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Décisions

CA Rennes, 1re ch. B, 26 mars 2009, n° 08/00377

RENNES

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Objectif Numerique (SARL)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Simonnot

Conseillers :

Mme Serrin, M. Gimonet

Avoués :

SCP Castres, Colleu, Perot & Le Couls-Bouvet, SCP D'Aboville, de Moncuit Saint-Hilaire & Le Callonnec

Avocats :

Me Bocquet, Me Le Marc Hadour

CA Rennes n° 08/00377

25 mars 2009

En 2005, la société Christien, qui exerce sous l'enseigne 'Objectif Numérique', a confié à Monsieur X... exerçant sous l'enseigne 'LC Design' la conception de sa plaquette d'entreprise, ainsi que celle d'un 'flyer', pour un montant de 9 150 HT, soit 10 943,40 TTC.

La société Christien n'ayant pas approuvé le travail fourni par Monsieur X..., celui-ci lui a réclamé vainement paiement d'une somme de 5 126,27 TTC, déduction faite de l'acompte versé de 3 071,32 TTC, d'une moins-value de 1 196 TTC au titre des prestations non réalisées et d'une somme de 1 549,81 TTC qui lui était due par la société Christien.

En conséquence, Monsieur X... a fait assigner la société Christien en paiement, par acte du

30 juin 2006, devant le tribunal de commerce de Lorient.

Par jugement contradictoire du 9 novembre 2007, le tribunal a :

- reçu Monsieur X... en sa demande, l'a déclarée non fondée et l'en a débouté,

- reçu la société Christien en sa demande reconventionnelle et l'a dite partiellement fondée,

- dit n'y avoir lieu à condamner Monsieur X... à restituer l'acompte,

- constaté que cette somme correspondait au travail effectué par Monsieur X... et l'a dite satisfactoire,

- dit n'y avoir lieu à faire droit à la demande de dommages-intérêts de Monsieur X...,

- condamné Monsieur X... à payer à la société Christien 1 000 sur le fondement de l'article

700 du code de procédure civile et à supporter les dépens.

Monsieur X... a relevé appel de ce jugement à l'encontre de la société Objectif Numérique venant aux droits de la société Christien.

Il conclut, aux termes de ses dernières écritures signifiées le 20 janvier 2009, à sa réformation à l'exception de ses dispositions rejetant la demande de restitution de l'acompte, à la condamnation de la société Objectif Numérique à lui verser 5 126,27 TTC, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation introductive d'instance, au titre des sommes restant dues après compensation, 2 000 à titre de dommages-intérêts et 2 000 sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Il reproche au tribunal d'avoir soumis le paiement de l'intégralité du prix à la signature par la société Objectif Numérique d'un bon à tirer.

Il souligne que le dirigeant de la société Objectif Numérique est un professionnel du design, parfaitement informé des pratiques et des tarifs qui n'a contesté son travail qu'après qu'il a été fourni.

Il soutient que ses critiques sont injustifiées.

Aux termes de ses dernières écritures signifiées le 8 janvier 2009, la société Objectif Numérique conclut à la confirmation du jugement en ce qu'il a reçu la société Christien en sa demande reconventionnelle, l'a dite fondée, a rejeté la demande de dommages-intérêts de Monsieur X... et l'a condamné aux dépens.

Elle sollicite son infirmation pour le surplus et demande à la cour d'annuler le contrat, de prendre acte de son inexécution, d'ordonner les restitutions pécuniaires qui s'imposent, de débouter LC Design de ses demandes et la condamner à rembourser à la société Christien l'acompte de 3 071,32 et à lui verser 4 000 à titre de dommages-intérêts et les intérêts du principal au taux légal à compter de la signification du 'jugement' à intervenir.

A titre subsidiaire, elle demande la confirmation du jugement, sauf en ce qui concerne les frais irrépétibles.

Elle sollicite 2 500 sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et

'l'exécution provisoire de l'arrêt à intervenir'.

Elle soutient que, compte tenu du prix de la prestation, un travail innovant et créatif devait être fourni, ce qui n'a pas été le cas. Elle considère que l'objet du contrat n'a pas été respecté et que le contrat est devenu sans cause, d'où sa demande de nullité.

Dans l'éventualité où la cour estimerait que le contrat est valable, elle oppose une exception d'inexécution et fait valoir qu'eu égard à l'insuffisance des prestations, jamais avalisées par elle, LC Design ne peut solliciter aucune rémunération.

L'instruction de l'affaire a été déclarée close le 5 février 2009.

DISCUSSION ET MOTIFS DE LA DÉCISION

Que, suivant devis accepté le 11 avril 2005, la société Christien a confié à Monsieur X... la conception d'une charte graphique ;

Que les travaux consistaient en la conception graphique de la plaquette d'entreprise, la création de concept charte graphique et stratégie de communication, la réalisation d'une maquette d'après une photographie fournie par la société Christien, la mise en page d'une pochette boitage, la mise en page de fiches, la conception de l'ensemble en quadri R°V°, l'optimisation des images, des travaux numériques sur image, la réalisation d'un rédactionnel d'après textes brouillons fournis, la conception d'un visuel pour DVD Rom et la transmission de fichiers prêts à imprimer sur cd + BAT pour un coût de 8 650 HT ;

Que la société Christien ne conteste pas avoir également commandé la conception d'un 'flyer' pour information changement d'adresse, cette prestation consistant en la réalisation d'une maquette, la conception de l'ensemble en quadri R°V°, des travaux numériques sur image, la réalisation d'un rédactionnel d'après textes brouillons fournis et la transmission de fichiers prêts à imprimer sur cd + BAT, le devis fixant à 500 HT le coût de cette prestation ;

Que le contrat liant Monsieur X... à la société Christien devenue depuis lors société Objectif Numérique était un contrat d'entreprise dans la mesure où Monsieur X... s'était engagé contre rémunération à exécuter une plaquette et un 'flyer' de façon indépendante ;

Que l'existence de l'objet s'appréciant au jour de la conclusion du contrat et l'objet pouvant porter sur une chose future, le fait que, postérieurement à sa formation, le travail fourni par Monsieur X... n'ait pas été agréé par la société Christien est indifférent et ne prive pas rétroactivement le contrat d'objet qui portait sur la réalisation à venir d'une plaquette et d'un 'flyer' ; que, par conséquent, le contrat ne peut être annulé pour absence d'objet ;

Que le contrat était un contrat synallagmatique commutatif, la cause de l'obligation de payer le prix pour la société Christien ayant pour cause la fourniture de la plaquette et du 'flyer' par Monsieur X... ;

Qu'il s'agit d'un contrat à exécution instantanée et non à exécution successive puisque la réalisation de la prestation, même si elle demandait un certain temps, se faisait en une fois, sans se renouveler dans le temps ;

Que la cause d'un contrat à exécution instantanée s'apprécie au jour de la conclusion du contrat de sorte que le fait que la prestation fournie ait été estimée d'une qualité insuffisante ne constitue pas une absence de cause susceptible de provoquer l'annulation du contrat ;

Que la société Christien sera déboutée de sa demande d'annulation du contrat ;

Qu'en refusant de signer le bon à tirer, la société Christien a manifesté son absence d'approbation du travail de conception, ce qui a conduit Monsieur X... d'abord à ne pas faire réaliser la maquette, et ensuite à renoncer à réclamer paiement de la partie du prix relatif à la phase de réalisation ;

Qu'en matière de contrat d'entreprise, même si les parties se sont accordées sur le prix, la rémunération convenue peut être réduite judiciairement au cas où elle s'avère excessive, ce qui est le cas lorsque la prestation fournie est insuffisante ;

Que Monsieur X... est mal fondé à soutenir que celle-ci ne peut être contestée dès lors qu'elle a été fixée avant la réalisation de la prestation et que ce n'était qu'à la remise des projets que la société Christien pouvait en apprécier la qualité et la pertinence ;

Que les documents versés aux débats montrent que les plaquettes s'inscrivent dans le sillage de la précédente et ne présentent aucune véritable créativité, alors que le travail confié à Monsieur X... étant un travail de conception d'une charte graphique, il se devait d'être innovant et ne pouvait se limiter à une adaptation de la plaquette jusqu'alors utilisée par la société Christien ;

Qu'il s'ensuit que la rémunération demandée par Monsieur X... pour un travail dénué d'originalité apparaît exagérée et est justement assurée par la somme de 3 071,32 versée à titre d'acompte ;

Que la société Objectif Numérique soutient que le refus de solution amiable qui lui a été opposé par Monsieur X... et l'engagement d'une procédure après dix mois de silence lui ont causé un préjudice ; qu'elle ne précise pas en quoi consiste ce préjudice qu'elle évalue à 4 000

;

Que l'existence d'un préjudice n'étant pas caractérisée, ce chef de demande sera rejeté ;

Que les dispositions du jugement relatives à l'article 700 du code de procédure civile étaient justifiées et seront maintenues ;

Qu'en indemnisation des frais de procédure non inclus dans les dépens exposés devant la cour, il convient d'allouer à la société Objectif Numérique 1 000 ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré, Et y ajoutant,

Condamne Monsieur X... à payer à la société Objectif Numérique 1 000 au titre des frais irrépétibles d'appel,

Rejette toutes autres demandes,

Condamne Monsieur X... aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés directement par la S.C.P. d'Aboville, De Moncuit Saint Hilaire, Le Callonnec, société titulaire d'un office d'avoué, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.