Cass. 3e civ., 8 mars 1989, n° 87-13.460
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Francon
Rapporteur :
M. Beauvois
Avocat général :
M. Sodini
Avocats :
Me Célice, Me Blanc
Sur le premier moyen :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Riom, 10 février 1987), que les époux B..., maîtres de l'ouvrage, ont chargé M. X..., architecte, d'une mission de maître d'oeuvre pour la construction d'une maison ; que M. X... a confié les travaux à l'entreprise Rome mais que celle-ci les ayant commencés avant signature du marché, le maître de l'ouvrage a fait interrompre le chantier ;
Attendu que les époux B... font grief à l'arrêt de les avoir condamnés à payer à Mme D..., partie du coût des travaux exécutés alors, selon le moyen, que 1°) l'architecte est un locateur d'ouvrage ne représentant pas le maître ; qu'il ne saurait être considéré comme un mandataire à moins qu'il n'ait été chargé par son client et par une convention particulière d'accomplir, au nom et pour le compte de celui-ci, certains actes juridiques déterminés et nécessaires à l'exécution du mandat ainsi confié ; que le fait qu'un architecte ait été chargé de la construction d'une maison n'implique pas, sauf convention expresse, qu'il ait été chargé d'accomplir des actes juridiques au nom et pour le compte de son client ; que, considérant l'architecte X... comme "le mandataire" des époux B... engageant ces derniers par les travaux qu'il commandait, la cour d'appel a violé les articles 1792 et 1984 du Code civil, alors, que 2°) les juges du fond n'ont pas à rechercher d'office l'existence d'une convention particulière rendant l'architecte mandataire du maître de l'ouvrage ; qu'en l'espèce, Mme D... ne soutenait pas dans ses conclusions que l'architecte X... aurait été le mandataire, réel ou apparent, des époux B... ; qu'en relevant d'office un tel moyen, sans provoquer d'ailleurs les explications des parties, la cour d'appel a méconnu son office et violé les textes susvisés ainsi que les articles 12 et 16 du nouveau Code de procédure civile et alors que 3°) le mandat apparent suppose que le tiers ait été victime de la qualité prise par le mandataire apparent et qu'il ait pu légitimement se tromper sur l'étendue de ses pouvoirs ; qu'un entrepreneur professionnel ne peut pas, sauf circonstances exceptionnelles qu'il appartient aux juges du fond de relever, se méprendre sur l'absence de pouvoirs d'un architecte pour représenter le maître de l'ouvrage, spécialement lorsque l'architecte n'accomplit aucun acte au nom de ce dernier ; qu'en affirmant que l'architecte X... aurait pu avoir l'apparence de mandataire à l'égard de Mme D..., la cour d'appel a violé l'article 1985 du Code civil" ;
Mais attendu qu'après avoir souverainement relevé que la mission de l'architecte ne se limitait pas à l'obtention du permis de construire mais s'étendait aux opérations de construction et que dans une lettre du 4 janvier 1982 le maître de l'ouvrage lui reprochait que "les fondations n'étaient toujours pas commencées", la cour d'appel a légalement justifié sa décision de ce chef en retenant, sans violer les textes visés au moyen, que Mme D... avait pu croire de bonne foi que M. X..., architecte et mandataire apparent des époux B..., avait qualité pour l'informer qu'elle était choisie pour l'exécution des travaux et l'autoriser à les commencer ;
Sur le second moyen :
Attendu que les époux B... font encore grief à l'arrêt d'avoir rejeté leurs demandes en dommages-intérêts et en remboursement du surcoût de la construction alors, selon le moyen, "que celui qui, par sa faute, a concouru à la production d'un dommage est tenu de le réparer en son entier ; qu'il n'est point nécessaire que le fait ait été la cause exclusive du dommage ; qu'en se prononçant ainsi qu'elle l'a fait, et sans répondre aux conclusions de M. et Mme B... qui soulignaient la responsabilité de l'entreprise Rome qui avait pris le risque d'effectuer des travaux en hiver en pleine période d'inondation, sans ordre du maître de l'ouvrage, causant ainsi de graves désordres générateurs de coûts supplémentaires et de retard dans la construction, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1382 et 1383 du Code civil" ; Mais attendu qu'après avoir déduit de la facture de l'entreprise le coût de la seule malfaçon relevée par l'expert et de ses conséquences quant à l'aggravation du mauvais état d'un chemin, la cour d'appel a légalement justifié sa décision de ce chef en retenant que le litige avec l'entreprise Rome n'était pas la véritable cause du retard et du surcoût de la construction ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi.