CA Amiens, ch. économique, 28 avril 2016, n° 15/01728
AMIENS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Siminvest (SARL)
Défendeur :
Valdman, Selarl Grave Randoux (ès qual.)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Grouman
Conseillers :
Mme Gilibert, Mme Paulmier Cayol
Avocats :
Me Le Roy, Me Brocard, Me Tourneux, Me Barnier
DECISION
Par jugement en date du 3 avril 2015, le tribunal de commerce de SAINT QUENTIN a arrêté le plan de redressement par voie de continuation de la SARL SIMINVEST selon les modalités suivantes :
- règlement dans le mois de l'arrêté du plan des créance inférieure ou égale à 300 € ;
- règlement à 50 % sans intérêt sur trois ans, à raison de 10 % la première année puis 20 % par an la deuxième et la troisième année pour les lire créance ayant été pour cette option ;
- règlement à 100 % des autres créanciers, dont ceux réfractaire au plan, sans intérêt sur cinq ans à raison de 10 % la première année ; 15 % la deuxième année, 20 % la troisième année 25 % la quatrième année, 30 % la cinquième année ;
- fixé à 12 mois après l'arrêté du plan la première échéance et la durée du plan a six ans ;
- dit que les fonds nécessaires à l'apurement du passif et à l'exécution du plan seront remis mensuellement par le dirigeant de la SARL SIMINVEST entre les mains du commissaire l'exécution
du plan ;
- ordonné le règlement des dettes contractées en vertu de l'article L622-17 du code de commerce selon leur rang à l'intérieur du plan ;
- nommé pour la durée du plan Maître Daniel VALDMAN commissaire l'exécution du plan ;
- maintenu la SELARL GRAVE RANDOUX, prise en la personne de Maître Michel GRAVE, en qualité de mandataire judiciaire ;
- donné acte au créancier d'entreprise des délais et remises acceptées par eux, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article L. 626-5 et à l'article L. 626-6 du code de commerce ;
- imposé aux créanciers ayant refusé les propositions d'apurement du passif, les délais uniformes de paiement ci-dessus repris dans le plan de redressement et de continuation, sous réserve, en ce qui concerne les créances à terme, des délais supérieurs stipulés par les parties avant l'ouverture de la présente procédure ;
- décidé que les biens meubles indispensables à la continuation de l'entreprise et tous les immeubles dépendant de l'actif de la SARL SIMINVEST ne pourront être aliéné pour une durée de six ans sans l'autorisation du tribunal et dit que les formalités nécessaires seront accomplies la diligence du commissaire l'exécution du plan.
Par déclaration au greffe, en date du 9 avril 2015, la SARL SIMINVEST a interjeté appel de cette décision.
Vu les dernières conclusions déposées au greffe, le 25 août 2015 par la voie électronique, par la SARL SIMINVEST qui demande à la cour de :
- La dire et juger recevables et bien fondée en son appel ;
Y faisant droit, en conséquence,
- infirmer le jugement du tribunal de commerce de Saint Quentin en date du 4 avril 2015 en ce qu'il a :
* réduit la durée du plan a six ans ainsi que dans les modalités de remboursement
* prononcé l'inaliénabilité des immeubles constituant le stock de la SARL SIMINVEST
- réformer le plan prononcé par de commerce de Saint Quentin en date du 4 avril 2015 ;
En conséquence,
- Dire que le plan de redressement de la SARL SIMINVEST s'exécutera sur une durée de 10 ans et selon les modalités suivantes (sans modification concernant : les créanciers supers privilégiés dont la créance est hors plan ; les frais de justice ; les créances de l'article L626-20 du code de commerce):
- Autres créanciers :
Pour l'ensemble des autres créanciers, tant privilégiés que chirographaires, il est proposé un remboursement selon les deux modalités suivantes :
Option n° 1 :
Règlement de 100 % de la créance définitive sur 10 ans, selon la progressivité suivante est sans intérêt :
-5 % de la créance définitivement admise les 1ère et 2ème années ;
-10 % de la créance définitivement admise de la 3ème à la 8ème année fiscale ;
-15 % de la créance définitivement admise les 9ème et 10ème années.
Option n° 2:
Un règlement unique et forfaitaire de 25 % de la créance définitivement admise, en une seule échéance, à la date d'anniversaire du plan.
- Dire que les immeubles détenus par la SARL SIMINVEST sont constitutifs de son stock et qui ne sont pas indispensables à continuation de l'entreprise ;
En conséquence,
- Prononcer la levée de la clause d'inaliénabilité des immeubles constituant le stock de la SARL SIMINVEST ;
- Statuer ce que de droit sur les dépens.
Vu les dernières conclusions déposées au greffe, le 29 décembre 2015 par la voie électronique, par Maître Daniel VALDMAN, commissaire à l'exécution du plan et la SELARL GRAVE RANDOUX, mandataire judiciaire qui demandent à la cour de :
- Confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Saint Quentin le 3 avril 2015 pour ce qui est de la durée des modalités du plan ;
- Rejeter les demandes de la SARL SIMINVEST relatives à la levée de la mesure d’inaliénabilité n’ordonnaient pas de mal de commerce de Saint Quentin en ce qu'elle est conforme aux propositions d'apurement du passif qui ont été signé par le dirigeant de la SARL SIMINVEST et circularisée aux créanciers ;
- Condamner la SARL SIMINVEST aux entiers dépens.
Vu l'ordonnance de la Présidente de la chambre économique, en date du 21 avril 2015, qui a , en application des dispositions de l'article 905 du code de procédure civile, fixé les délais de procédure et la clôture au 14 janvier 2016.
Les Faits
Par jugement en date du 4 octobre 2013, le tribunal de commerce de Saint Quentin a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la SARL SIMINVEST qui a une activité de promotion immobilière, de marchand de biens et, plus largement, de toute activité relevant de l'immobilier.
Le projet de plan de redressement prévoyait les dispositions particulières suivantes :
- de faire consigner auprès du commissaire l'exécution du plan dès qu'il sera désigné par le tribunal et en les livres de la caisse des dépôts et consignations, directement par les notaires qui sera en charge des ventes immobilières, au minimum 80 % du prix de vente HT de chaque actif immobilier en stock ;
- de demander au tribunal que soit prononcée l'inaliénabilité des actifs immobiliers pour la durée du plan conformément dispositions de l'article L626-14 du code de commerce ; ces actifs pouvant toutefois être cédé sur autorisation du tribunal.
S'agissant des modalités d'apurement du passif, déclaré à hauteur de la somme de 4.843.295,47€, entre les mains de Maître Michel GRAVE, mandataire judiciaire, il était proposé :
Pour les autres créanciers
Option n°1 :
Règlement de 100 % de la créance définitive sur 10 ans, selon la progressivité suivante est sans intérêt :
-5 % de la créance définitivement admise les 1ère et 2ème années ;
-10 % de la créance définitivement admise de la 3ème à la 8ème année;
-15 % de la créance définitivement admise les 9ème et 10ème années.
Option n°2 :
- Un règlement unique et forfaitaire de 25 % de la créance définitivement admise, en une seule échéance à la date d'anniversaire du plan.
Par son jugement en date du 3 avril 2015, dont appel, le tribunal de commerce de Saint Quentin a réduit la durée du plan à 6ans, modifié les modalités de remboursement et prononcé l'inaliénabilité des immeubles .
Les Moyens des Parties
La SARL SIMINVEST soutient que :
- la réduction de la durée du plan à 6 années va à l'encontre des chances de sauvetage de la SARL SIMINVEST dans la mesure où il est difficile de parier sur une reprise à court terme du marché de l'immobilier;
- les modalités d'apurement du passif qu'elle propose sont conformes à celles qui ont été circularisées aux créanciers;
- la mesure d'inaliénabilité est injustifiée puisque les immeubles dont elle est propriétaire constituent en réalité son stock et, par définition, destinés à être vendus;
- en cas d'inaliénabilité, la procédure tenant à solliciter l'autorisation du tribunal pour chaque vente d'immeubles génère des frais de greffe, d'un montant de 225,54€ outre les frais de signification de publication au BODACC.
Maître Daniel VALDMAN, ès qualités de commissaire à l'exécution du plan et la SELARL GRAVE RANDOUX, ès qualités de mandataire judiciaire soutiennent que :
- le tribunal a, conformément dispositions des articles L626-12 et L626-18 du code de commerce, fixer la durée du plan et réduit les délais et remises acceptées par les créanciers ;
- en application des dispositions de l'articleL626-26 du code de commerce, la SARL SIMINVEST conserve la possibilité de demander une modification du plan ;
- l'inaliénabilité des actifs constitue une garantie pour les créanciers et le tribunal qui a été proposé par le dirigeant de la SARL SIMINVEST.
Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il est, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, fait renvoi exprès aux conclusions susvisées.
Le ministère public, présent à l’audience, a demandé la confirmation du jugement entrepris.
SUR CE
Sur la durée du plan et les modalités d'apurement du passif
L'article L626-12 du code de commerce dispose « Sans préjudice de l'application des dispositions de l'article L626-18 , la durée du plan est fixée par le tribunal. Elle ne peut excéder 10 ans. Lorsque le débiteur est à l'agriculture, elle ne peut excéder 15 ans. »
L'article L626-18 alinéa 1 prévoit « Le tribunal donnent accès des délais et remises acceptées par les créanciers dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article L626-5 et à l'article L626-6. Ces délais et remises peuvent, le cas échéant, être réduits par le tribunal. »
Le projet de plan de redressement présenté par la SARL SIMINVEST offrait deux options aux créanciers :
- l’option n°1 prévoyant un apurement de la créance définitive à hauteur de 100 % en 10 ans et sans intérêt par le versement d'annuités progressives ;
- l’option n°2 prévoyait un apurement de la créance définitive à hauteur de 25 % sans intérêt par le versement d'une unique échéance forfaitaire à la date d'anniversaire du plan.
Conformément aux dispositions des articles L626-12 et L626-18 susvisés, le tribunal a fixé la durée du plan a six ans, réduit les délais acceptés par les créanciers ayant choisi l'option numéro un en les ramenant à cinq ans et les remises acceptées par les créanciers ayant choisi l'option numéro deux en les réduisant à 50 % à régler en trois annuités progressives.
Il résulte du rapport de Maître Daniel VALDMAN, agissant alors ès qualités d'administrateur judiciaire, que la SARL SIMINVEST n'a plus pour seul objet que celui de réaliser les actifs immobiliers dont elle est propriétaire en vue en vue d'apurer son passif qui s'élève à la somme de 4.696.751,70€, sous réserve de contestations de créances à hauteur de 1.504.691,72€.
Les actifs immobiliers en stock ont été évalués entre 5.000.000€ et 6.400.000€ par l'expert désigné par le juge commissaire.
S'il ne peut prévoir ce que sera l'évolution du marché immobilier, la durée de 10 ans prévue par le projet de redressement apparaît excessive s'agissant de vente d'immeubles à réaliser.
Les créanciers ayant accepté, expressément tacitement, l'option n°2, à savoir un règlement de 25 % la créance définitivement admise en une seule échéance, représente un montant total déclaré 1.064.136,49€.
Une réduction du montant de la créance à hauteur de 75 % apparaît également excessive contenue [sic] de l'activité poursuivie par la SARL SIMINVEST qui ne consistera qu'à vendre des immeubles déjà en stock et non à développer une activité économique.
Il convient ainsi de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fixé la durée du plan a six ans et modifier les modalités d'apurement du passif.
Sur l'inaliénabilité des immeubles dépendant de l'actif de la SARL SIMINVEST
L'article L626-14 alinéa 1 du code de commerce dispose « dans le jugement arrêtant le plan ou le modifiant, le tribunal peut décider que les biens qu'il estime indispensable la continuation de l'entreprise ne pourront être aliénés, pour une durée qu'il fixe, sans son autorisation. La durée de l'inaliénabilité ne peut excéder celle du plan. »
Les propositions d'apurement du passif présentées par la SARL SIMINVEST, sous la signature son gérant Monsieur Christian S., avec le concours de l'administrateur judiciaire, comportaient des engagements des dispositions particulières, notamment de demander au tribunal que soit prononcée l'inaliénabilité des actifs immobiliers pour la durée du plan conformément aux dispositions de l'article L626-14 du code de commerce, ces actifs pouvant être cédés sur autorisation du tribunal.
Si l'inaliénabilité des actifs immobiliers peut paraître singulière, s'agissant d'une activité de marchand de biens il demeure qu'elle a été proposée par le débiteur lui-même et qu'elle n'apparaît pas contraire aux dispositions de la loi sur les difficultés des entreprises.
Cette mesure sera de nature à sécuriser les créanciers en permettant au tribunal de s'assurer de la pertinence des prix de vente.
Les frais de greffe et de publicité, inhérents à la procédure d'autorisation, n'apparaissent pas excessifs au regard de la valeur des biens réalisés telle qu'estimée par l'expert.
Il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a prononcé l'inaliénabilité des immeubles dépendant de l'actif de la SARL SIMINVEST.
PAR CES MOTIFS
La cour statuant contradictoirement par arrêt mis à disposition au greffe,
Déclare recevable mais mal fondé l'appel interjeté par la SARL SIMINVEST ;
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 3 avril 2015 par la tribunal de commerce de SAINT QUENTIN ;
Dit que les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective.