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Décisions

Cass. ass. plén., 24 novembre 1989, n° 88-18.188

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Drai

Rapporteur :

M. Averseng

Avocat général :

M. Cabannes

Avocat :

Me Choucroy

Aix-en-Provence, du 24 juin 1988

24 juin 1988

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 24 juin 1988), que dans une instance en divorce suivie devant le tribunal de grande instance d'Aix-en-Provence, les avocats, après renvoi convenu des débats de l'audience du 28 octobre 1987 à celle du 20 janvier 1988, ont présenté, par lettre du 8 janvier 1988, une nouvelle demande de remise qu'ils ont fait réitérer par leurs collaborateurs à cette audience ; que le Tribunal leur a opposé un refus, a mis la cause en délibéré et a invité les avocats des parties à lui adresser leurs dossiers avant le 16 mars 1988 ; que, le 25 janvier 1988, le conseil de l'ordre des avocats au barreau d'Aix-en-Provence a pris une délibération élevant " la protestation la plus solennelle à l'égard de la décision (du 20 janvier 1988) ", en énonçant d'abord que " seuls les avocats en accord avec leurs clients disposent du droit de savoir s'ils peuvent se contenter d'un dépôt de dossier ou plaider " et ensuite " qu'il appartient aux parties seules de donner à leur affaire les développements qu'elles estiment conformes à leurs intérêts et qu'en l'espèce ces dernières, par l'intermédiaire de leur conseil respectif, avaient manifesté leur accord pour un déplacement de l'affaire " ; que, sur le recours formé par le procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence, l'arrêt attaqué a annulé les dispositions précitées de la délibération déférée ;

Attendu que le conseil de l'ordre fait grief à l'arrêt d'avoir ainsi statué alors, selon le moyen, d'une part, que le juge, lorsqu'il rejette une demande conjointe de renvoi, doit, pour assurer le droit des parties à débattre oralement leur cause devant lui, faire sortir l'affaire du rôle ; que, comme l'indiquaient les conclusions du conseil de l'ordre, le Tribunal n'avait pu imposer aux parties un jugement sur dossier sans méconnaître leur droit à l'oralité des débats et à un procès équitable au sens de la Convention européenne des droits de l'homme ; que la cour d'appel, en censurant sur ce point les critiques justifiées de la délibération, a laissé lesdites conclusions sans réponse et a violé les articles 14 et 16 du nouveau Code de procédure civile et l'article 6 de la Convention ; et alors, d'autre part, qu'en matière privée et particulièrement en matière de divorce, les parties ne sauraient être jugées malgré elles ; que le Tribunal, en décidant de procéder au jugement contre leur volonté commune, alors qu'il ne pouvait que prononcer la radiation administrative de l'affaire, avait, comme le montraient les conclusions du conseil de l'ordre, méconnu les principes directeurs du procès civil et le droit des parties à un procès équitable ; qu'en annulant le motif de la délibération suivant lequel il appartient aux seules parties de donner à leur affaire les développements qu'elles estiment conformes à leurs intérêts, la cour d'appel a omis de répondre auxdites conclusions et a violé les articles 1 et 2 du nouveau Code de procédure civile et l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme ;

Mais attendu que si les parties ont la libre disposition de l'instance, l'office du juge est de veiller au bon déroulement de celle-ci dans un délai raisonnable ; que la faculté d'accepter ou de refuser le renvoi, à une audience ultérieure, d'une affaire fixée pour être plaidée, relève du pouvoir discrétionnaire du juge, dès lors que les parties ont été mises en mesure d'exercer leur droit à un débat oral ; que si les parties conviennent de ne pas déposer leur dossier, le juge peut procéder à la radiation de l'affaire ;

Et attendu qu'après avoir énoncé qu'au cas où les parties considèrent de leur intérêt d'éviter ou de différer une solution judiciaire, elles ont la possibilité de suspendre le cours de l'instance en formant une demande conjointe de radiation, laquelle s'impose alors au juge, l'arrêt retient à bon droit, répondant aux conclusions, que la délibération du conseil de l'ordre est contraire aux dispositions réglementaires en vigueur en ce qu'elle tend à faire admettre que les juridictions se trouveraient liées par les demandes de renvoi présentées par les représentants des parties ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé :

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.