrement de Pizza Hut avait fait preuve de moins de négligence » ;

S'agissant des dégâts des eaux, les nombreux courriers versés aux débats montrent que les bailleurs se sont plaints, régulièrement et à de multiples reprises, depuis 2001 d'infiltrations dans les caves de l'immeuble en provenance des locaux loués à bail ;

L'expert G. a relevé des traces encore visibles de fuites dans les caves et constaté que lors du lavage à grande eau, une partie s'infiltrait et créait des coulures au niveau des cadres, au droit de la traversée de la canalisation ;

Il explique que les fuites résultent du défaut d'obturation des traversées des canalisations d'évacuation reliant les appareils du rez-de-chaussée au réseau d'évacuation et de l'achèvement incorrect des aménagements initiaux de Pizza Hut; il ajoute qu'elle sont entièrement imputables à la locataire qui aurait pu en outre remédier à ces désordres dans des délais rapides et à peu de frais la locataire qui aurait pu en outre remédier à ces désordres dans des délais rapides et à peu de frais par de simples travaux de rebouchage qui n'ont été réalisés en définitive qu'en juin 2009 mettant ainsi en évidence la négligence caractérisée de la locataire à faire cesser les troubles malgré les plaintes récurrentes ;

Il s'infère de l'ensemble des développements qui précèdent que sont établis à la charge de la locataire des manquements à son obligation contractuelle 'd'occuper les lieux loués paisiblement et de faire en sorte que la tranquillité de la maison ne soit troublée en aucune manière du fait du preneur, des gens à son service ou de ses visiteurs' (page 7 des baux rédigés en termes identiques), enfin « dans le cas où le preneur utiliserait des machines, de munir celle-ci de tous appareils nécessaires pour éviter les trépidations, vibrations et chocs à fin de course de façon à éviter que leur fonctionnement soit de nature à troubler la jouissance des autres locataires (page 9 ) ;

Ces manquements graves et persistants justifient que soit prononcé la résiliation du bail au 18 octobre 2007, date du jugement ayant sursis à statuer sur la demande formée à cette fin par les bailleurs dans l'att ente des résultats d'une mesure d'expertise ;

Le jugement dont appel doit être confirmé de ce chef.

Sur les réparations locatives

L'expert C. désigné à la suite du départ des lieux de la locataire le 23 novembre 2009 a confirmé les constatations de l'huissier de justice Me R. qui a relevé, aux termes de l'état des lieux contradictoire du 9 décembre 2009 des mures détériorés comportant de nombreux trous de cheville non rebouchés, des plinthes arrachées, des fi ls électriques sectionnés, des vannes dépourvues de robinets d'arrêt, une porte manquante, des ouvertures artisanales dans le faux plafond, des carrelages comportant de nombreux trous non rebouchés;

L'expert note en outre l'état général de saleté des peintures, les carrelages muraux à réparer ponctuellement, les appareils sanitaires déposés sans précaution, les câbles électriques grossièrement sectionnés en particulier ceux alimentant les chambres froides dont le moteur électrique a été déposé par la locataire à son départ, les faux plafonds à réviser, le ballon d'eau chaude hors service, des gaines de VMC démunies de bouches de soufflage ou d'extraction, des portes à remettre en jeu et conclut à juste titre en l'état de ces constatations que les locaux ne peuvent être considérés en bon état de réparations locatives et que les dégradations ne sont pas liées à la vétusté ;

Selon l'article 1731 du Code civil,

la locataire est présumée en l'absence d'état des lieux d'entrée avoir reçu les locaux en bon état de réparations locatives et doit les rendre tels sauf preuve contraire ; par ailleurs, l'acte de cession du fonds de commerce intervenu le 19 avril 1995 indique que les locaux étaient à cette date en bon état de réparations locatives ;

Les appelantes ne sauraient sérieusement faire valoir qu'elles ont correctement entretenu les lieux au cours du bail alors qu'elles n'ont communiqué à l'expert que des contrats relatifs à l'entretien des installations techniques et au lavage, tandis que l'état de lieux de sorti e ainsi que le rapport de l'expert établissent un défaut d'entretien courant des peintures et des carrelages outre des dégradations lors du départ des lieux concernant notamment la plomberie et l'électricité ;

Le jugement dont appel sera en conséquence confirmé en ce qu'il a retenu que les bailleurs devaient être indemnisés au titre des dommages locatifs et a entériné avec raison les montants arbitrés par l'expert C. au vu du devis produit , à l'encontre desquels les parti es n'apportent aucun démenti sérieux, de 28.542 euros au titre des réparations locatives et de 15.000 euros au titre de la remise en état de la chambre froide dont le moteur, immeuble par destination comme faisant partie intégrante de la chambre froide, a été repris par la locataire , soit au total, la somme de 43.542 euros .

Sur les pertes de loyers

C'est à bon droit que les bailleurs font valoir que leur bien s'est trouvé immobilisé durant le déroulement des opérations d'expertise qui leur a interdit de procéder à une nouvelle location entre le 23 novembre 2009, date du départ de la locataire et le 4 février 2011, date à laquelle s'est tenue la dernière réunion d'expertise ;

Les premiers juges ont exactement évalué la perte de loyers durant cette période d'immobilisation à la somme de 47.000 euros sur la base du loyer principal quittancé à compter du 1er janvier 2012 à la société 4 Murs d'un montant mensuel de 3.353 euros.

Sur les autres demandes

Le jugement n'est pas critiqué sur la condamnation des bailleurs au titre du dépôt de garantie et du prorata de loyer pour la période postérieure au 23 novembre 2009 à hauteur de 11.726,87 euros ;

Les bailleurs ne justifient pas du bien-fondé de leur demande de dommages-intérêts, ne rapportant pas la preuve d'un préjudice distinct de ceux réparés par le jugement dont appel, confirmé par le présent arrêt ;

Les locataires ne sont pas fondés en leur demande d'indemnité d'éviction le bail étant résilié à leurs torts pour inexécution de leurs obligations contractuelles ;

L'équité commande de les condamner solidairement à verser aux bailleurs une indemnité complémentaire globale de 6.000 euros au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne solidairement la société Kfc Holding venant aux droits de la société Sepsa et la société Pizza Delco France aux dépens de la procédure d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du Code de procédure civile et à verser aux consorts R. une indemnité complémentaire globale de 6.000 euros au titre des frais irrépétibles.