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Décisions

Cass. com., 10 juillet 1978, n° 77-10.240

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Cénac

Rapporteur :

M. Rouquet

Avocat général :

M. Toubas

Avocat :

Me Labbé

Paris, 25e ch. B, du 26 nov. 1976

26 novembre 1976

 
SUR LE PREMIER MOYEN, PRIS EN SES DEUX BRANCHES : ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE (PARIS, 26 NOVEMBRE 1976) QUE CLEMENT, ADMINISTRATEUR DE LA SOCIETE TRAVAUX INDUSTRIELS POUR L'ELECTRICITE, DITE TRINDEL, MAINTENANT DENOMMEE UNIDEL, A ETE DELEGUE PAR LE CONSEIL D'ADMINISTRATION POUR TRAITER AVEC LABBE DES CONDITIONS DE LA REMUNERATION DE CELUI-CI, DEPUIS PEU PRESIDENT DE LA SOCIETE, MAIS QUI CONSERVAIT LES FONCTIONS DE DIRECTEUR SALARIE, QU'IL OCCUPAIT DEPUIS 1939 ;
 
QU'UN "ADDITIF" AU CONTRAT INITIAL A ETE SIGNE LE 30 JANVIER 1947 PAR CLEMENT AU NOM DE LA SOCIETE TRINDEL ;
 
QUE, SELON CETTE CONVENTION ANNEXE, EN CAS DE DECES DE Y..., SA VEUVE OU SES AYANTS DROITS RECEVRAIENT DE LA SOCIETE UNE "INDEMNITE FORFAITAIRE" ;
 
QUE, DELEGUES LE 12 DECEMBRE 1967, PAR LE CONSEIL D'ADMINISTRATION A L'EFFET DE METTRE LES CONVENTIONS FIXANT LA REMUNERATION DE Y... "EN HARMONIE AVEC LA STRUCTURE ET AVEC LES ACTIVITES TECHNIQUES ACTUELLES DE LA SOCIETE", TROIS ADMINISTRATEURS ONT PROPOSE A Y..., QUI A DONNE SON ACCORD LE 11 MARS 1968, DE NOUVELLES CONVENTIONS QUI REPRENAIENT LA PLUPART DES DISPOSITIONS DES CONVENTIONS ANTERIEURES ET NOTAMMENT CELLES ATTRIBUANT UNE "INDEMNITE FORFAITAIRE" A LA DAME Y... A LA MORT DE SON MARI ;
 
QU'AU VU DU RAPPORT SPECIAL DU COMMISSAIRE AUX COMPTES, CONSACRE A CES CONVENTIONS NOUVELLES, L'ASSEMBLEE GENERALE DU 29 MAI 1968 A DONNE SON APPROBATION A CELLES-CI ;
 
QUE Y... ETANT DECEDE EN 1972, SA VEUVE A ASSIGNE LA SOCIETE TRINDEL EN PAIEMENT DE 1.326.666,68 FRANCS, MONTANT DE "L'INDEMNITE FORFAITAIRE" ;
 
ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET DEFERE D'AVOIR, POUR REJETER LA DEMANDE DE DAME Y..., DECLARE NULLES LES CONVENTIONS DES 30 JANVIER 1947 ET 11 MARS 1968, EN CE QU'ELLES PREVOYAIENT L'ALLOCATION A CETTE DAME D'UNE "INDEMNITE FORFAITAIRE" AU DECES DE SON MARI, AUX MOTIFS, POUR LES PREMIERES, QU'EN CONVENANT D'ACCORDER AU NOM DE LA SOCIETE TRINDEL UNE "INDEMNITE" A LA DAME Y..., CLEMENT X... DEPASSE LES LIMITES DU MANDAT DONNE PAR LE CONSEIL D'ADMINISTRATION ET, POUR LES SECONDES, QUE LES CHIFFRES SERVANT DE BASE A LA REMUNERATION DE Y... ET SUR LESQUELS ETAIT CALCULEE "L'INDEMNITE" DE SON EPOUSE, ETAIENT RESTES IGNORES, TANT DE CERTAINS MEMBRES DU CONSEIL D'ADMINISTRATION QUE DU COMMISSAIRE AUX COMPTES, DONT LE RAPPORT SPECIAL, FAUTE DE CONTENIR LES PRECISIONS INDISPENSABLES, N'AVAIT PAS PERMIS A L'ASSEMBLEE GENERALE DE STATUER EN CONNAISSANCE DE CAUSE, ALORS, SELON LE POURVOI, D'UNE PART, QU'IL SUFFISAIT, POUR QUE LES EXIGENCES IMPERATIVES DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966, SEULES PRESCRITES A PEINE DE NULLITE, SOIENT RESPECTEES, QUE LA CONVENTION AIT ETE SOUMISE AU CONTROLE DES COMMISSAIRES AUX COMPTES ET QUE CEUX-CI S'EN SOIENT EXPLIQUES DANS LEUR RAPPORT SPECIAL, LA LOI NE POSANT AUCUNE EXIGENCE QUANT AU CONTENU DE CE RAPPORT, ET, D'AUTRE PART, QUE, SI L'ARTICLE 103 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 PRESCRIT QUE LES CONVENTIONS PASSEES APRES AUTORISATION DU CONSEIL D'ADMINISTRATION ENTRE UNE SOCIETE ET L'UN DE SES ADMINISTRATEURS, SOIENT SOUMISES A L'ASSEMBLEE GENERALE DES ACTIONNAIRES QUI STATUE SUR LE RAPPORT SPECIAL PRESENTE A CET EFFET PAR LES COMMISSAIRES AUX COMPTES, CE TEXTE NE FAIT PAS DE L'EXISTENCE DE LA DELIBERATION DE L'ASSEMBLEE OU DE SA REGULARITE UNE CONDITION DE VALIDITE DES CONVENTIONS SOUMISES A APPROBATION ET NE PREVOIT PAS LA NULLITE DESDITES CONVENTIONS COMME SANCTION DE L'INOBSERVATION DE CETTE FORMALITE OU DE SON IRREGULARITE ;
 
QUE L'OMISSION DE FAIRE STATUER L'ASSEMBLEE OU L'IRREGULARITE DE LA DELIBERATION DE CELLE-CI N'A PAS POUR EFFET DE RENDRE NULLES, EN L'ABSENCE DE FRAUDE, LESDITES CONVENTIONS ;
 
QUE DES LORS, EN STATUANT AINSI QU'ELLE L'A FAIT, ALORS QU'ELLE NE CONSTATE PAS QUE LES CONVENTIONS LITIGIEUSES, ET SPECIALEMENT CELLE DU 11 MARS 1968, AIENT ETE ENTACHEES DE FRAUDE, LA COUR D'APPEL N'A PAS LEGALEMENT JUSTIFIE SA DECISION ;
 
MAIS ATTENDU, D'UNE PART, QUE LE RAPPORT SPECIAL DU COMMISSAIRE AUX COMPTES, REGULIEREMENT PRODUIT, ETAIT AINSI REDIGE : "AU COURS DE SA SEANCE DU 12 DECEMBRE 1967, VOTRE CONSEIL D'ADMINISTRATION A CONFIRME LES CONDITIONS DE REMUNERATION DU PRESIDENT-DIRECTEUR GENERAL, ETANT PRECISE QUE CES CONDITIONS, QUI AVAIENT DEJA ETE PRECEDEMMENT AGREEES PAR VOTRE CONSEIL, SONT SIMPLEMENT ADAPTEES POUR TENIR COMPTE DU DEVELOPPEMENT PRIS PAR LA SOCIETE ET DE L'ACCROISSEMENT A LA FOIS DU CHIFFRE D'AFFAIRES ET DES RESULTATS APPELANT UNE REDUCTION CORRESPONDANTE DU COEFFICIENT D'INTERESSEMENT AUX RESULTATS, EN DIMINUTION DE DEUX POINTS PAR RAPPORT AU STATUT ANTERIEUR" ;
 
QUE LA COUR D'APPEL A SOULIGNE LE CARACTERE "FICTIF" D'UN TEL RAPPORT QUI OMETTAIT NOTAMMENT DE SIGNALER QUE LES CONVENTIONS PRETENDUMENT SOUMISES AU CONTROLE DE L'ASSEMBLEE GENERALE PORTAIENT RECONDUCTION DES AVANTAGES ACCORDES A LA DAME Y... PAR LA CONVENTION ANNEXE DE 1947 DONT LA FLAGRANTE IRREGULARITE EST RELEVEE PAR LES JUGES D'APPEL ;
 
QUE CEUX-CI ONT JUGE A BON DROIT CE RAPPORT INSUFFISANT, AYANT RELEVE QU'IL NE CONTIENT AUCUNE DES PRECISIONS IMPOSEES PAR L'ARTICLE 92 DU DECRET DU 23 MARS 1967 DANS LE BUT DE PERMETTRE AUX ACTIONNAIRES D'APPRECIER L'INTERET POUR LA SOCIETE D'UN CONTRAT DONT L'APPROBATION EST DEMANDEE A L'ASSEMBLEE GENERALE ;
 
ATTENDU, D'AUTRE PART, QUE L'ARRET ATTAQUE A D'ABORD CONSTATE QUE, LORS DE SA REUNION DU 12 DECEMBRE 1967, LE CONSEIL D'ADMINISTRATION, PRETENDANT AINSI DONNER "L'AUTORISATION PREALABLE" PRESCRITE PAR L'ARTICLE 101 DE LA LOI DE 1966, S'EST BORNE, AU LIEU DE PRENDRE UNE DELIBERATION ECLAIREE PAR LA CONNAISSANCE DU TEXTE DU CONTRAT ENVISAGE, ETANT MEME REFUSE A CHEVRIER, L'UN DES ADMINISTRATEURS, DE LUI FOURNIR EN SEANCE LES PRECISIONS QU'IL SOLLICITAIT, A DELEGUER TROIS DE SES MEMBRES, POUR CONCLURE AVEC LEUR PRESIDENT DE NOUVELLES CONVENTIONS, DONT ON DECLARAIT AUX ADMINISTRATEURS QU'ELLES ETAIENT DESTINEES A RECONDUIRE, EN LES ADAPTANT AU NIVEAU DE DEVELOPPEMENT ATTEINT PAR L'ENTREPRISE A CETTE EPOQUE, LES CONDITIONS DE REMUNERATION DE Y... ;
 
QUE LA COUR D'APPEL A PU DEDUIRE DE L'INSUFFISANCE DU RAPPORT SPECIAL DU COMMISSAIRE AUX COMPTES ENSUITE RELEVEE, QUE L'ASSEMBLEE GENERALE, DE LA SORTE MAL INFORMEE, N'AVAIT PAS DONNE AUX CONVENTIONS LITIGIEUSES L'APPROBATION VALABLE QUI AURAIT PERMIS DE COUVRIR L'IRREGULARITE DE L'AUTORISATION DU CONSEIL D'ADMINISTRATION ;
 
QU'ELLE A DONC PRONONCE A BON DROIT LA NULLITE DU CONTRAT DU 11 MARS 1968 ;
 
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN EST MAL FONDE EN SES DEUX BRANCHES ;
 
SUR LE SECOND MOYEN, PRIS EN SES TROIS BRANCHES :
 
ATTENDU QU'IL EST ENCORE FAIT GRIEF A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR REJETE L'EXCEPTION DE PRESCRIPTION PROPOSEE PAR LA DAME Y... SUR LE FONDEMENT DE L'ARTICLE 105 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966, ALORS, SELON LE POURVOI, D'UNE PART, QU'EN VERTU DE CE TEXTE, LE POINT DE DEPART DU DELAI DE PRESCRIPTION NE PEUT ETRE REPORTE QUE DANS LE CAS OU LA CONVENTION A ETE DISSIMULEE, CE QUE LA COUR D'APPEL N'A PAS CONSTATE EN L'ESPECE, D'AUTRE PART, QUE LE FAIT QUE Y... AIT ETE LE PRESIDENT DE LA SOCIETE TRINDEL JUSQU'A SON DECES, SURVENU EN 1972, NE CONSTITUAIT PAS UN OBSTACLE RENDANT IMPOSSIBLE L'EXERCICE DE L'ACTION EN NULLITE ET SUSPENDANT LE COURS DE LA PRESCRIPTION, L'ACTION POUVANT ETRE EXERCEE PAR TOUT ACTIONNAIRE INTERESSE ET NOTAMMENT PAR L'ADMINISTRATEUR CHEVRIER, QUI S'ETAIT OPPOSE A LA CONVENTION ET QUI ETAIT ALORS EN LITIGE AVEC LA SOCIETE ET, ENFIN, QUE LA MAXIME "QUAE TEMPORALIA SUNT AD AGENDUM, PERPETUA SUNT AD EXCIPIENDUM" NE POUVAIT RECEVOIR APPLICATION EN LA CAUSE OU ELLE A, AU SURPLUS, ETE FAUSSEMENT APPLIQUEE ;
 
QU'EN EFFET, LA SOCIETE N'ETAIT PLUS RECEVABLE EN RAISON DE LA PRESCRIPTION, A INVOQUER LA NULLITE DE CERTAINES CLAUSES DE L'ACTE EN VERTU DE PRETENDUES CAUSES DE NULLITE QUI L'AFFECTAIENT NECESSAIREMENT DANS SON ENTIER, DES LORS QU'ELLE EN AVAIT EXECUTE VOLONTAIREMENT, DEPUIS L'ORIGINE, CERTAINES DISPOSITIONS ;
 
MAIS ATTENDU QUE SI L'ACTION EN NULLITE D'UNE CONVENTION CONCLUE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 101 DE LA LOI DU 24 JUILLET 1966 EST SOUMISE A LA PRESCRIPTION TRIENNALE INSTITUEE PAR L'ARTICLE 105 DE LA MEME LOI, L'EXCEPTION DE NULLITE EST PERPETUELLE ;
 
QU'EN INVOQUANT CE PRINCIPE, LA COUR D'APPEL, ABSTRACTION FAITE D'UN AUTRE MOTIF SURABONDANT, A JUSTIFIE LE REJET DE L'EXCEPTION DE PRESCRIPTION APPLIQUEE A LA CONVENTION PARTICULIERE A LA DAME Y..., CONVENTION DETACHABLE DES DISPOSITIONS CONTRACTUELLES INTERESSANT Y... PERSONNELLEMENT ET QUE LA SOCIETE N'A PAS EXECUTEE ;
 
QUE LE MOYEN EST DONC MAL FONDE EN SES TROIS BRANCHES ;
 
PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 26 NOVEMBRE 1976 PAR LA COUR D'APPEL DE PARIS.