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Décisions

CA Aix-en-Provence, 3e ch. b, 19 janvier 2012, n° 10/22642

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

SOCIETE SACER SUD EST S.A.

Défendeur :

S.A.R.L. GROUPE CARDINAL

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Madame Christine DEVALETTE

Conseillers :

Monsieur Gilles ELLEOUET, Monsieur Michel CABARET

Avoués :

SCP ERMENEUX-CHAMPLY - LEVAIQUE, SCP MAYNARD SIMONI, SCP LATIL PENARROYA-LATIL ALLIGIER

Avocats :

Me Hélène MARTY, Me Emmanuel MOLINA

AIX-EN-PROVENCE, du 30 Nov. 2010

30 novembre 2010

La société GROUPE CARDINAL a passé commande le 3 juin 2008 à la société SACER SUD EST de travaux de voirie et de réseaux divers correspondant au lot n°6 d'une opération de construction d'un bâtiment industriel à FOS SUR MER, pour un prix de 291 740€HT.

Le 19 novembre 2007, la SMTLI a fait à SACER SUD EST une offre de prix de 215 000€ HT pour la réalisation en sous-traitance des travaux de plateforme et de voirie du lot n°6(avec diverses dérogations au CCTP(notamment, non participation au compte prorata, paiement direct par le maître d'ouvrage, avance de démarrage de 30 000€HT).

Dès le 28 novembre 2007, SACER SUD EST transmettait au maître d'oeuvre la demande d'agrément de sous-traitant, et cet agrément était donné par la société CARDINAL le 7 décembre 2007 sous réserve de production de certains documents et notamment d'une attestation d'assurance complète.

Dés transmission de cette attestation, le Groupe Cardinal virait au bénéfice de SMTLI la somme de 35 880€TTC correspondant à l'avance.

Le 16 juillet 2008, SACER SUD EST a notifié à SMTLI certaines réserves formulées par le maître d' oeuvre sur les travaux réalisés .

Le 17 juillet 2008, le procès verbal de réception des travaux du lot n°6 était dressé avec reprise des réserves formulées.

Après échange de courriers sur la levée ou non des réserves ayant abouti au constat le 6 janvier 2009 de la levée de ces réserves par le maître d'ouvrage , hormis le 'dépierrage', la société SMTLI transmettait le 19 novembre 2008 , par l'intermédiaire de son conseil , une mise en demeure adressée tant au groupe CARDINAL qu'à la société SACER , d'avoir à régler une facture de 50 935,94€ TTC intitulée situation finale.

Après échange de courriers entre les parties , la société SMTLI mettait en nouveau en demeure la société SACER , par courrier du 17 février 2009, d'avoir à régler une somme portée à 165 368,42€TTC correspondant à un solde de situation intitulé 4bis pour 150 312,48€ et à la situation finale n°5.

Sur contestation de la société SACER invoquant les défaillances de son sous-traitant, la société SMTLI, par acte d'huissier du 5 mai 2009, a fait citer devant le tribunal de commerce d'Aix en Provence la société SACER SUD EST ainsi que la SOCIETE GROUPE CARDINAL qui bloquait tout règlement dans l'attente des suites de la procédure.

Le 7 septembre 2009, la société SMTLI a été placée en liquidation judiciaire et Maître VERRECHIA, nommée comme mandataire liquidateur, est intervenue volontairement dans la procédure .

Le  tribunal de commerce d'Aix-en-Provence, par jugement du 30 novembre 2010 a :

•         rejeté l'exception de nullité de la procédure soulevée par la société GROUPE CARDINAL, en l'état de l'intervention volontaire de Maître VERRECCHIA ès qualités,

•         rejeté toutes les demandes de la société SACER SUD EST et l'a condamnée à payer à Maitre VERRECCHIA pris en sa qualité de liquidateur, la somme principale de 165.368,42€ TTC

•         déclaré justifiée l'action directe mise en oeuvre par la société SMTLI représentée par Maitre VERRECCHIA, à l'encontre de la société GROUPE CARDINAL.

•         donné à la société GROUPE CARDINAL de ce qu'elle était prête à régler le sous-traitant sous réserve des observations de la société SACER,

•         dit qu'en cas de défaillance de la société SACER SUD EST dans l'exécution de la condamnation, GROUPE CARDINAL sera tenue de régler la somme due à la SMTLI et se trouvera ainsi subrogée dans les droits de Maitre VERRECCHIA vis a vis de la société SACER SUD EST

•         condamné la société SACER SUD EST à payer à Maître VERRECCHIA la somme de 2000€ au titre de l'article 700 ,

La société SACER SUD EST a interjeté appel le 17 décembre 2010

Vu les conclusions déposées le 6 septembre 2011 par la société SACER SUD EST, appelante

Vu les conclusions déposées le 31 mai 2011 par Maitre VERRECCHIA, intimé

Vu les conclusions déposées le 27 mai 2011 par la SARL GROUPE CARDINAL, intimée

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 15 novembre 2011.

Les conclusions déposées par Maître VERRECHIA le 17 novembre 2011, avec demande de révocation de clôture, ont été rejetées à l'audience, faute de caractérisation d'une cause grave justifiant cette révocation, l'intéressé ayant largement eu le temps de conclure sur les écritures de l'appelant avant cette clôture.

MOTIFS DE LA DECISION

En l'absence de signature par la société SMTLI du contrat de sous-traitance transmis par la société SACER, la relation contractuelle s'est bien nouée entre ces deux sociétés dans le cadre d'une sous-traitance, sur la base de la transmission de l'offre de prix détaillée transmise par la société SMTLI le 19 novembre 2007. L'exécution du contrat a d'ailleurs commencé avant même cette transmission du contrat de sous-traitance pour signature.

Ni la société SACER , ni la société GROUPE CARDINAL ne dénie la qualité de sous-traitant de la société SMTLI, ou les modalités de mise en oeuvre, en l'espèce, des dispositions de l'article 12 de la loi du 31 décembre 1975, seules les dispositions de l'article 13 de cette loi étant en cause dans le cadre du présent litige, la société SACER contestant en effet le montant réclamé par son sous-traitant et le maître d'ouvrage rappelant qu'il ne peut être tenu de régler directement au sous-traitant , au delà de ce qui est du à celui-ci par la société SACER, et au delà de ce qu'il doit lui-même à celle-ci à la date de réception de la mise en demeure, étant rappelé qu'en l'espèce , cet examen doit s'effectuer à la date de la deuxième mise en demeure dénoncée le 30 mars 2009 à la société GROUPE CARDINALE pour un montant global sur les deux factures réclamées.

Concernant la somme due par la société SACER à son sous-traitant SMTLI, cette dernière englobe dans sa créance des travaux supplémentaires détaillés dans la facture du 27 octobre 2008 pour une somme totale de 20 602,25€ HT( soit 24 640,41€TTC) sur quoi la société SACER oppose le caractère forfaitaire du marché , suivie en cela par la société CARDINAL qui observe en outre qu'elle ne peut régler directement que les travaux dont elle a effectivement bénéficié, contestant ainsi la réalité de ces travaux.

En l'espèce, en l'absence d'un contrat de sous-traitance signé des parties , la volonté des parties de se soumettre aux dispositions de l'article 1793 du code civil ne peut être tirée de la simple mention, sur l'offre de travaux en sous-traitance , des termes ' prix global et forfaitaire', alors que cette offre ni aucun autre document entre la SACER et son sous-traitant, ne fait référence à cet article qui concerne en principe le marché conclu entre le maître d'ouvrage et l'entreprise.

S'il ne peut donc être opposé à la société SMTLI l'interdiction d'un supplément de prix, il incombe en revanche à celle -ci d'établir par tout moyen la réalité des travaux supplémentaires facturés et leur acceptation expresse ou tacite par la société SACER et par le maître de l'ouvrage.

Or, la société SMTLI ne fournit, en l'absence de production d'ordres de services, avenant ou commande, aucune preuve de la réalité de ces travaux supplémentaires qu'elle qualifie de 'hors contrat' et qui ne figurent effectivement pas dans son offre détaillée, qui ne sont pas visés dans les autres situations de travaux, ni évoqués dans le DGD .

La demande pécuniaire formée par la société SMTLI contre la société SACER pour un montant global de 165 368,42€ TTC prenant en compte l'avance forfaitaire de 35 880, 00 TTC versée par la société CARDINAL, au démarrage des travaux, doit donc être ramenée à la date de la mise en demeure, après déduction de la somme de 24 640,41€TTC indûment facturée pour travaux supplémentaires, à la somme de 140 728,01€ TTC

Sur cette somme, la société SMTLI aurait perçu également directement de la société GROUPE CARDINAL une somme de 95 283,27€ que celle-ci prétend lui avoir versé le 10 juillet 2008, avant réception de la copie de la mise en demeure, mais la fiche de règlement produite n'est qu'une proposition de règlement direct au sous-traitant et ne vaut pas preuve d'un règlement qui est contesté.

Ce règlement affirmé dans les écritures de la société CARDINAL et de la société SACER et qui apparaît sur tous les décomptes produits y compris dans le DGD, ne peut, dans ces conditions, être déduit sauf preuve ultérieure de règlement.

La société SACER peut à bon droit solliciter, sur le fondement de la responsabilité contractuelle de son sous-traitant, que soient déduits de cette somme, les travaux qu'elle estime mal faits par la société MTLI et repris par elle ou par d'autres entreprises, et qui ont fait l'objet des réserves formulées à la réception, dés lors qu'elle justifie par les pièces qu'elle produit, que les réserves (sauf celle 196)concernent bien les travaux réalisés ou qu'aurait du réaliser la société MTLI dans le cadre du marché sous-traité, (même indirectement pour la réserve 190, la dégradation du bicouche étant imputable à l'entreprise SMTLI), que les réserves ont été levées par cette dernière mais aussi par elle-même et d'autres entreprises intervenantes, que la réserve non levée (empierrage) initialement, et portée en moins-value par le premier DGD, a été abandonnée par le maître d'ouvrage en raison de la reprise finalement effectuée par la société SACER. Le montant de ces reprises est justifié à hauteur de 34 265,11€

La société SACER ne réclame plus de déduction au titre du compte prorata et de pénalités de retard visés dans un courrier du maître d'oeuvre mais réclame en revanche la déduction de travaux facturés mais non réalisés par la société SMTLI , en termes d'épaisseur de couches de forme et de roulement, ce qui a entraîné une surfacturation à hauteur de 22 786,27€ HT

La somme totale à déduire de la somme due à la société SMTLI par la société SACER s'élève donc à 56 051,38 €TTC.

Enfin, et hors considération sur la connexité ou de non des créances réciproques, la société SACER n'est pas fondée à opposer à la SMTLI la compensation légale qui serait intervenue avant l'ouverture de la procédure collective entre la créance de travaux de sous-traitance, non certaine ni liquide au moment de la mise en demeure que la société SMTLI détenait sur elle et la créance, en revanche, certaine liquide et exigible d'un montant de 43 511,68€ qu'elle détenait sur la société SMTLI au titre d'un protocole d'accord transactionnel en date du 12 juin 2009 portant sur une dette impayée de fourniture de ciment.

La société SACER a d'ailleurs exactement produit cette créance à la procédure collective de la société MTLI , faute de compensation intervenue, de plein droit, antérieurement au jugement.

Dans ces conditions la société SMTLI n'est fondée à réclamer à la société SACER qu'une somme de 84 676,63€ TTC et peut exercer son action directe pour ce montant à l'encontre de la société CARDINAL, dés lors que celle-ci reconnaît devoir à la société SACER, sur la base d'un DGD sur lequel les parties se sont finalement accordées, une somme de 104 033,47 HT, supérieure à la somme due au sous-traitant et prenant en compte les règlements directs à celui-ci.

La société SACER ne forme aucune demande contre la société GROUPE CARDINAL.

Le jugement doit être réformé en ce sens, sans qu'il y ait lieu d'ordonner la restitution de quelconque somme, le présent arrêt valant , le cas échéant, titre de restitution.

L'équité commande qu'il ne soit fait application , en cause d'appel, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, au profit d'aucune des parties.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Statuant publiquement par arrêt contradictoire

Infirme le jugement entrepris ;

Et statuant à nouveau,

Condamne solidairement la société SACER SUD EST et la société GROUPE CARDINAL à payer à Maître VERRECCHIA, ès qualités de mandataire liquidateur de la société SMTL INDUSTRIE, la somme de 84 676,63€ TTC ;

Déboute les parties du surplus de leur demande;

Condamne solidairement la société SACER SUD EST et la société GROUPE CARDINAL aux dépens de 1ère instance et d'appel, qui seront tirés en frais de liquidation, et distraits au profit des avoués de la cause qui en auraient fait l'avance sans provision suffisante.