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Décisions

CA Reims, ch. civ. sect. 1, 17 avril 2018, n° 16/03297

REIMS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

SP Trading (SARL)

Défendeur :

Allianz Iard (SA), Ressorts Haut Marnais (SAS), Mecasonic (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Martin

Conseillers :

Mme Maussire, Mme Lefort

Avocats :

Selarl Jurope, SCP MCM & Associés, SCP Est Avocats

T. com. Chaumont, du 3 août 2009

3 août 2009

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES :

La société DTN commercialisait des poêles à pétrole importés du Japon équipés de réservoirs métalliques.

Elle a souhaité, pour des raisons d'économie, les munir de réservoirs polymères (en matière plastique) fabriqués localement en lieu et place des réservoirs métalliques utilisés auparavant.

Dans cette perspective, la société DTN a sollicité en octobre 1996 M. Ronald B. pour l'étude et l'établissement des plans du réservoir, la société Sarplast pour les opérations de plasturgie et la fabrication du réservoir, la société Mécasonic pour la fourniture de la machine destinée à souder les éléments en plastique fabriqués par la société Sarplast, la société des ressorts Haut Marnais (RHM) pour la fourniture des ressorts et des axes équipant le clapet du réservoir et la société FIMIC pour la fabrication du joint de couvercle du réservoir.

La société Mécasonic, assurée auprès du GAN (aujourd'hui Allianz) a acquis la machine à souder auprès d'une société allemande, KLN Ultraschall.

De son côté, la société Sarplast, assurée par Sprinks, puis à compter du 1er janvier 1998 par les AGF, a commandé à M. Olivier G. une étude rhéologique (étude de résistance du matériau à l'écoulement de liquide).

La société RHM a sous-traité la fabrication des axes à la société Roger S. assurée auprès de la MAAF.

En juin 1997, la société DTN a pris la décision d'une production en série, passé commande à ses fournisseurs et commercialisé le convecteur muni des réservoirs polymères.

En septembre 1997, des problèmes de suintement ayant été signalés par des clients, la société DTN a décidé de rapatrier tous les appareils défectueux pour échange, avant de remettre en vente le produit après y avoir apporté des modifications.

Cependant, à la suite de nouvelles défaillances apparues au début de l'année 1998 et affectant notamment le système de fermeture (clapet) apparu défectueux, une nouvelle opération de retrait a eu lieu avec restauration des réservoirs métalliques.

Il est apparu que le produit n'avait pas fait l'objet d'une certification.

A la suite de ce retrait, la société DTN a assigné les sociétés RHM, Sarplast, Mécasonic et M. B. devant le président du tribunal de commerce de Saint-Dizier statuant en référé aux fins de voir ordonner une mesure d'expertise judiciaire.

Par ordonnance du 28 décembre 1998, le juge des référés a fait droit à la demande d'expertise et désigné M. F. en qualité d'expert judiciaire avec pour mission d'examiner les réservoirs polymères litigieux, dire s'ils sont affectés de défauts les rendant impropres à leur usage, fournir au tribunal tout élément de fait permettant de déterminer les responsabilités encourues et donner son avis sur les préjudices subis par la société DTN.

L'expert s'est adjoint les services d'un sapiteur, M. A., pour la partie relative aux préjudices d'ordre financier et commercial subis par la société DTN.

La mission de M. F. a été complétée en 2003 afin d'éclairer la juridiction sur les responsabilités respectives des parties à la procédure, sur la conformité du produit, sur la certification, sur le caractère prématuré ou non de la mise sur le marché des produits litigieux par l'une ou l'autre partie et sur les préjudices susceptibles d'en découler.

L'expert a clôturé son rapport le 2 avril 2007.

La société DTN a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Nancy du 13 juillet 2007.

Afin d'obtenir réparation du préjudice subi, la SCP B., ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société DTN, a assigné le 14 mai 2008 devant le tribunal de commerce de Saint Dizier (rattaché par la suite au tribunal de commerce de Chaumont) les sociétés RHM, Sarplast et Mécasonic, lesquelles ont assigné à leur tour en intervention forcée et appelé en garantie sous-traitants, fournisseurs et compagnies d'assurance concernés.

Par jugement du 3 août 2009, le tribunal de commerce de Chaumont a notamment :

- fixé le préjudice subi par la société DTN France à la somme de 5.447.108,98 euros,

- dit que la part de responsabilité de cette société dans son propre préjudice était de 60'%,

- dit que la part de responsabilité de la société Sarplast dans le préjudice subi par la société DTN France était de 35'%,

- dit que la part de responsabilité de la société Mécasonic dans le préjudice subi par la société DTN France était de 5'%,

- débouté la SCP B., ès-qualités de liquidateur de la société DTN France, de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la société RHM,

- débouté la société Sarplast de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la SA AGF, de Mme B., de la SCP BTSG et de M. V., ès-qualités de liquidateurs de ICS Assurances, ainsi qu'à l'encontre de MM. G. et B., de la SA FIMIC et du Laboratoire National d'Essais,

- débouté le Laboratoire National d'Essais de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de GAN Eurocourtage,

- débouté la société RHM de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de la SA Roger S. et de la MAAF Assurances,

- débouté GAN Eurocourtage de l'ensemble de ses demandes à l'encontre de KLN Ultraschall AG,

- condamné la SCP B., ès-qualités, à prendre à sa charge la part de responsabilité qui lui a été reconnue dans le préjudice subi pour un montant de 3.268.265,39 euros,

- condamné la société Sarplast à payer à la SCP B., ès qualités, la somme de

1.906.488,14 euros au titre de la part de responsabilité qui lui a été reconnue dans le préjudice subi par la société DTN France,

- condamné GAN Eurocourtage à payer à la SCP B. la somme de 269 307,45 euros au titre de la part de responsabilité qui a été reconnue à son assuré Mécasonic dans le préjudice subi par la société DTN Fance, déduction faite de la franchise de 3 048 euros,

- condamné la société Mécasonic à payer à la SCP B., ès-qualités de liquidateur de la société DTN France, la somme de 3 048 euros au titre de sa franchise d'assurance GAN Eurocourtage';

le tout sous le bénéfice de l'exécution provisoire.

1. Sur l'évaluation du quantum du préjudice, le tribunal, notant que l'évaluation se fait sur la base d'hypothèses par définition discutables, a retenu la proposition de l'expert de fixer, après déduction de l'indemnisation de 304 898,02 euros reçue de la compagnie Le Continent, la somme à lui revenir à 5.447.108,98 euros';

2. Sur la responsabilité de la société DTN, le tribunal a retenu :

- le rôle primordial qui devait être accordé à la conception du réservoir,

- le rôle de DTN dans les décisions d'exécution des réservoirs malgré les problèmes de mise au point, passant outre aux conseils de M. G. proposant de rigidifier les réservoirs, décidant de ne pas soumettre le réservoir au contrôle de certification obligatoire du décret du 10 décembre 1992, le tout ayant contribué à la réalisation de son propre préjudice,

- l'insuffisance des contrôles sur les produits finis, de sorte qu'il en a déduit que dans la mesure où elle avait conçu le produit, en avait suivi la fabrication, s'était impliquée dans toutes les phases, et avait décidé de commercialiser un produit qu'elle savait non abouti, ni certifié, la société DTN devait être déclarée responsable à hauteur de 60 % de son propre préjudice ;

3. Sur la responsabilité de la société Sarplast, si le tribunal a considéré que celle-ci n'était pas maître d'oeuvre de l'opération, il a retenu son rôle primordial de fabricant des demi-coques soudées au moyen d'une machine, il en a déduit qu'elle ne maîtrisait pas le process de fabrication pour un résultat satisfaisant et lui a donc imputé une part de 35 % soit 1.906.488,14 euros ;

4. Sur la responsabilité de la société Mécasonic, le tribunal a retenu que la machine à souder n'était pas adaptée à son usage au regard des nombreux dysfonctionnements constatés et a estimé à 5 % la part de responsabilité de celle-ci, soit 272 355,45 euros.

Le tribunal a retenu la garantie de GAN Eurocourtage et a condamné cet assureur avec son assuré au paiement de cette somme, condamnant en outre l'assureur à garantir Mécasonic sous déduction de la franchise de 3 048 euros';

5. Sur la responsabilité de la société RHM, le tribunal a mis hors de cause cette société, considérant que le sous-dimensionnement des goupilles par rapport au logement de celles-ci', qui avait facilité la sortie des goupilles de leur logement et entraîné des ouvertures intempestives du couvercle du réservoir, procédait d'une erreur de conception qui n'était pas le fait de RHM';

6. Le tribunal a encore débouté la société Sarplast de sa demande de garantie à l'encontre des AGF, son assureur après janvier 1998, en considérant d'une part, que lors de la souscription, Sarplast n'avait pas avisé AGF de l'existence d'un sinistre et d'autre part, que le deuxième sinistre procédait de la même cause que le premier.

Sur appel de la société SP Trading anciennement Sarplast, et du GAN Eurocourtage à l'encontre de la SCP B., ès-qualités, de celle-ci à l'encontre du GAN Eurocourtage, et sur appel provoqué du Laboratoire National d'Essai à l'encontre de son assureur GAN Eurocourtage et de la société RHM à l'encontre de la société S. et de son assureur MAAF, le tout étant joint, la cour d'appel de Dijon, par arrêt du 10 juillet 2014, a infirmé le jugement sauf en ce qu'il a':

- débouté la société SP Trading anciennement Sarplast de ses demandes à l'encontre du Laboratoire National d'Essai,

- débouté la société RHM de ses demandes à l'encontre de la société S. et de son assureur MAAF,

- débouté le Laboratoire National d'Essai de ses demandes à l'encontre du GAN Eurocourtage, et statuant à nouveau sur les dispositions infirmées,

- dit le rapport opposable à la société SP Trading anciennement Sarplast,

- dit que la société DTN était responsable de son propre préjudice commercial résultant de la mise prématurée sur le marché des poêles équipés de réservoirs polymères en 1997 et 1998,

- fixé à 231 723 € le préjudice de la société DTN imputable aux sociétés Mécasonic et Sarplast au titre de la perte de chance sur le différentiel de marge,

- condamné in solidum les sociétés Sarplast et Mécasonic envers la SCP B., ès-qualités de liquidateur de la société DTN, au paiement de la somme de 231 723 euros,

- dit que dans leurs rapports entre elles, ces deux sociétés supporteront :

- la société SP Trading anciennement Sarplast : 60%,

- la société Mécasonic : 40% de ce montant,

- dit que chacune de ces deux parties se devait garantie pour toute somme payée au-delà de sa part contributive,

- condamné Allianz à garantir la société Mécasonic de la condamnation prononcée à son encontre envers la SCP B., ès-qualités de liquidateur de la société DTN, sous déduction de la franchise de 3 048 €,

Ajoutant à la décision,

- débouté Allianz de ses demandes de garantie à l'encontre de la société RHM,

- rappelé que le présent arrêt vaut titre de restitution des sommes payées en vertu de l'exécution provisoire du jugement, et débouté Allianz de sa demande de restitution avec intérêts,

- débouté la société S. de sa demande de dommages-intérêts à l'encontre de la société RHM.

La SCP B., ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société DTN, a formé un pourvoi à l'encontre de cette décision qui concernait en outre :

1- la compagnie Gan Eurocourtage

2- la société SP Trading, anciennement Sarplast

3- la société Mécasonic

4- le Laboratoire National de Métrologie et d'Essais,

5- la société Ressorts Haut Marnais (RHM)

6- la société MAAF Assurances

7- la société Roger S..

La SCP B., ès-qualités, a déclaré ultérieurement se désister de son pourvoi à l'encontre de :

1 - La société Ressorts Haut Marnais (RHM)

2 ' Le Laboratoire National de Métrologie et d'Essais

3 - La société MAAF Assurances

4 - La société Roger S.

Par arrêt rendu le 22 novembre 2016, la Cour de cassation a cassé l'arrêt sauf en ce qu'il a débouté la société SP Trading de ses demandes à l'encontre du Laboratoire National de Métrologie et d'Essais, débouté la société RHM de ses demandes à l'encontre de la société Roger S. et de son assureur la MAAF, débouté le Laboratoire National de Métrologie et d'Essais de ses demandes à l'encontre de la société GAN Eurocourtage, dit le rapport d'expertise opposable à la société SP Trading et en ce qu'il a statué sur les frais irrépétibles.

La Cour a cassé sur les trois points suivants :

- par violation de l'article 1147 du code civil dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance du10 février 2016':

Pour dire que la société DTN était responsable de son préjudice commercial résultant de la mise prématurée sur le marché des poêles équipés de réservoirs polymères en 1997 et 1998, fixer à une certaine somme le préjudice de cette société imputable aux sociétés Sarplast et Mécasonic au titre de la perte de chance sur le différentiel de marge et limiter le montant de leur condamnation in solidum, la cour d'appel a retenu que la société DTN était seule responsable du préjudice résultant des opérations de rapatriement, qui ne se serait pas réalisé sans sa décision prématurée de mise sur le marché d'un produit non abouti ni certifié et dont la faisabilité elle-même n'était pas assurée, et ce alors que, dans le même temps, elle imputait à la société Sarplast une faute pour n'avoir pas dénoncé les difficultés de mise au point du produit ni résisté aux décisions de la société DTN, de sorte que le comportement de celle-ci n'était pas la cause exclusive des préjudices résultant des opérations de rapatriement';

Qu'en statuant de la sorte, la cour d'appel a violé l'article susvisé dans la mesure où la faute de la victime n'est exonératoire que lorsqu'elle présente les caractéristiques de la force majeure ou constitue la cause exclusive du dommage' ;

- par violation du même article et pour les mêmes causes en ce que la cour d'appel a imputé à faute à la société Mécasonic de ne pas avoir fourni à la société Sarplast une machine adaptée et de ne pas avoir émis de réserve sur son utilisation pour souder des réservoirs en matière plastique' ;

- par violation du même article en ce que la cour d'appel a fixé à une certaine somme le préjudice de la société DTN imputable aux sociétés SP Trading et Mécasonic au titre de la perte de chance sur le différentiel de marge et condamné celles-ci in solidum envers la SCP B., ès-qualités, en fixant leur part respective dans cette indemnisation, en retenant que la probabilité de réalisation de la perte de chance devait s'apprécier au regard de la faisabilité réglementaire et technique du procédé polymère et que l'on pouvait raisonnablement s'interroger sur les chances de succès d'un tel produit qui n'aurait pas manqué d'être repris par d'autres industriels s'il s'était avéré une alternative intéressante aux réservoirs métalliques ;

Qu'en statuant de la sorte, par des motifs impropres à caractériser la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

La Cour de cassation a renvoyé l'examen du litige à cette cour.

Par conclusions du 3 janvier 2018, la société SP Trading (anciennement Sarplast) demande à la cour :

- de déclarer la société SP Trading recevable et bien fondée en son appel formé à l'encontre du jugement du tribunal de commerce de Chaumont du 3 août 2009,

- d'infirmer ce jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il a dénié à la société SP Trading la qualité de maître d'oeuvre pour l'attribuer exclusivement à la société DTN et en ce qu'il a reconnu que cette dernière était le concepteur du réservoir,

Dès lors';

- de dire et juger le rapport d'expertise de M. F. inopposable et l'écarter,

- de débouter la SCP B., ès-qualités de mandataire liquidateur de la société DTN, de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,

- de dire et juger que la société DTN se trouve être, en sa qualité de maître de l'ouvrage, de maître d'oeuvre et de concepteur du produit litigieux, entièrement responsable du préjudice qu'elle invoque,

- de décharger la société SP Trading de toute responsabilité dans la survenance du dommage dont argue la société DTN,

A titre infiniment subsidiaire,

Constatant que la société DTN ayant gravement contribué à son propre préjudice en mettant sur le marché un produit qu'elle savait non certifié et en continuant sa commercialisation après le 8 septembre 1997,

- de dire et juger que SP Trading ne pourra être condamnée qu'à réparation de la part nécessairement très limitée qui pourrait lui incomber directement dans le préjudice de DTN,

- de dire et juger que le préjudice réparable de la société DTN ne pourrait correspondre qu'à une part nécessairement très restreinte des seuls frais directement liés au 1er retrait (c'est-à-dire à une simple quote-part établie sur l'assiette de 72 683 euros qu'il appartiendra à la présente cour de ventiler en fonction de son appréciation de la répartition des responsabilités des différents intervenants, celle de SP Trading ne pouvant qu'être extrêmement limitée en raison des comportements des sociétés DTN et de Mécasonic),

En tout état de cause,

- de dire et juger que la société Mécasonic sera condamnée in solidum à relever la société SP Trading de toute condamnation qui pourrait être prononcée à son encontre,

- de condamner in solidum la SCP B., ès-qualités de mandataire liquidateur de la société DTN ainsi que la société Mécasonic à payer à la société SP Trading la somme de 45 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner in solidum la SCP B., ès-qualités de mandataire liquidateur de la société DTN ainsi que la société Mécasonic en tous les dépens d'appel et de première instance (en ce compris les dépens devant la juridiction des référés, devant le premier président de la cour d'appel de Dijon saisi par la société SP Trading d'une requête en suspension de l'exécution provisoire, devant la cour d'appel de Dijon et devant la Cour de cassation).

Par conclusions du 4 janvier 2018, la société Mécasonic demande à la cour :

A titre préalable,

- de dire et juger que le désistement de la société SP Trading à l'encontre de la Compagnie Allianz est inefficace, et que cette dernière reste en tout état de cause partie à la procédure,

- de constater que la société SP Trading a renoncé à se désister à l'encontre de la

Compagnie Allianz,

A titre principal,

- de réformer le jugement du 3 août 2009,

- de mettre la société Mécasonic purement et simplement hors de cause,

- de débouter la SCP B., ès-qualités de liquidateur de la société DTN et la société SP Trading de l'ensemble de leurs demandes à l'encontre de la société Mécasonic,

A titre subsidiaire,

- de confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Chaumont le 3 août 2009, en ce qu'il retient la responsabilité de la société Mécasonic dans le préjudice subi par la société DTN, à hauteur de 5% et en ce qu'il a condamné GAN Eurocourtage à garantir la société Mécasonic de l'ensemble de ses condamnations, déduction faite de la franchise de 3 048 euros,

- de le réformer sur le montant du préjudice retenu et le réduire à de plus justes proportions,

- de dire et juger cette condamnation opposable à la Compagnie Allianz, venant aux droits de la Compagnie GAN Eurocourtage,

En tout état de cause,

- de condamner la Compagnie Allianz, venant aux droits de la Compagnie GAN Eurocourtage, à relever et garantir la société Mécasonic de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre,

- de débouter la société Ressorts Haut Marnais de ses demandes envers la société Mécasonic au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner in solidum la société SP Trading et la SCP B. en qualité de liquidateur de la société DTN à verser à la société Mécasonic la somme de 15 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner enfin les mêmes in solidum aux entiers dépens, en ce compris les frais d'expertise, dont ceux exposés en première instance, en référé comme au fond, devant la cour d'appel de Dijon, au fond comme devant le premier président, devant la Cour de cassation et devant la cour de Céans, avec distraction, pour les dépens engagés devant cette dernière, au profit de la SCP D.-C.-R., représentée par Maître Mélanie C.-R., avocat, en application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions du 21 décembre 2017, la société Allianz, venant aux droits de la société GAN Eurocourtage, assureur de la société Mécasonic, demande à la cour':

- de la recevoir en son appel incident.

Y faisant droit,

- de réformer le jugement entrepris en ce qu'il a retenu partiellement la responsabilité de la société Mécasonic et, subsidiairement, en ce qu'il a débouté la Compagnie GAN Eurocourtage aux droits de laquelle se trouve la compagnie Allianz Iard, de ses demandes tendant à voir limiter ses garanties d'assurance, en ce qu'il a mis hors de cause la société Ressorts Haut Marnais et en ce qu'il a entériné le chiffrage du sapiteur financier sans tenir compte des observations des parties défenderesses et plus particulièrement de la Compagnie GAN Eurocourtage aujourd'hui devenue Allianz Iard' ;

Statuant à nouveau,

Après avoir constaté que la société DTN a volontairement mis sur le marché, en violation de la réglementation applicable, un produit dont elle n'ignorait pas que la conception était en cours de finalisation,

Après avoir constaté que la société Mécasonic, en sa qualité de simple fournisseur de la machine à souder équipée de son outillage élaboré à partir des plans transmis par les concepteurs et fabricants, Monsieur B. et la société SP Trading, n'a pas participé à la conception des réservoirs polymères, cause exclusive des désordres et n'a pas établi les plans de fabrication validés par la société SP Trading ;

A titre principal,

Vu les articles 1142 et 1147 du code civil,

- de débouter la SCP B., ès-qualités de mandataire liquidateur de la société DTN, de toutes ses demandes, fins et conclusions en ce qu'elles sont dirigées tant à l'encontre de la société Mécasonic qu'à l'encontre de la société Allianz Iard,

- de dire et juger que la société DTN, en mettant sur le marché en violation de la réglementation applicable et en toute connaissance de cause un produit dont elle n'ignorait pas que la conception était en cours de finalisation, a commis une faute qui est seule la cause et l'origine de l'ensemble du préjudice qu'elle prétend avoir subi,

- de dire et juger qu'en acceptant un tel risque, de façon délibérée, alors qu'elle avait une parfaite connaissance, non seulement de la non-conformité des produits qu'elle mettait sur le marché, mais également des carences conceptuelles intrinsèques à ces mêmes produits, la société DTN, représentée par son mandataire liquidateur, la SCP B., devra en supporter seule l'intégralité des conséquences, en termes de préjudices,

- de dire et juger que ces faits exonèrent de facto et nécessairement l'ensemble des défendeurs et particulièrement la société Mécasonic,

Subsidiairement, si par extraordinaire la cour ne devait pas faire droit à la demande principale telle que plus avant formulée,

Vu les articles 1142 et 1147 du code civil,

- de dire et juger que les désordres constatés sont en relation exclusive avec une conception défectueuse des réservoirs à laquelle la société Mécasonic n'a en rien participé et pour laquelle celle-ci ne saurait être tenue par une quelconque obligation de conseil,

- de dire et juger, en tout état de cause, qu'en approuvant et validant les plans de l'outillage installé sur les machines à souder, les sociétés DTN et SP Trading ne peuvent imputer à la société Mécasonic un quelconque dysfonctionnement de l'outillage équipant les machines à souder dès lors que celui-ci est directement dépendant et consécutif à la conception des réservoirs et à l'approbation des plans par la société SP Trading et ne saurait être la cause ou l'origine des désordres et défauts ayant entaché les réservoirs litigieux,

En conséquence,

- de débouter la SCP B., ès-qualités de mandataire liquidateur de la société DTN, et la société SP Trading (anciennement Sarplast) de l'ensemble de leurs demandes, moyens, fins et conclusions et/ou appels en garantie et les condamner chacune à verser 50 000 euros à la Compagnie Allianz Iard, venant aux droits de la Compagnie GAN Eurocourtage, en application de l'article 700 du code de procédure civile,

A titre très subsidiaire,

Après avoir constaté que le montant du préjudice retenu par l'expert, M. F., aux termes de son rapport définitif, s'élève à la somme de 5.615.763 euros et que la Compagnie Le Continent a versé à la société DTN deux indemnités d'un montant total de 304 898,03 euros qu'il conviendra de déduire du préjudice invoqué,

Après avoir constaté que l'indemnité réclamée au titre des frais de rapatriement fait double emploi avec la provision inscrite au bilan de la société DTN et que les frais consécutifs au remplacement des réservoirs en polymère ont pour seule cause l'imprévoyance de la société DTN,

Après avoir constaté que le préjudice commercial dont la société DTN fait état est, soit inexistant car non justifié, soit sans relation de causalité directe, certaine et exclusive avec les défauts affectant les réservoirs,

Après avoir constaté que la société DTN a créé une provision pour risque dans son bilan de 1997 l'empêchant d'invoquer un préjudice lié à un différentiel de marge brute et qu'elle ne justifie pas de l'existence d'une éventuelle perte de chance,

- de débouter la SCP B., ès-qualités de mandataire liquidateur de la société DTN de l'ensemble de ses demandes, moyens, fins et conclusions en ce qu'ils sont dirigés notamment à l'encontre de la société Mécasonic et de la société Allianz Iard à concurrence de 2.014.582 euros,

- de condamner la SCP B., ès-qualités de mandataire liquidateur de la société DTN, à verser à la Compagnie Allianz Iard, venant aux droits de la Compagnie GAN Eurocourtage, la somme de 50 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi que tous les dépens de première instance (en ce compris les instances de référé) et d'appel';

A titre infiniment subsidiaire, si par impossible la cour estimait devoir retenir la responsabilité de la société Mécasonic,

Vu l'article 1382 du code civil,

- de dire et juger que les sociétés SP Trading (anciennement Sarplast) et Ressorts Haut Marnais ont, avec la société DTN, participé à la réalisation du préjudice invoqué et que la société Mécasonic n'est pas à l'origine des faits reprochés à la société SP Trading,

- de dire et juger que les conditions d'une condamnation in solidum ne sont en l'espèce pas réunies en ce qui concerne la société Mécasonic,

- de dire et juger en tout état de cause que la responsabilité de la société Mécasonic ne peut qu'être purement symbolique et, en tout état de cause, très nettement inférieure à 5%,

En conséquence,

- de débouter la société SP Trading de son appel en garantie formé à l'encontre de la société Mécasonic et la SCP B., ès-qualités de mandataire liquidateur de la société DTN, ainsi que la société Ressort Haut Marnais, de leurs demandes formulées à l'encontre de la société Mécasonic,

- de condamner la société Ressorts Haut Marnais, la société SP Trading et la SCP B., ès-qualités de mandataire liquidateur de la société DTN, à garantir la société Mécasonic et son assureur la Compagnie Allianz Iard, venant aux droits de la Compagnie GAN Eurocourtage, des condamnations qui pourraient être prononcées à leur encontre,

- de rejeter toute demande de condamnation in solidum formulée à l'encontre de la société Mécasonic et de la société Allianz Iard,

En tout état de cause,

Vu la police d'assurance n°E82712066 souscrite par la société Mécasonic auprès de la société Commercial Unioniard aujourd'hui Allianz Iard à effet du 1er janvier 1989,

Vu le montant des capitaux garantis tels que récapitulés aux chapitres I, H et III des conditions particulières de la police,

- de dire et juger que, si par impossible la cour entrait en voie de condamnation à l'encontre de la société Mécasonic, la police souscrite auprès de la Compagnie GAN Eurocourtage, aux droits de laquelle vient la Compagnie Allianz Iard, ne saurait être mobilisée au-delà du montant du capital garanti, à savoir 1.524.491 euros, après déduction du montant de la franchise à concurrence de 3 048 euros,

- de condamner tout succombant à verser à la compagnie Allianz Iard, venant aux droits de la Compagnie GAN Eurocourtage, une indemnité de 50 000 euros par application de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner tout succombant aux entiers dépens de première instance (comprenant les instances de référé) et d'appel.

Par conclusions du 4 janvier 2018, la SCP B., ès-qualités de mandataire liquidateur de la société DTN, demande à la cour :

- d'écarter comme étant tardives' :

* les conclusions récapitulatives notifiées par la société SP Trading le 3 janvier 2018 intitulées « conclusions en réplique et récapitulatives n° 4' »

* les conclusions notifiées par la société Mécasonic le 4 janvier 2018 intitulées « conclusions récapitulatives n° 3 »

* les pièces numérotées 2 à 6 notifiées par la société Mécasonic le 4 janvier 2018 comme étant tardives

- de confirmer le jugement du tribunal de commerce de Chaumont uniquement en ce qu'il a fixé le préjudice subi par la société DTN conformément au rapport d'expertise, soit 5.752.007 euros,

- de constater que la compagnie d'assurance Le Continent a versé à la société DTN une indemnisation contractuelle au titre des deux retraits pour un montant total de 304 898,02 euros,

Statuant à nouveau,

- de dire et juger que la société Sarplast a commis des fautes contractuelles de nature à engager sa responsabilité à l'égard de la société DTN,

- de dire et juger que la société Mécasonic a commis des fautes contractuelles de nature à engager sa responsabilité à l'égard de la société DTN,

Y faisant droit,

- de dire et juger que le comportement de la société DTN ne constitue pas la faute exclusive du dommage,

En conséquence,

- de dire et juger que la responsabilité de la société Sarplast ne saurait être inférieure à 50'% dans la survenance des préjudices liés aux opérations de rapatriement,

- de dire et juger que la responsabilité de la société Mécasonic ne saurait être inférieure à 40'% dans la survenance des préjudices liés aux opérations de rapatriement,

Y faisant droit,

- de condamner la société Sarplast à payer à la SCP B., ès-qualités, une somme qui ne saurait être inférieure à 2.518.227,50 euros au titre des préjudices liés aux opérations de rapatriement,

- de condamner la société Mécasonic à payer à la SCP B., ès-qualités, une somme qui ne saurait être inférieure à 2.014.582 euros au titre des préjudices liés aux opérations de rapatriement,

- de dire et juger que la compagnie Allianz, venant aux droits de GAN Eurocourtage Iard, devra garantie à son assurée Mécasonic,

- de dire et juger que la perte de chance indemnisable sur le différentiel de marge pour la société DTN ne saurait être fixée à moins de 80'% du montant retenu par le sapiteur, M. A., soit 572 441,60 euros,

Y faisant droit,

- de condamner solidairement les sociétés Sarplast et Mécasonic à verser à la SCP B. ès-qualités une somme qui ne saurait être inférieure à 572 441,60 euros,

- de dire et juger que la compagnie Allianz devra garantie à son assurée Mécasonic,

En tout état de cause,

- de condamner chacune des sociétés à payer à la SCP B., ès-qualités, la somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner in solidum la société Sarplast, la société Mécasonic et Allianz Iard aux entiers dépens, y compris le coût des opérations d'expertise diligentées par M. F., ainsi que le coût de l'échantillonnage effectué par Maître D., huissier de justice, dont distraction est requise au profit de Maître B., par application de l'article 699 du code de procédure civile.

Par conclusions du 19 décembre 2017, la société Ressorts Haut Marnais (RHM) demande à la cour:

Vu le jugement rendu le 3 août 2009 par le tribunal de commerce de Chaumont,

Vu l'arrêt rendu le 10 juillet 2014 par la cour d'appel de Dijon,

Vu l'arrêt rendu le 22 novembre 2016 par la chambre commerciale de la Cour de cassation,

- de dire et juger que par jugement rendu le 3 août 2009 par le tribunal de commerce de Chaumont, la société Ressorts Haut Marnais a été mise hors de cause,

- de dire et juger que par arrêt rendu le 10 juillet 2014, la cour d'appel de Dijon a confirmé la mise hors de cause de la société Ressorts Haut Marnais,

- de dire et juger que la cassation partielle intervenue le 22 novembre 2016 de l'arrêt rendu le 10 juillet 2014 par la cour d'appel de Dijon n'était pas afférente à la mise hors de cause de la société Ressorts Haut Marnais,

Par conséquent,

- de dire et juger que la société Ressorts Haut Marnais a été définitivement mise hors de cause par l'arrêt rendu le 10 juillet 2014 par la cour d'appel de Dijon non cassé

sur ce point,

- de débouter la Compagnie Allianz Iard de ses demandes formées à l'encontre de la société Ressorts Haut Marnais et toutes autres parties de leurs demandes qu'elles pourraient former à son encontre,

Le cas échéant,

- de confirmer, au besoin par substitution de motifs, le jugement rendu le 3 août 2009 par le tribunal de commerce de Chaumont en ce qu'il a mis hors de cause la société Ressorts Haut Marnais,

Par conséquent,

- de débouter la Compagnie Allianz Iard, venant aux droits du GAN Eurocourtage, de son appel en garantie et de ses demandes formées à l'encontre de la société Ressorts Haut Marnais,

Subsidiairement , si par extraordinaire la cour devait infirmer le jugement en ce qu'il l'a mise hors de cause et statuant à nouveau, dire et juger que si sa responsabilité était engagée,

Vu les articles 9 du code de procédure civile et 1353 du code civil dans sa version applicable au 1er octobre 2016,

Vu l'article 1240 du code civil dans sa version applicable au 1er octobre 2016,

- de dire et juger que la société Ressorts Haut Marnais est uniquement concernée par la seconde opération de retrait représentant un coût de 837 892 euros,

- de dire et juger en toute hypothèse qu'aucune condamnation solidaire ne saurait être prononcée à l'encontre des défendeurs, la solidarité ne se présumant pas en application des dispositions de l'article 1202 du code civil devenu 1310 depuis le 1er octobre 2016,

- de dire et juger que la responsabilité de la société Ressorts Haut Marnais ne pourrait être que marginale, l'expert judiciaire ne relevant à son encontre qu'un facteur aggravant,

- de limiter à 5% la quote-part à laquelle la société Ressorts Haut Marnais pourrait être condamnée soit à 41 894,60 euros,

- de condamner la Compagnie Allianz Iard venant aux droits du GAN Eurocourtage ou à défaut tout succombant à payer à la société Ressorts Haut Marnais la somme de 7 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens qui pourront être recouvrés par Maître Simon M., avocat aux offres de droit, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

La demande formée le 4 janvier 2018 par la SCP B., ès-qualités de mandataire liquidateur de la société DTN, aux fins d'écarter les dernières conclusions de la société SP Trading et de la société Mécasonic :

La SCP B., ès-qualités, demande :

- d'écarter comme tardives les conclusions de la société SP Trading notifiées le 3 janvier 2018 intitulées « conclusions en réplique et récapitulatives n° 4 »,

- d'écarter comme tardives les conclusions de la société Mécasonic notifiées le 4 janvier 2018 intitulées « conclusions récapitulatives n° 3 » ainsi que les pièces versées par la société Mécasonic numérotées 2 à 6.

Suite à l'arrêt de cassation, la société SP Trading a saisi cette cour le 19 décembre 2016.

Le calendrier de procédure a été établi le 20 avril 2017 pour une clôture initialement prévue le 12 décembre 2017.

La SCP B., ès-qualités, a conclu pour la première fois le 4 décembre 2017, soit huit jours avant la date de clôture, puis le 11 décembre 2017, événement qui a justifié un report de l'ordonnance de clôture au 8 janvier 2018.

La SCP B., ès-qualités, a de nouveau conclu le 28 décembre 2017, ce qui a contraint la société SP Trading à une réponse le 3 janvier 2018.

Il ne peut être considéré, dans ces conditions, que le principe du contradictoire ait été violé compte tenu de la tardiveté avec laquelle la SCP B., ès-qualités, a elle-même conclu.

Il en est de même pour la société Mécasonic et pour les mêmes raisons que celles qui ont été précédemment exposées.

La SCP B., ès-qualités, sera par conséquent déboutée de sa demande aux fins d'écarter les conclusions de la société SP Trading du 3 janvier 2018 ainsi que celles de la société Mécasonic du 4 janvier 2018 et les pièces n° 2 à 6 versées à l'appui.

Les causes identifiées des désordres :

Le rapport d'expertise de M. F. dépourvu de toute contestation sur ce point fait ressortir les éléments suivants :

- les désordres portent, pour la première opération de rappel d'environ 50 000 pièces en septembre 1997, sur un suintement au niveau du couvercle du réservoir, et pour la seconde opération de rapatriement d'environ 160 000 pièces dans le courant du premier semestre 1998, à la fois sur l'ouverture du couvercle, l'axe du fermoir sortant de son logement, et sur un suintement au niveau du soudage des deux demi-coques en plastique ;

- les causes des désordres sont identifiées par l'expert à l'issue des investigations techniques qu'il a pu réaliser comme étant essentiellement les suivantes :

* le diamètre de l'axe du verrou du réservoir est inférieur au diamètre de son logement, ce qui favorise la sortie de l'axe,

* les fuites sont dues à un défaut d'étanchéité s'expliquant par plusieurs phénomènes :

- la forme dissymétrique du couvercle et du joint,

- le caractère bombé du couvercle avec une torsion du couvercle sur les bords,

- le caractère bombé du réservoir avec un décalage des deux demi-caissons soudés composant le réservoir révélant un problème d'assemblage et de soudage des deux parties trouvant, selon l'expert, vraisemblablement son origine dans les vibrations de la machine à souder, ces vibrations déréglant le système de maintien en place des caissons lors de l'opération de soudage,

- une incompatibilité géométrique du couvercle due à sa rigidité alors qu'il aurait dû être conçu de manière à se déformer légèrement afin de permettre un contact uniforme avec le joint, ajoutée au fait que le mauvais positionnement de la charnière et du verrou de fermeture entraînent une torsion du couvercle favorisant les fuites.

La responsabilité de la société SP Trading (anciennement Sarplast) :

* l'opposabilité du rapport d'expertise à la société SP Trading' :

Celle-ci soutient, comme elle l'a fait devant la cour d'appel de Dijon, que le rapport d'expertise de M. F. doit lui être déclaré inopposable pour les motifs qu'elle développe longuement dans ses conclusions.

Il ressort du dispositif de l'arrêt de la Cour de cassation du 22 novembre 2016, par la formule « casse et annule l'arrêt rendu par la cour d'appel de Dijon le 10 juillet 2014 sauf (...) en ce qu'il a dit le rapport opposable à la société SP Trading », que ce point a été définitivement tranché et qu'il n'y a donc plus lieu à discussion de ce chef.

Toute contestation à ce titre est par conséquent sans objet et il sera ajouté qu'en tout état de cause, ce rapport, pour imparfait, brouillon et peu synthétique qu'il soit, est de droit opposable à la société SP Trading qui a été assignée en qualité de partie devant les premiers juges et qui a été, de ce fait, associée de manière contradictoire aux opérations d'expertise.

* les relations contractuelles entre la société SP Trading (anciennement Sarplast) et la société DTN :

L'expert a cru devoir qualifier de manière péremptoire la société Sarplast de maître d'oeuvre du projet en se fondant sur le seul courrier du 22 avril 1996 adressé à la société DTN par la société Sarplast aux termes duquel celle-ci proposait de prendre en charge la maîtrise d'oeuvre d'un produit appelé « réservoir interface » (page 716 du rapport de l'expert).

Or, ce courrier ne concerne pas la conception ni la fabrication d'un réservoir en plastique ' ce qu'a reconnu finalement la société DTN devant l'expert - mais un projet antérieur ayant avorté et qui n'a aucun lien avec le litige.

Il ressort des éléments contenus dans le rapport d'expertise'que la société DTN a commandé à la société Sarplast'les prestations suivantes :

- une étude rhéologique avec calculs de structure qui a été confiée à M. G.,

- la réalisation de moules également sous-traitée,

- l'outillage Mécasonic de conformation des pièces,

- la réalisation d'une machine destinée à tester l'étanchéité du réservoir,

- la fabrication des réservoirs intégrant d'abord la fabrication des pièces en plastique et la soudure, puis, par la suite, le montage de l'ensemble du réservoir, en ce compris les ressorts et les joints fournis par la société DTN (cf annexe 55 du rapport': commande de la société DTN à la société Sarplast du 12 juin 1997).

La maîtrise d'oeuvre ne se présume pas.

S'il apparaît, à la lecture du rapport de M. F. que la société Sarplast est indéniablement intervenue dans plusieurs phases du process de fabrication des réservoirs en polymère et qu'elle y a joué un rôle essentiel, il est tout aussi incontestable que la société DTN n'a pas commandé à la société Sarplast de prestation d'assistance dans la passation du marché, ni signé de contrat de maîtrise d'oeuvre avec celle-ci.

C'est par conséquent à bon droit que le tribunal de commerce a considéré que la société DTN n'avait pas délégué à la société Sarplast la maîtrise d'oeuvre du projet.

L'article 1787 du code civil dispose que lorsqu'on charge quelqu'un de faire un ouvrage, on peut convenir qu'il fournira seulement son travail ou son industrie, ou bien qu'il fournira aussi la matière.

Le contrat d'entreprise est celui par lequel une personne (l'entrepreneur) s'engage moyennant rémunération à accomplir de manière indépendante un travail au profit d'une autre (le maître de l'ouvrage), sans la représenter.

Il en résulte que l'entrepreneur est maître de l'opération qui lui est confiée et qu'il n'est donc pas le préposé du maître de l'ouvrage.

Au regard des développements ci-dessus opérés, la relation contractuelle unissant la société DTN à la société Sarplast s'inscrit dans le cadre d'un contrat d'entreprise.

La société Sarplast soutient que le tribunal ne pouvait lui imputer une défaillance constitutive d'une faute dans la maîtrise du process de fabrication alors que la machine à souder Mécasonic lui avait été imposée par la société DTN, qu'elle a toujours été un simple exécutant et que c'est en toute connaissance de cause, malgré les réserves qu'elle lui a adressées à de multiples reprises, que les réservoirs ont été mis sur le marché à ses risques et périls.

Elle ajoute que la société DTN était non seulement un professionnel parfaitement averti mais qu'elle s'est immiscée de manière fautive dans l'opération, ce qui délie l'entrepreneur de son devoir de conseil.

Elle soutient enfin ' point qui n'a pas été tranché par les premiers juges - que les défauts des réservoirs étaient visibles à l'oeil nu, ce qui en faisait des vices apparents qu'un professionnel averti comme la société DTN se devait de prendre en compte avant de commercialiser les poêles munis de réservoirs en plastique et qu'en ne le faisant pas, elle a accepté tacitement et sans réserves l'ouvrage imparfait en prenant à son compte les défauts constatés.

Il est constant que lorsque le contrat d'entreprise porte sur une prestation matérielle pour laquelle il n'existe aucun aléa quant au résultat escompté, l'entrepreneur est tenu d'une obligation de résultat, soit concevoir un ouvrage conforme à la commande et exempt de vices.

De surcroît, l'ancien article 1147 du code civil applicable au litige rend le professionnel débiteur d'une obligation d'information et de conseil non seulement vis-à-vis du profane mais également du professionnel lorsque la compétence de ce dernier ne lui donne pas les moyens d'apprécier la portée exacte des prestations contractuelles qu'il a commandées.

Il en ressort que le professionnel qui contracte en dehors de sa sphère de compétence est créancier d'une obligation d'information.

En l'espèce, la commande adressée le 12 juin 1997 à la société Sarplast par la société DTN, était une prestation matérielle consistant en la fabrication de réservoirs munis de coques en plastique destinés à remplacer les réservoirs métalliques qui étaient commercialisés auparavant par la société DTN.

Celle-ci avait défini trois spécifications' : une température, une pression et une tenue au choc.

La société Sarplast ne soutient ni ne démontre qu'il était envisagé un aléa seul susceptible de transformer l'obligation de résultat à laquelle elle était tenue en vertu du contrat de louage d'ouvrage ' soit concevoir des réservoirs en plastique exempts de vices - en une obligation de moyens.

Force est de constater, au vu des conclusions expertales, que les réservoirs en plastique commandés n'ont pas rempli l'usage auquel ils étaient destinés, soit assurer leur étanchéité pour que le pétrole reste intégralement contenu dans ces réservoirs sans que du liquide ne s'en échappe.

L'obligation de résultat implique que la société Sarplast ne peut s'exonérer de sa responsabilité qu'en justifiant que l'inexécution du contrat est due à une cause étrangère ' force majeure ou cas fortuit, fait d'un tiers ou faute de la victime (soit en l'espèce la faute de la société DTN)-, l'entreprise demeurant responsable même si elle s'est conformée aux ordres du maître de l'ouvrage dès lors qu'il est démontré que celui-ci n'était pas notoirement compétent en la matière.

Il est tout d'abord logiquement permis de considérer que si la société DTN avait été en mesure de fabriquer elle-même les réservoirs, elle n'aurait pas fait appel pour ce faire :

- à M. B. pour l'étude et l'établissement des plans du réservoir,

- à la société Sarplast pour les opérations de plasturgie et de fabrication du réservoir.

Il est rappelé également que la société DTN était, avant sa liquidation judiciaire, un des leaders sur le marché de la commercialisation des poêles à pétrole et que son objet social était de distribuer ces poêles et non de fabriquer les éléments les composant, en particulier les réservoirs en plastique devant contenir le pétrole, objet du litige.

Il est par conséquent inexact d'affirmer, comme le fait la société SP Trading, que la société DTN était un professionnel averti dans la mesure où celle-ci n'était pas compétente en matière de fabrication de réservoirs, tâche qu'elle avait confiée à la société Sarplast, de sorte qu'elle ne pouvait se soustraire à l'obligation d'information et de conseil à laquelle elle était également tenue à l'égard de son co-contractant.

S'il est avéré, au vu des éléments versés aux débats par la société SP Trading, que la société DTN est intervenue de manière importante dans le process de fabrication de la commande et que la société Sarplast lui a signalé à plusieurs reprises les problèmes auxquels elle était confrontée, notamment le dysfonctionnement de la machine à souder, les difficultés avec la machine Modiqua, avec les joints et la colle mais également les difficultés avec les clapets, les ressorts et les axes, elle n'a jamais dénoncé de manière ferme les problèmes de mise au point du produit qui lui avait été commandé au regard de sa qualité de professionnel averti qui aurait dû la conduire à informer la société DTN de la probabilité importante que le produit ne soit, en définitive et compte tenu des multiples dysfonctionnements relevés depuis les premiers essais, irréalisable dans sa configuration actuelle.

La société SP Trading ne peut pas davantage soutenir que la société DTN se serait immixée de manière fautive dans la réalisation de l'ouvrage, l'affranchissant ainsi de tout devoir de conseil.

En effet, l'intervention, certes avérée et très active du maître de l'ouvrage qui peut s'expliquer par l'objectif qu'il s'était fixé de commercialiser le nouveau produit dans les délais les plus brefs possibles, ne peut être considérée comme une immixtion, qui implique qu'il soit démontré, soit que le maître de l'ouvrage était notoirement compétent dans le domaine où il est intervenu, soit qu'une clause du contrat lui ait confié ou réservé une tâche précise dans la réalisation de l'ouvrage, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

La société SP Trading soutient également qu'il ressort des constatations mêmes de l'expert que les défauts des réservoirs étaient visibles à l'oeil nu, ce qui en faisait des vices apparents facilement décelables par le maître d'ouvrage professionnel et maître d'oeuvre qu'était la société DTN et que, ce faisant, en mettant sur le marché les réservoirs tout en connaissant leurs défauts, elle les avait pris à son compte en assurant une réception tacite et sans réserves de l'ouvrage qui en couvrait les vices.

Outre le fait que la société SP Trading reconnaît ainsi avoir livré des produits viciés dont elle connaissait l'existence et avoir par conséquent failli dans la mission qui lui avait été confiée par la société DTN, elle ne démontre pas que celle-ci ait pu mettre, en toute connaissance de cause sur le marché, des réservoirs affectés de vices décelables à l'oeil nu et ce d'autant que la société DTN avait alerté plusieurs fois la société Sarplast des défectuosités du produit (voir plus particulièrement les pièces n° 71,72, 74 et 75 produites par l'appelante).

Au surplus, les constatations visuelles ont été effectuées par l'expert (page 712 de son rapport), soit par un homme de l'art dont le savoir-faire technique le prédestine tout particulièrement à repérer rapidement un défaut affectant un ouvrage.

Enfin, si, en sa qualité de membre du comité de normalisation AFNOR, la société DTN était effectivement, ainsi que le soutient la société SP Trading, un spécialiste des convecteurs à pétrole, elle n'était en revanche pas un spécialiste de la partie « réservoirs en plastique ».

Ces éléments ne peuvent non plus dédouaner la société Sarplast, aux droits de laquelle intervient la SP Trading, de la faute qu'elle a commise, non plus que la prestation des différents fournisseurs dont elle se devait de vérifier la conformité des produits réceptionnés et dont la responsabilité a, depuis, été définitivement écartée, de sorte que cette cour n'a plus à étudier leur implication dans la survenance du dommage.

C'est par conséquent à bon droit que les premiers juges ont retenu la responsabilité partielle de la société Sarplast sur la base des constatations de l'expert figurant en page 718 de son rapport, l'absence de maîtrise du process de fabrication des réservoirs qui lui avait été confié étant de surcroît en lien direct avec les préjudices allégués par la société DTN.

La responsabilité de la société DTN :

La SCP B., ès-qualités de mandataire liquidateur de la société DTN, ne conteste plus la responsabilité partielle de celle-ci dans la réalisation du dommage, soit le rapatriement par deux fois des poêles munis des réservoirs en plastique mis sur le marché, puisqu'elle reconnaît une erreur dans la conception du produit mais soutient, en se fondant sur les motifs retenus par la Cour de cassation pour censurer l'arrêt de la cour d'appel de Dijon, que sa faute n'est en rien la cause exclusive du dommage qu'elle a subi.

Il conviendra par conséquent de rappeler que la société DTN a pris la décision finale de mettre sur le marché un produit dont elle ne pouvait ignorer qu'il n'était pas abouti en raison du fait qu'elle avait débuté les travaux portant sur la conception même du réservoir seulement à l'automne 1996 pour une commercialisation à l'été 1997, temps jugé par l'expert manifestement trop court pour concevoir un produit exempt de vices et ce d'autant que le process de fabrication avait déjà été émaillé de multiples incidents et qu'un premier projet avait précédemment avorté.

Il a également été relevé par les premiers juges que la société DTN avait omis de soumettre, avant la commercialisation du poêle, le nouveau réservoir au contrôle de certification obligatoire prévu par le décret n° 92-1280 du 10 décembre 1992, cette négligence étant d'autant plus impardonnable que le président directeur général de cette société était également membre de la commission de normalisation AFNOR.

C'est par conséquent à bon droit que les premiers juges ont considéré que la responsabilité partielle de la société DTN devait être retenue et qu'elle avait contribué à la réalisation de son propre préjudice.

La responsabilité de la société Mécasonic :

Le tribunal, pour retenir la responsabilité de la société Mécasonic à hauteur de 5'%, a considéré que celle-ci n'avait pas été capable de fournir à la société Sarplast l'outillage qui aurait permis de souder les deux demi-coques du réservoir l'une en face de l'autre et en vendant à la société DTN une soudeuse inadaptée à l'usage qui devait en être fait.

La SCP B., ès-qualités, soutient que la responsabilité de la société Mécasonic doit être retenue au regard du rôle important joué par elle dans le process de fabrication de ces réservoirs et de son expérience, responsabilité qui ne saurait être inférieure à 40'%.

La société SP Trading considère que la responsabilité de la société Mécasonic est engagée, au même titre que celle de la société DTN dans la réalisation du dommage.

La société Mécasonic soutient à titre principal, s'agissant de sa responsabilité, que les sociétés DTN et Sarplast sont seules à l'origine des désordres constatés et qu'elle n'a commis aucune faute'; elle ajoute qu'en tout état de cause, il n'est pas démontré de lien de causalité entre les désordres et le choix de la soudeuse.

Son assureur, Allianz Iard, soutient que la société qu'il assure n'a pas été associée à la conception des réservoirs alors que les vices de conception sont la cause exclusive des désordres et que l'absence de maîtrise du process de fabrication par la société Sarplast est également une cause d'exonération de sa responsabilité.

La société Mécasonic est intervenue dans le process de fabrication en fournissant la machine destinée à souder les éléments en plastique du réservoir du poêle.

L'expert, en page 704 de son rapport, précise que les problèmes d'assemblage et de soudage des caissons trouvent apparemment leur origine dans les vibrations de la machine à souder qui dérègleraient le maintien en place des caissons lors de l'opération de soudage.

S'il est exact que la machine à souder avait été acquise pour un autre usage que celui auquel elle a été finalement destinée, il ressort de la pièce n° 9 produite par la société SP Trading que la société Mécasonic a accepté de lui établir un devis le 22 janvier 1997 portant sur la fourniture d'un outillage vibration linéaire permettant l'assemblage d'un réservoir DTN (sic) sans émettre la moindre réserve.

Il en ressort qu'à partir du moment où ce devis a été accepté, la société Mécasonic devait fournir une machine en état de servir à l'usage auquel elle était destinée, soit assembler les demi-coques en plastique contenant le pétrole.

La société Sarplast a déploré de nombreux dysfonctionnements sur cette machine (pièces produites n° 67,68 et 69).

La société DTN s'est inquiétée le 22 août 1997 auprès de la société Mécasonic des problèmes rencontrés avec la machine (pièce n° 70) qui n'ont, par la suite jamais été solutionnés.

C'est par conséquent à juste titre que l'expert a relevé en page 729 de son rapport qu'il pouvait être considéré que la société Mécasonic avait vendu une soudeuse inadaptée à l'usage auquel elle était destinée au vu des dysfonctionnements constatés par la société Sarplast.

La faute de la société Mécasonic est ainsi constituée.

Néanmoins, pour retenir la responsabilité de cette société et la condamner pour partie à la réparation des préjudices subis par la société DTN, il convient que la SCP B., ès-qualités, démontre qu'il existe un lien de causalité direct entre la faute commise et les désordres à l'origine des préjudices financiers et commerciaux subis.

Il ressort du rapport de l'expert (pages 19, 94 et 98) que la première opération de rapatriement a été provoquée par des suintements détectés à hauteur du couvercle du réservoir dont atteste la société DTN.

Il n'est pas démontré ' et ceci ne ressort pas du rapport d'expertise - que ce premier rapatriement aurait un lien, même indirect, avec la défectuosité de la machine à souder.

La responsabilité de la société Mécasonic doit donc être écartée à ce titre.

La seconde opération de rapatriement est due à deux problèmes':

* une ouverture du couvercle causée par l'axe du fermoir sortant de son logement

* un suintement au niveau du plan de soudage

La responsabilité de la société Mécasonic serait donc susceptible d'être engagée sur la seconde opération qui concerne pour partie la machine à souder qu'elle a fournie.

M. F., en page 704 de son rapport, a fait les constatations visuelles suivantes':

* une forme dissymétrique du couvercle et du joint avec pour conséquence un gradient de pression

* un bombé du réservoir

* une incompatibilité géométrique du couvercle

* la charnière et le verrou de fermeture, de par leur position géométrique, induisent vraisemblablement une flexion torsion du couvercle, qui, a priori, semble favorable pour induire une fuite

* le diamètre de la goupille est vraisemblablement trop faible, favorable au bout d'un certain nombre de manipulations à l'extraction de la goupille par rotation progressive de celle-ci dans le logement côté opposé à son introduction

* le verrou semble mal positionné, le becquet pour qu'il soit bien verrouillé, nécessitant a priori deux manœuvres

L'expert s'interroge à ce stade sur le nombre d'erreurs de conception du produit.

Les essais de métrologie réalisés par la suite ont confirmé'sa première impression et M. F. en a déduit, s'agissant plus particulièrement du bombé du réservoir et du bombé du couvercle, que ceux-ci favorisaient le manque d'étanchéité du réservoir.

Il en conclut (page 710 de son rapport) que la conception associée à une fabrication non maîtrisée de ce réservoir ne permet pas d'obtenir les résultats auxquels il était destiné.

Il précise également (page 678), en réponse à un dire du conseil de la société Mécasonic, qu'il est d'accord pour considérer que si cette société avait pour obligation de fournir une soudeuse devant permettre l'obtention du soudage des demi-coques, encore fallait-il que celles-ci soient préalablement conçues dans les règles de l'art pour être conformes à leur destination.

Il est rappelé à cet égard que l'outillage a été fourni par la société Mécasonic sur la base des plans établis par M. B. et validés par la société DTN.

Il est permis de déduire de l'ensemble de ces éléments que si la société Mécasonic avait une obligation de résultat ' obtenir une soudure correcte des éléments à souder -, celle-ci ne se conçoit, en terme de responsabilité qui peut en résulter, que si les différents éléments constituant le réservoir ont été préalablement conçus dans les règles de l'art, car utiliser un outillage inadapté sur un ouvrage vicié à l'origine fait disparaître tout lien de causalité entre la faute et le dommage, le préjudice ayant déjà été consommé avant l'intervention de la société Mécasonic.

Les vices de conception du réservoir, qui sont étrangers à l'intervention de cette société, constituent la cause exclusive des désordres à l'origine des préjudices subis, de sorte que la responsabilité de la société Mécasonic doit être écartée.

La garantie de la compagnie Allianz Iard est dès lors sans objet.

La décision sera infirmée de ce chef.

La mise hors de cause de la société Ressorts Haut Marnais (RHM):

Le tribunal de commerce de Chaumont a mis hors de cause la société RHM.

La cour d'appel de Dijon a confirmé le jugement de ce chef.

La Cour de cassation a donné acte à la SCP B., ès-qualités, du désistement de son pourvoi à l'égard de la société RHM.

La cassation porte uniquement sur les points rappelés en début d'arrêt et non sur la mise hors de cause de cette société.

Celle-ci est par conséquent définitivement sortie du litige et la compagnie Allianz ne peut former de demandes à son encontre, fût-ce à titre infiniment subsidiaire, de sorte qu'il n'y a pas lieu de les examiner.

Les partages de responsabilité :

En définitive, seules les sociétés DTN et Sarplast, aux droits de laquelle intervient maintenant la société SP Trading, sont responsables des désordres.

Leurs fautes respectives ont contribué à la réalisation du dommage.

Dans leurs rapports entre elles et pour déterminer la part de responsabilité leur incombant, il convient de prendre en considération la gravité des manquements commis par l'une et par l'autre.

S'il a été précédemment démontré que l'absence de maîtrise du process de fabrication des réservoirs pouvait être reprochée à la société Sarplast, les manquements les plus graves sont à la charge de la société DTN qui a mis sur le marché un produit qu'elle savait non abouti compte tenu du manque d'anticipation et des délais trop brefs qui ont été fixés pour commercialiser les nouveaux poêles'; cette société est en outre responsable de l'absence de vérification préalable de la conformité à la norme NF de ces produits, défaillance sur laquelle la SCP B., ès-qualités, est particulièrement taisante à hauteur de cour.

Au vu de ces éléments, il y a lieu de fixer à 70'% la part de responsabilité de la société DTN et à 30'% celle de la société Sarplast, aux droits de laquelle intervient maintenant la société SP Trading.

La décision sera également infirmée de ce chef.

Les préjudices :

La faute de la société DTN n'étant pas la cause exclusive du dommage qu'elle a subi, la SCP B., ès-qualités, est en droit de solliciter l'indemnisation de son préjudice.

Le tribunal de commerce de Chaumont a fixé le préjudice subi par la société DTN à la somme de 5.447.108,98 euros après déduction d'une somme de 304 898,02 euros réglée par la compagnie d'assurance de la société DTN sans distinguer entre les préjudices qui sont de nature différente (préjudice financier et commercial d'une part et préjudice lié au différentiel de marge qui constitue une perte de chance d'autre part).

* le préjudice financier et commercial :

La société SP Trading persiste à soutenir que le préjudice commercial allégué serait en réalité inexistant et qu'en tout état de cause, à le supposer établi, la base d'indemnisation ne pourrait se faire que sur le premier retrait du produit en septembre 1997, soit tout au plus 72 683 euros.

M. A., expert-comptable près la cour d'appel de Rouen, sapiteur désigné pour la partie indemnitaire du litige, a rédigé un rapport particulièrement détaillé et argumenté sur ce point et a répondu de manière exhaustive aux dires des parties'; il y sera donc renvoyé pour ses éléments techniques.

Il n'y a donc plus lieu à ce stade de remettre en cause les conclusions qu'il a dressées de manière objective et impartiale et qui démontrent le lien de causalité entre les fautes commises et les préjudices subis par la société DTN, et plus particulièrement le préjudice commercial constitué par la perte de part de marché causée par les deux sinistres subis.

M. A. a pris soin, pour chiffrer celui-ci, d'étudier l'évolution du marché du poêle à pétrole et de prendre en compte le fait que la baisse des ventes, avec ses conséquences sur le résultat d'exploitation de la société, n'était pas exclusivement due aux sinistres ayant généré un incontestable désastre commercial mais également à la concurrence du marché asiatique.

Si M. A. a pu déplorer, au fil de son rapport, l'absence d'un dossier plus étoffé et mieux structuré que celui qui lui a été finalement remis par la société DTN, il a été néanmoins en mesure de répondre à sa mission au vu des pièces comptables qui lui ont été remises.

Il ressort de son rapport final que les préjudices d'ordre financier et commercial doivent être évalués comme suit :

- surcoût lié à l'opération de rapatriement de septembre 1997': 72 683 euros

- surcoût lié à l'opération de remplacement définitif des réserves polymères d'avril 1998' : 837 892 euros

- préjudice commercial (exclusivement lié à l'opération de rapatriement de septembre 1997)': 4.116.123 euros

- surcoût de stockage' : 9 757 euros

Soit un total de : 5. 036. 455 euros

Compte tenu du pourcentage de responsabilité qui a été retenu ' 70'% pour la société DTN et 30'% pour la société Sarplast ', la SCP B., ès-qualités, conservera à sa charge la somme de 3.525.518,50 euros.

La société SP Trading (anciennement Sarplast) sera condamnée à payer à la SCP B., ès-qualités, la somme de 1.510.936,50 euros en réparation du préjudice subi à ce titre.

* le préjudice lié au différentiel de marge :

La SCP B., ès-qualités, se fondant sur le rapport d'expertise (page 739), sollicite l'indemnisation du manque à gagner lié au différentiel de marge pour un montant de

579 308 euros (10,63 francs à l'époque x 357 480 convecteurs), la société DTN escomptant de la substitution des réservoirs polymères une baisse du prix de revient des convecteurs et par conséquent une amélioration de sa marge brute par appareil.

La perte de chance se caractérise par la disparition de la probabilité d'obtenir un avantage ou par la disparition de la possibilité d'éviter une perte.

En conséquence, seule constitue une perte de chance réparable la disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable.

Si la notion de perte de chance suppose l'existence d'un aléa, le principe d'une réparation du préjudice ne peut se concevoir qu'à la condition que la perte de chance présente un caractère réel et sérieux.

Toute indemnisation doit par conséquent être exclue en cas de préjudice simplement hypothétique.

La perte de chance dans le cas d'espèce doit s'apprécier au regard de la faisabilité réglementaire et technique du procédé polymère.

Si la société DTN a été la première à recourir à ce procédé en 1997, celui-ci a été abandonné en 1998, après de multiples dysfonctionnements constatés dans le process de fabrication et il n'est pas démontré qu'une autre société l'ait repris depuis lors et ce, malgré les indéniables gains en terme de coût de production qui pourraient en découler.

Il en ressort que les chances de commercialiser un tel produit posent véritablement question sur la faisabilité du remplacement d'un réservoir métallique par un réservoir en plastique compte tenu de la nature du liquide qu'il contient (pétrole).

La disparition actuelle et certaine d'une éventualité favorable n'est pas démontrée, le préjudice apparaît hypothétique et il ne peut donc être indemnisé.

La SCP B., ès-qualités, sera déboutée de sa demande à ce titre.

La décision sera par conséquent infirmée de ce chef.

L'article 700 du code de procédure civile:

La décision sera infirmée.

La SCP B., ès-qualités, et la société SP Trading seront déboutées de leur demande au titre des frais irrépétibles.

La SCP B., ès-qualités, et la société SP Trading seront condamnées in solidum à payer à la société Mécasonic la somme de 8 000 euros.

La société Ressorts Haut Marnais (RHM) a été définitivement mise hors de cause.

Néanmoins, la compagnie Allianz Iard, assureur de la société Mécasonic, a maintenu à hauteur de cour des demandes à titre subsidiaire à l'encontre de la société RHM qui a dû conclure pour y répondre.

L'équité justifie donc qu'il soit alloué à celle-ci la somme de 3 000 euros au paiement de laquelle la compagnie Allianz Iard, venant aux droits de la société Gan Eurocourtage, sera condamnée.

Les mêmes considérations justifient que les autres parties soient déboutées de leur demande à ce titre.

Les dépens :

La décision sera infirmée.

L'article 639 du code de procédure civile dispose que la juridiction de renvoi statue sur la charge de tous les dépens exposés devant les juridictions du fond y compris sur ceux afférents à la décision cassée.

La responsabilité de la société DTN ayant été retenue à titre majeur sans exclure celle de la société Sarplast, l'ensemble des dépens exposés devant les juridictions seront mis à la charge de la SCP B., ès-qualités, à hauteur de 70'% et à celle de la société SP Trading à hauteur de 30'%, en ce compris les frais d'expertise de M. F. et le coût de l'échantillonnage effectué par Maître D., avec recouvrement direct par application de l'article 699 du code de procédure civile au profit de la SCP D.-C.-R. pour la société Mécasonic et au profit de Maître M. pour la société RHM.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement et par arrêt contradictoire ;

Vu l'arrêt rendu par la Cour de cassation le 22 novembre 2016 et sur les points atteints par la cassation' ;

Déboute la SCP B., ès-qualités de mandataire liquidateur de la société DTN France, de sa demande aux fins d'écarter les conclusions de la société SP Trading du 3 janvier 2018 et les conclusions de la société Mécasonic du 4 janvier 2018 ainsi que les pièces n° 2 à 6 versées à l'appui.

Infirme le jugement rendu le 3 août 2009 par le tribunal de commerce de Chaumont.

Statuant à nouveau' ;

Dit que la société Sarplast a commis une faute contractuelle engageant sa responsabilité à l'égard de la société DTN.

Dit que la société DTN a contribué par sa faute à la réalisation du dommage mais qu'il ne s'agit pas d'une faute exclusive.

Ecarte toute responsabilité de la société Mécasonic dans la survenance du dommage.

En conséquence ;

Déboute la SCP B., ès-qualités de mandataire liquidateur de la société DTN, de ses demandes à l'encontre de la société Mécasonic.

Dit que la garantie de la compagnie Allianz Iard, assureur de la société Mécasonic, est dès lors sans objet.

Rappelle que la société Ressorts Haut Marnais (RHM) a été définitivement mise hors de cause.

Fixe à 70'% la part de responsabilité de la société DTN et à 30'% la part de responsabilité de la société Sarplast, aux droits de laquelle intervient maintenant la société SP Trading, dans la survenance du dommage.

Dit que la SCP B., ès-qualités de mandataire liquidateur de la société DTN, garde à sa charge la somme de 3.525.518,50 euros' au titre du préjudice financier et commercial.

Condamne la société SP Trading (anciennement Sarplast) à payer à la SCP B., ès-qualités de mandataire liquidateur de la société DTN, la somme de 1.510.936,50 euros au titre du préjudice financier et commercial.

Déboute la SCP B., ès-qualités de mandataire liquidateur de la société DTN, de sa demande d'indemnisation au titre du préjudice lié au différentiel de marge.

Condamne in solidum la SCP B., ès-qualités de mandataire liquidateur de la société DTN, et la société SP Trading (anciennement Sarplast) à payer à la société Mécasonic la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamne la compagnie Allianz Iard, venant aux droits de la société Gan Eurocourtage, à payer à la société Ressorts Haut Marnais (RHM) la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Déboute les autres parties de leur demande à ce titre.

Condamne la SCP B., ès-qualités de mandataire liquidateur de la société DTN, à hauteur de 70'% et la société SP Trading (anciennement Sarplast) à hauteur de 30'% aux dépens exposés devant les juridictions, qui comprendront les frais d'expertise de M. F. et le coût de l'échantillonnage effectué par Maître D., avec recouvrement direct par application de l'article 699 du code de procédure civile'au profit de la SCP D.-C.-R. et au profit de Maître M..