Cass. com., 3 décembre 2003, n° 01-01.717
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions (Nîmes, 23 novembre 2000), que M. X..., agriculteur, a été mis en redressement judiciaire le 15 juin 1993 ; que par jugement du 18 avril 1995, un plan de continuation d'une durée de dix ans a été arrêté ; que par requête du 28 septembre 1998, le commissaire à l'exécution du plan a fait connaître les incidents de paiement des dividendes par le débiteur et a demandé au tribunal de statuer sur les difficultés d'exécution du plan de continuation ; que le tribunal, par jugement du 8 juin 1999, a prononcé la résolution du plan et ouvert une nouvelle de procédure de redressement judiciaire à l'encontre du débiteur ; que, par jugement du 30 novembre 1999, le tribunal a prononcé la liquidation judiciaire de M. X... ; que ce dernier a relevé appel des deux derniers jugements cités ; que la cour d'appel a ordonné la jonction des deux recours ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande d'annulation du jugement du 8 juin 1999, prononcé la résolution du plan de redressement, ouvert une nouvelle procédure de redressement judiciaire à son encontre et prononcé sa liquidation judiciaire, alors, selon le moyen :
1 / que le tribunal de grande instance ne peut être saisi d'une demande en résolution du plan de continuation arrêté au profit d'un agriculteur et d'ouverture d'une procédure judiciaire qu'à la demande d'un créancier représentant au moins 15 % des créances ayant préalablement informé le commissaire à l'exécution du plan, du commissaire à l'exécution du plan agissant personnellement ou représenté par un avocat ou à la demande du procureur de la République ; qu'en considérant que le tribunal saisi par une requête du commissaire à l'exécution du plan aux fins de statuer sur les difficultés d'exécution du plan de continuation de M. X... avait pu prononcer la résolution du plan dès lors qu'une collaboratrice avait demandé à l'audience la résolution dudit plan ou que le ministère Public sans saisir lui-même la juridiction avait conclu à celle-ci, peu important les rapports que le commissaire à l'exécution du plan avait pu adresser à la juridiction en application de l'article 94 du décret du 27 décembre 1985 dans sa rédaction applicable en l'espèce qui ne saisissent pas la juridiction, la cour d'appel a méconnu les dispositions des articles 80 de la loi du 25 janvier 1985 dans sa rédaction originaire applicable en l'espèce, 94 et 175 du décret du 27 décembre 1985 dans sa rédaction applicable en l' espèce et 853 du nouveau Code de procédure civile ;
2 / que par un jugement du 29 juin 1999, le tribunal de grande instance de Carpentras a, au visa de l'article 80 de la loi du 25 janvier 1985 dans sa rédaction applicable à la date d' adoption du plan de continuation, prononcer la résolution du plan de redressement de M. X... et ouvert à son encontre une procédure de redressement judiciaire régime général ; qu'en considérant que ledit tribunal s' était saisi d' office aux fins de prononcé le redressement judiciaire de M. X... sur le fondement des articles 3 et 4 de la loi du 25 janvier 1985 et de résolution du plan, la cour d'appel a en tout état de cause méconnu l'autorité de la chose jugée attachée à cette décision, en violation de l'article 1351 du Code civil ;
Mais attendu qu'après avoir relevé que le tribunal avait été saisi par la requête du commissaire à l'exécution du plan dont le rapport ultérieur exposait les défauts de paiement des dividendes et proposait la résolution du plan, la cour d'appel, abstraction faite des motifs surabondants critiqués par la seconde branche, a décidé à bon doit que la comparution à l'audience d'une collaboratrice du commissaire à l'exécution du plan munie d'un pouvoir spécial était sans incidence sur la régularité de la saisine du tribunal ; d'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que M. X... fait encore le même reproche à l'arrêt, alors, selon le moyen, que la résolution du plan ne peut être prononcée que pour non respect des engagements financiers qui y sont stipulés ; qu'en prononçant la résolution du plan de continuation de M. X... en raison du règlement tardif de la créance due au Crédit agricole et des créances fiscales sans expliquer en quoi cette inexécution était suffisamment grave pour justifier la résolution, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 80 de la loi du 25 janvier 1985 dans sa rédaction antérieure aux modifications apportées par la loi du 10 juin 1994 ;
Mais attendu qu'après avoir constaté que les lettres de mise en demeure du commissaire à l'exécution du plan adressées au débiteur de justifier du règlement des dividendes prévus par le plan à l'échéance du 31 janvier 1999 étaient demeurées sans réponse, puis caractérisé les retards de paiement des créances du Crédit agricole et de l'administration fiscale, c'est dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation que la cour d'appel a estimé que les manquements de M. X... justifiaient la résolution du plan ; que le moyen n' est pas fondé ;
Et sur le troisième moyen, pris en ses deux branches :
Attendu que M. X... fait enfin grief à l'arrêt d'avoir prononcé sa liquidation judiciaire, alors, selon le moyen :
1 / qu'il était versé aux débats les lettres du fils de M. X... adressées au liquidateur précisant qu'il avait l'intention de reprendre l'exploitation de son père en apurant le passif ; qu' en considérant que M. X... n'avait produit devant le tribunal ou la cour d'appel aucun justificatif d'une offre de reprise de son exploitation, la cour d'appel a dénaturé les lettres de M. Rémy X... adressées à M. Y... liquidateur de M. X..., en violation de l'article 1134 du Code civil ;
2 / qu' en prononçant la liquidation judiciaire de M. X... sans constater que celui-ci ne pouvait faire face à son passif exigible avec son actif disponible, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 3 et 80 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Mais attendu, d'une part, qu'il ne résulte, ni de l'arrêt, ni des pièces de la procédure, que les lettres dont la dénaturation est alléguée aient été produites devant la cour d'appel ;
Attendu, d'autre part, que la constatation de l' état de cessation des paiements n'est pas une condition nécessaire à l'ouverture d'une nouvelle procédure de redressement judiciaire consécutive à la résolution d'un plan de continuation qui ne peut tendre qu'à la cession ou à la liquidation judiciaire ; que, dès lors, la cour d'appel, qui n'avait pas à effectuer la recherche évoquée à la seconde branche et qui a considéré qu'aucun plan de cession n'était possible, a légalement justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.