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Décisions

Cass. 3e civ., 19 février 1986, n° 83-17.052

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Monégier du Sorbier

Rapporteur :

M. Mouthon

Avocat général :

M. de Saint Blancard

Avocats :

Me Vuitton, SCP Martin-Martinière et Ricard

Bastia, ch. civ., du 20 sept. 1983

20 septembre 1983

Sur le premier moyen du pourvoi de la compagnie Les Assurances Générales de France :

Vu l'article 1788 du Code civil ;

Attendu que si, dans le cas où l'ouvrier fournit la matière, la chose vient à périr, de quelque manière que ce soit, avant d'être livrée, la perte en est pour l'ouvrier, à moins que le maître ne fut en demeure de recevoir la chose ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Bastia, 20 septembre 1983) que la société civile immobilière Porto Monaghi a fait construire par l'entrepreneur X..., assuré par la Compagnie Winterthur, un ensemble immobilier destiné à être vendu en copropriété par appartements en l'état de futur achèvement ; qu'avant réception de l'ouvrage, mais après la vente de plusieurs appartements, une explosion criminelle, dont les auteurs sont demeurés inconnus, a endommagé l'édifice ; que la société civile immobilière a assigné en réparation du dommage l'entrepreneur et l'assureur de celui-ci, ainsi que les compagnies "Les Assurances Générales de France" et "Le Secours" auprès desquelles elle avait elle-même souscrit des polices d'assurances ;

Attendu que pour confirmer la décision des premiers juges de mettre hors de cause l'entrepreneur et son assureur, l'arrêt retient qu'aucune des parties ne la contestait sérieusement, la destruction de la chose ayant constitué pour M. X... un cas de force majeure imprévisible et irrésistible ;

Qu'en statuant ainsi, alors que dans ses conclusions la Compagnie Les Assurances Générales de France soutenait qu'en l'absence de réception de l'ouvrage, la charge des risques devait être supportée par l'entrepreneur, la Cour d'appel a violé le texte susvisé ;

Attendu qu'ayant condamné "conjointement et solidairement" la Compagnie A.G.F. et la Compagnie "Le Secours", l'arrêt dit qu'il leur appartiendra de répartir entre elles les charges du sinistre ;

Attendu qu'un lien de dépendance nécessaire existant, d'une part, entre la prise en charge des risques par l'une des parties au contrat de louage d'ouvrage et leur garantie par les assureurs, d'autre part, entre la condamnation de l'un de ceux-ci et la condamnation de l'autre, la cassation sur le premier moyen du pourvoi formé par la Compagnie A.G.F. profitera à la Compagnie "Le Secours" qui le demande ;

PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres moyens du pourvoi 83-17.052, ni sur le pourvoi 83-17.037 formé par la compagnie Le Secours,

CASSE et ANNULE l'arrêt rendu le 20 septembre 1983, entre les parties, par la Cour d'appel de Bastia ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la Cour d'appel d'Aix-en-Provence.