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Décisions

Cass. 1re civ., 28 juin 1989, n° 88-10.842

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Ponsard

Rapporteur :

M. Pinochet

Avocat général :

M. Dontenwille

Avocats :

SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, SCP Waquet et Farge

Bordeaux, du 26 nov. 1987

26 novembre 1987

Sur le moyen unique pris en ses quatre branches :

Attendu que la Société d'exploitation des produits manufacturés (SEPM), ayant son siège social à Bordeaux, et la société Baraderie-Loustallot (BL) ayant son siège social à Dakar, ont assigné la société de droit espagnol Trenzas y cables de acero (Tycsa) en résolution d'une vente de câbles métalliques livrés au Sénégal ainsi qu'en paiement de sommes d'argent devant le tribunal de commerce de Bordeaux qui s'est déclaré incompétent ; que sur contredit formé par les demanderesses l'arrêt infirmatif attaqué (Bordeaux, 26 novembre 1987) a rejeté l'exception d'incompétence soulevée par Tycsa et renvoyé les parties à conclure au fond devant le tribunal de commerce de Bordeaux ;

Attendu que la société Tycsa fait grief à cette décision d'avoir retenu qu'il résultait des demandes présentées dans l'assignation, des faits et documents de la cause, que la SEPM avait agi comme acheteur et pas seulement comme mandataire de BL, que par application de l'article 14 du Code civil cette société, dont la nationalité française n'était pas contestée, pouvait légitimement attraire devant le tribunal de commerce de Bordeaux la société Tycsa sans qu'il soit nécessaire de rechercher si la société BL pouvait également se prévaloir de ce texte pour justifier la compétence de la juridiction française, alors, d'une part, que les parties étant d'accord pour admettre que celui qui avait passé les commandes et avancé le prix n'avait agi que comme mandataire de l'acheteur sénégalais, la cour d'appel, en le qualifiant d'office d'acheteur ferme, a en même temps méconnu les termes du litige et violé le principe de la contradiction, alors que, d'autre part, la nationalité du représentant ne pouvant être prise en considération pour l'application du privilège de juridiction réservé aux Français, seul le représenté étant, en droit, partie au procès, la cour d'appel a faussement appliqué l'article 14 susvisé ; alors que, enfin, elle a privé sa décision de base légale au regard de ce texte en n'expliquant pas pourquoi il n'était pas nécessaire de rechercher si le mandant, dont le siège social était au Sénégal, pouvait également se prévaloir du privilège de juridiction ;

Mais attendu que la SEPM ayant, tant dans l'assignation que dans ses conclusions, exposé qu'elle était personnellement intéressée à l'opération et soutenu qu'elle avait un intérêt légitime à agir contre Tycsa, la cour d'appel a souverainement apprécié, sans dénaturer l'objet du litige ni violer le principe de la contradiction, l'intérêt qu'avait cette société à exercer en son nom propre une action en justice, et en a exactement déduit que cette partie, dont la nationalité française n'était pas discutée, pouvait bénéficier du privilège de juridiction prévu à l'article 14 du Code civil, sans avoir à rechercher la nationalité de l'autre partie demanderesse ;

Que le moyen n'est donc fondé en aucune de ses quatre branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.