Cass. soc., 5 juillet 1989, n° 86-18.534
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Cochard
Rapporteur :
M. Aragon-Brunet
Avocat général :
M. Picca
Avocats :
Me Ryziger, Me Boullez
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 5 mai 1986), que M. Z..., engagé en qualité d'ingénieur par la société Clément X... le 1er novembre 1948, a été nommé directeur le 1er juin 1963, administrateur le 26 juin 1978, président du conseil d'administration le 26 juillet 1978 et président du directoire le 14 mars 1982 à la suite de la transformation de la forme de la société ; qu'il est devenu propriétaire, en décembre 1982, de 24 350 actions sur 45 000 ; que la liquidation des biens de la société ayant été prononcée par jugement du 15 novembre 1983, M. Y..., en sa qualité de syndic à cette liquidation, a mis fin aux fonctions de M. Z... le 18 novembre 1983 ; que l'ASSEDIC Champagne-Ardenne a refusé de verser les salaires et indemnités qu'il réclamait ;
Attendu que M. Z... fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande tendant au paiement de ces sommes entre les mains du syndic, alors, selon le pourvoi, d'une part, que le directoire d'une société anonyme n'exerce les pouvoirs dont il est investi pour agir au nom de la société que sous réserve de ceux expressément attribués par la loi au conseil de surveillance et aux assemblées d'actionnaires, que le conseil de surveillance exerce le contrôle permanent de la gestion de la société par le directoire qui doit lui présenter un rapport au moins une fois par trimestre, qu'à toute époque de l'année, le conseil de surveillance opère les vérifications et les contrôles qu'il juge opportuns et peut se faire communiquer les documents qu'il estime utiles à l'accomplissement de sa mission, qu'en l'espèce, M. Z... faisait valoir que c'est en qualité de salarié qu'il avait participé à la reprise de la société Clément X..., que le conseil de surveillance de cette société, présidé notamment par une personnalité indépendante, avait expressément confirmé le maintien, sans modification, de son contrat de travail, ainsi que de celui de l'autre membre du directoire ; qu'en se bornant à retenir que M. Z... détenait une participation majoritaire dans le capital de la société, sans indiquer concrètement en quoi il aurait fait échec au contrôle qui appartient au conseil de surveillance, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 120 et suivants et 128 de la loi des sociétés commerciales du 24 juillet 1966, et L. 143-9 et suivants du Code du travail dans la rédaction antérieure à la loi du 25 janvier 1985, alors, d'autre part, que la novation ne se présume pas, qu'au surplus, il résulte des principes dont s'inspirent les dispositions de l'article L. 351-24 du Code du travail que, sauf stipulations contraires, les salariés qui reprennent une entreprise exploitée sous la forme d'une société commerciale conservent à tous égards leur qualité de salariés, qu'en l'espèce, il est constant que M. Z... et quelques cadres de la société des anciens établissements Clément X... ont accepté de reprendre une exploitation difficile pour tenter de sauver la société et les emplois, à l'instigation, notamment, du Comité interministériel pour l'amélioration des structures industrielles et de la Société de développement régional qui avaient participé à la composition du conseil d'administration de la société dont les membres sont devenus membres du conseil de surveillance, qu'en faisant abstraction de ces circonstances, les juges du fond ont, derechef, privé leur décision de base légale au regard des textes précités, et alors, enfin, que les juges du fond ont constaté que, postérieurement à sa nomination comme administrateur et comme président de la société, M. A... a continué à remplir les fonctions de directeur technique ou directeur de l'usine dont il était précédemment chargé, et qu'il a continué d'être rémunéré à ce titre, qu'en outre, l'ASSEDIC a perçu des cotisations sur sa rémunération de directeur salarié ; qu'en déniant, malgré ces constatations, l'existence d'un contrat de travail, la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, méconnaissant ainsi les exigences de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant relevé que M. Z... disposait dans la société de tous les pouvoirs sans aucun contrôle et qu'il exerçait sa mission technique de directeur en toute indépendance sans avoir à en référer à quiconque, la cour d'appel a pu, sans se contredire, en déduire qu'il ne se trouvait pas à l'égard de cette société dans un lien de subordination caractéristique d'un contrat de travail ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.