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Décisions

Cass. 3e civ., 12 juin 2002, n° 00-10.439

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Weber

Rapporteur :

Mme Lardet

Avocat général :

M. Guérin

Avocats :

Me Copper-Royer, SCP Piwnica et Molinié

Versailles, 3e ch. civ., du 5 nov. 1999

5 novembre 1999

Sur le premier moyen :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 5 novembre 1999), que la société FBP Bâtiment, depuis lors en liquidation judiciaire, entrepreneur général chargé de la construction d'un groupe d'ateliers et de bureaux pour le compte de la société civile particulière la Calarde, aux droits de laquelle se trouvent les consorts X... et Y... et les sociétés civiles immobilières La Calarde A 3 à A 10, A 14 à A 16, E 23 et E 27 à E 29, maître de l'ouvrage, a sous-traité le lot "menuiseries extérieures" à la société Leblanc ; que cette société n'ayant pas été réglée du solde de ses travaux a sollicité du maître de l'ouvrage le bénéfice de l'action directe prévue par la loi du 31 décembre 1975 ou, subsidiairement, des dommages-intérêts sur le fondement de l'article 14-1 de cette même loi ;

Attendu que la société Leblanc fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande au titre de l'action directe, alors, selon le moyen, qu'aux termes de l'article 2.7 du contrat de construction conclu entre la société FBP Bâtiment et la SCP La Calarde "FBP Bâtiment, sous son entière responsabilité : -fait réaliser par les entreprises de son choix la totalité des travaux mentionnés au contrat et compris dans le prix global sans avoir à solliciter d'autre accord du client que celui implicitement contenu dans le présent contrat" ; qu'il ressortait donc des termes mêmes du contrat de construction que le maître de l'ouvrage, la SCP La Calarde, acceptait expressément par avance tout sous-traitant auquel aurait recours l'entrepreneur ; que la cour d'appel, en violation formelle avec les clauses contractuelles, a cependant déclaré qu'il n'était pas justifié d'une acceptation expresse ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu que la cour d'appel, devant laquelle la société Leblanc s'était bornée à soutenir que le maître de l'ouvrage avait, dans le contrat de construction le liant à la société FBP Bâtiment, implicitement donné son accord à cette société pour sous-traiter la réalisation des travaux, a pu retenir, appréciant souverainement la portée des stipulations contractuelles et la commune intention des parties, qu'il n'en résultait pas que le maître de l'ouvrage avait accepté la société Leblanc en qualité de sous-traitant et agréé les conditions de paiement du contrat ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que la société Leblanc fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande sur le fondement de l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975, alors, selon le moyen :

1 / que le maître de l'ouvrage doit, s'il a connaissance de la présence sur le chantier d'un sous-traitant occulte sans autre condition, mettre en demeure l'entrepreneur principal de faire procéder à son agrément et à son acceptation ; que, pour dénier au sous-traitant le droit à l'action directe, la cour d'appel a retenu que le maître de l'ouvrage ne connaissait pas nominativement le sous-traitant intervenant sur le chantier ; qu'en statuant ainsi, alors que le maître de l'ouvrage ne pouvait ignorer le recours nécessaire de l'entrepreneur, société d'architectes, à des sous-traitants, la cour d'appel a violé l'article 14-1 de la loi modifiée du 31 décembre 1975 par ajout d'une condition qui ni figurait pas ;

2 / que le maître de l'ouvrage, qui a connaissance de la présence d'un sous-traitant sur le chantier et qui ne met pas l'entrepreneur principal en demeure de le faire accepter et d'agréer ses conditions de paiement, commet une faute dont il doit réparation au sous-traitant ; que la cour d'appel devait rechercher si, en tolérant sur le chantier un sous-traitant occulte sans avoir mis en demeure l'entrepreneur de le faire agréer, la société la Calarde n'avait pas commis une faute dont elle devait réparation ; que faute d'avoir procéder à cette recherche, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 14-1 de la loi du 31 décembre 1975 ;

Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel a pu retenir que le recours implicite à la sous-traitance résultant de l'autorisation donnée par le maître de l'ouvrage à l'entrepreneur principal de faire réaliser les travaux par des entreprises de son choix ne suffisait pas à démontrer que le maître de l'ouvrage avait connaissance de la présence sur le chantier de la société Leblanc en qualité de sous-traitant ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant souverainement relevé que ni les énonciations du cahier des clauses techniques particulières, ni le compte-rendu de réunion de chantier, ni la lettre du bureau Socotec ne permettaient d'établir que le maître de l'ouvrage connaissait l'intervention sur le chantier de la société Leblanc en qualité de sous-traitant, la cour d'appel a procédé à la recherche prétendument omise et légalement justifié sa décision de ce chef ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.